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ans. Après avoir été riche dans son enfance, il est devenu pauvre |
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ans. Après avoir été riche dans son enfance, il est devenu pauvre |
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dans sa jeunesse; il a habité des palais de passage, à présent il est |
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dans sa jeunesse; il a habité des palais de passage, à présent il est |
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presque dans un grenier. Son père a été un vainqueur de l'Europe et |
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presque dans un grenier. Son père a été un vainqueur de l’Europe et |
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est maintenant un brigand de la Loire. Chute, ruine, pauvreté. Cet |
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est maintenant un brigand de la Loire. Chute, ruine, pauvreté. Cet |
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homme, qui a vingt ans, trouve cela tout simple, et travaille. |
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homme, qui a vingt ans, trouve cela tout simple, et travaille. |
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Travailler, cela fait qu'on aime; aimer, cela fait qu'on se marie. |
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Travailler, cela fait qu’on aime; aimer, cela fait qu’on se marie. |
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L'amour et le travail, les deux meilleurs points de départ pour la
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L’amour et le travail, les deux meilleurs points de départ pour la |
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famille; il lui en vient une. Le voilà avec des enfants. Il prend au |
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famille; il lui en vient une. Le voilà avec des enfants. Il prend au |
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sérieux toute cette aurore. La mère nourrit l'enfant, le père nourrit |
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sérieux toute cette aurore. La mère nourrit l’enfant, le père nourrit |
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la mère. Plus de bonheur demande plus de travail. Il passait les |
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la mère. Plus de bonheur demande plus de travail. Il passait les |
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jours à la besogne, il y passera les nuits. Qu'est-ce qu'il fait? peu |
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jours à la besogne, il y passera les nuits. Qu’est-ce qu’il fait? peu |
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importe. Un travail quelconque. |
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importe. Un travail quelconque. |
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Sa vie est rude, mais douce. Le soir, avant de se mettre à l'œuvre |
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Sa vie est rude, mais douce. Le soir, avant de se mettre à l’œuvre |
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jusqu'à l'aube, il se couche à terre et les petits montent sur lui,
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jusqu’à l’aube, il se couche à terre et les petits montent sur lui, |
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riant, chantant, bégayant, jouant. Ils sont quatre, deux garçons et |
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riant, chantant, bégayant, jouant. Ils sont quatre, deux garçons et |
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deux filles. |
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deux filles. |
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Les années passent, les enfants grandissent, l'homme mûrit. Avec le |
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Les années passent, les enfants grandissent, l’homme mûrit. Avec le |
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travail un peu d'aisance lui est venue. Il habite dans de l'ombre et |
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travail un peu d’aisance lui est venue. Il habite dans de l’ombre et |
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dans de la verdure, aux Champs-Élysées. Il reçoit là des visites de |
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dans de la verdure, aux Champs-Élysées. Il reçoit là des visites de |
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quelques travailleurs pauvres comme lui, d'un vieux chansonnier appelé |
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quelques travailleurs pauvres comme lui, d’un vieux chansonnier appelé |
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Béranger, d'un vieux philosophe appelé Lamennais, d'un vieux proscrit |
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Béranger, d’un vieux philosophe appelé Lamennais, d’un vieux proscrit |
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appelé Chateaubriand. Il vit dans cette retraite, rêveur, s'imaginant |
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appelé Chateaubriand. Il vit dans cette retraite, rêveur, s’imaginant |
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que les Champs-Élysées sont une solitude, destiné pourtant à la vraie |
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que les Champs-Élysées sont une solitude, destiné pourtant à la vraie |
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solitude plus tard. S'il écoute, il n'entend que des chants. Entre les |
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solitude plus tard. S’il écoute, il n’entend que des chants. Entre les |
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arbres et lui, il y a les oiseaux; entre les hommes et lui, il y a les |
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arbres et lui, il y a les oiseaux; entre les hommes et lui, il y a les |
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enfants. |
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enfants. |
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La mère leur apprend à lire; lui, il leur apprend à écrire. |
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La mère leur apprend à lire; lui, il leur apprend à écrire. |
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Quelquefois il écrit en même temps qu'eux sur la même table, eux des |
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Quelquefois il écrit en même temps qu’eux sur la même table, eux des |
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alphabets et des jambages, lui autre chose; et, pendant qu'ils font |
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alphabets et des jambages, lui autre chose; et, pendant qu’ils font |
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lentement et gravement des jambages et des alphabets, il expédie une |
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lentement et gravement des jambages et des alphabets, il expédie une |
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page rapide. Un jour, le plus jeune des deux garçons, qui a quatre |
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page rapide. Un jour, le plus jeune des deux garçons, qui a quatre |
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ans, s'interrompt, pose la plume, regarde son père écrire, et lui dit: |
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ans, s’interrompt, pose la plume, regarde son père écrire, et lui dit: |
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C'est drôle, quand on a de petites mains, on écrit tout gros, et
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C’est drôle, quand on a de petites mains, on écrit tout gros, et |
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quand on a de grosses mains, on écrit tout petit. |
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quand on a de grosses mains, on écrit tout petit. |
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Au père maître d'école succède le collège. Le père pourtant tient |
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Au père maître d’école succède le collège. Le père pourtant tient |
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à mêler au collège la famille, estimant qu'il est bon que les |
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à mêler au collège la famille, estimant qu’il est bon que les |
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adolescents soient le plus longtemps possible des enfants. Arrive, |
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adolescents soient le plus longtemps possible des enfants. Arrive, |
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pour ces petits à leur tour, la vingtième année; le père alors n'est |
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pour ces petits à leur tour, la vingtième année; le père alors n’est |
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plus qu'une espèce d'aîné; car la jeunesse finissante et la jeunesse |
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plus qu’une espèce d’aîné; car la jeunesse finissante et la jeunesse |
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commençante fraternisent, ce qui adoucit la mélancolie de l'une et |
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commençante fraternisent, ce qui adoucit la mélancolie de l’une et |
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tempère l'enthousiasme de l'autre. |
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tempère l’enthousiasme de l’autre. |
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Ces enfants deviennent des hommes; et alors il se trouve que ce sont |
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Ces enfants deviennent des hommes; et alors il se trouve que ce sont |
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des esprits. L'un, le premier-né, est un esprit alerte et vigoureux; |
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des esprits. L’un, le premier-né, est un esprit alerte et vigoureux; |
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l'autre, le second, est un esprit aimable et grave. La lutte du
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l’autre, le second, est un esprit aimable et grave. La lutte du |
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progrès veut des intelligences de deux sortes, les fortes et les |
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progrès veut des intelligences de deux sortes, les fortes et les |
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douces: le premier ressemble plus à l'athlète, le second à l'apôtre. |
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douces: le premier ressemble plus à l’athlète, le second à l’apôtre. |
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Leur père ne s'étonne pas d'être de plain-pied avec ces jeunes hommes; |
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Leur père ne s’étonne pas d’être de plain-pied avec ces jeunes hommes; |
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et, en effet, comme on vient de le dire, il les sent frères autant que |
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et, en effet, comme on vient de le dire, il les sent frères autant que |
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fils. |
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fils. |
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Eux aussi, comme a fait leur père, ils prennent leur jeunesse avec |
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Eux aussi, comme a fait leur père, ils prennent leur jeunesse avec |
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probité, et, voyant leur père travailler, ils travaillent. A quoi? |
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probité, et, voyant leur père travailler, ils travaillent. A quoi? |
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A leur siècle. Ils travaillent à l'éclaircissement des problèmes, |
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A leur siècle. Ils travaillent à l’éclaircissement des problèmes, |
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à l'adoucissement des âmes, à l'illumination des consciences, à la |
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à l’adoucissement des âmes, à l’illumination des consciences, à la |
|
vérité, à la liberté. Leurs premiers travaux sont récompensés; ils |
|
vérité, à la liberté. Leurs premiers travaux sont récompensés; ils |
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sont décorés de bonne heure, l'un de six mois de prison, pour avoir |
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sont décorés de bonne heure, l’un de six mois de prison, pour avoir |
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combattu l'échafaud, l'autre de neuf mois, pour avoir défendu le droit |
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combattu l’échafaud, l’autre de neuf mois, pour avoir défendu le droit |
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d'asile. Disons-le en passant, le droit d'asile est mal vu. Dans un
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d’asile. Disons-le en passant, le droit d’asile est mal vu. Dans un |
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pays voisin, il est d'usage que le ministre de l'intérieur ait un fils |
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pays voisin, il est d’usage que le ministre de l’intérieur ait un fils |
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qui organise des bandes chargées des assauts nocturnes aux partisans |
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qui organise des bandes chargées des assauts nocturnes aux partisans |
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du droit d'asile; si le fils ne réussit pas comme bandit, le père |
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du droit d’asile; si le fils ne réussit pas comme bandit, le père |
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réussit comme ministre; et celui qu'on n'a pu assassiner, on |
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réussit comme ministre; et celui qu’on n’a pu assassiner, on |
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l'expulse. De cette façon, la société est sauvée. En France, en
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l’expulse. De cette façon, la société est sauvée. En France, en |
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1851, pour mettre à la raison ceux qui défendent les vaincus et les |
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1851, pour mettre à la raison ceux qui défendent les vaincus et les |
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proscrits, on n'avait recours ni à la lapidation, ni à l'expulsion, on |
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proscrits, on n’avait recours ni à la lapidation, ni à l’expulsion, on |
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se contentait de la prison. Les mœurs des gouvernements diffèrent. |
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se contentait de la prison. Les mœurs des gouvernements diffèrent. |
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Les deux jeunes hommes vont en prison; ils y sont ensemble; le père |
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Les deux jeunes hommes vont en prison; ils y sont ensemble; le père |
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s'y installe presque avec eux, faisant de la Conciergerie sa maison.
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s’y installe presque avec eux, faisant de la Conciergerie sa maison. |
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Cependant son tour vient à lui aussi. Il est forcé de s'éloigner |
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Cependant son tour vient à lui aussi. Il est forcé de s’éloigner |
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de France, pour des causes qui, si elles étaient rappelées ici, |
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de France, pour des causes qui, si elles étaient rappelées ici, |
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troubleraient le calme de ces pages. Dans la grande chute de tout, |
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troubleraient le calme de ces pages. Dans la grande chute de tout, |
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qui survient alors, le commencement d'aisance ébauché par son travail |
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qui survient alors, le commencement d’aisance ébauché par son travail |
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s'écroule; il faudra qu'il recommence; en attendant, il faut qu'il
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s’écroule; il faudra qu’il recommence; en attendant, il faut qu’il |
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parte. Il part. Il s'éloigne par une nuit d'hiver. La pluie, la bise, |
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parte. Il part. Il s’éloigne par une nuit d’hiver. La pluie, la bise, |
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la neige, bon apprentissage pour une âme, à cause de la ressemblance |
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la neige, bon apprentissage pour une âme, à cause de la ressemblance |
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de l'hiver avec l'exil. Le regard froid de l'étranger s'ajoute |
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de l’hiver avec l’exil. Le regard froid de l’étranger s’ajoute |
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utilement au ciel sombre; cela trempe un cœur pour l'épreuve. Ce père |
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utilement au ciel sombre; cela trempe un cœur pour l’épreuve. Ce père |
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s'en va, au hasard, devant lui, sur une plage déserte, au bord de
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s’en va, au hasard, devant lui, sur une plage déserte, au bord de |
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la mer. Au moment où il sort de France, ses fils sortent de prison, |
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la mer. Au moment où il sort de France, ses fils sortent de prison, |
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coïncidence heureuse, de façon qu'ils peuvent le suivre; il avait |
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coïncidence heureuse, de façon qu’ils peuvent le suivre; il avait |
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partagé leur cellule, ils partagent sa solitude. |
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partagé leur cellule, ils partagent sa solitude. |
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On vit ainsi. Les années passent. Que font-ils pendant ce temps-là? |
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On vit ainsi. Les années passent. Que font-ils pendant ce temps-là? |
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Une chose simple, leur devoir. De quoi se compose pour eux le devoir? |
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Une chose simple, leur devoir. De quoi se compose pour eux le devoir? |
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de ceci: Persister. C'est-à-dire servir la patrie, l'aimer, la |
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de ceci: Persister. C’est-à-dire servir la patrie, l’aimer, la |
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glorifier, la défendre; vivre pour elle et loin d'elle; et, parce |
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glorifier, la défendre; vivre pour elle et loin d’elle; et, parce |
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qu'on est pour elle, lutter, et, parce qu'on est loin d'elle,
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qu’on est pour elle, lutter, et, parce qu’on est loin d’elle, |
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souffrir. |
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souffrir. |
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Servir la patrie est une moitié du devoir, servir l'humanité est |
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Servir la patrie est une moitié du devoir, servir l’humanité est |
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l'autre moitié; ils font le devoir tout entier. Qui ne le fait pas
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l’autre moitié; ils font le devoir tout entier. Qui ne le fait pas |
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tout entier, ne le fait pas, telle est la jalousie de la conscience. |
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tout entier, ne le fait pas, telle est la jalousie de la conscience. |
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Comment servent-ils l'humanité? en étant de bon exemple. |
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Comment servent-ils l’humanité? en étant de bon exemple. |
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Ils ont une mère, ils la vénèrent; ils ont une sœur morte, ils la |
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Ils ont une mère, ils la vénèrent; ils ont une sœur morte, ils la |
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pleurent; ils ont une sœur vivante, ils l'aiment; ils ont un père |
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pleurent; ils ont une sœur vivante, ils l’aiment; ils ont un père |
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proscrit, ils l'aident. A quoi? à porter la proscription. Il y a des |
