Recueil des lettres missives de Henri IV/1584/Fin de l’année ― Au Roy, mon souverain seigneur

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[1584. — fin de l’annéee.] — Ire.

Cop. — B. R. Suppl. fr. Ms. 1009-4.

Imprimé. — Mémoires de Philippes de Mornay, seigneur du Plessis Marli, etc. t. I, page 399, édition de 1624, in-4o.


AU ROY, MON SOUVERAIN SEIGNEUR.

[1] Monseigneur, Le sieur du Plessis est arrivé icy depuis deux jours ; par le retour duquel j’ay entendu ce qu’il a pleu à Vostre Majesté ordonner sur les cahiers et instructions qui ont esté presentés à Vostre Majesté par monsr de la Val[2] et luy, au nom de vos très humbles subjects de la Religion reformée, assemblez il y a quelques mois, par vostre permission, en vostre ville de Montaulban. Et s’est tout à propos rencontré que mon cousin monsieur le prince de Condé, et un nombre de seigneurs et gentils-hommes de ceste profession, se sont trouvés, sur son retour, prés de moy : auxquels ont esté communiquées les responses qu’il a pleu à Vostre Majesté accorder sur les dicts cahiers et instructions. Je diray avec verité à Vostre Majesté, Monseigneur, que tous unanimement ont reconnu, non seulement la saincte intention que Vostre Majesté apporte à l’execution de ses edicts, et au bien et repos de tous, mais aussy particulierement la paternelle affection de laquelle il luy plaist embrasser tous ses tres humbles subjects de la Religion, qui louent Dieu, de tout leur cœur, de l’heur qu’Elle leur fait esperer, de se ressentir de plus en plus de vostre bonne grace, et le supplient de vouloir conserver Vostre Majesté longuement, pour tant de milliers de personnes qui ne respirent que sous sa sagesse et prudence, et de prosperer et benir tous ses conseils et desseins, pour l’entier restablissement et heureux accroissement de son Estat. Entr’eux tous, Monseigneur, je reconnois et ressens une obligation tres speciale, en ce qu’il a pleu à Vostre Majesté avoir pour agreable les tres humbles remonstrances, que j’ay pris la hardiesse de vous faire, de ce qui m’a semblé convenable à la necessité de vosdicts subjects de la Religion, pour les faire vivre en quelque plus grande asseurance, attendant qu’il ait pleu à Dieu, par la prudence de Vostre Majesté, ramener toutes choses à un plus desirable estat. Qui me faict aussy esperer, Monseigneur, que de plus en plus Vostre Majesté estendra sur moy ses bonnes graces, comme de ma part je me dispose et disposeray tousjours à rechercher toutes les occasions de m’en faire digne ; ne regrettant rien plus que de ne les voir naistre telles, et aussy souvent que je les desirerois pour rendre notables et continuelles preuves à Vostre Majesté de la fidelité de mon service. Reste maintenant, Monseigneur, comme il a pleu à Vostre Majesté, faire connoistre ceste sienne bonne volonté à ses tres humbles subjects de la Religion, qu’aussy il luy plaise, par une mesme bonté, commander, au plustost que ses affaires le pourront permettre, les expeditions necessaires pour leur en faire sentir les effets, suivant les memoires qui en auront esté mis par son commendement es mains de monsr de Believre, desquels Vostre Majesté trouvera bon que le sieur de Chassincourt fasse la sollicitation et poursuite. Ce que sçachant, Monseigneur, estre tres conforme à vostre intention, assés tesmoignée par les precedens et recens effets, ne pensent vos dicts tres humbles subjects avoir besoing vers Vostre Majesté de plus longue requeste, mais bien, Monseigneur, de supplier le Createur, comme je fay de tout mon cœur avec eux tous, qu’il doint à Vostre Majesté, [en parfaite santé, heureuse et longue vie.....


HENRY.]


  1. « Dressée par M, du Plessis. » (Mémoires de Mornay.)
  2. Voyez la lettre du mois d’octobre 1584, IIme.