Roméo et Juliette/Traduction Hugo, 1868/Scène XV

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Roméo et Juliette/Traduction Hugo, 1868
Traduction par François-Victor Hugo.
Œuvres complètes de ShakespearePagnerre7 (p. 326-328).
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Scène XV.


[Dans la maison de Capulet.]


Entrent Capulet, lady Capulet et Pâris.
capulet.

— Les choses ont tourné si malheureusement, messire, — que nous n’avons pas eu le temps de disposer notre fille. — C’est que, voyez-vous, elle aimait chèrement son cousin Tybalt, — et moi aussi… Mais quoi ! nous sommes nés pour mourir. — Il est très-tard ; elle ne descendra pas ce soir. — Je vous promets que, sans votre compagnie, — je serais au lit depuis une heure.

pâris.

— Quand la mort parle, ce n’est pas pour l’amour le moment de parler. — Madame, bonne nuit : présentez mes hommages à votre fille.

lady capulet.

— Oui, messire, et demain de bonne heure je connaîtrai sa pensée. — Ce soir elle est cloîtrée dans sa douleur.

capulet.

— Sire Pâris, je puis hardiment vous offrir — l’amour de ma fille ; je pense qu’elle se laissera diriger — par moi en toutes choses ; bien plus, je n’en doute pas… — Femme, allez la voir avant d’aller au lit ; — apprenez-lui l’amour de mon fils Pâris, — et dites-lui, écoutez bien, que mercredi prochain… — Mais doucement ! Quel jour est-ce ?

paris.

Lundi, monseigneur.

capulet.

— Lundi ? hé ! hé ! alors, mercredi est trop tôt. — Ce sera pour jeudi… dites-lui que jeudi — elle sera mariée à ce noble comte. — Serez-vous prêt ? Cette hâte vous convient-elle ? — Nous ne ferons pas grand fracas : un ami ou deux ! — Car, voyez-vous, le meurtre de Tybalt étant si récent, — on pourrait croire que nous nous soucions fort peu — de notre parent, si nous faisions de grandes réjouissances. — Conséquemment, nous aurons une demi-douzaine d’amis, et ce sera tout. Mais que dites-vous de jeudi ?

pâris.

— Monseigneur, je voudrais que jeudi fût demain.

capulet.

— Bon ; vous pouvez partir… — Ce sera pour jeudi, alors. — Vous, femme, allez voir Juliette avant d’aller au lit, — et préparez-la pour la noce… — Adieu, messire… De la lumière dans ma chambre, holà ! — Ma foi, il est déjà si tard — qu’avant peu il sera de bonne heure… Bonne nuit.

Ils sortent.