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proscrit, ils l’aident. A quoi? à porter la proscription. Il y a des |
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heures où cela est lourd. Ils ont des compagnons d'adversité, ils |
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heures où cela est lourd. Ils ont des compagnons d’adversité, ils |
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se font leurs frères; et à ceux qui n'ont plus le ciel natal, ils |
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se font leurs frères; et à ceux qui n’ont plus le ciel natal, ils |
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montrent du doigt l'espérance, qui est le fond du ciel de tous les |
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montrent du doigt l’espérance, qui est le fond du ciel de tous les |
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hommes. Il y a parfois dans ce groupe intrépide de vaincus des |
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hommes. Il y a parfois dans ce groupe intrépide de vaincus des |
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instants de poignante angoisse. On en voit un qui se dresse la nuit |
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instants de poignante angoisse. On en voit un qui se dresse la nuit |
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pour saigner. Ces deux jeunes bannis sont fermes et simples. Dans ces |
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pour saigner. Ces deux jeunes bannis sont fermes et simples. Dans ces |
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ténèbres, ils brillent; dans cette nostalgie, ils persévèrent; dans ce |
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ténèbres, ils brillent; dans cette nostalgie, ils persévèrent; dans ce |
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désespoir, ils chantent. Pendant qu'un homme, en ce moment-là empereur |
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désespoir, ils chantent. Pendant qu’un homme, en ce moment-là empereur |
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des français et des anglais, vit dans sa demeure triomphale, baisé |
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des français et des anglais, vit dans sa demeure triomphale, baisé |
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des reines, vainqueur, tout-puissant et lugubre, eux, dans la maison |
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des reines, vainqueur, tout-puissant et lugubre, eux, dans la maison |
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d'exil inondée d'écume, ils rient et sourient. Ce maître du monde et
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d’exil inondée d’écume, ils rient et sourient. Ce maître du monde et |
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de la minute a la tristesse de la prospérité misérable; eux, ils ont |
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de la minute a la tristesse de la prospérité misérable; eux, ils ont |
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la joie du sacrifice. Ils ne sont pas abandonnés d'ailleurs; ils ont |
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la joie du sacrifice. Ils ne sont pas abandonnés d’ailleurs; ils ont |
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d'admirables amis: Vacquerie, le puissant et superbe esprit; Meurice,
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d’admirables amis: Vacquerie, le puissant et superbe esprit; Meurice, |
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la grande âme douce; Ribeyrolles, le vaillant cœur. Ces deux frères |
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la grande âme douce; Ribeyrolles, le vaillant cœur. Ces deux frères |
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sont dignes de ces fiers hommes-là. Aucune sérénité n'éclipse la |
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sont dignes de ces fiers hommes-là. Aucune sérénité n’éclipse la |
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leur; que la destinée fasse ce qu'elle voudra, ils ont l'insouciance |
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leur; que la destinée fasse ce qu’elle voudra, ils ont l’insouciance |
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héroïque des consciences heureuses. L'aîné, à qui l'on parle de |
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héroïque des consciences heureuses. L’aîné, à qui l’on parle de |
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l'exil, répond: Cela ne me regarde pas . Ils prennent avec cordialité
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l’exil, répond: Cela ne me regarde pas . Ils prennent avec cordialité |
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leur part de l'agonie qui les entoure; ils pansent dans toutes les |
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leur part de l’agonie qui les entoure; ils pansent dans toutes les |
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âmes la plaie rongeante que fait le bannissement. Plus la patrie est |
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âmes la plaie rongeante que fait le bannissement. Plus la patrie est |
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absente, plus elle est présente, hélas! Ils sont les points d'appui de |
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absente, plus elle est présente, hélas! Ils sont les points d’appui de |
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ceux qui chancellent; ils déconseillent les concessions que le mal du |
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ceux qui chancellent; ils déconseillent les concessions que le mal du |
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pays pourrait suggérer à quelques pauvres êtres désorientés. En même |
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pays pourrait suggérer à quelques pauvres êtres désorientés. En même |
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temps, ils répugnent à l'écrasement de leurs ennemis, même infâmes. Il |
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temps, ils répugnent à l’écrasement de leurs ennemis, même infâmes. Il |
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arrive un jour qu'on découvre, dans ce campement de proscrits, dans |
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arrive un jour qu’on découvre, dans ce campement de proscrits, dans |
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cette famille d'expatriés, un homme de police, un traître affectant |
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cette famille d’expatriés, un homme de police, un traître affectant |
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l'air farouche, un agent de Maupas affublé du masque d'Hébert; toutes
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l’air farouche, un agent de Maupas affublé du masque d’Hébert; toutes |
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ces probités indignées se soulèvent, on veut tuer le misérable, les |
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ces probités indignées se soulèvent, on veut tuer le misérable, les |
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deux frères lui sauvent la vie. Qui use du droit de souffrance peut |
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deux frères lui sauvent la vie. Qui use du droit de souffrance peut |
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user du droit de clémence. Autour d'eux, on sent que ces jeunes hommes |
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user du droit de clémence. Autour d’eux, on sent que ces jeunes hommes |
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ont la foi, la vraie, celle qui se communique. De là, une certaine |
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ont la foi, la vraie, celle qui se communique. De là, une certaine |
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autorité mêlée à leur jeunesse. Le proscrit pour la vérité est un |
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autorité mêlée à leur jeunesse. Le proscrit pour la vérité est un |
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honnête homme dans l'acception hautaine du mot; ils ont cette grave |
|
honnête homme dans l’acception hautaine du mot; ils ont cette grave |
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honnêteté-là. Toute défaillance à côté d'eux est impossible; ils |
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honnêteté-là. Toute défaillance à côté d’eux est impossible; ils |
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offrent leur robuste épaule à tous les accablements. Toujours debout |
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offrent leur robuste épaule à tous les accablements. Toujours debout |
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sur le haut de l'écueil, ils fixent sur l'énigme et sur l'ombre leur |
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sur le haut de l’écueil, ils fixent sur l’énigme et sur l’ombre leur |
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regard tranquille, ils font le signal d'attente dès qu'ils voient |
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regard tranquille, ils font le signal d’attente dès qu’ils voient |
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une lueur poindre à l'horizon, ils sont les vigies de l'avenir. Ils |
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une lueur poindre à l’horizon, ils sont les vigies de l’avenir. Ils |
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répandent dans cette obscurité on ne sait quelle clarté d'aurore, |
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répandent dans cette obscurité on ne sait quelle clarté d’aurore, |
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silencieusement remerciés par la douceur sinistre des résignés. |
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silencieusement remerciés par la douceur sinistre des résignés. |
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En même temps qu'ils accomplissent la loi de fraternité, ils exécutent |
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En même temps qu’ils accomplissent la loi de fraternité, ils exécutent |
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la loi du travail. |
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la loi du travail. |
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L'un traduit Shakespeare, et restitue à la France, dans un livre de
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L’un traduit Shakespeare, et restitue à la France, dans un livre de |
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sagace peinture et d'érudition élégante, «la Normandie inconnue». |
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sagace peinture et d’érudition élégante, «la Normandie inconnue». |
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L'autre publie une série d'ouvrages solides et exquis, pleins d'une
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L’autre publie une série d’ouvrages solides et exquis, pleins d’une |
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émotion vraie, d'une bonté pénétrante, d'une haute compassion. Ce |
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émotion vraie, d’une bonté pénétrante, d’une haute compassion. Ce |
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jeune homme est tout simplement un grand écrivain. Comme tous les |
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jeune homme est tout simplement un grand écrivain. Comme tous les |
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puissants et abondants esprits, il produit vite, mais il couve |
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puissants et abondants esprits, il produit vite, mais il couve |
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préméditation que recommande Horace, et qui est la source des |
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préméditation que recommande Horace, et qui est la source des |
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improvisations durables. Son début dans le conte visionnaire (1856) |
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improvisations durables. Son début dans le conte visionnaire (1856) |
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est un chef-d'œuvre. Il le dédie à Voltaire, et, détail qui montre la |
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est un chef-d’œuvre. Il le dédie à Voltaire, et, détail qui montre la |
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magnifique envergure de ce jeune esprit, il eût pu en même temps le |
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magnifique envergure de ce jeune esprit, il eût pu en même temps le |
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dédier à Dante. Il a l'ironie comme Arouet et la foi comme Alighieri. |
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dédier à Dante. Il a l’ironie comme Arouet et la foi comme Alighieri. |
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Son début au théâtre (1859) est un chef-d'œuvre aussi, mais un |
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Son début au théâtre (1859) est un chef-d’œuvre aussi, mais un |
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chef-d'œuvre petit, un badinage de penseur, vivant, fuyant, rapide, |
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chef-d’œuvre petit, un badinage de penseur, vivant, fuyant, rapide, |
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inoubliable, comédie légère et forte qui a la fragilité apparente des |
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inoubliable, comédie légère et forte qui a la fragilité apparente des |
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choses ailées. |
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choses ailées. |
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Ce jeune homme, pour qui le voit de près, semble toujours au repos, et |
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Ce jeune homme, pour qui le voit de près, semble toujours au repos, et |
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il est toujours en travail. C'est le nonchalant infatigable. Du reste, |
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il est toujours en travail. C’est le nonchalant infatigable. Du reste, |
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il a autant de facultés qu'il fait d'efforts; il entre dans le roman, |
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il a autant de facultés qu’il fait d’efforts; il entre dans le roman, |
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c'est un maître; il aborde le théâtre, c'est un poëte; il se jette
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c’est un maître; il aborde le théâtre, c’est un poëte; il se jette |
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dans les mêlées de la polémique, c'est un journaliste éclatant. Dans |
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dans les mêlées de la polémique, c’est un journaliste éclatant. Dans |
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ces trois régions, il est chez lui. |
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ces trois régions, il est chez lui. |
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Toute son œuvre est mêlée, c'est-à-dire une. Et c'est encore la loi |
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Toute son œuvre est mêlée, c’est-à-dire une. Et c’est encore la loi |
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des intelligences planantes, lesquelles voient tout l'horizon. Pas |
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des intelligences planantes, lesquelles voient tout l’horizon. Pas |
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de cloison dans cet esprit; ou rien que des cloisons apparentes. Ses |
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de cloison dans cet esprit; ou rien que des cloisons apparentes. Ses |
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romans sont des tragédies; ses comédies sont des élégies, et elles |
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romans sont des tragédies; ses comédies sont des élégies, et elles |
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sont tristes, ce qui ne les empêche pas d'être joyeuses; versement de |
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sont tristes, ce qui ne les empêche pas d’être joyeuses; versement de |
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la raillerie dans la mélancolie et de la colère dans le sarcasme, |
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la raillerie dans la mélancolie et de la colère dans le sarcasme, |
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qui, de tout temps, d'Aristophane à Plaute et de Plaute à Molière, a |
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qui, de tout temps, d’Aristophane à Plaute et de Plaute à Molière, a |
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caractérisé l'art suprême. Rire, quel motif de pleurer! Ce jeune homme |
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caractérisé l’art suprême. Rire, quel motif de pleurer! Ce jeune homme |
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est fait comme ces grands hommes. Il médite, et sourit; il médite, |
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est fait comme ces grands hommes. Il médite, et sourit; il médite, |
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et s'indigne. Par moments, son intonation moqueuse prend subitement |
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et s’indigne. Par moments, son intonation moqueuse prend subitement |
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l'accent tragique. Hélas! la sombre gaieté des penseurs sanglote.
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l’accent tragique. Hélas! la sombre gaieté des penseurs sanglote. |
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Pour ces causes et pour d'autres, ce jeune écrivain a dans le style |
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Pour ces causes et pour d’autres, ce jeune écrivain a dans le style |
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cet imprévu qui est la vie. L'inattendu dans la logique, c'est le |
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cet imprévu qui est la vie. L’inattendu dans la logique, c’est le |
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souverain secret des écrivains supérieurs. On ne sait pas assez ce que |
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souverain secret des écrivains supérieurs. On ne sait pas assez ce que |
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c'est que le style. Pas de grand style sans grande pensée. Le style
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c’est que le style. Pas de grand style sans grande pensée. Le style |
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contient aussi nécessairement la pensée que le fruit contient la sève. |
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contient aussi nécessairement la pensée que le fruit contient la sève. |
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Qu'est-ce donc que le style? C'est l'idée dans son expression absolue,
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Qu’est-ce donc que le style? C’est l’idée dans son expression absolue, |
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c'est l'image sous sa figure parfaite; tout ce qu'est la pensée, le
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c’est l’image sous sa figure parfaite; tout ce qu’est la pensée, le |
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style l'est; le style, c'est le mot fait âme; le style, c'est |
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style l’est; le style, c’est le mot fait âme; le style, c’est |
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le langage fait verbe. Otez le style, Virgile s'efface, Horace |
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le langage fait verbe. Otez le style, Virgile s’efface, Horace |
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s'évanouit, Tacite disparaît. On a de nos jours imaginé un barbarisme
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s’évanouit, Tacite disparaît. On a de nos jours imaginé un barbarisme |
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curieux: «les stylistes». Il y a une trentaine d'années, une école |
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curieux: «les stylistes». Il y a une trentaine d’années, une école |
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imbécile de critiques, oubliée aujourd'hui, faisait tous ses efforts |
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imbécile de critiques, oubliée aujourd’hui, faisait tous ses efforts |
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pour insulter le style, et l'appelait: «la forme». Quelle insulte! |
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pour insulter le style, et l’appelait: «la forme». Quelle insulte! |
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forma , la beauté. La Vénus hottentote dit à la Vénus de Milo: Tu |
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forma , la beauté. La Vénus hottentote dit à la Vénus de Milo: Tu |
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n'as que la forme!
