Rig Véda ou Livre des hymnes/Section 3/Lecture 1

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Traduction par Alexandre Langlois.
Bibliothèque Internationale Universelle (p. 197-207).

LECTURE PREMIÈRE.
HYMNE I.
À Agni, par Viswâmitra.
(Mètre : Trichtoubh.)

1. Les sept[1] splendeurs (d’Agni), dont le dos commence à blanchir[2], viennent de s’élancer du foyer où il reposait, et elles ont pénétré les grands parents[3]. Étendus autour (de nous), ces deux ancêtres s’avancent de concert, pour perpétuer le temps.

2. (Agni) s’est entouré de ses vaches lumineuses[4] ; (le dieu) bienfaisant s’élance sur ses célestes montures, qui portent le miel des (offrandes). (Ô Agni), tu daignes habiter la demeure du sacrifice ; tu fais rouler (tes flammes) ; cependant autour de toi s’élève la voix (de la Prière)[5].

3. Le maître sage et opulent est monté sur ses coursiers, qu’il a rendus dociles. Son dos noir s’est revêtu (des rayons) qui partent du foyer, et ses membres se sont développés.

4. Les Libations donnent de la force aux grandes (Lumières), enfants de Twachtri, et servent de char au (dieu), impérissable soutien (du monde, Agni), de son trône étendant au loin ses membres brillants, s’unit au Ciel et à la Terre, comme (l’époux s’unit) à son épouse.

5. (Les sages) aiment à honorer (ce dieu) grand, libéral et bienfaisant, et ils bénissent son empire. L’air s’illumine de leurs feux éclatants ; leur hymne a son prix ; leur prière a son mérite.

6. En même temps qu’ils invoquent les deux grands parents, que nos Seigneurs nous procurent aussi la protection (d’Agni). Qu’en faveur de celui qui le chante, (ce dieu) qui sème (la lumière) apporte ses clartés dans les lieux qu’environnait la nuit.

7. Sept sages avec cinq prêtres[6] gardent le foyer où repose le (dieu), aussi rapide que l’oiseau. Ils s’approchent avec bonheur, répandent (la libation), et, Dévas immortels, accomplissent les rites en l’honneur des Dévas (célestes).

8. J’honore, avant tout, les deux sacrificateurs divins[7]. Chargés de leurs sept offrandes, les (prêtres) se plaisent à présenter la Swadhâ. Ils chantent le (dieu) qu’ils appellent du nom de Rita[8], et, brillants gardiens des rites sacrés, ils poursuivent leur œuvre.

9. Sous les libations qui s’épandent en l’honneur d’un (dieu) rapide et libéral, ses rayons, aux formes changeantes, s’affaissent et s’agitent. Dieu sage et sacrificateur, sois heureux, et amène ici les grands dieux avec le Ciel et la Terre.

10. (Dieu de la) richesse, accorde-nous l’abondance. Que les Aurores, accompagnées de douces prières et d’heureuses splendeurs, se lèvent avec magnificence ! Ô Agni, excuse les fautes des Grands qui ont su faire grandir tes larges feux.

11. Ô Agni, en échange de nos invocations, fais que la terre[9] soit à jamais libérale pour nous, et féconde en troupeaux ! Que nous ayons une belle lignée d’enfants et de petits-enfants ! Ô Agni, que ta bonté soit avec nous !


HYMNE II.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètres : Trichtoubh et Anouchtoubh.)

1. Ô Vanaspati[10], les saints ministres du sacrifice répandent sur toi leur miel divin. Deviens ici même notre bienfaiteur, soit que tu lèves ta tête superbe, soit que tu reposes au sein de ta mère[11].

2. Ô toi[12], placé à l’orient du foyer, sois (pour nous) une source d’abondance intarissable ; (donne-nous) une forte lignée. Éloigne nos ennemis, et dresse-toi pour notre grande félicité.

3. Dresse-toi, ô Vanaspati, sur le sol du sacrifice, et présente-nous d’heureuses dimensions. Fais la gloire de celui qui apporte ici ses offrandes.

4. Le voilà qui vient[13], le (dieu) jeune, richement vêtu, ceint (de lumière), préférable à tous. Il naît ; les vénérables sages, pleins d’un saint recueillement et d’une vénération profonde, le font apparaître.

5. Il est né ; il croît au milieu des hommages des mortels, pour nous donner des jours sereins. Les sages accomplissent leurs œuvres de purification, et pour la sainte prière le prêtre élève sa voix.

6. Ô Vanaspati, que ces bois divins[14], que les ministres du sacrifice ont plantés et que la hache a taillés, nous procurent une heureuse fortune, une nombreuse famille !

7. Que ces branches coupées et plantées en terre, vers lesquelles s’élèvent les vases (des libations), que tous (ces bois) qui prennent une nature divine et ornent le champ du sacrifice concourent à notre bonheur !

8. Que les Adityas, les Roudras, les Vassous, merveilleux directeurs, le Ciel et la Terre, l’Espace[15], l’Air viennent avec joie participer à nos cérémonies ; que les Dévas[16] élèvent l’enseigne du sacrifice !

9. Tels que des cygnes qui volent en troupe, que les poteaux s’élèvent entourés de blanches lueurs. Placés par nos sages du côté de l’orient, que ces Dévas[17] suivent la route des Dévas.

10. Ainsi que la corne sur la (tête du) taureau, ces poteaux apparaissent, sur la terre, garnis de leurs anneaux. Invoqués par les prêtres au milieu du sacrifice, qu’ils soient notre défense sur les champs de bataille.

11. Ô Vanaspati, monte, élève-toi sur tes cent rameaux ! Puissions-nous aussi donner à notre (famille) mille rameaux, (ô dieu) que la hache brillante a disposé pour le grand bonheur (du monde) !


HYMNE III.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètres : Vrihatî et Trichtoubh.)

1. Ô dieu, nous mortels, tes amis, nous t’appelons à notre secours, toi enfant des Ondes[18], bienfaiteur brillant, sauveur irréprochable.

2. Tu aimes nos offrandes, et tu viens vers les Ondes, qui sont tes mères. Ô Agni, nous ne pouvons plus supporter ton absence[19]. Tu es en ces lieux, et cependant loin de nous.

3. Ton désir est de satisfaire nos vœux : car tu es bon. Vois ces (prêtres), sur l’attachement desquels tu peux compter. Pour ton service les uns sont debout, les autres sont assis[20].

4. Ce (dieu) prêt à combattre nos ennemis et leurs troupes innombrables, les Dévas[21] immortels et cléments l’ont retrouvé dans les ondes, comme le lion (dans sa caverne).

5. Tel qu’un fugitif, Agni se cachait ; les Dévas l’ont cherché avec de violents efforts[22], et Mâtariswan l’a ramené de la contrée lointaine.

