Poésies de Benserade/À Mademoiselle de Guerchy, contre Mariamne

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Poésies de Benserade, Texte établi par Octave UzanneLibrairie des bibliophiles (p. 113-115).



À Mademoiselle de Guerchy, contre Mariamne.

STANCES.


Oui, je vous dis et vous répète
Que Mariamne étoit coquette,
Et n’eut pu se passer d’amant.
Ce n’est point médisance noire ;
Et je m’en rapporte au roman
Où vous croyez mieux qu’à l’histoire.

Son âme ne fut point ingrate
Aux passions de Tiridate,
Qui fut l’un de ses favoris ;
Et c’est d’elle que vient la mode
De faire enrager les maris,
Alors qu’ils sont vieux comme Hérode.

Lorsque ce livre enseigne comme
Elle baisa ce galant homme,
Dieu sçait ce qu’entend le lecteur :
Et vous-même êtes assez fine
Pour vous imaginer l’auteur
Plus modeste que l’héroïne.

On ne pouvoit vivre avec elle :
Hérode et toute sa séquelle
Lui passèrent pour des dragons :
Bref, sa conduite impertinente
Eût, je crois, fait sortir des gonds
Madame votre gouvernante.

La pauvre dame toute bonne
Eût vu cette fière personne
Sans cesse la contrarier ;
Et dans son humeur inquiète
Eût trouvé pis que le brasier,
Et pis que les brins de vergette.

Elle aimoit, elle étoit aimée.
Mais épargnons la renommée,
Et laissons-la pour ce qu’elle est :

Suffit que c’est un sot modèle,
Et qu’on a beaucoup d’intérêt
Que vous ne soyez pas comme elle.

De grâce, m’allez pas redire
Que j’en ai fait une satire,
Où je la mets en beaux draps blancs,
Et que mes muses libertines
Ont après quelques deux mille ans
Mis Mariamne aux Feuillantines.



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