Projet de constitution française du 19 avril 1946

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Projet de constitution adopté par l'Assemblée constituante le 19 avril 1946 et rejeté par le peuple le 5 mai 1946
Le Petit Marocain (p. 4-13).

Déclaration des droits de l'homme[modifier]

Au lendemain de la victoire remportée par les peuples libres sur les régimes qui ont tenté d'asservir et de dégrader la personne humaine et viennent d'ensanglanter le monde entier, le peuple français, fidèle aux principes de 1789 – charte de sa libération – proclame à nouveau que tout être humain possède des droits inaliénables et sacrés, auxquels nulle loi ne saurait porter atteinte, et décide, comme en 1793, 1795 et 1848, de les inscrire en tête de sa Constitution.

La République garantit à tous les hommes et à toutes les femmes vivant dans l'Union française l'exercice individuel ou collectif des libertés et droits ci-après :

Des libertés[modifier]

Article 1er[modifier]

Tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux devant la loi.

La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme.

Article 2[modifier]

Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans le peuple. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément. La loi est l'expression de la volonté nationale. Elle est la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse, soit qu'elle oblige.

Cette volonté s'exprime par les représentants élus du peuple.

Article 3[modifier]

La liberté est la faculté de faire tout ce qui ne porte pas atteinte aux droits d'autrui. Les conditions d'exercice de la liberté sont définies par la loi. Nul ne peut être contraint de faire ce que la loi n'ordonne pas.

Article 4[modifier]

La loi garantit l'exercice légal pour tous des libertés et droits énoncés dans le présent titre; elle ne saurait y porter atteinte.

Article 5[modifier]

Tout homme a le droit de se fixer en tout lieu et de se déplacer librement.

Article 6[modifier]

Tout homme persécuté en violation des libertés et droits garantis par la présente déclaration a droit d'asile sur les territoires de la République.

Article 7[modifier]

Le domicile est inviolable. Nulle perquisition ne peut avoir lieu qu'en vertu de la loi, sur un ordre écrit émanant de l'autorité judiciaire.

Article 8[modifier]

Le secret de toute correspondance est inviolable. Il ne peut y être porté atteinte qu'en vertu de la loi, sur une décision spéciale émanant de l'autorité judiciaire.

Article 9[modifier]

Nul ne peut être poursuivi, arrêté ou détenu que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu'elle a prescrites.

Nul ne peut être maintenu en détention s'il n'a comparu dans les quarante-huit heures devant un juge appelé à statuer sur la légalité de l'arrestation et si ce juge n'a confirmé, chaque mois, la détention par décision motivée.

Toute rigueur ou contrainte qui n'est pas nécessaire pour appréhender une personne ou la maintenir en détention ainsi que toute pression morale ou brutalité physique, notamment pendant l'interrogatoire, sont interdites.

Ceux qui sollicitent, rédigent, signent, exécutent ou font exécuter des actes en violation de ces règles engagent leur responsabilité personnelle. Ils seront punis.

Article 10[modifier]

La loi ne peut avoir d'effet rétroactif. Nul ne peut être jugé et puni qu'en vertu d'une loi promulguée et publiée antérieurement au fait punissable.

Tout prévenu est présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable.

Nul ne peut être puni deux fois pour le même fait.

Les peines sont personnelles et proportionnées à la gravité de l'infraction. Les peines privatives ou restrictives de liberté doivent tendre à la rééducation du coupable. Tout traitement qui aggrave la peine légalement applicable engage la responsabilité personnelle de ses auteurs.

Article 11[modifier]

La loi assure à tous les hommes le droit de se faire rendre justice et l'insuffisance des ressources ne saurait y faire obstacle.

Article 12[modifier]

En matière pénale, l'identité des juridictions dans le cadre du même territoire est garantie à tous les habitants de l'Union française.

Article 13[modifier]

Nul ne peut être inquiété en raison de ses origines, de ses opinions ou croyances en matière religieuse, philosophique ou politique. La liberté de conscience et des cultes est garantie par la neutralité de l'État à l'égard de toutes les croyances et de tous les cultes. Elle est garantie notamment par la séparation des églises et de l'État, ainsi que par la laïcité des pouvoirs et de l'enseignement publics

Article 14[modifier]

Tout homme est libre de parler, d'écrire, d'imprimer, de publier ; il peut soit par la voie de la presse, soit de toute autre manière, exprimer, diffuser et défendre toute opinion dans la mesure où il n'abuse pas de ce droit, notamment pour violer les libertés garanties par la présente déclaration ou porter atteinte à la réputation d'autrui.