6. Les mortels t’ont reçu des Dévas, ô (Agni), qui portes les holocaustes. Par ta puissance, ô (dieu) humain[23] et toujours jeune, tu protéges tous les sacrifices.

7. Ainsi ton œuvre, ô Agni, est pour ton humble serviteur une source de bonheur, quand, au moment du crépuscule, tous les êtres vivants sont rassemblés autour de ton foyer.

8. Invoquez le dieu ami des sacrifices, qui siége (dans le foyer) et s’entoure d’une flamme pure. Honorez le messager rapide, actif, antique et vénérable.

9. Que les trois mille trois cent trente-neuf[24] Dévas honorent Agni. Qu’ils répandent pour lui le beurre (consacré), qu’ils étendent le gazon, et qu’ils le fassent asseoir sur son siége de sacrificateur.


HYMNE IV.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Ouchnih.)

1. Les sages, ô Agni, te (reconnaissent) pour le roi des hommes ; mortels, ils allument pour le sacrifice le feu d’un dieu.

2. Ô Agni, ils te chantent dans leurs cérémonies, comme prêtre et sacrificateur. Gardien des choses saintes, brille sur ton trône.

3. Ô Agni (surnommé) Djâtavédas, celui qui nourrit tes feux obtient une puissante famille, une fortune florissante.

4. Qu’il vienne, cet Agni, l’étendard des sacrifices ; que, pour le (bonheur de) celui qui offre l’holocauste, les Dévas répandent sur lui leurs sept libations.

5. À Agni, sage et sacrificateur, qui semble porter les feux allumés par les sages, apportez l’hymne antique et solennel.

6. Que nos hymnes augmentent (la gloire) d’Agni. Que ce (dieu) brillant et digne de nos hommages naisse pour (nous apporter) l’abondance et la richesse.

7. Agni, (dieu) vénérable, honore les dieux dans le sacrifice en faveur du serviteur qui les invoque. Sacrificateur né pour notre bonheur, tu règnes sur nos ennemis.

8. (Dieu) purificateur, brille pour nous ; que nous obtenions par toi une brillante et forte famille. Deviens pour tes adorateurs une source de bénédictions.

9. Nos prêtres remplis de sagesse s’éveillent (dès le matin) pour allumer tes feux, ô toi qui portes l’holocauste, (dieu) immortel, que la Force a fait grandir.


HYMNE V.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Agni, sacrificateur, pontife, surveillant des saintes cérémonies, connaît tous nos rites sacrés.

2. Prêtre immortel, Agni porte l’holocauste, et, messager chargé des offrandes, il s’unit à la Prière.

3. Étendard du sacrifice, l’antique Agni apparaît avec la Prière. Ses rayons triomphent des (ténèbres).

4. Les Dévas ont enfanté Agni, fils toujours nouveau de la Force, possesseur de tous les biens et agent du sacrifice.

5. Agni est l’invincible chef des races humaines, rapide, impétueux, toujours jeune.

6. Agni soutient tous les assauts ; il ne saurait être vaincu, et il fait la force des Dévas. Il est l’auteur de toute abondance.

7. Le mortel qui l’honore par l’offrande des mets sacrés s’approche (heureusement) du trône où brille (un dieu) purificateur.

8. Puissions-nous, sages (et dévoués), réunir les faveurs d’Agni, qui possède tous les biens !

9. Ô Agni, nous demandons l’abondance et la précieuse richesse. Voilà pour quel motif les Dévas s’adressent à toi.


HYMNE VI.

À Indra et Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Indra et Agni, traversez l’air pour venir, à la voix de notre prière, partager nos copieuses libations. Buvez, provoqués par nos hymnes.

2. Indra et Agni, le Sacrifice marche, animé par le chant du poëte. (Appelés) par la Prière, buvez de nos libations.

3. Par l’hommage du sacrifice, par la voix du poëte, j’honore Indra et Agni. Qu’ils viennent se rassasier de notre soma.

4. J’invoque Indra et Agni, invincibles triomphateurs, terribles vainqueurs de Vritra, auteurs d’abondants bienfaits.

5. Les poëtes, savants dans les rites sacrés, vous célèbrent par leurs hymnes. Ô Indra et Agni, je vous apporte mon offrande.

6. Indra et Agni, unissant vos efforts, vous avez ébranlé les quatre-vingt dix villes, épouses du brigand (céleste)[25].

7. Indra et Agni, autour de vous agissent les Rites divins, suivant avec respect les voies du sacrifice.

8. Indra et Agni, avec vous habitent la Force et l’Abondance. C’est vous qui lancez les eaux (sur la terre).

9. Indra et Agni, (animés) par nos offrandes, vous ornez les mondes célestes, et votre force se fait partout sentir.


HYMNE VII.

À Agni, par Richabha, fils de Viswâmitra.

(Mètre : Anouchtoubh.)

1. En l’honneur du divin Agni fais entendre tes plus beaux chants. Qu’il vienne avec les dieux, et, objet de notre profonde vénération, qu’il se place sur notre gazon.

2. Plein de justice, il est le maître du ciel et de la terre ; les (Dévas) secondent et augmentent sa force. Chargés d’holocaustes, (les prêtres) le chantent, et par leurs offrandes cherchent à obtenir son secours.

3. C’est lui qui est le sage directeur de nos (prêtres), l’instituteur des sacrifices. Honorez donc Agni, qui est l’auteur, le distributeur de tout bien.

4. Que pour prix de nos hommages Agni nous accorde ses dons les plus heureux. Que par lui nous arrive une florissante moisson des biens du ciel, de la terre et des eaux[26].

5. Les (prêtres), en chantant leurs hymnes, allument les feux de cet Agni, sacrificateur resplendissant, et souverain maître des hommes, et ils le disposent pour ses œuvres merveilleuses.

6. Ô toi que les Dévas appellent avec ferveur, garde-nous au milieu de nos cérémonies et de nos chants. Brille heureusement pour nous, ô Agni, toi dont les Marouts[27] augmentent la splendeur, et qui es riche de mille trésors.

7. Ô Agni, accorde-nous une opulence ornée de mille biens, douée de gloire et d’éclat, entourée de famille ; (accorde-nous) une force et une puissance qui jamais ne puissent décroître.


HYMNE VIII.

À Agni, par Richabha.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le (dieu) sage, prudent et juste, prêtre et sacrificateur, apparaît, pour notre bonheur, au milieu de nos cérémonies : l’enfant de la Force, Agni, au char brillant, à la chevelure enflammée, sur son trône terrestre, se revêt de toute sa force.

2. Je t’adresse mon hommage, à toi qui peux m’entendre, (dieu) juste et fort. Exauce-moi. Sage, tu amènes (les dieux) sages comme toi. Digne de nos adorations, viens t’asseoir sur notre cousa, au milieu de nous, et prêt à nous secourir.

