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Société asiatique/séances/1895/8 février

La bibliothèque libre.
Société asiatique (Paris, France)
Journal asiatiquesérie 9, tome 5 et 6 (p. 169-171).
SÉANCE DU 8 FÉVRIER 1895.

La séance est ouverte à 4 heures et demie, sous la présidence de M. Barbier de Meynard.

Lecture est donnée du procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

M. le Président communique à la Société une circulaire du Ministère de l’instruction publique invitant toutes les sociétés savantes de France à indiquer au Ministère les dates de fondation, d’autorisation et, s’il y a lieu, de reconnaissance légale de chacune d’elles.

Est reçu membre de la Société :

M. Thureau-Dangin (François), élève de l’École des hautes études, demeurant à Paris, rue Garancière, 11 ; présenté par MM. Halévy et Carra de Vaux.

M. le Président présente l’ouvrage de M. Basset, intitulé : Notice sommaire de deux bibliothèques de Lisbonne ; il signale la richesse des renseignements et l’utilité des indications bibliographiques fournies par l’auteur.

M. Drouin présente, au nom de M. Allan Cunningham, de Londres, les trois parties d’un important mémoire du major général Sir A. Cunningham, son père, sur les derniers Indo-Scythes (later Indo-Scythians) ; ce mémoire est la réimpression d’articles qui ont paru dans le Numismatic Chronicle. Le Président exprime les remerciements de la Société pour l’envoi de cet ouvrage.

M. Barbier de Meynard étant obligé de partir avant la fin de la séance, M. Senart prend la présidence.

M. Senart présente à la Société une notice de M. Cordier sur M. James Darmesteter ; cette notice, rédigée en anglais, a paru dans le Journal de la Société asiatique de Londres.

M. l’abbé J.-B. Chabot présente un livre qu’il vient de publier : l’Histoire de Mar Jabalaka III, patriarche nestorien (1281-1311), et du moine Rabban Çauma, ambassadeur du roi Argoun en Occident (1287). M. Rubens Duval rendra prochainement compte de cet ouvrage dans le Journal asiatique.

M. Senart offre à la Société les moulages des pierres sur lesquelles sont gravées les inscriptions, la plupart en caractères inconnus, découvertes par le major Deane et publiées par M. Senart lui-même dans les cahiers de septembre-octobre et de novembre-décembre 1894 du Journal asiatique. Les originaux se trouvent au musée de Lahore.

M. Halévy présente les considérations suivantes sur quatre noms sémitiques dont l’interprétation a rencontré jusqu’ici de sérieuses difficultés. Ce sont les noms d’homme Heyân et Panthéra, le nom de dieu Šadrapa et le nom de mois Nissan.

M. Max Müller, de Philadelphie, a signalé dernièrement dans les inscriptions égyptiennes le nom d’un roi hyksos écrit Ḥeyân. M. Halévy y voit le roi nommé Ἰάννας par Manéthon et le rapproche du nom du roi de Sam’al, Hayân, fils de Gabbaru, qui est purement sémitique. Il fait remarquer que le sémitisme de la dynastie des Hyksos a été dégagé par lui à l’aide du nom d’un autre roi de cette dynastie, Pachnan, dans lequel il a supposé l’article égyptien pa et le nom du pays de Chanaan, qui est naturellement hébréo-phénicien.

Le nom de Panthéra ou Panthéris a été donné au père de Jésus par les Juifs. C’est pure malveillance de leur part, disent les pères de l’Église. M. Halévy montre, au contraire, qu’on reconnaît dans ce nom le mot targumique Panthérin (פנטרין) qui désigne la pierre précieuse appelée Iašphé (ישפה), en hébreu. Par suite de l’analogie des mots Joseph et Jasphé, ceux qui s’appelaient Joseph avaient souvent leur nom aramaïsé sous la forme de Panthérin.

Le dieu écrit en araméen Šadrapa (שדרפא) est orthographié en grec Ξαθράπης. D’après M. Halévy, c’est le dieu assyrien Nusku qui est le gouverneur de plusieurs dieux, notamment de Bel et d’Anou.

M. Halévy rappelle enfin que la néoménie du premier mois de l’année assyro-babylonienne était la plus grande fête de l’année, ou, comme le disaient les Babyloniens, isinnu rabu « un grand isinnu » ; il est donc probable que le mot isinnu a précisément formé le nom de Nisannu ou Nisinnu qui désigne ce mois.

Après quelques observations de MM. Rubens Duval et de Charencey au sujet de cette communication, la séance est levée à 5 heures et demie.