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n’as que la forme! |
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Les œuvres succèdent aux œuvres; après la Bohême dorée, la Famille |
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Les œuvres succèdent aux œuvres; après la Bohême dorée, la Famille |
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tragique ; créations composées de divination et d'observation, où |
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tragique ; créations composées de divination et d’observation, où |
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l'ironie se décompose en pitié, où l'intérêt dramatique arrive parfois
|
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l’ironie se décompose en pitié, où l’intérêt dramatique arrive parfois |
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à l'effroi, où l'intelligence se dilate en même temps que le cœur se |
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à l’effroi, où l’intelligence se dilate en même temps que le cœur se |
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serre. |
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serre. |
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Toutes ces qualités, style, émotion, bonté d'écrivain, vertu de poëte, |
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Toutes ces qualités, style, émotion, bonté d’écrivain, vertu de poëte, |
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dignité d'artiste, ce jeune homme les concentre et les condense dans |
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dignité d’artiste, ce jeune homme les concentre et les condense dans |
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un grand livre, les Hommes de l'exil . Ce livre est un grand livre |
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un grand livre, les Hommes de l’exil . Ce livre est un grand livre |
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politique, pourquoi? parce que c'est un grand livre littéraire. Qui |
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politique, pourquoi? parce que c’est un grand livre littéraire. Qui |
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dit littérature , dit humanité . Ce livre, les Hommes de l'exil , |
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dit littérature , dit humanité . Ce livre, les Hommes de l’exil , |
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est une protestation et un défi; protestation soumise à Dieu, défi |
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est une protestation et un défi; protestation soumise à Dieu, défi |
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jeté aux tyrans. L'âme est le personnage, l'exil est le drame; les |
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jeté aux tyrans. L’âme est le personnage, l’exil est le drame; les |
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martyrs sont divers, le martyre est un; l'épreuve varie, les éprouvés, |
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martyrs sont divers, le martyre est un; l’épreuve varie, les éprouvés, |
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non. Cette sévère peinture restera. Ce livre austère et tragique |
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non. Cette sévère peinture restera. Ce livre austère et tragique |
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est un livre d'amour; amour pour la vérité, pour l'équité, pour la |
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est un livre d’amour; amour pour la vérité, pour l’équité, pour la |
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probité, pour la souffrance, pour le malheur, pour la grandeur; de là |
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probité, pour la souffrance, pour le malheur, pour la grandeur; de là |
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une haine profonde contre ce qui est vil, lâche, injuste et bas. Ce |
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une haine profonde contre ce qui est vil, lâche, injuste et bas. Ce |
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livre est implacable; pourquoi? parce qu'il est tendre. |
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livre est implacable; pourquoi? parce qu’il est tendre. |
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Partout la justice, et partout la pitié; la belle âme exprimée par le |
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Partout la justice, et partout la pitié; la belle âme exprimée par le |
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la philosophie. |
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la philosophie. |
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Insistons sur cette philosophie. L'isolement développe dans les âmes |
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Insistons sur cette philosophie. L’isolement développe dans les âmes |
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profondes une sagesse d'une espèce particulière, qui va au delà de |
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profondes une sagesse d’une espèce particulière, qui va au delà de |
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l'homme. C'est cette sagesse étrange qui a créé l'antique magisme.
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l’homme. C’est cette sagesse étrange qui a créé l’antique magisme. |
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Ce jeune homme, dans le désert de Jersey et dans le crépuscule de |
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Ce jeune homme, dans le désert de Jersey et dans le crépuscule de |
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Guernesey, est, comme les autres solitaires pensifs qui l'entourent, |
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Guernesey, est, comme les autres solitaires pensifs qui l’entourent, |
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atteint par cette sagesse. Une intuition presque visionnaire donne à |
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atteint par cette sagesse. Une intuition presque visionnaire donne à |
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plusieurs de ses ouvrages, comme à d'autres œuvres des hommes du |
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plusieurs de ses ouvrages, comme à d’autres œuvres des hommes du |
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même groupe, une portée singulière; chose qu'on ne peut pas ne point |
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même groupe, une portée singulière; chose qu’on ne peut pas ne point |
|
souligner, ce qui préoccupe ce jeune esprit, c'est ce qui préoccupe |
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souligner, ce qui préoccupe ce jeune esprit, c’est ce qui préoccupe |
|
aussi les vieux; à ce commencement de la vie où il semble qu'on a le |
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aussi les vieux; à ce commencement de la vie où il semble qu’on a le |
|
droit d'être uniquement absorbé par la préparation de soi-même, ce qui |
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droit d’être uniquement absorbé par la préparation de soi-même, ce qui |
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inquiète ce penseur, lumineux et serein jusqu'à l'éclat de rire, mais |
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inquiète ce penseur, lumineux et serein jusqu’à l’éclat de rire, mais |
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attendri, ce qui l'émeut et le tourmente, c'est le côté impénétrable |
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attendri, ce qui l’émeut et le tourmente, c’est le côté impénétrable |
|
du destin; c'est le sort des êtres condamnés au cri ou au silence, |
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du destin; c’est le sort des êtres condamnés au cri ou au silence, |
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bêtes, plantes, de ce qu'on appelle l'animal, de ce qu'on appelle le |
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bêtes, plantes, de ce qu’on appelle l’animal, de ce qu’on appelle le |
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végétal; il lui semble voir là des déshérités; il se penche vers eux; |
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végétal; il lui semble voir là des déshérités; il se penche vers eux; |
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il constate qu'ils sont hors de la liberté, et presque de la lumière; |
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il constate qu’ils sont hors de la liberté, et presque de la lumière; |
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il se demande qui les a chassés dans cette ombre, et il oublie, en |
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il se demande qui les a chassés dans cette ombre, et il oublie, en |
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se courbant sur ces bannis, qu'il est lui-même un exilé. Superbe |
|
se courbant sur ces bannis, qu’il est lui-même un exilé. Superbe |
|
commisération, fraternité de l'être parlant pour les êtres muets, |
|
commisération, fraternité de l’être parlant pour les êtres muets, |
|
noble augmentation de l'amour de l'humanité par la douceur envers |
|
noble augmentation de l’amour de l’humanité par la douceur envers |
|
la création. Les vivants d'en bas, quelle énigme! Inferi , mot |
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la création. Les vivants d’en bas, quelle énigme! Inferi , mot |
|
mystérieux; les inférieurs. L'Enfer. Creusez le rêve des religions, |
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mystérieux; les inférieurs. L’Enfer. Creusez le rêve des religions, |
|
vous trouverez au fond la vérité. Seulement, les religions interposées |
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vous trouverez au fond la vérité. Seulement, les religions interposées |
|
la défigurent par leur grossissement. Toute vie infernale, étant |
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la défigurent par leur grossissement. Toute vie infernale, étant |
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Ces deux frères sont comme le complément l'un de l'autre: l'aîné est |
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Ces deux frères sont comme le complément l’un de l’autre: l’aîné est |
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le rayonnant, le plus jeune est l'austère. Austérité aimable comme |
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le rayonnant, le plus jeune est l’austère. Austérité aimable comme |
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celle d'un jeune Socrate. Sa présence est fortifiante; rien n'est sain |
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celle d’un jeune Socrate. Sa présence est fortifiante; rien n’est sain |
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et rien n'est rassurant comme l'imperturbable aménité de l'ouvrier |
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et rien n’est rassurant comme l’imperturbable aménité de l’ouvrier |
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content. Ce jeune exilé volontaire conserve, dans le désert où l'on |
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content. Ce jeune exilé volontaire conserve, dans le désert où l’on |
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est pour jamais peut-être, les élégances de sa vie passée, et en même |
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est pour jamais peut-être, les élégances de sa vie passée, et en même |
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temps il se met à la tâche; il veut construire, et il construit un |
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temps il se met à la tâche; il veut construire, et il construit un |
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temps; ses habitudes sont à la fois parisiennes et monacales. Il |
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temps; ses habitudes sont à la fois parisiennes et monacales. Il |
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habite une chambre encombrée de livres. Au point du jour il entend |
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habite une chambre encombrée de livres. Au point du jour il entend |
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marcher au-dessus de sa tête, sur le toit de la maison, quelqu'un qui |
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marcher au-dessus de sa tête, sur le toit de la maison, quelqu’un qui |
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travaille; c'est son père; ce pas le réveille; alors il se lève et |
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travaille; c’est son père; ce pas le réveille; alors il se lève et |
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travaille aussi. Ce qu'il fait, on l'a vu plus haut, il traduit |
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travaille aussi. Ce qu’il fait, on l’a vu plus haut, il traduit |
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Shakespeare; entreprise considérable. Il traduit Shakespeare; il |
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Shakespeare; entreprise considérable. Il traduit Shakespeare; il |
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l'interprète, il le commente, il le fait accessible à tous; il taille
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l’interprète, il le commente, il le fait accessible à tous; il taille |
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degré par degré dans la roche et dans le glacier on ne sait quel |
|
degré par degré dans la roche et dans le glacier on ne sait quel |
|
vertigineux escalier qui aboutit à cette cime. On a bien raison |
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vertigineux escalier qui aboutit à cette cime. On a bien raison |
Ligne 305 : |
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même façon Homère, Eschyle, Isaïe et Dante. En attendant, il tient |
|
même façon Homère, Eschyle, Isaïe et Dante. En attendant, il tient |
|
Shakespeare. Conquête illustre à faire. Introduire Shakespeare en |
|
Shakespeare. Conquête illustre à faire. Introduire Shakespeare en |
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France, quel vaste devoir! Ce devoir, il l'accepte; il s'y engage, il |
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France, quel vaste devoir! Ce devoir, il l’accepte; il s’y engage, il |
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s'y enferme; il sait que sa vie désormais sera liée par cette promesse
|
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s’y enferme; il sait que sa vie désormais sera liée par cette promesse |
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faite au nom de la France au grand homme de l'Angleterre; il sait |
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faite au nom de la France au grand homme de l’Angleterre; il sait |
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que ce grand homme de l'Angleterre est un des grands hommes du genre |
|
que ce grand homme de l’Angleterre est un des grands hommes du genre |
|
humain tout entier, et que servir cette gloire, c'est servir la |
|
humain tout entier, et que servir cette gloire, c’est servir la |
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civilisation même; il sait qu'une telle entreprise est impérieuse, |
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civilisation même; il sait qu’une telle entreprise est impérieuse, |
|
qu'elle sera exigeante et altière, et qu'une fois commencée elle ne
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qu’elle sera exigeante et altière, et qu’une fois commencée elle ne |
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peut être ni interrompue ni abandonnée; il sait qu'il en a pour douze |
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peut être ni interrompue ni abandonnée; il sait qu’il en a pour douze |
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ans; il sait que c'est là une autre cellule, et qu'il se condamne au |
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ans; il sait que c’est là une autre cellule, et qu’il se condamne au |
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cloître, et que lorsqu'on entre dans un tel labeur, on y est muré; |
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cloître, et que lorsqu’on entre dans un tel labeur, on y est muré; |
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il y consent, et, de même qu'il s'est exilé pour son père, il |
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il y consent, et, de même qu’il s’est exilé pour son père, il |
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s'emprisonne pour Shakespeare.
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s’emprisonne pour Shakespeare. |
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Sa récompense, c'est son effort même. Il a voulu traduire Shakespeare, |
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Sa récompense, c’est son effort même. Il a voulu traduire Shakespeare, |
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et, en effet, voilà Shakespeare traduit. Il a renouvelé l'effrayant |
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et, en effet, voilà Shakespeare traduit. Il a renouvelé l’effrayant |
|
combat nocturne de Jacob; il ajouté avec l'archange, et son jarret n'a |
|
combat nocturne de Jacob; il ajouté avec l’archange, et son jarret n’a |
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pas plié. Il est l'écrivain qu'il fallait. |
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pas plié. Il est l’écrivain qu’il fallait. |
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L'anglais de Shakespeare n'est plus l'anglais d'à présent; il a été
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L’anglais de Shakespeare n’est plus l’anglais d’à présent; il a été |
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nécessaire de superposer à cet anglais du seizième siècle le français |
|
nécessaire de superposer à cet anglais du seizième siècle le français |
|
du dix-neuvième, sorte de corps à corps des deux idiomes; la plus |
|
du dix-neuvième, sorte de corps à corps des deux idiomes; la plus |
|
redoutable aventure où puisse se hasarder un traducteur: ce jeune |
|
redoutable aventure où puisse se hasarder un traducteur: ce jeune |
|
homme a eu cette audace. Ce qu'il a entrepris de faire, il l'a fait. |
|
homme a eu cette audace. Ce qu’il a entrepris de faire, il l’a fait. |
|
Il importait de ne rien perdre de l'œuvre énorme. Il a mis sur |
|
Il importait de ne rien perdre de l’œuvre énorme. Il a mis sur |
|
Shakespeare la langue française, et il a réussi à faire passer, à |
|
Shakespeare la langue française, et il a réussi à faire passer, à |
|
travers l'inextricable claire-voie de deux idiomes appliqués l'un sur |
|
travers l’inextricable claire-voie de deux idiomes appliqués l’un sur |
|
l'autre, tout le rayonnement de ce génie.
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l’autre, tout le rayonnement de ce génie. |
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Pour cela, il a dû dépenser, à chaque phrase, à chaque vers, presque à |
|
Pour cela, il a dû dépenser, à chaque phrase, à chaque vers, presque à |
|
chaque mot, une inépuisable invention de style. Pour une telle œuvre, |
|
chaque mot, une inépuisable invention de style. Pour une telle œuvre, |
|
il faut que le traducteur soit créateur. Il l'a été. |
|
il faut que le traducteur soit créateur. Il l’a été. |
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Un écrivain qui prouve son originalité par une traduction, c'est |
|
Un écrivain qui prouve son originalité par une traduction, c’est |
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étrange et rare. Traduire ne lui suffit pas. Il bâtit autour de |
|
étrange et rare. Traduire ne lui suffit pas. Il bâtit autour de |
|
Shakespeare, comme des contreforts autour d'une cathédrale, toute une |
|
Shakespeare, comme des contreforts autour d’une cathédrale, toute une |
|
œuvre à lui, œuvre de philosophie, de critique, d'histoire. Il est |
|
œuvre à lui, œuvre de philosophie, de critique, d’histoire. Il est |
|
linguiste, artiste, grammairien, érudit. Il est docte et alerte; |
|
linguiste, artiste, grammairien, érudit. Il est docte et alerte; |
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toujours savant, jamais pédant. Il accumule et coordonne les |
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toujours savant, jamais pédant. Il accumule et coordonne les |
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Et c'est ainsi qu'après douze années de labeur, il fait à la France |
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Et c’est ainsi qu’après douze années de labeur, il fait à la France |
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don de Shakespeare. Les vrais traducteurs ont cette puissance |
|
don de Shakespeare. Les vrais traducteurs ont cette puissance |
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singulière d'enrichir un peuple sans appauvrir l'autre, de ne point |
|
singulière d’enrichir un peuple sans appauvrir l’autre, de ne point |
|
dérober ce qu'ils prennent, et de donner un génie à une nation sans |
|
dérober ce qu’ils prennent, et de donner un génie à une nation sans |
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l'ôter à sa patrie.