3. Toutes chargées d’offrandes, que l’Aurore et la Nuit arrivent par les routes du vent. Au moment où (nos prêtres) jettent le beurre de l’holocauste sur l’antique (Agni), qu’elles viennent dans notre demeure, placées sur le devant de leur char.

4. Puissant Agni ! Mitra, Varouna, les Viswas, les Marouts t’honorent avec bonheur, lorsque tu t’élèves tout resplendissant, ô fils de la Force, et répandant, (comme) le soleil, tes rayons parmi les hommes.

5. Nous approchons de toi avec vénération, tendant nos bras pour te présenter aujourd’hui l’offrande que, tu désires. En ta qualité de prêtre, ô Agni, fais agréer aux dieux notre culte respectueux, notre prière innocente.

6. Enfant de la Force, un dieu tel que toi est pour nous une source toujours pleine de secours et d’abondance ; accorde-nous des biens sans nombre ; ô Agni, fais aussi que nous soyons justes et bons.

7. Ô dieu sage et fort, mortels que nous sommes, nous avons accompli pour toi l’œuvre du sacrifice. Souviens-toi de tous ceux qui ont chargé le char de tes offrandes. Immortel Agni, consomme entièrement notre (holocauste).


HYMNE IX.

À Agni, par Outkila, fils de Cata.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Développe tes brillantes clartés et détruis nos ennemis, les Rakchasas et les Maladies. Que je me trouve couvert par la protection du grand et heureux Agni, et placé sous la direction d’un (dieu) digne de nos hommages.

2. Sois notre gardien. Entends notre prière, et au lever de l’aurore, et à l’apparition du soleil. Comme un père aime sa postérité, chéris nos hymnes, ô toi, Agni, dont le corps est resplendissant.

3. Généreux Agni, œil de la nature, brille, au milieu de l’obscurité, de toute ta splendeur ; sois notre refuge et notre conducteur ; délivre-nous du mal ; (dieu) toujours jeune, donne-nous l’opulence que nous désirons.

4. Brille, invincible et généreux Agni ; force pour nous toutes les villes (célestes), et donne-nous leurs trésors. Tu possèdes tous les biens, et tu connais l’art de diriger (les hommes). Tu es le guide du sacrifice, (que nous regardons comme) un noble et riche protecteur.

5. Chanté par nous, (dieu) brillant et sage, porte vers les (autres dieux) nos nombreuses offrandes ; qu’ils en jouissent sans partage. Sois comme un char tout comblé de richesses ; ô Agni, que par toi le Ciel et la Terre, doués de tant de beautés, reçoivent les mets (sacrés).

6. Généreux Agni, rassasie ta soif, goûte nos offrandes. Rends-nous favorables le Ciel et la Terre, auteurs de tous les biens. Avec les (autres) dieux, dieu de lumière, viens (à nous), et que la folie d’un mortel ne cause point notre perte.

7. Ô Agni, en échange de nos invocations, fais que la terre soit à jamais libérale pour nous, et féconde en troupeaux ! que nous ayons une belle lignée d’enfants et de petits-enfants ! Ô Agni, que ta bonté soit avec nous !


HYMNE X.

À Agni, par Outkila.

(Mètre : Vrihatî.)

1. Agni est le maître d’une félicité pleine de grandeur et de force. Il est le maître d’une opulence riche en vaches, féconde en enfants. Il est le maître de la puissance qui détruit un ennemi.

2. Vaillants Marouts, attachez-vous à ce (dieu) qui répand l’abondance et le bonheur. Que ces (Marouts), habitués à vaincre leurs ennemis sur les champs de bataille, nous fassent chaque jour triompher de nos adversaires.

3. Agni, généreux et riche en bienfaits, augmente notre fortune ; donne-nous la force, l’abondance, la santé, la vigueur. Multiplie notre famille.

4. Le (dieu) qui a fait tous les mondes, qui, au milieu des Dévas, forme et accomplit les rites (sacrés), vient, dans cette société toute divine, écouter nos hymnes et nous apporte la force.

5. Agni, ne nous abandonne point à l’ignorance, et à la faiblesse des hommes sans cœur. Ô fils de la Force, que nos vaches soient sauvées et notre honneur garanti. Éloigne nos ennemis.

6. Heureux et opulent Agni, tu es le maître d’une abondance large et féconde. Fais-nous jouir d’une grande, d’une glorieuse affluence de richesses et de félicité.


HYMNE XI.

À Agni, par Cata, fils de Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Agni, objet commun de tous les hommages, remplit ses fonctions suprêmes, et reçoit d’onctueuses libations. Déployant sa chevelure de flamme, prenant une forme sous (l’effusion) du beurre (sacré), purificateur et prêtre, (il vient) pour honorer les dieux.

2. Agni, ô toi qui possèdes tous les biens, reçois cet holocauste, et offre-le à la Terre et au Ciel : honore les dieux. Tel que Manou[28], dirige aujourd’hui notre sacrifice.

3. Agni, ô toi qui possèdes tous les biens, tu as trois aliments[29] ; tu as trois mères qui concourent à ton lever[30]. Avec elles rends aux dieux les honneurs qu’ils attendent ; (dieu) sage, fais le bonheur de l’homme qui offre le sacrifice.

4. Agni, ô toi qui possèdes tous les biens, nous te célébrons, nous t’adorons, (dieu) noble, brillant, honorable. Les Dévas t’ont fait pour être le messager (du sacrifice), la terreur de l’ennemi, le porteur de l’holocauste, le dépositaire de l’ambroisie.

5. Que, placé près de (ton foyer) le matin et dans deux autres (moments)[31] un homme religieux et fortuné veuille te vénérer en te présentant la Swadhâ ; ô (dieu) sage, remplis en sa faveur les divers devoirs du prêtre. Dans la sainte cérémonie consomme notre sacrifice.


HYMNE XII.

À Agni, par Cata.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Agni, sois bienveillant pour nous ; viens tel qu’un ami, et dans ton amitié sois bon comme un père et une mère. Les hommes sont exposés à beaucoup de maux : brûle les ennemis qui se déclarent contre nous.

2. Agni, brûle les ennemis qui nous menacent ; réduis en cendres l’orgueil de notre adversaire impie. (Dieu) prudent et protecteur, brûle les (êtres) dépourvus de sagesse. Que tes rayons immortels soient vainqueurs.

3. Agni, j’implore ta faveur, et je t’offre ce beurre (sacré) pour obtenir la puissance et la force. Je t’adore, et mesurant mes hommages à ma fortune, j’emploie la sainte prière et j’attends de toi mille faveurs.

