« Page:Rugendas - Voyage pittoresque dans le Brésil, fascicule 18, trad Golbéry, 1827.djvu/4 » : différence entre les versions

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fin de Septembre à la fin d’Octobre, et pendant ce temps il n’est rien qu on ne fasse pour conserver les Nègres en bonne humeur et en bonne santé ; aussi y a-t-il dans les commencemens beaucoup de gaieté et beaucoup de bruit ; mais peu à peu la continuité du travail épuise les esclaves et surtout ceux des (engenhos) moulins à sucre, et même leur fatigue devient telle qu’ils s’endorment en quelque lieu qu’ils se trouvent, d’où est venue cette locution : he dorminhoço como negro de engenho (il a sommeil comme un Nègre du moulin à sucre). Il arrive très-souvent que cet épuisement donne lieu à des malheurs : soit que la main, soit que les vêtemens du Nègre chargé de placer les cannes à sucre entre les cylindres, s’y prennent ; le bras et quelquefois le corps entier sont alors écrasés, à moins qu’il n’y soit porté secours sur-le-champ. Dans quelques plantations on voit a coté de la machine une forte barre de fer, que l’on introduit entre les cylindres pour les arrêter en pareil cas ou pour les séparer. Néanmoins il n’y a souvent d’autre moyen de sauver le malheureux que de lui couper promptement avec une hache le doigt, la main, ou le bras qui se trouvent engagés dans les cylindres. On pense généralement qu’il y a moins de danger quand la machine est mue par des bœufs que quand on y emploie des mulets, que le cri des Nègres effarouche et qui n’en tournent que plus rapidement, tandis que les bœufs s arrêtent d eux-memes.

La nourriture donnée par les maîtres aux esclaves consiste en farine de manioc (farinha da mandioccà), ou fèves de marais (feixaos), en viandes séchées au soleil (carne secca), en lard et en bananes. Il est plus avantageux de leur abandonner le soin de préparer leurs alimens eux-mêmes dans les champs, que de leur faire perdre beaucoup de temps à revenir, pour chaque repas, de plantations souvent trèséloignées jusqu’au logis ; aussi cela se pratique-t-il ainsi en un grand nombre d’endroits. En général, on leur donne leur nourriture avec beaucoup de parcimonie, et elle suffirait à peine à leur entretien, s’ils n’avaient les moyens de se procurer encore différens comestibles, tels que des fruits, des légumes sauvages, ou même du gibier.

Le dimanche, ou aux jours de fêtes, qui sont tellement nombreux qu’ils absorbent plus de cent jours de l’année, les esclaves sont dispensés de travailler pour leurs maîtres, ils peuvent ou se reposer ou bien s’occuper pour leur propre compte. Il y a dans chaque plantation une étendue de terrain proportionnée à son importance ; le maître ne s’en sert point, l’abandonne à ses esclaves, et chacun en cultive autant qu’il le veut ou qu’il le peut : non-seulement l’esclave se procure une nourriture saine et suffisante par le produit de ces champs, mais il trouve souvent à le vendre avantageusement. Ainsi