Pologne, colonie manufacturière

La bibliothèque libre.
Anonyme
Pologne, colonie manufacturière

POLOGNE. — Grande colonie manufacturière. — Une grande colonie manufacturière a été fondée dans le royaume de Pologne, Palatinat de Masovie, district de Rawa, dans les domaines de S. E. le comte Antoine Ostrowski, à Tomaszow. Cette ville est située au confluent de la Pilica, rivière navigable, et de la Wolborka, autre rivière considérable, sur la grande route de Varsovie, entre Piotrkow et Rawa, à 14 milles de Varsovie, 25 de Cracovie, et autres villes manufacturières, dont elle peut être regardée comme un des points les plus importans. Tomaszow est de plus en communication avec la Vistule et la Baltique par la Pilica. Un air sain, un terrain élevé, coupé par un vallon, des forêts immenses tout à l’entour, des mines de fer, des carrières inépuisables de chaux et de pierre à bâtir, des eaux abondantes, des chutes nombreuses, propres à faire mouvoir des mécaniques, tout s’y trouve réuni. Aussi cette colonie qui, il y a sept ans, comptait au plus quatre ou cinq maisons, présente aujourd’hui l’aspect d’une petite ville bien bâtie et habitée par une population aisée et industrielle, composée en grande partie d’étrangers, qui s’élève déjà à 5,000 ames, et s’accroît tous les jours. Tomaszow compte un grand nombre de manufactures de draps ; celles de coton commencent à s’y multiplier. Des négocians, des marchands, des entrepreneurs de toute espèce, y font valoir leurs capitaux avec beaucoup de succès ; une foule d’artisans et d’ouvriers, des familles laborieuses, ont recueilli en peu de temps les fruits de leur industrie et de leur activité. Un bien plus grand nombre de colons peut encore y jouir d’une existence assurée et y trouver sûreté et protection.

Les contrats entre le propriétaire de l’endroit et les intéressés se font à leur convenance mutuelle, soit à titre de bail temporaire, soit à perpétuité. Dans ce dernier cas, le colon prend possession d’une certaine étendue de terrain, à titre de ferme à perpétuité qui passe à ses enfans et héritiers. Il a le droit de céder son contrat, ses terres, les maisons qui peuvent s’y trouver, à qui bon lui semble, et c’est dans ce cas qu’une somme convenue sur le prix de la vente revient au propriétaire de l’endroit. Le colon est libre d’exercer tel métier qu’il lui plaît, de faire le commerce, d’établir des manufactures de tout genre, sans que personne puisse mettre des entraves à son industrie. Il faut en excepter toutefois le droit de fabriquer et de vendre les boissons, comme eau-de-vie, bière, etc., qui appartient, selon l’usage général du pays, au propriétaire, ainsi que le droit d’exploiter les minéraux.

Les cultivateurs peuvent avoir pour plusieurs années, ou pour toujours, des fermes de l’étendue de 7, 14, 28, 40 à 60 arpens. Quant aux terrains situés dans l’enceinte de Tomaszow même, ce n’est qu’au bout de six années, à compter de la date du bail à ferme, que le colon est tenu de payer au propriétaire une rente annuelle qui n’excède pas la somme de seize florins de Pologne (dix francs environ). Le seigneur de l’endroit accorde jusqu’à présent, à titre gratuit, à la plupart des colons, pour diminuer les frais de construction, une certaine quantité de bois, de pierres à bâtir et de pierres à chaux.

Tomaszow possède deux filatures de laine, plusieurs établissemens pour la teinture et l’apprêt des draps les plus fins, plusieurs fouleries, ainsi que tous les établissemens nécessaires pour donner le dernier fini aux draps. Les draps de Tomaszow ont acquis tant de vogue dans le commerce de la Russie, que plusieurs centaines de métiers, toujours en mouvement, ne peuvent suffire aux demandes des marchands russes. Quelques magasins de coton filé sont ouverts pour les fabricans qui commencent à s’installer dans la colonie. On va mettre en activité l’établissement d’une filature. En général, la fabrication des étoffes de coton, moins avancée jusqu’à présent à Tomaszow que celle des draps, offre les plus belles espérances, vu que le pays possède bien peu de manufactures en ce genre. Les établissemens pour la teinture, l’imprimerie, l’apprêt et les autres accessoires, commencent à se former. La branche des cotonnades est protégée dans ce pays d’une manière toute particulière, et les fabricans étrangers peuvent s’attendre à être encouragés.

Tomaszow renferme plusieurs fabriques de fer, un haut fourneau, une fonderie, une taillanderie, etc. On y trouve une maison de poste, des auberges, un médecin, plusieurs chirurgiens, une pharmacie, un bureau pour l’expédition des marchandises, des magasins bien fournis de toutes les choses nécessaires à la vie, une église catholique, une église protestante, une école polonaise et allemande, une synagogue, un grand marché une fois la semaine, etc.

Le chemin le plus court pour y arriver, si l’on vient de l’Autriche, est par Cracovie, Konskie, Opoczno ; si c’est de l’Allemagne, c’est par Kalisz, Warta, Fabianice, ou, ce qui est plus court encore, par la douane frontière de Wieruszow à Tomaszow.