Aucune manifestation d'opinion ne peut être imposée.

Article 15[modifier]

Chacun a le droit d'adresser une pétition écrite aux pouvoirs publics afin de provoquer l'examen de problèmes d'intérêt individuel ou collectif.

Article 16[modifier]

Le droit de défiler librement sur la voie publique et le droit de réunion sont garantis a tous.

Article 17[modifier]

Tous les hommes ont le droit de s'associer librement à moins que leur association ne porte ou ne tende à porter atteinte aux libertés garanties par la présente déclaration.

Nul ne peut être contraint de s'affilier à une association.

Article 18[modifier]

L'accès aux fonctions publiques est, sans autres conditions que celles des capacités, des aptitudes et des talents, ouvert à tout ressortissant de l'Union française jouissant des droits politiques attachés par la présente Constitution à la qualité de citoyen.

L'accès à toutes les professions, places et emplois privés est ouvert dans les mêmes conditions à tout ressortissant de l'Union française et, en l'absence de réglementation particulière fixée par la loi, à toute personne vivant légalement dans l'Union française. À égalité de travail, de fonction, de grade, de catégorie, de responsabilités, chacun a droit à égalité de situation matérielle et morale.

Article 19[modifier]

L'exercice des droits garantis par la présente déclaration ne peut être suspendu.

Toutefois, lorsque, dans les conditions déterminées par la présente Constitution, la République est proclamée en danger, les droits énoncés dans les Articles 5, 8, 14 (al. ler) et 16 peuvent être suspendus dans les limites et les formes déterminées par la loi.

Cette mesure ne saurait être prise pour une durée supérieure à six mois ; elle peut être renouvelée dans les mêmes formes.

Quiconque en aura abusé pour porter arbitrairement préjudice aux droits matériels ou moraux d'autrui engagera sa responsabilité personnelle.

Au terme de la période d'exception, quiconque se jugera lésé arbitrairement dans sa personne ou dans ses biens pourra réclamer réparation morale ou matérielle devant les tribunaux.

Article 20[modifier]

La garantie des Droits de l'Homme et du Citoyen nécessite une force publique; cette force, instituée pour l'avantage de tous et non pour l'utilité particulière de ceux à qui elle est confiée, doit rester en permanence au service du peuple souverain.

Article 21[modifier]

Quand le Gouvernement viole les libertés et les droits garantis par la Constitution, la résistance sous toutes ses formes est le plus sacré des droits et le plus impérieux des devoirs.


Des Droits sociaux et économiques[modifier]

Article 22[modifier]

Tout être humain possède, à l'égard de la Société, les droits qui garantissent, dans l'intégrité et la dignité de sa personne, son plein développement physique, intellectuel et moral.

La loi organise l'exercice de ces droits.

Article 23[modifier]

La protection de la santé dès la conception, le bénéfice de toutes les mesures d'hygiène et de tous les soins que permet la science sont garantis à tous et assurés par la Nation.

Article 24[modifier]

La Nation garantit à la famille les conditions nécessaires à son libre développement.

Elle protège également toutes les mères et tous les enfants par une législation et des institutions sociales appropriées.

Elle garantit à la femme l'exercice de ses fonctions de citoyenne et de travailleuse dans des conditions qui lui permettent de remplir son rôle de mère et sa mission sociale.

Article 25[modifier]

La culture la plus large doit être offerte à tous sans autre limitation que les aptitudes de chacun. Tout enfant a droit à l'instruction et à l'éducation dans le respect de la liberté.

L'organisation de l'enseignement public à tous les degrés est un devoir de l'État. Cet enseignement doit être gratuit et rendu accessible à tous par une aide matérielle à ceux qui, sans elle, ne pourraient poursuivre leurs études.

Article 26[modifier]

Tout homme a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi.

Nul ne peut, dans son emploi, être lésé en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances.

Article 27[modifier]

La durée et les conditions du travail ne doivent porter atteinte ni à la santé, ni à la dignité, ni à la vie familiale du travailleur.

Les adolescents ne doivent pas être astreints a un travail qui compromette leur développement physique, intellectuel ou moral. Ils ont droit à la formation professionnelle.