4. Enfant de la Force, allume tes feux en entendant nos louanges ; donne à tes serviteurs, (donne), Agni, aux enfants de Viswâmitra une riche et abondante opulence. Nous demandons le bonheur, et arrosons ton corps de nombreuses libations.

5. Agni, généreux bienfaiteur, comble-nous de tes dons précieux en récompense de cet éclat brillant dont nous t’entourons. (Vois, en effet, comme) tes bras s’étendent magnifiquement dans le foyer de ton heureux serviteur, (comme) tes formes se déploient.


HYMNE XIII.

À Agni, par Gathin.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. J’honore dans le sacrifice Agni, prêtre sage et savant, héraut habile dans la louange. Que pour la fête que nous célébrons en l’honneur des dieux il nous serve de pontife, et qu’il reçoive nos offrandes pour nous accorder la richesse et l’abondance.

2. Ô Agni, tournant (avec respect) vers ma droite[32], j’ouvre et célèbre pour toi cette fête où sont prodigués les holocaustes, les mets, les offrandes, le beurre (consacré). Avec tes dons et tes trésors viens à notre sacrifice.

3. Ton serviteur t’apporte une âme dévouée. Donne-lui une heureuse famille. Puissions-nous, ô Agni, tenir de toi une mâle puissance, de la gloire et des richesses.

4. Ô Agni, tes serviteurs se sont plu à nourrir l’éclat de tes rayons divins. Amène donc les dieux à cette fête, où, prêtre toujours jeune, tu déploies aujourd’hui ta force merveilleuse.

5. Les Dévas, dans cette assemblée sainte, t’ont pris pour sacrificateur, et ils ont versé sur toi la libation. Éveille-toi, Agni, notre sauveur, et répands sur nous tes bienfaits.


HYMNE XIV.

À Agni, par Gathin.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le (prêtre), apportant (l’holocauste) et ses hymnes, invoque le matin Agni, l’Aurore, les Aswins, (le dieu appelé) Dadhicrâs[33]. Qu’ils nous entendent, ces dieux brillants, heureux de nos hommages et amis de nos sacrifices.

2. Ô Agni, enfant du Sacrifice, tu as trois aliments[34], trois foyers[35], trois langues[36] avides de libations, trois corps[37]. Avec ces (corps) sauve-nous ; écoute nos prières.

3. Immortel Agni, dieu qui possèdes tous les biens et qui aimes la Swadhâ, tes rayons sont innombrables. Bienfaiteur de tous les êtres et ami des malheureux, (les Dévas) ont rassemblé en toi les (splendeurs) magiques qui distinguent les Asouras[38].

4. Agni est comme Bhaga[39] ; il est le chef des troupes divines, le dieu juste, le gardien des saisons. Il donne la mort à Vritra ; antique et possesseur de toute science, il peut faire traverser à son serviteur tous les maux (de la vie).

5. J’appelle ici Dadhicrâs, Agni, la divine Aurore, Vrihaspati, le brillant Savitri, les Aswins, Mitra et Varouna, Bhaga, les Vasous, les Roudras, les Adityas.


HYMNE XV.

À Agni, par Gathin.

(Mètres : Trichtoubh, Anouchtoubh et Vrihatî.)

1. (Ô Dieu) qui possèdes tous les biens, présente notre sacrifice aux Immortels. Prends cet holocauste, Agni sacrificateur, siége le premier (sur notre cousa), et goûte à nos onctueuses libations de beurre.

2. (Agni) purificateur, pour toi coulent ces onctueuses libations de beurre. Remplis ton office, et pour l’honneur des dieux, reçois nos offrandes les plus précieuses.

3. À toi, sage et généreux Agni, ces libations de beurre ! Illustre prophète, tes feux s’allument. Sois le conservateur de notre sacrifice.

4. Rapide et puissant Agni, pour toi coulent ces onctueuses libations de beurre. À la voix de nos poëtes, viens entouré d’une grande lumière. (Dieu) sage, prends cet holocauste.

5. Nous élevons (nos coupes pleines) d’onctueuses et brillantes libations, et nous les vidons en ton sein. (Agni) protecteur, ces libations coulent sur ton corps. Reçois-les pour les transmettre aux dieux.


HYMNE XVI.

À Agni, par Gathin.

(Mètres : Trichtoubh et Anouchtoubh.)

1. Voici Agni qui reçoit la libation de soma. Indra prend pour lui cette libation, et la verse dans ses entrailles. Ô (Dieu) qui possèdes tous les biens, telles qu’un coursier rapide, nos liqueurs (vives) et abondantes arrivent jusqu’à toi au milieu de nos louanges.

2. Adorable Agni, ta forme est au ciel, sur la terre, dans les plantes, dans les ondes[40]. Cette lumière éclatante que tu as jetée sur l’étendue de l’air se développe comme un océan. Elle forme l’œil du monde.

3. Agni, tu t’élèves dans la mer du ciel[41] ; tu vas interpeller les dieux qui peuvent être superbes. Les Ondes, placées au delà comme en deçà du monde brillant du soleil, s’approchent avec vénération.

4. Que les Feux de nos foyers s’élèvent à l’envi l’un de l’autre sur le lit de terre qui les contient. Pleins d’innocence et de bonté, qu’ils se plaisent à notre sacrifice, et (qu’ils dévorent) nos abondantes offrandes.

5. Ô Agni, en échange de nos invocations, fais que la terre soit à jamais libérale pour nous, et féconde en troupeaux ! que nous ayons une belle lignée d’enfants et de petits-enfants ! Ô Agni, que ta bonté soit avec nous !


HYMNE XVII.

À Agni, par Dévasravas et Dévavâta, fils de Bharata.

(Mètres : Vrihatî et Trichtoubh.)

1. Tiré (de l’Aranî), établi sur (le foyer), Agni, jeune et sage, conduit le Sacrifice. L’impérissable Agni (assis) sur ce bûcher périssable y reçoit l’ambroisie (de la libation).

2. Les deux fils de Bharata, Dévasravas et Dévavâta, ont heureusement extrait (de l’Aranî) le généreux Agni. Ô Agni, vois la riche abondance de nos offrandes. Sois chaque jour notre directeur.

3. (Dieu) antique, cher nourrisson, dix ministres[42] l’ont engendré au sein de ses mères[43]. Ô Dévasravas, fais l’éloge d’Agni, enfanté par Dévavâta, et qui se met au service des hommes.

4. Avec l’espoir de jours favorables et sereins, je t’ai placé sur ce noble trône de terre (que consacre le nom) d’Ilâ[44]. Brille avec toute ta pompe, ô Agni, dans ces lieux qu’habitent les enfants de Manou, aux bords de la Drichadwati, de l’Apayâ et de la Saraswatî[45].