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l’ôter à sa patrie. |
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|
Cette longue incubation se fait sans qu'il l'interrompe un seul jour. |
|
Cette longue incubation se fait sans qu’il l’interrompe un seul jour. |
|
Aucune solution de continuité, pas de relâche, aucune lacune, aucune |
|
Aucune solution de continuité, pas de relâche, aucune lacune, aucune |
|
concession à la fatigue, toutes les aurores ramènent la besogne; |
|
concession à la fatigue, toutes les aurores ramènent la besogne; |
|
nulla dies sine linea ; c'est là, du reste, la bonne loi des fiers |
|
nulla dies sine linea ; c’est là, du reste, la bonne loi des fiers |
|
esprits. L'œuvre qu'on accomplit et qu'on voit croître est par |
|
esprits. L’œuvre qu’on accomplit et qu’on voit croître est par |
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elle-même reposante. Aucun autre repos n'est nécessaire. Ce jeune |
|
elle-même reposante. Aucun autre repos n’est nécessaire. Ce jeune |
|
homme le comprend ainsi; il ne quitte jamais sa tâche; il s'éveille |
|
homme le comprend ainsi; il ne quitte jamais sa tâche; il s’éveille |
|
chaque matin dès qu'il entend le marcheur d'en haut s'éveiller; et |
|
chaque matin dès qu’il entend le marcheur d’en haut s’éveiller; et |
|
quand, l'heure de la table de famille venue, ils redescendent tous les |
|
quand, l’heure de la table de famille venue, ils redescendent tous les |
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deux de leur travail, son père et lui, ils échangent un doux sourire. |
|
deux de leur travail, son père et lui, ils échangent un doux sourire. |
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pensée; telle est la vie de ces hommes. Pour horizon le brouillard |
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pensée; telle est la vie de ces hommes. Pour horizon le brouillard |
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des flots et des événements, pour musique le vent de tempête, pour |
|
des flots et des événements, pour musique le vent de tempête, pour |
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spectacle la mobilité d'un infini, la mer, sous la fixité d'un autre |
|
spectacle la mobilité d’un infini, la mer, sous la fixité d’un autre |
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infini, le ciel. On est des naufragés, on regarde les abîmes. Tout a |
|
infini, le ciel. On est des naufragés, on regarde les abîmes. Tout a |
|
sombré, hors la conscience; navire dont il ne reste que la boussole. |
|
sombré, hors la conscience; navire dont il ne reste que la boussole. |
|
Dans cette famille personne n'a rien à soi; tout est en commun, |
|
Dans cette famille personne n’a rien à soi; tout est en commun, |
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l'effort, la résistance, la volonté, l'âme. Ce père et ces fils
|
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l’effort, la résistance, la volonté, l’âme. Ce père et ces fils |
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resserrent de plus en plus leur étroit embrassement. |
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resserrent de plus en plus leur étroit embrassement. |
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Il est probable qu'ils souffrent, mais ils ne se le disent pas; |
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Il est probable qu’ils souffrent, mais ils ne se le disent pas; |
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chacun s'absorbe et se rassérène dans son œuvre diverse; dans les |
|
chacun s’absorbe et se rassérène dans son œuvre diverse; dans les |
|
intermittences, le soir, aux réunions de famille, aux promenades sur |
|
intermittences, le soir, aux réunions de famille, aux promenades sur |
|
la plage, ils parlent. De quoi? de quoi peuvent parler des proscrits, |
|
la plage, ils parlent. De quoi? de quoi peuvent parler des proscrits, |
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si ce n'est de la patrie? Cette France, ils l'adorent; plus l'exil |
|
si ce n’est de la patrie? Cette France, ils l’adorent; plus l’exil |
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s'aggrave, plus l'amour augmente. Loin des yeux, près du cœur. Ils
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s’aggrave, plus l’amour augmente. Loin des yeux, près du cœur. Ils |
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ont toutes les grandes convictions, ce qui leur donne toutes les |
|
ont toutes les grandes convictions, ce qui leur donne toutes les |
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grandes certitudes. On a agi de son mieux; on a fait ce qu'on a pu; |
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grandes certitudes. On a agi de son mieux; on a fait ce qu’on a pu; |
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quelle récompense veut-on? Une seule. Revoir la patrie. Eh bien, on la |
|
quelle récompense veut-on? Une seule. Revoir la patrie. Eh bien, on la |
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reverra. Comme on y était heureux, et comme on y sera heureux encore! |
|
reverra. Comme on y était heureux, et comme on y sera heureux encore! |
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Certes, l'heure bénie du retour sonnera. On les attend là-bas. Ainsi |
|
Certes, l’heure bénie du retour sonnera. On les attend là-bas. Ainsi |
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parlent ces bannis. La causerie finie, on se remet au travail. Toutes |
|
parlent ces bannis. La causerie finie, on se remet au travail. Toutes |
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les journées se ressemblent. Cela dure dix-neuf ans. Au bout de |
|
les journées se ressemblent. Cela dure dix-neuf ans. Au bout de |
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dix-neuf ans l'exil cesse, ils rentrent, les voilà dans la patrie; ils |
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dix-neuf ans l’exil cesse, ils rentrent, les voilà dans la patrie; ils |
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sont attendus en effet, eux par la tombe, lui par la haine. |
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sont attendus en effet, eux par la tombe, lui par la haine. |
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Qui pourrait songer à la France autrement que reconnaissant et |
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Qui pourrait songer à la France autrement que reconnaissant et |
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attendri? Et pour cet homme-là, pour ce père, n'y a-t-il pas trois |
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attendri? Et pour cet homme-là, pour ce père, n’y a-t-il pas trois |
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journées inoubliables, le 5 septembre 1870, le 18 mars 1871, le 28 |
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journées inoubliables, le 5 septembre 1870, le 18 mars 1871, le 28 |
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décembre 1873! Le 5 septembre 1870, il rentra dans la patrie, la |
|
décembre 1873! Le 5 septembre 1870, il rentra dans la patrie, la |
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France; le 18 mars 1871, le 28 décembre 1873, ses fils rentrèrent, |
|
France; le 18 mars 1871, le 28 décembre 1873, ses fils rentrèrent, |
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l'un après l'autre, dans l'autre patrie, le sépulcre; et à ces trois
|
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l’un après l’autre, dans l’autre patrie, le sépulcre; et à ces trois |
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rentrées, tu vins de toutes parts faire cortége, ô immense peuple de |
|
rentrées, tu vins de toutes parts faire cortége, ô immense peuple de |
|
Paris! Tu y vins tendre, ému, magnanime, avec ce profond murmure des |
|
Paris! Tu y vins tendre, ému, magnanime, avec ce profond murmure des |
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foules qui ressemble parfois au bercement des mères. Depuis ces trois |
|
foules qui ressemble parfois au bercement des mères. Depuis ces trois |
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jours ineffaçables, y a-t-il eu quelque part, n'importe où, dans des |
|
jours ineffaçables, y a-t-il eu quelque part, n’importe où, dans des |
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régions quelconques, de la calomnie, de l'insulte et de la haine? Cela |
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régions quelconques, de la calomnie, de l’insulte et de la haine? Cela |
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se peut, mais pourquoi pas? et à qui cela fait-il du mal? à ceux qui |
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se peut, mais pourquoi pas? et à qui cela fait-il du mal? à ceux qui |
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haïssent peut-être. Plaignons-les. Le peuple est grand et bon. Le |
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haïssent peut-être. Plaignons-les. Le peuple est grand et bon. Le |
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reste n'est rien. Il faudrait pour s'en émouvoir n'avoir jamais vu |
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reste n’est rien. Il faudrait pour s’en émouvoir n’avoir jamais vu |
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l'océan. Qu'importe une vaine surface écumante quand le fond est
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l’océan. Qu’importe une vaine surface écumante quand le fond est |
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majestueusement ami et paisible! Se plaindre de la patrie, lui |
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majestueusement ami et paisible! Se plaindre de la patrie, lui |
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reprocher quoi que ce soit, non, non, non! Même ceux qui meurent par |
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reprocher quoi que ce soit, non, non, non! Même ceux qui meurent par |
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elle vivent par elle. |
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elle vivent par elle. |
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Quant à vous, Dieu, que vous dire? Est-ce que vous n'êtes pas |
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Quant à vous, Dieu, que vous dire? Est-ce que vous n’êtes pas |
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l'Ignoré? Que savons-nous sinon que vous êtes et que nous sommes?
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l’Ignoré? Que savons-nous sinon que vous êtes et que nous sommes? |
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Est-ce que nous nous connaissons, ô mystère! Éternel Dieu, vous faites |
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Est-ce que nous nous connaissons, ô mystère! Éternel Dieu, vous faites |
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tourner sur ses gonds la porte de la tombe, et vous savez pourquoi. |
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tourner sur ses gonds la porte de la tombe, et vous savez pourquoi. |
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Nous faisons la fosse, et vous ce qui est au delà. Au trou dans la |
|
Nous faisons la fosse, et vous ce qui est au delà. Au trou dans la |
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terre s'ajuste une ouverture dans le firmament. Vous vous servez |
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terre s’ajuste une ouverture dans le firmament. Vous vous servez |
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du sépulcre comme nous du creuset, et, l'indivisible étant |
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du sépulcre comme nous du creuset, et, l’indivisible étant |
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l'incorruptible, rien ne se perd, ni l'atome matériel, la molécule
|
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l’incorruptible, rien ne se perd, ni l’atome matériel, la molécule |
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dans le creuset, ni l'atome moral, le moi, dans le tombeau. Vous |
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dans le creuset, ni l’atome moral, le moi, dans le tombeau. Vous |
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maniez la destinée humaine; vous abrégez la jeunesse, vous prolongez |
|
maniez la destinée humaine; vous abrégez la jeunesse, vous prolongez |
|
la vieillesse; vous avez vos raisons. Dans notre crépuscule, nous |
|
la vieillesse; vous avez vos raisons. Dans notre crépuscule, nous |
|
qui sommes le relatif, nous nous heurtons à tâtons à vous qui êtes |
|
qui sommes le relatif, nous nous heurtons à tâtons à vous qui êtes |
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l'absolu, et ce n'est pas sans meurtrissure que nous faisons la
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l’absolu, et ce n’est pas sans meurtrissure que nous faisons la |
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rencontre obscure de vos lois. Vous êtes calomnié vous aussi; les |
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rencontre obscure de vos lois. Vous êtes calomnié vous aussi; les |
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religions vous appellent jaloux, colère, vengeur; par moments elles |
|
religions vous appellent jaloux, colère, vengeur; par moments elles |
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plaident vos circonstances atténuantes; voilà ce que font les |
|
plaident vos circonstances atténuantes; voilà ce que font les |
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religions. La religion vous vénère. Aussi la religion a-t-elle pour |
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religions. La religion vous vénère. Aussi la religion a-t-elle pour |
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ennemies les religions. Les religions croient l'absurde. La religion |
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ennemies les religions. Les religions croient l’absurde. La religion |
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croit le vrai. Dans les pagodes, dans les mosquées, dans les |
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croit le vrai. Dans les pagodes, dans les mosquées, dans les |
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synagogues, du haut des chaires et au nom des dogmes, on vous |
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synagogues, du haut des chaires et au nom des dogmes, on vous |
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conseille, on vous exhorte, on vous interprète, on vous qualifie; les |
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conseille, on vous exhorte, on vous interprète, on vous qualifie; les |
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prêtres se font vos juges, les sages non. Les sages vous acceptent. |
|
prêtres se font vos juges, les sages non. Les sages vous acceptent. |
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Accepter Dieu, c'est là le suprême effort de la philosophie. Nos |
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Accepter Dieu, c’est là le suprême effort de la philosophie. Nos |
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propres dimensions nous échappent à nous-mêmes. Vous les connaissez, |
|
propres dimensions nous échappent à nous-mêmes. Vous les connaissez, |
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vous; vous avez la mesure de tout et de tous. Les lois de percussion |
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vous; vous avez la mesure de tout et de tous. Les lois de percussion |
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sont diverses. Tel homme est frappé plus souvent que les autres; il |
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sont diverses. Tel homme est frappé plus souvent que les autres; il |
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semble qu'il ne soit jamais perdu de vue par le destin. Vous savez |
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semble qu’il ne soit jamais perdu de vue par le destin. Vous savez |
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pourquoi. Nous ne voyons que des raccourcis; vous seul connaissez les |
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pourquoi. Nous ne voyons que des raccourcis; vous seul connaissez les |
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proportions véritables. Tout se retrouvera plus tard. Chaque chiffre |
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proportions véritables. Tout se retrouvera plus tard. Chaque chiffre |
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aura son total. Vivre ne donne sur la terre pas d'autre droit que |
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aura son total. Vivre ne donne sur la terre pas d’autre droit que |
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mourir, mais mourir donne tous les droits. Que l'homme fasse son |
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mourir, mais mourir donne tous les droits. Que l’homme fasse son |
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devoir, Dieu fera le sien. Nous sommes à la fois vos débiteurs et vos |
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devoir, Dieu fera le sien. Nous sommes à la fois vos débiteurs et vos |
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créanciers; relation naturelle des fils au père. Nous savons que nous |
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créanciers; relation naturelle des fils au père. Nous savons que nous |
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venons de vous; nous sentons confusément, mais sûrement, le point |
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venons de vous; nous sentons confusément, mais sûrement, le point |
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d'attache de l'homme à Dieu; de même que le rayon a conscience du
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d’attache de l’homme à Dieu; de même que le rayon a conscience du |
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soleil, notre immortalité a conscience de votre éternité. Elles se |
|
soleil, notre immortalité a conscience de votre éternité. Elles se |
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prouvent l'une par l'autre; cercle sublime. Vous êtes nécessairement |
|
prouvent l’une par l’autre; cercle sublime. Vous êtes nécessairement |
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juste puisque vous êtes; et que ni le mal ni la mort n'existent. Vous |
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juste puisque vous êtes; et que ni le mal ni la mort n’existent. Vous |
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ne pouvez pas être autre chose que la bonté au haut de la vie et la |
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ne pouvez pas être autre chose que la bonté au haut de la vie et la |
|
clarté au fond du ciel. Nous ne pouvons pas plus vous nier que nous |
|
clarté au fond du ciel. Nous ne pouvons pas plus vous nier que nous |
|
ne pouvons nier l'infini. Vous êtes l'illimité évident. La vie |
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ne pouvons nier l’infini. Vous êtes l’illimité évident. La vie |
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universelle, c'est vous; le ciel universel, c'est vous. Votre bonté |
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universelle, c’est vous; le ciel universel, c’est vous. Votre bonté |
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est la chaleur de votre clarté; votre vérité est le rayon de votre |
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est la chaleur de votre clarté; votre vérité est le rayon de votre |
|
amour. L'homme ne peut que bégayer à jamais un essai de vous |
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amour. L’homme ne peut que bégayer à jamais un essai de vous |
|
comprendre. Il travaille, souffre, aime, pleure et espère à travers |
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comprendre. Il travaille, souffre, aime, pleure et espère à travers |
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cela. Devant vous, abaisser nos fronts, c'est élever nos esprits. |
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cela. Devant vous, abaisser nos fronts, c’est élever nos esprits. |
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C'est là tout ce que nous avons à vous dire, ô Dieu.