Article 28[modifier]

Hommes et femmes ont droit à une juste rémunération selon la qualité et la quantité de leur travail, en tout cas, aux ressources nécessaires pour vivre dignement, eux et leur famille.

Article 29[modifier]

Chacun a droit au repos et aux loisirs.

Article 30[modifier]

Tout homme a le droit de défendre ses intérêts par l'action syndicale. Chacun adhère au syndicat de son choix ou n'adhère à aucun.

Article 31[modifier]

Tout travailleur a le droit de participer par l'intermédiaire de ses délégués à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises.

Article 32[modifier]

Le droit de grève est reconnu a tous dans le cadre des lois qui le réglementent.

Article 33[modifier]

Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence .

La garantie de ce droit est assurée par l'institution d'organismes publics de sécurité sociale.

Article 34[modifier]

Les dommages causés par les calamités nationales aux personnes et aux biens sont supportés par la Nation. La République proclame l'égalité et la solidarité de tous devant les charges qui en résultent.

Article 35[modifier]

La propriété est le droit inviolable d'user, de jouir et de disposer des biens garantis a chacun par la loi. Tout homme doit pouvoir y accéder par le travail et par l'épargne. Nul ne saurait en être privé si ce n'est pour cause d'utilité publique légalement constatée et sous la condition d'une juste indemnité fixée conformément à la loi.

Article 36[modifier]

Le droit de propriété ne saurait être exercé contrairement à l'utilité sociale ou de manière à porter préjudice à la sûreté, à la liberté, à l'existence ou à la propriété d'autrui.

Tout bien, toute entreprise dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait doit devenir la propriété de la collectivité.

Article 37[modifier]

La participation de chacun aux dépenses publiques doit être progressive et calculée en fonction de l'importance de la fortune et des revenus, compte tenu des charges familiales.

Article 38[modifier]

Nul ne saurait être placé dans une situation d'infériorité économique, sociale ou politique contraire à sa dignité et permettant son exploitation en raison de son sexe, de son âge, de sa couleur, de sa nationalité, de sa religion, de ses opinions, de ses origines ethniques ou autres.

L'exercice des libertés et droits reconnus à tous les ressortissants de l'Union française implique la condamnation de toute pratique de travail forcé, dérogeant au régime légal du travail dans la métropole. Toute propagande contraire aux dispositions ci-dessus sera punie par la loi.

Article 39[modifier]

La sauvegarde des droits inscrits dans la présente déclaration, le maintien des institutions démocratiques et le progrès social exigent que tous connaissent et remplissent leurs devoirs : les citoyens doivent servir la République, la défendre au prix de leur vie, participer aux charges de l'État, concourir par leur travail au bien commun et s' entraider fraternellement.


Des institutions de la République[modifier]

Titre IerDe la souveraineté et de l'Assemblée nationale

Article 40[modifier]

La France est une République indivisible, démocratique et sociale.

Article 41[modifier]

La France forme avec les territoires d'outre-mer, d'une part, et avec les États associés, d'autre part, une Union librement consentie.

Article 42[modifier]

L'emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge, à trois bandes verticales.

La devise de la République est « Liberté, Égalité, Fraternité ».

Article 43[modifier]

La souveraineté appartient au peuple. Elle s'exerce conformément à la Constitution.

Article 44[modifier]

Tous les ressortissants de l'Union française jouissent des droits et libertés de la personne humaine garantis par les Articles ler à 39 de la présente Constitution. Tous les nationaux et ressortissants français de la métropole et des territoires d'outre-mer jouissent des droits de citoyen.

Article 45[modifier]

Les originaires des territoires d'outre-mer, à qui la loi reconnaît un statut personnel, conservent ce statut tant qu'ils n'y ont pas eux-mêmes renoncé.

Ce statut ne peut en aucun cas constituer un motif pour refuser ou limiter les droits et libertés garantis par les Articles 1er à 39 de la présente Constitution.

Article 46[modifier]

La République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international. Elle n'entreprendra aucune guerre dans des vues de conquête et n'emploiera jamais ses forces contre la liberté d'aucun peuple.

Sous réserve de réciprocité, la France consent aux limitations de souveraineté nécessaires à l'organisation et à la défense de la paix.