5. Ô Agni, en échange de nos invocations, fais que la terre soit à jamais libérale pour nous, et féconde en troupeaux ! Que nous ayons une belle lignée d’enfants et de petits-enfants ! Ô Agni, que ta bonté soit avec nous !


HYMNE XVIII.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètres : Anouchtoubh et Gâyatrî.)

1. Agni, triomphe des armées, éloigne les ennemis. Par ta force invincible tu renverses tes adversaires. Brille pour celui qui t’apporte son offrande.

2. Agni, tes feux sont allumés sur (le foyer) de terre[46]. Pontife immortel, ami du Sacrifice, réjouis-toi de nos hommages.

3. Agni, éveille-toi avec éclat. Enfant de la Force, je t’appelle ; viens t’asseoir sur mon cousa.

4. Agni, avec tous tes Feux divins, ministres des sacrifices, accomplis le vœu de nos prières.

5. Agni, donne à ton serviteur une opulence forte et brillante. Fais-nous riches en enfants.


HYMNE XIX.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Virât.)

1. Agni, tu es sage et prudent ; tu possèdes tous les biens. Tu es fils du Ciel, fils de la Terre[47]. Honore ici tous les dieux.

2. Le sage Agni donne des forces (à l’homme) ; il est l’ornement (du monde), et transmet aux Immortels nos offrandes. (Dieu) opulent, amène ici vers nous tous ces dieux.

3. Le prévoyant Agni illumine le Ciel et la Terre, divins et immortels parents de la Nature. Il est magnifique ; il règne, environné d’offrandes et de mets (sacrés).

4. Agni et Indra, venez ici, dans la demeure de votre serviteur, qui a préparé les libations. (Venez) boire son soma, dieux cléments.

5. Agni, enfant de la Force, (dieu) possesseur de tous les biens, tes feux s’allument sans relâche dans le séjour des Ondes (divines)[48]. Tes (clartés) secourables embellissent les mondes.


HYMNE XX.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Enfants de Cousica[49], l’âme pleine de vénération, et (les mains) chargées d’offrandes, priant, et animés par l’espoir, nous invoquons Agni (surnommé) Vêswânara[50], dieu juste, maître du bonheur, bienfaisant, rapide, digne de notre amour.

2. Nous appelons à notre secours l’adorable, le brillant Agni, (que nous nommons) Vêswânara, Mâtariswan[51], Vrihaspati[52]; (nous invitons) à cette fête, que Manou[53] prépare pour les dieux, l’hôte sage et actif qui daigne écouter (nos prières).

3. Tel que le coursier hennissant qui s’enflamme aux feux de ses cavales, Vêswânara est d’âge en âge allumé par les enfants de Cousica. Qu’Agni, éveillé au milieu des Immortels, nous accorde une heureuse génération d’enfants vigoureux et de chevaux excellents.

4. Que les Feux rapides s’avancent, unis à l’éclat et à la force. Que les Marouts attellent leurs daims[54]. Ces (dieux) invincibles et maîtres de tous les biens ébranlent les montagnes (célestes), et répandent au loin les Ondes.

5. Les Marouts sont ornés des richesses d’Agni[55]. Invoquons ces vainqueurs irrésistibles, ces protecteurs brillants et formidables. Les généreux enfants de Roudra nous apparaissent sous la forme de la pluie ; ils font entendre leur voix pareille au rugissement du lion.

6. Unissant nos voix pieuses, nous chantons la splendeur d’Agni, ou la force des Marouts. Les sages (Marouts), portés sur leurs montures[56] aux couleurs variées, et chargés de présents, arrivent à nos sacrifices.

7. Agni naît (et s’écrie) : Je suis Djâtavédas[57] ; le beurre (sacré) forme mon œil[58], l’ambroisie de la libation ouvre ma bouche. Ma splendeur est triple[59] ; c’est moi qui ai mesuré le monde[60] ; je suis le feu toujours nouveau, l’holocauste, l’adoration. »

8. De trois sources diverses[61] (Agni) verse ses rayons les plus purs. Par sa sagesse il engendre la Prière (du matin) et la Lumière. Ses lueurs forment et agrandissent le Soleil ; il fait apparaître le Ciel et la Terre.

9. Ô Ciel et Terre, conservez cet (Agni), source intarissable (de bienfaits), qui viennent sur nous en forme de pluies fécondantes, sage gardien de nos prières, (ami) véridique initié à toutes nos œuvres, heureux à l’approche des deux grands parents[62].


HYMNE XXI.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Voilà que pour vous (s’avancent) les Mets (divins), brillants des feux (du foyer), avec la Cuiller (du sacrifice). Entouré des Libations, (Agni) monte vers les dieux.

2. J’adresse mon hymne à Agni, sage pontife, opulent bienfaiteur.

3. Divin Agni, puissions-nous dignement célébrer ta fête, et, remplis de force, vaincre nos ennemis !

4. Les feux d’Agni s’allument pour le sacrifice. Nous invoquons (le dieu) purificateur, adorable, à la brillante chevelure.

5. Agni s’entoure de larges splendeurs ; le beurre (sacré) compose sa forme ; immortel, saintement invoqué, il transporte l’holocauste du sacrifice.

6. Confondant leurs efforts, les (prêtres) apportent l’holocauste et la prière, élèvent la cuiller (sacrée) et honorent Agni en l’appelant à leur secours.

7. Dieu prêtre, immortel, il vient avec pompe pour présider au sacrifice et pour le consommer.

8. Sage et fort, il siége parmi les mets (qui donnent la force) ; il est amené au milieu des saintes cérémonies : il accomplit le sacrifice.

9. L’élu du monde devient le fruit de la Prière. La fille de Dakcha[63] reçoit le père, en qui est le germe de tous les êtres.

10. Oui, (la fille) de Dakcha, Ilâ[64], te reçoit, enfant de la Force, élu du monde, brillant Agni, avide (de nos libations).

11. Les sages, adorateurs (d’Agni), au sein du sacrifice, allument et nourrissent les feux de celui qui fait mouvoir (le monde), et précipite les eaux.

12. Je chante le sage et puissant Agni, l’enfant[65] des Mets (sacrés), qui brille et dans le sacrifice et dans le ciel.

13. Il s’enflamme, ce généreux Agni, (dieu) éclatant, adorable, digne de nos louanges, ennemi des ténèbres.

14. Le magnifique Agni, tel qu’un coursier (rapide), lance ses rayons, et transporte les dieux. Les (hommes) l’honorent par leurs holocaustes et leurs hymnes.

15. Chargés de présents, ô généreux Agni, nous allumons les feux resplendissants d’un (dieu) libéral en ses bienfaits[66].


HYMNE XXII.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètres : Gâyatrî, Ouchnih, Trichtoubh et Djagatî.)

1. Agni, (nommé) Djâtavédas, reçois avec plaisir nos offrandes et nos holocaustes du matin, ô (Dieu) qui récompenses la prière.