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C’est là tout ce que nous avons à vous dire, ô Dieu. |
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Pas de plainte donc. Nous n'avons tout au plus droit qu'à |
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Pas de plainte donc. Nous n’avons tout au plus droit qu’à |
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l'étonnement. L'étonnement contient toute la quantité de protestation
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l’étonnement. L’étonnement contient toute la quantité de protestation |
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permise à cet immense ignorant qui est l'homme. Et ce douloureux |
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permise à cet immense ignorant qui est l’homme. Et ce douloureux |
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étonnement, comment le réserver pour soi quand la France le réclame? |
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étonnement, comment le réserver pour soi quand la France le réclame? |
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Comment songer aux douleurs privées en présence de l'affliction |
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Comment songer aux douleurs privées en présence de l’affliction |
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publique? Une telle patrie prend toute la place. Que chacun ait |
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publique? Une telle patrie prend toute la place. Que chacun ait |
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sa blessure à lui, soit, mais qu'il la cache en présence du flanc |
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sa blessure à lui, soit, mais qu’il la cache en présence du flanc |
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saignant de notre mère. Ah! quels songes on faisait! On était mis hors |
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saignant de notre mère. Ah! quels songes on faisait! On était mis hors |
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la loi, expulsé, banni, rebanni, proscrit, reproscrit; tel homme qui a |
|
la loi, expulsé, banni, rebanni, proscrit, reproscrit; tel homme qui a |
|
des cheveux blancs a été chassé quatre fois, d'abord de France, puis |
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des cheveux blancs a été chassé quatre fois, d’abord de France, puis |
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de Belgique, puis de Jersey, puis de Belgique encore; eh bien, quoi? |
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de Belgique, puis de Jersey, puis de Belgique encore; eh bien, quoi? |
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on était des exilés. On souriait. On disait: Oui, mais la France! |
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on était des exilés. On souriait. On disait: Oui, mais la France! |
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La France est là, toujours grande, toujours belle, toujours adorée, |
|
La France est là, toujours grande, toujours belle, toujours adorée, |
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toujours France! Il y a un voile entre elle et nous, mais un de ces |
|
toujours France! Il y a un voile entre elle et nous, mais un de ces |
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jours l'empire se déchirera du haut en bas, et, derrière la déchirure |
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jours l’empire se déchirera du haut en bas, et, derrière la déchirure |
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lumineuse, la France reparaîtra! La France reparaîtra, quel |
|
lumineuse, la France reparaîtra! La France reparaîtra, quel |
|
éblouissement! Dans sa splendeur, dans sa gloire, dans sa majesté |
|
éblouissement! Dans sa splendeur, dans sa gloire, dans sa majesté |
|
fraternelle aux nations, avec toute sa couronne comme une reine, avec |
|
fraternelle aux nations, avec toute sa couronne comme une reine, avec |
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toute son auréole comme une déesse, puissante et libre, puissante |
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toute son auréole comme une déesse, puissante et libre, puissante |
|
pour protéger, libre pour délivrer! Voilà ce qui est triste, c'est |
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pour protéger, libre pour délivrer! Voilà ce qui est triste, c’est |
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de s'être dit cela. Hélas, on rêvait l'apothéose, on a le pilori. La |
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de s’être dit cela. Hélas, on rêvait l’apothéose, on a le pilori. La |
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patrie a été foulée aux pieds par cette sauvage, la guerre étrangère, |
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patrie a été foulée aux pieds par cette sauvage, la guerre étrangère, |
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et par cette folle, la guerre civile; l'une a essayé d'assassiner la |
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et par cette folle, la guerre civile; l’une a essayé d’assassiner la |
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civilisation et de supprimer le chef-lieu du monde; l'autre a brûlé |
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civilisation et de supprimer le chef-lieu du monde; l’autre a brûlé |
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les deux crèches sacrées de la Révolution, les Tuileries, nid de la |
|
les deux crèches sacrées de la Révolution, les Tuileries, nid de la |
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Convention, l'hôtel de ville, nid de la Commune. On a profité de la |
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Convention, l’hôtel de ville, nid de la Commune. On a profité de la |
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présence des prussiens pour jeter bas la colonne d'Iéna. On leur a |
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présence des prussiens pour jeter bas la colonne d’Iéna. On leur a |
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ajouté cette joie. On a tué des vieillards, on a tué des femmes, on |
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ajouté cette joie. On a tué des vieillards, on a tué des femmes, on |
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a tué des petits enfants. On a été des gens ivres qui ne savent |
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a tué des petits enfants. On a été des gens ivres qui ne savent |
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ce qu'ils font. On a creusé des fosses immenses où l'on a enterré |
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ce qu’ils font. On a creusé des fosses immenses où l’on a enterré |
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pêle-mêle, et à demi morts, le juste et l'injuste, le faux et le vrai, |
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pêle-mêle, et à demi morts, le juste et l’injuste, le faux et le vrai, |
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le bien et le mal. On a voulu abattre cette géante, Paris; on a voulu |
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le bien et le mal. On a voulu abattre cette géante, Paris; on a voulu |
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ressusciter ce fantôme, Versailles. On a eu des incendies dignes |
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ressusciter ce fantôme, Versailles. On a eu des incendies dignes |
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d'Érostrate et des fratricides dignes d'Atrée. Qui a fait ces crimes?
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d’Érostrate et des fratricides dignes d’Atrée. Qui a fait ces crimes? |
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Personne et tout le monde; ces deux exécrables anonymes, la guerre |
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Personne et tout le monde; ces deux exécrables anonymes, la guerre |
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étrangère et la guerre civile; les barbares, qui en sont venus aux |
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étrangère et la guerre civile; les barbares, qui en sont venus aux |
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conscience humaine, sans pouvoir dire pourquoi, sans rien comprendre, |
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conscience humaine, sans pouvoir dire pourquoi, sans rien comprendre, |
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sinon que le vent qui passe les avait mis en colère. Attentats des |
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sinon que le vent qui passe les avait mis en colère. Attentats des |
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ignorants. Aussi bien des ignorants d'en haut que des ignorants d'en |
|
ignorants. Aussi bien des ignorants d’en haut que des ignorants d’en |
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bas. Attentats des innocents aussi, car l'ignorance est une innocence. |
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bas. Attentats des innocents aussi, car l’ignorance est une innocence. |
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Férocités farouches. Qui plaindre? les vaincus et les vainqueurs. Oh! |
|
Férocités farouches. Qui plaindre? les vaincus et les vainqueurs. Oh! |
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voir à terre, gisant, inerte, souffleté, le cadavre de notre gloire! |
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voir à terre, gisant, inerte, souffleté, le cadavre de notre gloire! |
Ligne 529 : |
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|
artères sont ouvertes. Nous sommes saignés aux quatre veines de notre |
|
artères sont ouvertes. Nous sommes saignés aux quatre veines de notre |
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honneur. Pourtant nos soldats ont été héroïques, et certes le seront |
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honneur. Pourtant nos soldats ont été héroïques, et certes le seront |
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encore. Mais quels désastres! Rien n'est crime, tout est fatalité! Les |
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encore. Mais quels désastres! Rien n’est crime, tout est fatalité! Les |
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vieilles calamités de Ninive, de Thèbes et d'Argos sont dépassées. |
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vieilles calamités de Ninive, de Thèbes et d’Argos sont dépassées. |
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Personne qui n'ait sa plaie, laquelle est la plaie publique. Et, à |
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Personne qui n’ait sa plaie, laquelle est la plaie publique. Et, à |
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travers tout cela, aggravation lugubre, il vous vient par moments |
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travers tout cela, aggravation lugubre, il vous vient par moments |
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cette pensée poignante qu'à cette heure il y a, à cinq mille lieues |
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cette pensée poignante qu’à cette heure il y a, à cinq mille lieues |
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d'ici, loin de leur mère, des enfants de vingt ans condamnés à mort,
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d’ici, loin de leur mère, des enfants de vingt ans condamnés à mort, |
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puis au bagne, pour un article de journal. O pauvres hommes! éternelle |
|
puis au bagne, pour un article de journal. O pauvres hommes! éternelle |
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pitié! fanatismes contre fanatismes. Hélas! fanatiques, nous le sommes |
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pitié! fanatismes contre fanatismes. Hélas! fanatiques, nous le sommes |
Ligne 545 : |
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heure, que voit-on? La joie des rois assis comme des bourreaux sur un |
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heure, que voit-on? La joie des rois assis comme des bourreaux sur un |
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démembrement. Après les écartèlements, cela se fait; et Charlot, avant |
|
démembrement. Après les écartèlements, cela se fait; et Charlot, avant |
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de les jeter au bûcher, s'accroupit et se reposa un moment sur les |
|
de les jeter au bûcher, s’accroupit et se reposa un moment sur les |
|
lamentables tronçons de Damiens, comme Guillaume sur l'Alsace et la |
|
lamentables tronçons de Damiens, comme Guillaume sur l’Alsace et la |
|
Lorraine. Guillaume, du reste, n'est pas plus coupable que Charlot; les |
|
Lorraine. Guillaume, du reste, n’est pas plus coupable que Charlot; les |
|
bourreaux sont innocents; les responsables sont les juges; l'histoire |
|
bourreaux sont innocents; les responsables sont les juges; l’histoire |
|
dira quels ont été, dans l'affreux traité de 1871, les juges de la |
|
dira quels ont été, dans l’affreux traité de 1871, les juges de la |
|
France. Ils ont fait une paix pleine de guerre. Ah! les infortunés! A |
|
France. Ils ont fait une paix pleine de guerre. Ah! les infortunés! A |
|
cette heure, ils règnent, ils sont princes, et se croient maîtres. |
|
cette heure, ils règnent, ils sont princes, et se croient maîtres. |
|
Ils sont heureux de tout le bonheur que peut donner une tranquillité |
|
Ils sont heureux de tout le bonheur que peut donner une tranquillité |
|
violente; ils ont la gloire d'un immense sang répandu; ils se pensent |
|
violente; ils ont la gloire d’un immense sang répandu; ils se pensent |
|
invulnérables, ils sont cuirassés de toute-puissance et de néant; ils |
|
invulnérables, ils sont cuirassés de toute-puissance et de néant; ils |
|
préparent, au milieu des fêtes, dans la splendeur de leur imbécillité |
|
préparent, au milieu des fêtes, dans la splendeur de leur imbécillité |
|
souveraine, la dévastation de l'avenir; quand on leur parle de |
|
souveraine, la dévastation de l’avenir; quand on leur parle de |
|
l'immortalité des nations, ils jugent de cette immortalité par leur
|
|
l’immortalité des nations, ils jugent de cette immortalité par leur |
|
majesté à eux-mêmes, et ils en rient; ils se croient de bons tueurs, |
|
majesté à eux-mêmes, et ils en rient; ils se croient de bons tueurs, |
|
et pensent avoir réussi; ils se figurent que c'est fait, que les |
|
et pensent avoir réussi; ils se figurent que c’est fait, que les |
|
dynasties en ont fini avec les peuples; ils s'imaginent que la tête du |
|
dynasties en ont fini avec les peuples; ils s’imaginent que la tête du |
|
genre humain est décidément coupée, que la civilisation se résignera |
|
genre humain est décidément coupée, que la civilisation se résignera |
|
à cette décapitation, qu!est-ce que Paris de plus ou de moins? Ils se |
|
à cette décapitation, qu!est-ce que Paris de plus ou de moins? Ils se |
|
persuadent que Metz et Strasbourg deviendront de l'ombre, qu'il y aura |
|
persuadent que Metz et Strasbourg deviendront de l’ombre, qu’il y aura |
|
prescription pour ce vol, que nous en prendrons notre parti, que la |
|
prescription pour ce vol, que nous en prendrons notre parti, que la |
|
nation-chef sera paisiblement la nation-serve, que nous descendrons |
|
nation-chef sera paisiblement la nation-serve, que nous descendrons |
|
jusqu'à l'acceptation de leur pourpre épouvantable, que nous n'avons
|
|
jusqu’à l’acceptation de leur pourpre épouvantable, que nous n’avons |
|
plus ni bras, ni mains, ni cerveau, ni entrailles, ni cœur, ni |
|
plus ni bras, ni mains, ni cerveau, ni entrailles, ni cœur, ni |
|
esprit, ni sabre au côté, ni sang dans les veines, ni crachat dans la |
|
esprit, ni sabre au côté, ni sang dans les veines, ni crachat dans la |
|
bouche, que nous sommes des idiots et des infâmes, et que la France, |
|
bouche, que nous sommes des idiots et des infâmes, et que la France, |
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qui a rendu l'Amérique à l'Amérique, l'Italie à l'Italie, et la Grèce |
|
qui a rendu l’Amérique à l’Amérique, l’Italie à l’Italie, et la Grèce |
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à la Grèce, ne saura pas rendre la France à la France. |
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à la Grèce, ne saura pas rendre la France à la France. |
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Et cependant la nuée monte; elle monte, pareille à la mystérieuse |
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Et cependant la nuée monte; elle monte, pareille à la mystérieuse |
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colonne conductrice, noire sur l'azur, rouge sur l'ombre. Elle emplit |
|
colonne conductrice, noire sur l’azur, rouge sur l’ombre. Elle emplit |
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lentement l'horizon. Les vieillards la redoutent pour les enfants, et |
|
lentement l’horizon. Les vieillards la redoutent pour les enfants, et |
|
les enfants la saluent. Une funeste inclémence germe. Les rancunes |
|
les enfants la saluent. Une funeste inclémence germe. Les rancunes |
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couvent les représailles; les plus doux se sentent confusément |
|
couvent les représailles; les plus doux se sentent confusément |
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de saison; la frontière redevient barrière; on recommence à être |
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de saison; la frontière redevient barrière; on recommence à être |
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national, et le plus cosmopolite renonce à la neutralité; adieu la |
|
national, et le plus cosmopolite renonce à la neutralité; adieu la |
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mansuétude des philosophes! entre l'humanité et l'homme la patrie se |
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mansuétude des philosophes! entre l’humanité et l’homme la patrie se |
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dresse, terrible. Elle regarde les sages, indignée. Qu'ils ne viennent |
|
dresse, terrible. Elle regarde les sages, indignée. Qu’ils ne viennent |
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plus parler d'union, d'harmonie et de paix! Pas de paix, que la |
|
plus parler d’union, d’harmonie et de paix! Pas de paix, que la |
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tête haute! Voilà ce que veut la patrie. Ajournement de la concorde |
|
tête haute! Voilà ce que veut la patrie. Ajournement de la concorde |
|
humaine. Oh! la misérable aventure! Les échéances sont inévitables; |
|
humaine. Oh! la misérable aventure! Les échéances sont inévitables; |
|
on entend sourdre sous terre les catastrophes semées, et sur leur |
|
on entend sourdre sous terre les catastrophes semées, et sur leur |
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croissance, de plus en plus distincte, on peut calculer l'heure de |
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croissance, de plus en plus distincte, on peut calculer l’heure de |
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leur éclosion. Nul moyen d'échapper. L'avenir est plein d'arrivées |
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leur éclosion. Nul moyen d’échapper. L’avenir est plein d’arrivées |
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fatales. Eschyle, s'il était français, et Jérémie, s'il était teuton, |
|
fatales. Eschyle, s’il était français, et Jérémie, s’il était teuton, |
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pleureraient. Le penseur médite accablé. Que faire? Attendre et |
|
pleureraient. Le penseur médite accablé. Que faire? Attendre et |
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espérer, mais espérer à travers le carnage. De là un sinistre |
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espérer, mais espérer à travers le carnage. De là un sinistre |
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effarement. Le penseur, qui est toujours compliqué d'un prophète, a |
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effarement. Le penseur, qui est toujours compliqué d’un prophète, a |
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devant les yeux un tumulte, qui est l'avenir. Il cherchait du regard, |
|
devant les yeux un tumulte, qui est l’avenir. Il cherchait du regard, |
|
au delà de l'horizon, l'alliance et la fraternité, et il est condamné |
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au delà de l’horizon, l’alliance et la fraternité, et il est condamné |
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à entrevoir la haine. Rien n'est certain, mais tout menace. Tout est |
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à entrevoir la haine. Rien n’est certain, mais tout menace. Tout est |
|
obscur, mais sombre. Il pense et il souffre. Ses rêves d'inviolabilité |
|
obscur, mais sombre. Il pense et il souffre. Ses rêves d’inviolabilité |
|
de la vie humaine, d'abolition de la guerre, d'arbitrage entre |
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de la vie humaine, d’abolition de la guerre, d’arbitrage entre |