Article 47[modifier]

Le peuple français exerce sa souveraineté par ses députés à l'Assemblée nationale, élus au suffrage universel, égal, direct et secret. La Constitution ne pourra être modifiée que par voie de référendum, conformément à l’Article 123.

Article 48[modifier]

Les territoires d'outre-mer élisent, dans des conditions fixées par les lois électorales des députés à l'Assemblée nationale.

Article 49[modifier]

Sont électeurs tous les nationaux et ressortissants français majeurs des deux sexes et jouissant de leurs droits civils et politiques.

La majorité est fixée a vingt ans.

Article 50[modifier]

Les députés à l'Assemblée nationale sont élus pour cinq ans. Les pouvoirs d'une Assemblée cessent au moment de l'entrée en fonction de la nouvelle Assemblée. Sont éligibles les électeurs et les électrices âgés de vingt-trois ans au moins.

Les inéligibilités et incompatibilités sont fixées par la loi.

Article 51[modifier]

L'Assemblée nationale élit le président du Conseil des Ministres, conformément aux Articles 76 et 94 ci-dessous.

Article 52[modifier]

La guerre ne peut être déclarée sans l'assentiment préalable de l'Assemblée nationale et l'avis préalable du Conseil de l'Union française.

Article 53[modifier]

L'Assemblée nationale valide l'élection de ses membres. La procédure du contrôle de la régularité des opérations électorales est déterminée par la loi.

Article 54[modifier]

L'Assemblée nationale se réunit de plein droit en session annuelle le second mardi de janvier.

La durée totale des interruptions de la session ne peut excéder quatre mois. Sont considérés comme interruptions de session les ajournements de séance supérieurs à dix jours.

Article 55[modifier]

Les séances de l'Assemblée nationale sont publiques. Les comptes rendus in extenso des débats sont publiés au Journal officiel. L'Assemblée peut se former en comité secret.

Elle décide si le sujet débattu en comité secret doit être repris en séance publique et si le compte rendu in extenso des débats en comité secret doit être publié.

Article 56[modifier]

L'Assemblée nationale élit son bureau chaque année au début de sa session à la représentation proportionnelle des groupes.

Article 57[modifier]

Quand l'Assemblée ne siège pas, son bureau contrôle l'action du cabinet. Il peut convoquer l'Assemblée ; il doit le faire à la demande du tiers des députés, ou a celle du Conseil des ministres.

Article 58[modifier]

Aucun député ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l'occasion des opinions ou votes émis par lui dans l'exercice de ses fonctions.

Article 59[modifier]

Aucun député ne peut, pendant la durée de son mandat, être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle qu'avec l'autorisation de l'Assemblée nationale, sauf le cas de flagrant délit. La détention ou la poursuite d'un député est suspendue si l'Assemblée le requiert.

Article 60[modifier]

Les députés perçoivent une indemnité garantissant, avec leur indépendance, la dignité de leur vie.

La loi fixe cette indemnité par référence au traitement d'une catégorie de fonctionnaires.

Article 61[modifier]

Les membres de l'Assemblée nationale ne peuvent faire partie ni du Conseil de l'Union française, ni du Conseil économique.


Titre II – De l'élaboration des lois[modifier]

Article 62[modifier]

Le président du Conseil des ministres et les députés ont l'initiative des lois.

Article 63[modifier]

L'Assemblée nationale étudie les projets et propositions de loi dont elle est saisie, dans ses commissions, dont elle fixe le nombre, la composition et la compétence.

Article 64[modifier]

Le Conseil économique examine, pour avis, les projets et propositions de loi de la compétence. Ces projets lui sont soumis par l'Assemblée nationale avant qu'elle n'en délibère.

L'avis doit être donné dans les dix jours, faute de quoi il est passé outre. Ce délai est réduit à deux jours francs au cas où l'Assemblée nationale en a ainsi décidé.

Le Conseil économique peut, en outre, être consulté par le Conseil des ministres. Il l'est obligatoirement sur l'établissement d'un plan économique national ayant pour objet le plein emploi des hommes et l'utilisation rationnelle des ressources matérielles.

Article 65[modifier]

Le Conseil économique est élu pour trois ans.

Une loi organique détermine la composition et la compétence du Conseil économique.