2. Pour toi, Agni, l’offrande a été clarifiée, et préparée soigneusement ; (Dieu) toujours jeune, reçois-la avec plaisir.

3. Ô Agni, prends cette offrande consacrée par nos invocations, et composée ce matin. Tu es le fils de la Force, siégeant dans le sacrifice.

4. Sage Djâtavédas, dans le milieu du jour, reçois avec plaisir notre hommage. Agni, tu es grand ; les prêtres par leurs œuvres élèvent ta fortune.

5. Agni, fils de la Force, dans le troisième sacrifice[67] aime notre offrande consacrée par la prière. Au milieu des dieux immortels, éveillé par nos louanges, accepte nos libations précieuses.

6. Agni, possesseur de tous les biens, développe tes feux, et reçois avec plaisir et notre invocation et notre offrande composée ce matin.


HYMNE XXIII.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètres : Anouchtoubh, Djagatî et Trichtoubh.)

1. Voici le moment d’agiter (l’Aranî), le moment d’enfanter (Agni). Apporte la reine du peuple[68] et, suivant l’antique usage, travaillons à produire (son fils).

2. Le (dieu) qui possède tous les biens est dans les deux pièces de l’Aranî ; il y est comme l’embryon au sein de sa mère, cet Agni que, chaque jour, les enfants de Manou, en s’éveillant, doivent honorer avec l’hymne et l’holocauste.

3. (Prêtre) intelligent, pousse (la pièce supérieure) dans la pièce inférieure ; et qu’à l’instant (l’Aranî) fécondée enfante (le dieu) qui remplit tous les vœux. (Cependant) reçue sur une poignée (de feuilles), l’étincelle rougeâtre a brillé, et le fils d’Ilâ[69] a paru sur le foyer.

4. Ô Agni, possesseur de tous les biens, nous te plaçons sur le sein d’Ilâ[70], sur le trône de terre, pour te charger de nos holocaustes.

5. Prêtres pieux, travaillez à produire (le dieu) sage, prudent, véridique, immortel et charmant. Enfantez Agni, le héraut du sacrifice, le premier des êtres adorables.

6. Agité avec force, il se lance comme un coursier rapide, et vient sur le bûcher briller avec éclat. Invincible dans sa voie comme le char des Aswins, il sort de la pierre qui le contient en dévorant les plantes.

7. Agni est né ; ses feux s’animent ; fort, sage, bienveillant, il est chanté par les poëtes, et les Dévas ont établi pour le sacrifice ce (dieu) adorable, qui connaît tout et qui porte l’holocauste.

8. Siége donc sur ton trône, sacrificateur intelligent, et porte notre sacrifice dans le lieu où il doit être récompensé. Agni, honore les dieux, et présente-leur l’holocauste. Réserve pour ton serviteur une large part dans tes bienfaits.

9. Ô mes amis, augmentez la masse de cette fumée. Apportez sans relâche les mets qui nourrissent cet Agni fort et victorieux, par lequel les dieux obtiennent le triomphe sur les Dasyous.

10. Voilà le berceau[71] où, dans le moment favorable, tu brilles après ta naissance. Reconnais-le, ô Agni, et viens t’y placer, pour te montrer sensible à nos vœux.

11. Tant qu’il n’est encore qu’un embryon[72], on l’appelle Tanoûnapât[73]. Une fois né, il est Narâsansa[74]. Il devient Mâtariswan[75] dès qu’il s’étend au sein de l’air, et dans sa marche se fait le créateur de Vâyou.

12. Prudent Agni, produit et placé convenablement par des (prêtres) habiles, rends-toi propice à leurs travaux. Honore les dieux au nom de leur fidèle serviteur.

13. Les Immortels ont enfanté un mortel invincible, lui sauveur vigoureux et redoutable. Dix frères[76], unissant leurs efforts, ont avec bruit applaudi à sa naissance.

14. Qu’il brille sans interruption au sein de sa mère[77] (Ilâ), le (dieu) sacrificateur chargé des sept offrandes. Il ne meurt point ; pour notre bonheur il naît chaque jour des entrailles de l’Aranî[78].

15. Des enfants de Cousica, nos anciens[79], prêtres aussi savants que guerriers redoutables, pareils à une avant-garde de Marouts, ont su pourvoir et aux prières et aux offrandes. Ils ont dans chaque maison allumé les feux d’Agni.

16. En ce jour et dans le cours de ce sacrifice, nous aussi, ô pontife intelligent, nous t’honorons. Daigne accourir vers nous, daigne nous favoriser. Tu nous connais, (dieu) sage, viens à notre soma.



  1. Ce sont les sept rayons ou les sept langues d’Agni.
  2. Il est singulier que le même mot, siti, signifie noir et blanc. Le dos d’Agni est la partie du bûcher noircie par la fumée, et sur laquelle s’élève la flamme blanche. Dans ma traduction j’ai cherché à concilier les deux sens contradictoires de l’épithète sitiprichtha.
  3. C’est-à-dire le ciel et la terre. On pourrait aussi entendre le mot mâtarô comme désignant les deux pièces de l’Aranî.
  4. Nous savons maintenant que les vaches, comme les coursiers d’Agni, ce sont les flammes.
  5. Le mot voix est ici représenté par le mot go, qui signifie la vache ; et le texte dit que la vache chemine autour d’Agni. Voy. page 44, col. 1, note 7.
  6. Je pense que le poëte personnifie les sept oblations, ou plutôt les sept mètres poétiques, et les cinq coupes du sacrifice. Il en fait autant des Richis, qui, au nombre de douze, représentent les ministres des Rites sacrés. Voy. page 53, col. 2, note 3 ; page 80, col. 1, note 6 ; page 86, col. 1, note 3.
  7. Voy. page 133, col. 1, note 9.
  8. Voy page 41, col. 2, note 3.
  9. Ce mot Ilâ pourrait tout aussi bien signifier l’hymne du sacrifice. Ilâ me semble le nom d’un pays. Voyez plus bas, page 204, col. 1, note 1.
  10. Les bois qui servent au sacrifice et les poteaux sont personnifiés par le poëte sous le nom de Vanaspati. C’est Agni, existant dans le bûcher et les pièces de bois de diverse nature employées pour le service sacré.
  11. Je pense que ce mot désigne l’Arani ; ou bien, il faut supposer que l’auteur, considérant Vanaspati comme le bois des poteaux sacrés, le regarde tantôt comme planté en terre, tantôt comme couché sur le sol.
  12. Sans doute le poteau (yoûpa) placé du côté de l’orient, où est le foyer Ahavanîya.
  13. Il serait naturel de faire rapporter ce passage au dieu Agni, naissant dans le foyer. Et cependant je crois qu’il faut l’entendre de Vanaspati, amené, sous la forme des poteaux, au milieu de l’enceinte sacrée.
  14. Littéralement ils sont Dévas.
  15. Je rends ainsi le mot Prithivi.
  16. Je suppose que par ce mot se trouvent désignés les prêtres, ou plutôt les Rites personnifiés.
  17. Les poteaux ont été érigés du côté de l’orient, et par le fait de la consécration érigés à la dignité de Dévas ; ils s’élèvent dans l’air, séjour des êtres de leur nature.
  18. Les Ondes sont les libations du sacrifice, qui nourrissent et entretiennent le feu. Voy. hymne XII, section II, lect. VI.
  19. En ce moment Agni est dans l’Aranî, invisible et présent.
  20. Le commentateur dit qu’il y a seize personnes occupées des soins du sacrifice, douze Adwaryous, qui marchent et agissent, et quatre Oudgatris, qui chantent les hymnes et restent assis.
  21. C’est-à-dire les Rites personnifiés.
  22. Les prêtres ont agité l’Aranî pour en extraire le feu, que le vent a excité de son souffle.
  23. C’est-à-dire né par le secours des hommes, vivant au milieu des hommes et pour leur avantage.
  24. Nous avons vu, page 63, col. 2, note 3, qu’il y avait trente-trois dieux, savoir les douze Adityas, les huit Vasous, les onze Roudras et les deux Aswins ; le commentateur, à la place des deux Aswins, met Indra et Pradjâpati. Ailleurs ces trente-trois dieux étaient considérés comme appartenant par tiers au ciel, à l’air et à la terre. Ici le nombre en est singulièrement augmenté, et le commentaire ne donne à ce sujet aucune explication. Je ne puis voir dans cette énumération que le résultat d’une addition dont les éléments, dans je ne sais quelle intention mystérieuse, auraient été disposés de cette manière.