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les peuples et de paix universelle, sont traversés par de vagues |
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les peuples et de paix universelle, sont traversés par de vagues |
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flamboiements d'épées. |
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flamboiements d’épées. |
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En attendant on meurt, et ceux qui meurent laissent derrière eux ceux |
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En attendant on meurt, et ceux qui meurent laissent derrière eux ceux |
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qui pleurent. Patience. On n'est que précédé. Il est juste que le soir |
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qui pleurent. Patience. On n’est que précédé. Il est juste que le soir |
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vienne pour tous. Il est juste que tous montent l'un après l'autre |
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vienne pour tous. Il est juste que tous montent l’un après l’autre |
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recevoir leur paie. Les passe-droits ne sont qu'apparents. La tombe |
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recevoir leur paie. Les passe-droits ne sont qu’apparents. La tombe |
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n'oublie personne.
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n’oublie personne. |
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Un jour, bientôt peut-être, l'heure qui a sonné pour les fils sonnera |
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Un jour, bientôt peut-être, l’heure qui a sonné pour les fils sonnera |
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pour le père. La journée du travailleur sera finie. Son tour sera |
|
pour le père. La journée du travailleur sera finie. Son tour sera |
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venu; il aura l'apparence d'un endormi; on le mettra entre quatre |
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venu; il aura l’apparence d’un endormi; on le mettra entre quatre |
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planches, il sera ce quelqu'un d'inconnu qu'on appelle un mort, et on |
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planches, il sera ce quelqu’un d’inconnu qu’on appelle un mort, et on |
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le conduira à la grande ouverture sombre. Là est le seuil impossible |
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le conduira à la grande ouverture sombre. Là est le seuil impossible |
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à deviner. Celui qui arrive y est attendu par ceux qui sont arrivés. |
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à deviner. Celui qui arrive y est attendu par ceux qui sont arrivés. |
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Celui qui arrive est le bienvenu. Ce qui semble la sortie est pour lui |
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Celui qui arrive est le bienvenu. Ce qui semble la sortie est pour lui |
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l'entrée. Il perçoit distinctement ce qu'il avait obscurément
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l’entrée. Il perçoit distinctement ce qu’il avait obscurément |
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accepté; l'oeil de la chair se ferme, l'oeil de l'esprit s'ouvre, |
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accepté; l’oeil de la chair se ferme, l’oeil de l’esprit s’ouvre, |
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et l'invisible devient visible. Ce qui est pour les hommes le monde |
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et l’invisible devient visible. Ce qui est pour les hommes le monde |
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s'éclipse pour lui. Pendant qu'on fait silence autour de la fosse
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s’éclipse pour lui. Pendant qu’on fait silence autour de la fosse |
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béante, pendant que des pelletées de terre, poussière jetée à ce |
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béante, pendant que des pelletées de terre, poussière jetée à ce |
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qui va être cendre, tombent sur la bière sourde et sonore, l'âme |
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qui va être cendre, tombent sur la bière sourde et sonore, l’âme |
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mystérieuse quitte ce vêtement, le corps, et sort, lumière, de |
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mystérieuse quitte ce vêtement, le corps, et sort, lumière, de |
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l'amoncellement des ténèbres. Alors pour cette âme les disparus
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l’amoncellement des ténèbres. Alors pour cette âme les disparus |
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reparaissent, et ces vrais vivants, que dans l'ombre terrestre on |
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reparaissent, et ces vrais vivants, que dans l’ombre terrestre on |
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nomme les trépassés, emplissent l'horizon ignoré, se pressent, |
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nomme les trépassés, emplissent l’horizon ignoré, se pressent, |
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rayonnants, dans une profondeur de nuée et d'aurore, appellent |
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rayonnants, dans une profondeur de nuée et d’aurore, appellent |
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doucement le nouveau venu, et se penchent sur sa face éblouie avec ce |
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doucement le nouveau venu, et se penchent sur sa face éblouie avec ce |
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bon sourire qu'on a dans les étoiles. Ainsi s'en ira le travailleur |
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bon sourire qu’on a dans les étoiles. Ainsi s’en ira le travailleur |
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chargé d'années, laissant, s'il a bien agi, quelques regrets derrière |
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chargé d’années, laissant, s’il a bien agi, quelques regrets derrière |
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lui, suivi jusqu'au bord du tombeau par des yeux mouillés peut-être et |
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lui, suivi jusqu’au bord du tombeau par des yeux mouillés peut-être et |
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par de graves fronts découverts, et en même temps reçu avec joie dans |
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par de graves fronts découverts, et en même temps reçu avec joie dans |
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la clarté éternelle; et, si vous n'êtes pas du deuil ici-bas, vous |
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la clarté éternelle; et, si vous n’êtes pas du deuil ici-bas, vous |
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serez là-haut de la fête, ô mes bien-aimés! |
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serez là-haut de la fête, ô mes bien-aimés! |
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Je veux qu'après ma mort tous mes manuscrits non publiés, avec leurs |
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Je veux qu’après ma mort tous mes manuscrits non publiés, avec leurs |
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copies s'il en existe, et toutes les choses écrites de ma main que je |
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copies s’il en existe, et toutes les choses écrites de ma main que je |
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laisserai, de quelque nature qu'elles soient, je veux, dis-je, |
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laisserai, de quelque nature qu’elles soient, je veux, dis-je, |
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que tous mes manuscrits, sans exception, et quelle qu'en soit la |
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que tous mes manuscrits, sans exception, et quelle qu’en soit la |
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dimension, soient réunis et remis à la disposition des trois amis dont |
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dimension, soient réunis et remis à la disposition des trois amis dont |
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voici les noms: |
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voici les noms: |
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Ernest Lefèvre. |
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Ernest Lefèvre. |
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Je donne à ces trois amis plein pouvoir pour requérir l'exécution |
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Je donne à ces trois amis plein pouvoir pour requérir l’exécution |
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entière et complète de ma volonté. |
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entière et complète de ma volonté. |
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volantes. |
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volantes. |
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Je prie mes trois amis, ou l'un d'eux choisi par eux, de faire ce |
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Je prie mes trois amis, ou l’un d’eux choisi par eux, de faire ce |
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triage avec le plus grand soin et comme je le ferais moi-même, dans |
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triage avec le plus grand soin et comme je le ferais moi-même, dans |
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l'esprit et dans la pensée qu'ils me connaissent, et avec toute
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l’esprit et dans la pensée qu’ils me connaissent, et avec toute |
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l'amitié dont ils m'ont donné tant de marques.
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l’amitié dont ils m’ont donné tant de marques. |
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Je les prie de publier, avec des intervalles dont ils seront juges |
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Je les prie de publier, avec des intervalles dont ils seront juges |
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entre chaque publication: |
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entre chaque publication: |
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D'abord, les œuvres terminées;
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D’abord, les œuvres terminées; |
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Ensuite, les œuvres commencées et en partie achevées; |
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Ensuite, les œuvres commencées et en partie achevées; |
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Enfin, les fragments et idées éparses. |
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Enfin, les fragments et idées éparses. |
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Cette dernière catégorie d'œuvres, se rattachant à l'ensemble de |
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Cette dernière catégorie d’œuvres, se rattachant à l’ensemble de |
|
toutes mes idées, quoique sans lien apparent, formera, je pense, |
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toutes mes idées, quoique sans lien apparent, formera, je pense, |
|
plusieurs volumes, et sera publiée sous le titre OCÉAN. Presque tout |
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plusieurs volumes, et sera publiée sous le titre OCÉAN. Presque tout |
|
cela a été écrit dans mon exil. Je rends à la mer ce que j'ai reçu |
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cela a été écrit dans mon exil. Je rends à la mer ce que j’ai reçu |
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d’elle. |
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d'elle. |
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Pour assurer les frais de la publication de cet ensemble d'œuvres, il |
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Pour assurer les frais de la publication de cet ensemble d’œuvres, il |
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sera distrait de ma succession une somme de cent mille francs qui |
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sera distrait de ma succession une somme de cent mille francs qui |
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sera réservée et affectée auxdits frais. |
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sera réservée et affectée auxdits frais. |
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travail fait par chacun: |
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travail fait par chacun: |
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1° Sur la première catégorie d'œuvres, quinze pour cent du bénéfice |
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1° Sur la première catégorie d’œuvres, quinze pour cent du bénéfice |
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net; |
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net; |
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Indépendamment de ces trois catégories de publication, mes trois amis, |
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Indépendamment de ces trois catégories de publication, mes trois amis, |
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dans le cas où l'on jugerait à propos de publier mes lettres après ma |
|
dans le cas où l’on jugerait à propos de publier mes lettres après ma |
|
mort, sont expressément chargés par moi de cette publication, en vertu |
|
mort, sont expressément chargés par moi de cette publication, en vertu |
|
du principe que les lettres appartiennent, non à celui qui les a |
|
du principe que les lettres appartiennent, non à celui qui les a |
|
reçues, mais à celui qui les a écrites. Ils feront le triage de mes |
|
reçues, mais à celui qui les a écrites. Ils feront le triage de mes |
|
lettres et seront juges des conditions de convenance et d'opportunité |
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lettres et seront juges des conditions de convenance et d’opportunité |
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de cette publication. |
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de cette publication. |
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tous ces soins. |
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tous ces soins. |
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En cas de décès de l'un d'eux, ils désigneraient, s'il était |
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En cas de décès de l’un d’eux, ils désigneraient, s’il était |
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nécessaire, une tierce personne qui aurait leur confiance, pour le |
|
nécessaire, une tierce personne qui aurait leur confiance, pour le |
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remplacer. |
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remplacer. |
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Telles sont mes volontés expresses pour la publication de tous les |
|
Telles sont mes volontés expresses pour la publication de tous les |
|
manuscrits inédits, quels qu'ils soient, que je laisserai après ma |
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manuscrits inédits, quels qu’ils soient, que je laisserai après ma |
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mort. |
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mort. |
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J'ordonne que ces manuscrits soient immédiatement remis à MM. Paul
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J’ordonne que ces manuscrits soient immédiatement remis à MM. Paul |
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Meurice, Auguste Vacquerie et Ernest Lefèvre, pour qu'ils exécutent |
|
Meurice, Auguste Vacquerie et Ernest Lefèvre, pour qu’ils exécutent |
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mes intentions comme l'eussent fait mes fils bien-aimés que je vais |
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mes intentions comme l’eussent fait mes fils bien-aimés que je vais |
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rejoindre. |
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rejoindre. |
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Fait, et écrit de ma main, en pleine santé d'esprit et de corps, |
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Fait, et écrit de ma main, en pleine santé d’esprit et de corps, |
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aujourd'hui vingt-trois septembre mil huit cent soixante-quinze, à
|
|
aujourd’hui vingt-trois septembre mil huit cent soixante-quinze, à |
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Paris. |
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Paris. |
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Nous sommes profondément touchés de la confiance que Victor Hugo nous |
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Nous sommes profondément touchés de la confiance que Victor Hugo nous |
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témoigne et profondément reconnaissants de l'immense honneur qu'il |
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témoigne et profondément reconnaissants de l’immense honneur qu’il |
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nous fait en nous choisissant pour les metteurs en œuvre de ses |
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nous fait en nous choisissant pour les metteurs en œuvre de ses |
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manuscrits et pour les interprètes de sa pensée. |
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manuscrits et pour les interprètes de sa pensée. |
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Nous acceptons la mission. |
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Nous acceptons la mission. |
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Nous n'acceptons pas l'argent. |
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Nous n’acceptons pas l’argent. |
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Pendant trente ans, nous avons fait pour rien ce que Victor Hugo nous |
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Pendant trente ans, nous avons fait pour rien ce que Victor Hugo nous |
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demande de continuer. Il ne nous convient pas d'en être payés après sa |
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demande de continuer. Il ne nous convient pas d’en être payés après sa |
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mort plus que de son vivant. |
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mort plus que de son vivant. |
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bénéfices de la publication de ses manuscrits. Nous la donnons à |
|
bénéfices de la publication de ses manuscrits. Nous la donnons à |
|
tout ce gui servira sa mémoire et son œuvre. Un acte régulier en |
|
tout ce gui servira sa mémoire et son œuvre. Un acte régulier en |
|
déterminera et en constatera l'emploi. |
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déterminera et en constatera l’emploi. |
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Les premiers produits en seront attribués à la souscription pour le |
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Les premiers produits en seront attribués à la souscription pour le |
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Ligne 775 : |
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PAUL MEURICE.-AUGUSTE VACQUERIE. |
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PAUL MEURICE.-AUGUSTE VACQUERIE. |
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Extrêmement honoré d'avoir été associé par Victor Hugo au mandat de |
|
Extrêmement honoré d’avoir été associé par Victor Hugo au mandat de |
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MM. Paul Meurice et Auguste Vacquerie, je me joins à leur |
|
MM. Paul Meurice et Auguste Vacquerie, je me joins à leur |
|
déclaration: je refuse l'argent, et j'accepte la mission avec |
|
déclaration: je refuse l’argent, et j’accepte la mission avec |
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reconnaissance.-ERNEST LEFÈVRE. |
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reconnaissance.-ERNEST LEFÈVRE. |
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Depuis l’exil 1876-1885
Fin
Mes fils
1874
I
Un homme se marie jeune; sa femme et lui ont à eux deux trente-sept
ans. Après avoir été riche dans son enfance, il est devenu pauvre
dans sa jeunesse; il a habité des palais de passage, à présent il est
presque dans un grenier. Son père a été un vainqueur de l’Europe et
est maintenant un brigand de la Loire. Chute, ruine, pauvreté. Cet
homme, qui a vingt ans, trouve cela tout simple, et travaille.