Titre III – De la discussion et du vote des lois[modifier]

Article 66[modifier]

L'Assemblée nationale a seule le droit de légiférer. Elle ne peut déléguer ce droit à quiconque en tout ou en partie. Sauf disposition contraire, les lois de la République sont applicables dans les départements et territoires d'outre-mer.

Article 67[modifier]

Les traités diplomatiques régulièrement ratifiés et publiés ont force de loi. Sauf clause contraire, ils s'appliquent de plein droit à tous les départements et territoires d'outre-mer.

Article 68[modifier]

Les traités relatifs à l'organisation internationale, les traités de paix, de commerce, les traités qui engagent les finances de l'État, ceux qui sont relatifs à l'état des personnes et au droit de propriété des Français à l'étranger ne sont définitifs qu'après avoir été votés par l'Assemblée nationale. Nulle cession, nul échange, nulle adjonction de territoire ne peut avoir lieu qu'en vertu d'une loi.

Article 69[modifier]

L'Assemblée nationale vote le budget. Ses membres possèdent l'initiative des dépenses.

Article 70[modifier]

L'amnistie ne peut être accordée que par une loi.

Article 71[modifier]

Le Conseil de l'Union française est formé de conseillers élus par les conseils généraux des départements de la métropole et par les conseils généraux ou les assemblées territoriales des départements et territoires d'outre-mer.

Article 72[modifier]

Le Conseil de l'Union française est élu pour quatre ans. Ses séances sont publiques et les comptes rendus in extenso en sont publiés dans un bulletin spécial.

Le conseil de l'Union française siège en même temps que l'Assemblée nationale. Il ne peut prolonger sa session au delà du délai prévu pour la deuxième lecture des textes dont il est saisi.

Article 73[modifier]

Le Conseil de l'Union française examine, pour avis, les projets et propositions de loi qui lui sont renvoyés, soit sur sa demande, soit par le Conseil des ministres ou par l'Assemblée nationale.

Il donne son avis dans le mois qui suit la transmission par l'Assemblée nationale. Quand l'Assemblée nationale a déclaré l'urgence, le Conseil de l'Union française donne son avis dans le même délai que celui prévu pour les débats de l'Assemblée nationale par le règlement de celle-ci.

Si l'avis du Conseil de l'Union française est conforme ou s'il n'a pas été donné dans les délais prévus à l'alinéa précédent, la loi est promulguée dans le texte voté par l'Assemblée nationale.

Si l'avis n'est pas conforme, l'Assemblée nationale examine le projet ou la proposition de loi en seconde lecture. Elle statue définitivement et souverainement sur les amendements proposés par le Conseil de l'Union française.

Article 74[modifier]

Ne donnent ouverture à aucune action les discours tenus dans le sein du Conseil de l'Union française, ainsi que les rapports ou toutes autres pièces imprimées par ordre du Conseil de l'Union française.

Aucun conseiller ne peut, pendant la durée de son mandat, être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle qu'avec l'autorisation de l'Assemblée nationale donnée sur avis du Conseil de l'Union française, sauf le cas de flagrant délit. La détention ou la poursuite d'un conseiller est suspendue si l'Assemblée nationale le requiert.

Les conseillers de l'Union française perçoivent une indemnité fixée par la loi.

Article 75[modifier]

Les membres du Conseil de l'Union française ne peuvent faire partie du Conseil économique.


Titre IV – Du Conseil des ministres[modifier]

Article 76[modifier]

Le président du Conseil des ministres est élu au début de chaque législature par l'Assemblée nationale, au scrutin public et à la majorité absolue des députés.

Il en est de même au cours de la législature, en cas de vacance par décès, démission ou toute autre cause, sauf ce qui est dit à l’Article 85 ci-dessous.

Article 77[modifier]

Le président du Conseil et les ministres choisis par lui sont nommés par décret du président de la République.

Article 78[modifier]

Le président du Conseil des ministres assure l'exécution des lois. Il nomme à tous les emplois civils et militaires, sauf ceux prévus par les Articles 77 et 96.

Les actes du président du Conseil des ministres prévus au présent Article sont contresignés par les ministres compétents.

Article 79[modifier]

La structure, la composition et le programme du cabinet sont soumis à l'Assemblée nationale, qui accorde ou refuse sa confiance.

L'Assemblée doit être convoquée a cet effet au plus tard le quatrième jour qui suit la constitution du cabinet.

Article 80[modifier]

Les ministres sont collectivement responsables devant l'Assemblée nationale de la politique générale du cabinet et individuellement de leurs actes personnels.