    33
    303
    3003

    Le nombre de ces dieux pourrait encore être exprimé ainsi :

    303039

  25. Page 89, il est question des quatre-vingt dix fleuves dont la foudre d’Indra ouvre la source. Ailleurs ce nombre est porté à 99. Voy. ibid., page 61.
  26. Le commentaire traduit par le mot air, antarikcham.
  27. Les vents par leur souffle augmentent l’ardeur du feu.
  28. On peut donner deux sens à ces mots. Qu’Agni soit comme Manou, qui jadis dirigeait les sacrifices, ou bien qu’Agni dirigeant les sacrifices soit comme Manou, comme un homme parmi les hommes.
  29. Le commentaire nous apprend que ces trois aliments sont les trois genres de libations, le beurre (âdjya), les plantes (ochadî) et le soma. Ces trois nourritures sont appelées les mères d’Agni.
  30. Ouchasas, suivant le commentaire, est un nominatif pluriel. Je n’ai pas compris ce que pouvaient être ces trois aurores mères d’Agni. J’ai traduit comme si ouchasas était au génitif.
  31. Je pense que l’auteur fait ici allusion au trichavana, ou aux trois sacrifices de la journée. Cependant, il pourrait bien aussi parler du trivédi, de la réunion des trois foyers où siége Agni.
  32. La cérémonie sacrée s’accomplit en faisant le tour du feu de gauche à droite. Lois de Manou, liv. III, sl. 214.
  33. Ce mot signifie un dieu qui vient vers le caillé, et doit ici s’entendre du soleil. Ailleurs ce peut être Agni.
  34. Voy. page 201, col. 2, note 2.
  35. Ce sont les trois coundas des feux Ahavanîya, Dakchina et Gârhapatya. Le commentaire croit que ce sont les trois mondes.
  36. On appelle langue la flamme d’Agni, qui brille sur le triple foyer.
  37. Le commentaire donne à ces corps les noms de Pavamâna, Pâvaca et Soutchi. Voy. page 203, col. 2, note 1 ; et page 205, col. 1, note 6.
  38. C’est-à-dire toutes ces lueurs qui brillent dans les nuages.
  39. Nom du soleil.
  40. Le commentaire dit qu’Agni au ciel, c’est le feu du soleil et des astres ; sur la terre, c’est le feu Ahvanîya et les autres ; dans les plantes, c’est le feu dans l’Aranî et dans les bois du foyer ; dans les Ondes, que le commentateur prend pour les ondes des nuages, c’est le feu de la foudre, Vêdyouta.
  41. Le commentaire dit que c’est par le moyen de la fumée.
  42. Les dix doigts du prêtre.
  43. Les pièces de bois qui composent l’Aranî.
  44. On a vu, page 59, col. 2, note 3, que la fille de Manou se nommait Ilâ. On sait aussi (voy. ibid. et page 43, col. 1, note 1) que le mot Ilâ s’emploie pour désigner l’hymne et la déesse de la prière. De plus, la mythologie raconte que la terre, nommée Prithivî, fut changée en vache : or, Ilâ est encore un des noms de la terre et de la vache. Avec ces diverses acceptions données à un même mot, il est difficile de se déterminer pour le sens de cette phrase. J’ai entendu qu’il s’agissait ici du counda dans lequel est allumé le feu du sacrifice ; mais je ne serais pas étonné que le poëte, fidèle au goût de sa nation, qui aime assez les jeux de mots, eût en même temps voulu indiquer un point géographique, la terre d’Ilâ. Parmi les neuf varchas ou divisions du Djambou-Dwîpa se trouve une contrée appelée Ilâvrita. Le vers suivant complète quelques notions sur la position de cette région, également décrite dans le deuxième livre des Lois de Manou, sl. 17 et suivants, où elle est nommée Bramâvartta.
  45. La Drichadwatî est le Caggar, et la Saraswatî, la Sarsoutî. Je ne sais quelle est la rivière qui portait le nom d’Apayâ.
  46. Le mot Ilâ est encore employé ici pour signifier terre : le commentaire le rend par Outtarâvédî.
  47. Il faut se rappeler qu’Agni est considéré comme brillant au ciel et sur la terre, soit comme Aditya et Vêdyouta, soit comme Ahvanîya.
  48. Le commentateur pense que le séjour des Ondes, c’est l’air, Antarikcha. Je crois qu’il est ici question des ondes du sacrifice, des libations.
  49. Voy. page 46, col. 2, note 1. Viswâmitra est un fils de Gâdhi ; ses enfants par conséquent descendent de Cousica.
  50. Ce mot signifie ami de tous les hommes.
  51. Ce mot désigne ordinairement le vent, et se traduit par cette idée : s’agrandissant au sein de l’air. Ce sens convient également à Agni, surtout à Agni Vêdyouta, et je pense que c’est à lui qu’il faut l’appliquer ici.
  52. Vrihaspati est un nom d’Agni, et signifie maître du sacrifice étendu, comme s’il y avait Vrihatas pati.
  53. Nom générique pour signifier l’homme.
  54. Prichati ; c’est le daim porcin. Ce mot signifie aussi goutte d’eau.
  55. C’est-à-dire que les nuages, qui sont leurs formes, se colorent des flammes d’Agni.
  56. Ces daims, ces montures des Marouts, il est bien entendu que ce sont les nuages.
  57. Voy. page 69, col. 1, note 1.
  58. Le beurre jeté sur le foyer excite la flamme : c’est là l’œil d’Agni.
  59. Agni brille dans le foyer comme Tryagni dans le soleil comme Aditya dans le nuage comme Vêdyouta ou comme Vâyou. (Voy. page 204, col. 2, note 4.) De là le nom composé qu’on lui donne Agnivâyousoûrya.
  60. Agni par ses feux développe et semble créer le monde, qui au milieu des ténèbres a l’air de ne pas exister.