Travailler, cela fait qu’on aime; aimer, cela fait qu’on se marie.
L’amour et le travail, les deux meilleurs points de départ pour la
famille; il lui en vient une. Le voilà avec des enfants. Il prend au
sérieux toute cette aurore. La mère nourrit l’enfant, le père nourrit
la mère. Plus de bonheur demande plus de travail. Il passait les
jours à la besogne, il y passera les nuits. Qu’est-ce qu’il fait? peu
importe. Un travail quelconque.
Sa vie est rude, mais douce. Le soir, avant de se mettre à l’œuvre
jusqu’à l’aube, il se couche à terre et les petits montent sur lui,
riant, chantant, bégayant, jouant. Ils sont quatre, deux garçons et
deux filles.
Les années passent, les enfants grandissent, l’homme mûrit. Avec le
travail un peu d’aisance lui est venue. Il habite dans de l’ombre et
dans de la verdure, aux Champs-Élysées. Il reçoit là des visites de
quelques travailleurs pauvres comme lui, d’un vieux chansonnier appelé
Béranger, d’un vieux philosophe appelé Lamennais, d’un vieux proscrit
appelé Chateaubriand. Il vit dans cette retraite, rêveur, s’imaginant
que les Champs-Élysées sont une solitude, destiné pourtant à la vraie
solitude plus tard. S’il écoute, il n’entend que des chants. Entre les
arbres et lui, il y a les oiseaux; entre les hommes et lui, il y a les
enfants.
La mère leur apprend à lire; lui, il leur apprend à écrire.
Quelquefois il écrit en même temps qu’eux sur la même table, eux des
alphabets et des jambages, lui autre chose; et, pendant qu’ils font
lentement et gravement des jambages et des alphabets, il expédie une
page rapide. Un jour, le plus jeune des deux garçons, qui a quatre
ans, s’interrompt, pose la plume, regarde son père écrire, et lui dit:
C’est drôle, quand on a de petites mains, on écrit tout gros, et
quand on a de grosses mains, on écrit tout petit.
Au père maître d’école succède le collège. Le père pourtant tient
à mêler au collège la famille, estimant qu’il est bon que les
adolescents soient le plus longtemps possible des enfants. Arrive,
pour ces petits à leur tour, la vingtième année; le père alors n’est
plus qu’une espèce d’aîné; car la jeunesse finissante et la jeunesse
commençante fraternisent, ce qui adoucit la mélancolie de l’une et
tempère l’enthousiasme de l’autre.
Ces enfants deviennent des hommes; et alors il se trouve que ce sont
des esprits. L’un, le premier-né, est un esprit alerte et vigoureux;
l’autre, le second, est un esprit aimable et grave. La lutte du
progrès veut des intelligences de deux sortes, les fortes et les
douces: le premier ressemble plus à l’athlète, le second à l’apôtre.
Leur père ne s’étonne pas d’être de plain-pied avec ces jeunes hommes;
et, en effet, comme on vient de le dire, il les sent frères autant que
fils.
Eux aussi, comme a fait leur père, ils prennent leur jeunesse avec
probité, et, voyant leur père travailler, ils travaillent. A quoi?
A leur siècle. Ils travaillent à l’éclaircissement des problèmes,
à l’adoucissement des âmes, à l’illumination des consciences, à la
vérité, à la liberté. Leurs premiers travaux sont récompensés; ils
sont décorés de bonne heure, l’un de six mois de prison, pour avoir
combattu l’échafaud, l’autre de neuf mois, pour avoir défendu le droit
d’asile. Disons-le en passant, le droit d’asile est mal vu. Dans un
pays voisin, il est d’usage que le ministre de l’intérieur ait un fils
qui organise des bandes chargées des assauts nocturnes aux partisans
du droit d’asile; si le fils ne réussit pas comme bandit, le père
réussit comme ministre; et celui qu’on n’a pu assassiner, on
l’expulse. De cette façon, la société est sauvée. En France, en
1851, pour mettre à la raison ceux qui défendent les vaincus et les
proscrits, on n’avait recours ni à la lapidation, ni à l’expulsion, on
se contentait de la prison. Les mœurs des gouvernements diffèrent.
Les deux jeunes hommes vont en prison; ils y sont ensemble; le père
s’y installe presque avec eux, faisant de la Conciergerie sa maison.
Cependant son tour vient à lui aussi. Il est forcé de s’éloigner
de France, pour des causes qui, si elles étaient rappelées ici,
troubleraient le calme de ces pages. Dans la grande chute de tout,
qui survient alors, le commencement d’aisance ébauché par son travail
s’écroule; il faudra qu’il recommence; en attendant, il faut qu’il
parte. Il part. Il s’éloigne par une nuit d’hiver. La pluie, la bise,
la neige, bon apprentissage pour une âme, à cause de la ressemblance
de l’hiver avec l’exil. Le regard froid de l’étranger s’ajoute
utilement au ciel sombre; cela trempe un cœur pour l’épreuve. Ce père
s’en va, au hasard, devant lui, sur une plage déserte, au bord de
la mer. Au moment où il sort de France, ses fils sortent de prison,
coïncidence heureuse, de façon qu’ils peuvent le suivre; il avait
partagé leur cellule, ils partagent sa solitude.
II
On vit ainsi. Les années passent. Que font-ils pendant ce temps-là?
Une chose simple, leur devoir. De quoi se compose pour eux le devoir?
de ceci: Persister. C’est-à-dire servir la patrie, l’aimer, la
glorifier, la défendre; vivre pour elle et loin d’elle; et, parce
qu’on est pour elle, lutter, et, parce qu’on est loin d’elle,
souffrir.
Servir la patrie est une moitié du devoir, servir l’humanité est
l’autre moitié; ils font le devoir tout entier. Qui ne le fait pas
tout entier, ne le fait pas, telle est la jalousie de la conscience.
Comment servent-ils l’humanité? en étant de bon exemple.
Ils ont une mère, ils la vénèrent; ils ont une sœur morte, ils la
pleurent; ils ont une sœur vivante, ils l’aiment; ils ont un père
proscrit, ils l’aident. A quoi? à porter la proscription. Il y a des
heures où cela est lourd. Ils ont des compagnons d’adversité, ils
se font leurs frères; et à ceux qui n’ont plus le ciel natal, ils
montrent du doigt l’espérance, qui est le fond du ciel de tous les
hommes. Il y a parfois dans ce groupe intrépide de vaincus des
instants de poignante angoisse. On en voit un qui se dresse la nuit
sur son lit et se tord les bras en criant: Dire que je ne suis plus
en France! Les femmes se cachent pour pleurer, les hommes se cachent
pour saigner. Ces deux jeunes bannis sont fermes et simples. Dans ces
ténèbres, ils brillent; dans cette nostalgie, ils persévèrent; dans ce
désespoir, ils chantent. Pendant qu’un homme, en ce moment-là empereur
des français et des anglais, vit dans sa demeure triomphale, baisé
des reines, vainqueur, tout-puissant et lugubre, eux, dans la maison
d’exil inondée d’écume, ils rient et sourient. Ce maître du monde et
de la minute a la tristesse de la prospérité misérable; eux, ils ont
la joie du sacrifice. Ils ne sont pas abandonnés d’ailleurs; ils ont
d’admirables amis: Vacquerie, le puissant et superbe esprit; Meurice,
la grande âme douce; Ribeyrolles, le vaillant cœur. Ces deux frères
sont dignes de ces fiers hommes-là. Aucune sérénité n’éclipse la
leur; que la destinée fasse ce qu’elle voudra, ils ont l’insouciance
héroïque des consciences heureuses. L’aîné, à qui l’on parle de
l’exil, répond: Cela ne me regarde pas . Ils prennent avec cordialité
leur part de l’agonie qui les entoure; ils pansent dans toutes les
âmes la plaie rongeante que fait le bannissement. Plus la patrie est
absente, plus elle est présente, hélas! Ils sont les points d’appui de
ceux qui chancellent; ils déconseillent les concessions que le mal du
pays pourrait suggérer à quelques pauvres êtres désorientés. En même
temps, ils répugnent à l’écrasement de leurs ennemis, même infâmes. Il
arrive un jour qu’on découvre, dans ce campement de proscrits, dans
cette famille d’expatriés, un homme de police, un traître affectant
l’air farouche, un agent de Maupas affublé du masque d’Hébert; toutes
ces probités indignées se soulèvent, on veut tuer le misérable, les
deux frères lui sauvent la vie. Qui use du droit de souffrance peut
user du droit de clémence. Autour d’eux, on sent que ces jeunes hommes
ont la foi, la vraie, celle qui se communique. De là, une certaine
autorité mêlée à leur jeunesse. Le proscrit pour la vérité est un
honnête homme dans l’acception hautaine du mot; ils ont cette grave
honnêteté-là. Toute défaillance à côté d’eux est impossible; ils
offrent leur robuste épaule à tous les accablements. Toujours debout
sur le haut de l’écueil, ils fixent sur l’énigme et sur l’ombre leur
regard tranquille, ils font le signal d’attente dès qu’ils voient
une lueur poindre à l’horizon, ils sont les vigies de l’avenir. Ils
répandent dans cette obscurité on ne sait quelle clarté d’aurore,
silencieusement remerciés par la douceur sinistre des résignés.
III
En même temps qu’ils accomplissent la loi de fraternité, ils exécutent
la loi du travail.
L’un traduit Shakespeare, et restitue à la France, dans un livre de
sagace peinture et d’érudition élégante, «la Normandie inconnue».
L’autre publie une série d’ouvrages solides et exquis, pleins d’une
émotion vraie, d’une bonté pénétrante, d’une haute compassion. Ce
jeune homme est tout simplement un grand écrivain. Comme tous les
puissants et abondants esprits, il produit vite, mais il couve
longtemps, avec la féconde paresse de la gestation; il a cette
préméditation que recommande Horace, et qui est la source des
improvisations durables. Son début dans le conte visionnaire (1856)
est un chef-d’œuvre. Il le dédie à Voltaire, et, détail qui montre la
magnifique envergure de ce jeune esprit, il eût pu en même temps le
dédier à Dante. Il a l’ironie comme Arouet et la foi comme Alighieri.
Son début au théâtre (1859) est un chef-d’œuvre aussi, mais un
chef-d’œuvre petit, un badinage de penseur, vivant, fuyant, rapide,
inoubliable, comédie légère et forte qui a la fragilité apparente des
choses ailées.
Ce jeune homme, pour qui le voit de près, semble toujours au repos, et
il est toujours en travail. C’est le nonchalant infatigable. Du reste,
il a autant de facultés qu’il fait d’efforts; il entre dans le roman,
c’est un maître; il aborde le théâtre, c’est un poëte; il se jette
dans les mêlées de la polémique, c’est un journaliste éclatant. Dans
ces trois régions, il est chez lui.