Article 81[modifier]

La question de confiance ne peut être posée qu'après délibération du Conseil des ministres ; elle ne peut l'être que par le président du Conseil. Le vote sur la question de confiance ne peut intervenir qu'un jour franc après qu'elle a été posée devant l'Assemblée. Il a lieu au scrutin public.

La confiance ne peut être refusée au cabinet qu'à la majorité absolue des députés a l'Assemblée.

Ce refus entraîne la démission collective du cabinet.

Article 82[modifier]

Le vote par l'Assemblée nationale d'une motion de censure entraîne la démission collective du cabinet. Ce vote ne peut intervenir que deux jours francs après le dépôt de la motion. Il a lieu au scrutin public à la tribune.

La motion de censure ne peut être adoptée qu'à la majorité absolue des députés à l'Assemblée.

Article 83[modifier]

L'Assemblée nationale a le droit de prononcer sa dissolution par une résolution votée à la majorité des deux tiers des députés.

Article 84[modifier]

Si, au cours d'une même session annuelle, deux crises ministérielles surviennent dans les conditions prévues aux Articles 81 et 82, la dissolution de l'Assemblée nationale pourra être décidée en Conseil des ministres, après avis du président de l'Assemblée. La dissolution sera prononcée, conformément a cette décision, par décret du président de la République. Cette disposition n'est pas applicable pendant la première moitié de la législature.

Article 85[modifier]

Le président de la République désigne comme nouveau président du Conseil des ministres le président de l'Assemblée nationale. Celui-ci constitue le cabinet en assignant les divers départements ministériels aux présidents des commissions parlementaires correspondantes.

Le nouveau cabinet fait procéder, dans les quarante jours de la dissolution, aux élections générales.

L'Assemblée nationale se réunit de plein droit le quinzième jour après son élection, pour élire un nouveau président du Conseil des ministres, sauf ce qui est dit à l’Article 105 ci-dessous.

Article 86[modifier]

Les ministres ont accès à l'Assemblée nationale, à ses commissions et aux organismes consultatifs. Ils doivent être entendus quand ils le demandent.

Ils peuvent se faire assister par des commissaires désignés par décret.

Article 87[modifier]

Le président du Conseil des ministres peut déléguer ses pouvoirs à un ministre.

Article 88[modifier]

En cas de vacance par décès ou pour toute autre cause, le Conseil des ministres charge un de ses membres d'assurer provisoirement la présidence du Conseil des ministres.

Titre V – De la responsabilité pénale des ministres[modifier]

Article 89[modifier]

Les ministres sont pénalement responsables des crimes et délits commis dans l'exercice de leurs fonctions.

Article 90[modifier]

Les ministres sont mis en accusation par l'Assemblée nationale, statuant au scrutin secret et à la majorité absolue des membres la composant, et renvoyés devant la Haute Cour de justice prévue à l’Article 91 ci-dessous. Les membres titulaires et suppléants de la Haute Cour de justice ne participent pas au vote et ne sont pas comptés dans le calcul de la majorité.

Article 91[modifier]

La Haute Cour de justice est élue par l'Assemblée nationale au début de chaque législature.

Elle comprend trente membres : vingt, élus parmi les membres de l'Assemblée à la représentation proportionnelle des groupes ; dix, élus en dehors des membres de l'Assemblée à la majorité absolue.

Trente membres suppléants sont élus dans les mêmes conditions.

Article 92[modifier]

L'organisation du parquet de la Haute Cour de justice et la procédure suivie devant elle sont déterminée par une loi spéciale.



Titre VI – Du président de la République[modifier]

Article 93[modifier]

Le président de la République est élu par l'Assemblé nationale. Cette élection a lieu au scrutin public à la tribune et requiert la majorité des deux tiers des députés composant l'Assemblée. Si les trois premiers tours de scrutin ne permettent pas d'atteindre cette majorité, l'élection est renvoyée au lendemain. Elle a lieu alors dans les mêmes formes et à la majorité des trois cinquièmes.

Le président de la République est élu pour sept ans. Il n'est rééligible qu'une fois.

Article 94[modifier]

Le président de la République, après les consultations d'usage, communique au président de l'Assemblée nationale les noms des candidats à la présidence du Conseil des ministres.

