Recueil des lettres missives de Henri IV/1584/Novembre ― À monsieur de Bellievre (1)

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[1584. — novembre.] — IVme.

Orig. autographe. — Biblioth. impér. de Saint-Pétersbourg, Ms. 915, n° 27. Copie transmise par M. Allier, correspondant du ministère de l’Instruction publique.


À MONSR DE BELLIEVRE.

Monsr de Bellievre, Il y a si longtemps que nous sommes si mal traités, ma sœur et moy pour le payement de nos pensions, encores que, comme vous sçavés, elles soient d’autre nature et plus considerables que toutes les aultres, que ma sœur s’est enfin resolue de depescher ce porteur pour s’adresser à vous, suivant la confiance que nous avons de vostre amitié et bonne volonté, pour vous prier de faire en sorte que nous puissions voir de plus prompts et meilleurs effects que ceulx que nous avons connu par cy-devant ; qui sont tous aultres que nous ne meritons. Et parce que je m’asseure que vousy ferez tout ce qui se peut, et mesme que pour ce qui nous est deu du passé, si se presente quelque expedient ou party pour nostre payement vous le nous ferés accorder, je laisseray ce propos, pour vous dire que aussy tost que le sr de Pontcarré m’a communiqué la depesche que vous luy avez baillée et la charge qu’il a pour le Languedoc, j’ay telle affection au service du Roy et au bien de cest Estat, que j’ay avisé presentement de faire les depesches les plus affectyonnées et expresses que j’ay peu et les plus convenables au fait qui se manie ; et suyvant vostre advis et intention, j’ay commandé à Dupin, qui a la volonté et le moyen de bien faire, de s’y acheminer et d’apporter toute l’affection, fidelité et dexterité qu’il pourra ; et n’ay point en cella regardé que, encores que j’ay apporté beaucoup en cest affaire, on ne faict aucune mention de moy en toute la dicte depesche comme si on ne se voulloit en cella servir de moy. En quoy il semble qu’on ne me porte la bonne volonté que je merite, et qu’on tient peu de compte de moy en cella comme en beaucoup d’autres choses : ce que je vous dis priveement comme à l’un de mes meilleurs amis. Vous sçavés ce que j’ay demandé, qui est raisonnable, pour la monstre et payement de ma compaignie de gend’armes. À quoy je ne voy poinct qu’on me face aucune response. Je vous prie, Monsr de Bellievre, selon les occasions, parler de cella au Roy, et d’aultres choses que je vous ay dictes, et mesmes de celles que vous jugerés estre raisonnables, et m’en faire response le plus tost que vous pourrés, et au reste m’aimer et faire certain estat de l’amitié de

Vostre plus affectionné et assuré amy,


HENRY.


Monsr de Bellievre, il n’y a meilleur moyen ne plus aysé pour remectre la chambre tripartie en ce gouvernement, qu’en la redressant pour ceste heure, de mesme qu’elle estoit composée lorsqu’elle fut interrompue par la venue de ceulx de la chambre de la justice, pour deux ans, sans s’arrester à faire nouvelle eslection ; à quoy je vous prie vous voulloir employer.