  61. Le texte est plus métaphorique. Il se sert du mot pavitra, qui est le vase où se met la libation. Ces trois vases doivent être le foyer sur la terre, le soleil dans le ciel, les nuages dans l’air.
  62. Agni semble jouir à la vue du ciel et de la terre. Le mot pitroh employé ici pourrait encore s’appliquer aux bois de l’Aranî, qui ont produit le feu, et qui sont placés non loin du foyer.
  63. Dakcha est un personnage que nous avons déjà vu deux fois pages 94, col. 2, note 2, et 181, col. 1, note 1. Il semble y être présenté comme un Aditya, autrement dit comme une forme du Soleil ou d’Agni. J’ai dit que je regardais Dakcha comme une personnification du sacrifice, ou plutôt d’une partie du sacrifice ; je pensais que c’était la donation, à cause du mot dakchinâ, qui signifie présent. Mais, réflexion faite, je crois que Dakcha est la force industrielle, l’adresse, l’art employé dans le sacrifice. L’art s’occupe à former de terre le foyer dans lequel Agni doit naître et grandir. Ce foyer, appelé Ilâ ou la terre, est considéré comme enfant de Dakcha. Ce Dakcha, suivant les mythologues postérieurs, est né du pouce de Brahmâ : ces mythologues, en adoptant les idées allégoriques des Védas, les ont continuées sur un autre plan. Brahmâ, dans l’origine, était Agni ou le sacrifice ; un être né de son pouce semble devoir être l’adresse intelligente personnifiée. Dakcha est devenu un personnage important dans le Sivaïsme : sa fille y est la femme de Siva, Satî, et ensuite Pârvati. Il sera sans doute fort curieux d’étudier ces deux mythes, et de suivre leur transformation. Il y a quelques différences d’attributions, que les changements de croyance et de rites ont amenées. Le personnage de Dakcha indique dans l’histoire des religions indiennes une époque importante.
  64. Ce mot doit ici signifier terre. Voy. page 204, col. 1, note 1.
  65. Le mot sanscrit est napât, qui veut dire petit-fils ; et à ce sujet le commentaire donne au dieu Agni une généalogie singulière. De la nourriture sacrée (Annam) naît l’oblation (Ahouti) ; de l’oblation, Aditya ; d’Aditya, Agni. Il est d’autres généalogies différemment présentées, mais tout aussi arbitrairement.
  66. Ce vers renferme le mot vrichan répété trois fois. C’est un ornement de style dans cette langue.
  67. Cette espèce de sacrifice porte le nom de Savana. Il y en a trois, le matin, à midi et le soir.
  68. Vispati. Agni s’appelle aussi Vispani, protecteur du peuple. L’Aranî, sa mère, peut bien porter le même nom. Voyez page 47, col. 1, note 2 ; page 57, col. 1, note 4 ; et page 147, col. 1, note 7.
  69. C’est-à-dire de la terre, dont se compose le foyer, Agni, siégeant sur ce foyer, est appelé enfant de la terre. Voy. page 204, col. 1, notes 1 et 3.
  70. Ilâpadé, ou Ilâyâhpadé. Le commentaire donne, comme synonyme de ce mot, Gopadé, qui littéralement se traduirait par pied de vache. Ilâ (terre) prendrait le même sens du mot go (vache) : car nous avons vu (page 44, col. 1, note 7) que ce mot go s’emploie pour tout ce qui donne un avantage, pour la chose qui fournit une espèce de lait. La terre est donc une vache, et, avec cette explication, le mot go peut remplacer le mot Ilâ. Mais l’imagination du commentateur, dans l’union des mots go et pada, perd de vue le côté métaphorique, et ne trouve ici que le sens matériel, en sorte que le mot Ilâpadé, il le traduit par cette idée, ayant la forme d’un pied de vache (Gopadaroûpé). Je ne sais pas si l’Outtaravêdi, qui recevait le feu du sacrifice, avait réellement quelque rapport avec le pied de la vache. Je pense que le mot pada doit être ramené au sens de place, station, établissement, ou, si pada doit conserver le sens de pied, je serais porté à traduire nâbhô ilâpadé par le foyer au pied de terre. Cependant j’ai cru aussi que le poëte avait voulu personnifier la terre sous le nom d’Ilâ ; et c’est ce qui m’a déterminé dans la traduction que j’ai donnée. À cette occasion j’exprimerai timidement une idée qui m’est particulière : il me semble avoir reconnu dans quelques parties du mythe d’Agni celui de Bacchus. Dans la circonstance présente, Agni au sein d’Ilâ, n’est-ce pas Bacchus dans les bras de Proserpine ?
  71. Le texte dit : la matrice (yoni). C’est un nom de foyer. Le commentaire croit que c’est l’Aranî.
  72. Garbha âsoura. Il paraît que l’Aranî porte le nom d’Asoura, parce qu’elle lance des rayons, asyati rasmîn.
  73. Voy. page 47, col. 2, note 3.
  74. Voy. page 48, col. 1, note 1.
  75. Voy. page 204, col. 2, note 4.
  76. Ce sont les dix doigts qui ont concouru à le tirer de l’Aranî, et qui travaillent encore à l’arroser de libations. Le texte se servant d’un mot féminin, a mis dix sœurs au lieu de dix frères.
  77. Le commentaire explique le mot mâtouh par Prithivyah. Ce mot peut quelquefois s’entendre de la personne qui a préparé, mesuré, le sacrifice.
  78. Asourasya djtharât. Le commentateur entend ces mots de l’Aranî, et pense que l’on désigne ainsi le bois dont elle est formée, câchtham Aranîroûpam. Voy. même page, col. 1, note 2.
  79. Je n’ai pu adopter le sens du commentateur, qui suppose que les Cousicas étaient les premiers-nés de Brahmâ. J’ai pensé que brahmanah était un génitif qui signifiait science sacrée.