Article 95[modifier]

Il représente les intérêts permanents de l'Union française et préside aux solennités nationales.

Article 96[modifier]

Il nomme en Conseil des ministres, les conseillers d'État, le grand chancelier de la Légion d'Honneur, les ambassadeurs et les envoyés extraordinaires, les résidents généraux et les membres du Conseil supérieur de la défense nationale.

Article 97[modifier]

Le président de la République est tenu informé de la négociation des traités. Il les signe et les ratifie.

Le président de la République accrédite les ambassadeurs et les envoyés extraordinaires auprès des puissances étrangères; les ambassadeurs et les envoyés extraordinaires étrangers sont accrédités auprès de lui.

Article 98[modifier]

Le président de la République dispose de la force armée.

Article 99[modifier]

Le président de la République préside le Conseil des ministres. Il fait établir et conserve les procès-verbaux des séances.

Article 100[modifier]

Il préside avec les mêmes attributions le Conseil supérieur de la défense nationale.

Article 101[modifier]

Le président de la République préside le Conseil supérieur de la magistrature.

Article 102[modifier]

Il promulgue les lois dans les dix jours qui suivent leur transmission par l'Assemblée nationale. Pour en surveiller l'exécution, il signe les décrets d'application.

Le délai prévu à l'alinéa précédent est ramené à deux jours quand l'urgence a été déclarée.

À défaut de promulgation des lois par le président de la République dans les délais prévus, le président de l'Assemblée nationale procède à cette promulgation.

Article 103[modifier]

Chacun des actes du président de la République doit être contresigné par le président du Conseil des ministres et par un ministre.

Article 104[modifier]

Trente jours au plus, quinze jours au moins avant l'expiration des pouvoirs du président de la République, l'Assemblée nationale procède à l'élection du nouveau président.

Article 105[modifier]

Si, en application de l’Article précédent, l'élection doit avoir lieu dans une période où l'Assemblée nationale est dissoute conformément aux Articles 83 et 84, les pouvoirs du président de la République en exercice sont prorogés jusqu'à l'élection du nouveau président. La nouvelle Assemblée procède à l'élection de ce nouveau président dans les dix jours de son élection.

Dans ce cas, l'élection du nouveau président du Conseil des ministres a lieu dans les dix jours qui suivent l'élection du nouveau président de la République.

Article 106[modifier]

En cas de vacance par décès, démission ou toute autre cause, le président de l'Assemblée nationale assure provisoirement l'intérim des fonctions de président de la République.

Le nouveau président de la République est élu dans les dix jours, sauf ce qui est dit à l’Article précédent.

Article 107[modifier]

Le président de la République n'est responsable que dans le cas de haute trahison.

Il est mis en accusation par l'Assemblée nationale et renvoyé devant la Haute Cour de justice dans les conditions prévues à l’Article 90 ci-dessus.

Article 108[modifier]

Le président de la République communique avec le peuple au moyen de messages adressés à l'Assemblée nationale. Ces messages sont lus à l'Assemblée par son président sous le double assentiment de celui-ci et du président du Conseil des Ministres.

Article 109[modifier]

La charge de président de la République est incompatible avec toute autre fonction publique élective.

Article 110[modifier]

Les membres des familles ayant régné sur la France sont inéligibles à la présidence de la République.


Titre VII – Du Conseil supérieur de la magistrature[modifier]

Article 111[modifier]

Le Conseil supérieur de la magistrature est composé de douze membres :

  • le président de la République, président ;
  • le garde des sceaux, ministre de la justice, vice-président ;
  • six personnalités élues pour six ans par l'Assemblée nationale, à la majorité des deux tiers, en dehors de ses membres, six suppléants étant élus dans les mêmes conditions ;
  • quatre magistrats élus pour six ans : un par les présidents et les conseillers de la Cour de cassation, un par les présidents et les conseillers des cours d'appel, un par les présidents et les juges des tribunaux de première instance, un par les juges de paix, quatre suppléants étant élus dans les mêmes conditions.

Les décisions du Conseil supérieur de la magistrature sont prises à la majorité des suffrages. En cas de partage des voix, celle du président est prépondérante.

Article 112[modifier]

Le président de la République nomme en Conseil supérieur de la magistrature les magistrats, à l'exclusion de ceux du parquet.

Le Conseil supérieur de la magistrature assure, dans les mêmes conditions et conformément à la loi, la discipline de ces magistrats, leur indépendance et l'administration des tribunaux judiciaires.

Article 113[modifier]

Le Conseil supérieur de la magistrature exerce le droit de grâce.



Titre VIII – Des collectivités locales[modifier]

Article 114[modifier]

La République française, une et indivisible, reconnaît l'existence de collectivités territoriales. Ces collectivités sont les communes et départements, les territoires et fédérations d'outre-mer. Elles s'administrent librement, conformément à la loi nationale.

Article 115[modifier]

Le cadre, l'étendue, le regroupement éventuel et l'organisation des communes et départements, territoires et fédérations d'outre-mer sont fixés par la loi.

Article 116 .[modifier]

Les collectivités locales sont administrées aux différents échelons par des conseils élus, dans les conditions fixées par les lois électorales, au suffrage universel. L'exécution des décisions de ces conseils est assurée par leur maire ou président.

Article 117[modifier]

La coordination de l'activité des fonctionnaires de l'État la représentation des intérêts nationaux et le contrôle administratif des collectivités locales sont assurés dans le cadre départemental par des délégués du gouvernement désignés en Conseil des ministres.

Article 118[modifier]

La loi déterminera les conditions dans lesquelles le conseil général administrera les affaires départementales. Le président du conseil général, assisté du bureau, assurera en permanence l'exécution des décisions du conseil général.

La loi déterminera également les conditions dans lesquelles fonctionneront les services locaux des administrations centrales, de manière à rapprocher l'administration des administrés.

Article 119[modifier]

Les intérêts propres des territoires d'outre-mer sont administrés et gérés par des assemblées locales, élues au suffrage universel et direct, dont le régime électoral, la composition et la compétence sont déterminés par des lois spéciales assurant la liberté du vote.

Ceux de ces territoires qui forment un groupe ou une fédération élisent une assemblée dont la composition et la compétence sont fixées par des lois spéciales.

Article 120[modifier]

Le ministre chargé de l'ensemble des problèmes de la France d'outre-mer est assisté, pour chaque fédération ou groupe de territoire d'un sous-secrétaire d'État résident.

Celui-ci veille à l'application des lois. Il coordonne les services publics de l'Union française et contrôle le fonctionnement des administrations locales.

Il est responsable du maintien de l'ordre et de la défense du groupe ou de la fédération de territoires.



Titre IX – Dispositions exceptionnelles[modifier]

Article 121[modifier]

Toute loi proclamant la République en danger doit avoir été votée par l'Assemblée nationale à la majorité des deux tiers des députés.

La loi fixe, s'il est nécessaire, les conditions dans lesquelles sera prolongée la durée des fonctions des députés, des conseillers de l'Union française, des membres du Conseil économique et des membres élus du Conseil supérieur de la magistrature.

Pendant la période d'application de la loi prévue au premier alinéa du présent Article, les Articles 83 et 84 cessent d'être applicables.

Article 122[modifier]

Pendant les périodes d'hostilités, des lois spéciales fixent, s'il est nécessaire, les conditions dans lesquelles sera prolongée la durée des fonctions des députés, des conseillers de l'Union française, des membres du Conseil économique et des membres élus du Conseil supérieur de la magistrature.


no match[modifier]

Titre X – De la révision de la Constitution[modifier]

Article 123[modifier]

La présente Constitution, adoptée par le peuple français, ne peut être révisée que par le peuple.

La révision a lieu dans les formes suivantes :

L'Assemblée nationale, par une résolution prise par scrutin public à la tribune, à la majorité des députés, déclare qu'il y a lieu de réviser la Constitution.

La résolution précise l'objet de la révision.

Elle est soumise a une deuxième lecture dans le délai minimum de trois mois.

Après cette seconde lecture, l'Assemblée nationale élabore un projet de loi portant révision de la Constitution. Ce projet est voté à la majorité et dans les formes prévues pour la loi ordinaire.

Ce projet de loi est soumis au référendum.

En cas d'adoption par le peuple, il est promulgué comme loi constitutionnelle par le président de la République dans les huit jours qui suivent la date du référendum.

Article 124[modifier]

Au cas d'occupation du tout ou partie du territoire métropolitain par des forces étrangères, aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie.

Article 125[modifier]

La forme républicaine du gouvernement ne peut faire l'objet d'une proposition de révision.