Toute son œuvre est mêlée, c’est-à-dire une. Et c’est encore la loi
des intelligences planantes, lesquelles voient tout l’horizon. Pas
de cloison dans cet esprit; ou rien que des cloisons apparentes. Ses
romans sont des tragédies; ses comédies sont des élégies, et elles
sont tristes, ce qui ne les empêche pas d’être joyeuses; versement de
la raillerie dans la mélancolie et de la colère dans le sarcasme,
qui, de tout temps, d’Aristophane à Plaute et de Plaute à Molière, a
caractérisé l’art suprême. Rire, quel motif de pleurer! Ce jeune homme
est fait comme ces grands hommes. Il médite, et sourit; il médite,
et s’indigne. Par moments, son intonation moqueuse prend subitement
l’accent tragique. Hélas! la sombre gaieté des penseurs sanglote.
Pour ces causes et pour d’autres, ce jeune écrivain a dans le style
cet imprévu qui est la vie. L’inattendu dans la logique, c’est le
souverain secret des écrivains supérieurs. On ne sait pas assez ce que
c’est que le style. Pas de grand style sans grande pensée. Le style
contient aussi nécessairement la pensée que le fruit contient la sève.
Qu’est-ce donc que le style? C’est l’idée dans son expression absolue,
c’est l’image sous sa figure parfaite; tout ce qu’est la pensée, le
style l’est; le style, c’est le mot fait âme; le style, c’est
le langage fait verbe. Otez le style, Virgile s’efface, Horace
s’évanouit, Tacite disparaît. On a de nos jours imaginé un barbarisme
curieux: «les stylistes». Il y a une trentaine d’années, une école
imbécile de critiques, oubliée aujourd’hui, faisait tous ses efforts
pour insulter le style, et l’appelait: «la forme». Quelle insulte!
forma , la beauté. La Vénus hottentote dit à la Vénus de Milo: Tu
n’as que la forme!
Les œuvres succèdent aux œuvres; après la Bohême dorée, la Famille
tragique ; créations composées de divination et d’observation, où
l’ironie se décompose en pitié, où l’intérêt dramatique arrive parfois
à l’effroi, où l’intelligence se dilate en même temps que le cœur se
serre.
Toutes ces qualités, style, émotion, bonté d’écrivain, vertu de poëte,
dignité d’artiste, ce jeune homme les concentre et les condense dans
un grand livre, les Hommes de l’exil . Ce livre est un grand livre
politique, pourquoi? parce que c’est un grand livre littéraire. Qui
dit littérature , dit humanité . Ce livre, les Hommes de l’exil ,
est une protestation et un défi; protestation soumise à Dieu, défi
jeté aux tyrans. L’âme est le personnage, l’exil est le drame; les
martyrs sont divers, le martyre est un; l’épreuve varie, les éprouvés,
non. Cette sévère peinture restera. Ce livre austère et tragique
est un livre d’amour; amour pour la vérité, pour l’équité, pour la
probité, pour la souffrance, pour le malheur, pour la grandeur; de là
une haine profonde contre ce qui est vil, lâche, injuste et bas. Ce
livre est implacable; pourquoi? parce qu’il est tendre.
Partout la justice, et partout la pitié; la belle âme exprimée par le
beau style; tel est ce jeune écrivain.
Ajoutons à ce don de la nature, le pathétique, un don de la solitude,
la philosophie.
Insistons sur cette philosophie. L’isolement développe dans les âmes
profondes une sagesse d’une espèce particulière, qui va au delà de
l’homme. C’est cette sagesse étrange qui a créé l’antique magisme.
Ce jeune homme, dans le désert de Jersey et dans le crépuscule de
Guernesey, est, comme les autres solitaires pensifs qui l’entourent,
atteint par cette sagesse. Une intuition presque visionnaire donne à
plusieurs de ses ouvrages, comme à d’autres œuvres des hommes du
même groupe, une portée singulière; chose qu’on ne peut pas ne point
souligner, ce qui préoccupe ce jeune esprit, c’est ce qui préoccupe
aussi les vieux; à ce commencement de la vie où il semble qu’on a le
droit d’être uniquement absorbé par la préparation de soi-même, ce qui
inquiète ce penseur, lumineux et serein jusqu’à l’éclat de rire, mais
attendri, ce qui l’émeut et le tourmente, c’est le côté impénétrable
du destin; c’est le sort des êtres condamnés au cri ou au silence,
bêtes, plantes, de ce qu’on appelle l’animal, de ce qu’on appelle le
végétal; il lui semble voir là des déshérités; il se penche vers eux;
il constate qu’ils sont hors de la liberté, et presque de la lumière;
il se demande qui les a chassés dans cette ombre, et il oublie, en
se courbant sur ces bannis, qu’il est lui-même un exilé. Superbe
commisération, fraternité de l’être parlant pour les êtres muets,
noble augmentation de l’amour de l’humanité par la douceur envers
la création. Les vivants d’en bas, quelle énigme! Inferi , mot
mystérieux; les inférieurs. L’Enfer. Creusez le rêve des religions,
vous trouverez au fond la vérité. Seulement, les religions interposées
la défigurent par leur grossissement. Toute vie infernale, étant
une vie planétaire, est une vie passagère: la vie céleste seule est
éternelle.
IV
Ces deux frères sont comme le complément l’un de l’autre: l’aîné est
le rayonnant, le plus jeune est l’austère. Austérité aimable comme
celle d’un jeune Socrate. Sa présence est fortifiante; rien n’est sain
et rien n’est rassurant comme l’imperturbable aménité de l’ouvrier
content. Ce jeune exilé volontaire conserve, dans le désert où l’on
est pour jamais peut-être, les élégances de sa vie passée, et en même
temps il se met à la tâche; il veut construire, et il construit un
monument; il ne perd pas une heure, il a le respect religieux du
temps; ses habitudes sont à la fois parisiennes et monacales. Il
habite une chambre encombrée de livres. Au point du jour il entend
marcher au-dessus de sa tête, sur le toit de la maison, quelqu’un qui
travaille; c’est son père; ce pas le réveille; alors il se lève et
travaille aussi. Ce qu’il fait, on l’a vu plus haut, il traduit
Shakespeare; entreprise considérable. Il traduit Shakespeare; il
l’interprète, il le commente, il le fait accessible à tous; il taille
degré par degré dans la roche et dans le glacier on ne sait quel
vertigineux escalier qui aboutit à cette cime. On a bien raison
de dire que ces proscrits-là sont des ambitieux; celui-ci rêve la
familiarité avec les génies, il se dit: Je traduirai plus tard de la
même façon Homère, Eschyle, Isaïe et Dante. En attendant, il tient
Shakespeare. Conquête illustre à faire. Introduire Shakespeare en
France, quel vaste devoir! Ce devoir, il l’accepte; il s’y engage, il
s’y enferme; il sait que sa vie désormais sera liée par cette promesse
faite au nom de la France au grand homme de l’Angleterre; il sait
que ce grand homme de l’Angleterre est un des grands hommes du genre
humain tout entier, et que servir cette gloire, c’est servir la
civilisation même; il sait qu’une telle entreprise est impérieuse,
qu’elle sera exigeante et altière, et qu’une fois commencée elle ne
peut être ni interrompue ni abandonnée; il sait qu’il en a pour douze
ans; il sait que c’est là une autre cellule, et qu’il se condamne au
cloître, et que lorsqu’on entre dans un tel labeur, on y est muré;
il y consent, et, de même qu’il s’est exilé pour son père, il
s’emprisonne pour Shakespeare.
Sa récompense, c’est son effort même. Il a voulu traduire Shakespeare,
et, en effet, voilà Shakespeare traduit. Il a renouvelé l’effrayant
combat nocturne de Jacob; il ajouté avec l’archange, et son jarret n’a
pas plié. Il est l’écrivain qu’il fallait.
L’anglais de Shakespeare n’est plus l’anglais d’à présent; il a été
nécessaire de superposer à cet anglais du seizième siècle le français
du dix-neuvième, sorte de corps à corps des deux idiomes; la plus
redoutable aventure où puisse se hasarder un traducteur: ce jeune
homme a eu cette audace. Ce qu’il a entrepris de faire, il l’a fait.
Il importait de ne rien perdre de l’œuvre énorme. Il a mis sur
Shakespeare la langue française, et il a réussi à faire passer, à
travers l’inextricable claire-voie de deux idiomes appliqués l’un sur
l’autre, tout le rayonnement de ce génie.
Pour cela, il a dû dépenser, à chaque phrase, à chaque vers, presque à
chaque mot, une inépuisable invention de style. Pour une telle œuvre,
il faut que le traducteur soit créateur. Il l’a été.
Un écrivain qui prouve son originalité par une traduction, c’est
étrange et rare. Traduire ne lui suffit pas. Il bâtit autour de
Shakespeare, comme des contreforts autour d’une cathédrale, toute une
œuvre à lui, œuvre de philosophie, de critique, d’histoire. Il est
linguiste, artiste, grammairien, érudit. Il est docte et alerte;
toujours savant, jamais pédant. Il accumule et coordonne les
variantes, les notes, les préfaces, les explications. Il condense tout
ce qui est épars dans les environs de Shakespeare. Pas un antre de
cette caverne immense où il ne pénètre. Il fait des fouilles dans ce
génie.
V
Et c’est ainsi qu’après douze années de labeur, il fait à la France
don de Shakespeare. Les vrais traducteurs ont cette puissance
singulière d’enrichir un peuple sans appauvrir l’autre, de ne point
dérober ce qu’ils prennent, et de donner un génie à une nation sans
l’ôter à sa patrie.
Cette longue incubation se fait sans qu’il l’interrompe un seul jour.
Aucune solution de continuité, pas de relâche, aucune lacune, aucune
concession à la fatigue, toutes les aurores ramènent la besogne;
nulla dies sine linea ; c’est là, du reste, la bonne loi des fiers
esprits. L’œuvre qu’on accomplit et qu’on voit croître est par
elle-même reposante. Aucun autre repos n’est nécessaire. Ce jeune
homme le comprend ainsi; il ne quitte jamais sa tâche; il s’éveille
chaque matin dès qu’il entend le marcheur d’en haut s’éveiller; et
quand, l’heure de la table de famille venue, ils redescendent tous les
deux de leur travail, son père et lui, ils échangent un doux sourire.
Isolement, intimité, renoncement, apaisement de la nostalgie par la
pensée; telle est la vie de ces hommes. Pour horizon le brouillard
des flots et des événements, pour musique le vent de tempête, pour
spectacle la mobilité d’un infini, la mer, sous la fixité d’un autre
infini, le ciel. On est des naufragés, on regarde les abîmes. Tout a
sombré, hors la conscience; navire dont il ne reste que la boussole.
Dans cette famille personne n’a rien à soi; tout est en commun,
l’effort, la résistance, la volonté, l’âme. Ce père et ces fils
resserrent de plus en plus leur étroit embrassement.
Il est probable qu’ils souffrent, mais ils ne se le disent pas;
chacun s’absorbe et se rassérène dans son œuvre diverse; dans les
intermittences, le soir, aux réunions de famille, aux promenades sur
la plage, ils parlent. De quoi? de quoi peuvent parler des proscrits,
si ce n’est de la patrie? Cette France, ils l’adorent; plus l’exil
s’aggrave, plus l’amour augmente. Loin des yeux, près du cœur. Ils
ont toutes les grandes convictions, ce qui leur donne toutes les
grandes certitudes. On a agi de son mieux; on a fait ce qu’on a pu;
quelle récompense veut-on? Une seule. Revoir la patrie. Eh bien, on la
reverra. Comme on y était heureux, et comme on y sera heureux encore!
Certes, l’heure bénie du retour sonnera. On les attend là-bas. Ainsi
parlent ces bannis. La causerie finie, on se remet au travail. Toutes
les journées se ressemblent. Cela dure dix-neuf ans. Au bout de
dix-neuf ans l’exil cesse, ils rentrent, les voilà dans la patrie; ils
sont attendus en effet, eux par la tombe, lui par la haine.
VI
Est-ce que ceci est une plainte? Point. Et de quel droit la plainte?
Et vers qui se tournerait-elle? Vers vous, Dieu? Non. Vers toi,
patrie? Jamais.
Qui pourrait songer à la France autrement que reconnaissant et
attendri? Et pour cet homme-là, pour ce père, n’y a-t-il pas trois
journées inoubliables, le 5 septembre 1870, le 18 mars 1871, le 28
décembre 1873! Le 5 septembre 1870, il rentra dans la patrie, la
France; le 18 mars 1871, le 28 décembre 1873, ses fils rentrèrent,
l’un après l’autre, dans l’autre patrie, le sépulcre; et à ces trois
rentrées, tu vins de toutes parts faire cortége, ô immense peuple de
Paris! Tu y vins tendre, ému, magnanime, avec ce profond murmure des
foules qui ressemble parfois au bercement des mères. Depuis ces trois
jours ineffaçables, y a-t-il eu quelque part, n’importe où, dans des
régions quelconques, de la calomnie, de l’insulte et de la haine? Cela
se peut, mais pourquoi pas? et à qui cela fait-il du mal? à ceux qui
haïssent peut-être. Plaignons-les. Le peuple est grand et bon. Le
reste n’est rien. Il faudrait pour s’en émouvoir n’avoir jamais vu
l’océan. Qu’importe une vaine surface écumante quand le fond est
majestueusement ami et paisible! Se plaindre de la patrie, lui
reprocher quoi que ce soit, non, non, non! Même ceux qui meurent par
elle vivent par elle.
Quant à vous, Dieu, que vous dire? Est-ce que vous n’êtes pas
l’Ignoré? Que savons-nous sinon que vous êtes et que nous sommes?
Est-ce que nous nous connaissons, ô mystère! Éternel Dieu, vous faites
tourner sur ses gonds la porte de la tombe, et vous savez pourquoi.
Nous faisons la fosse, et vous ce qui est au delà. Au trou dans la
terre s’ajuste une ouverture dans le firmament. Vous vous servez
du sépulcre comme nous du creuset, et, l’indivisible étant
l’incorruptible, rien ne se perd, ni l’atome matériel, la molécule
dans le creuset, ni l’atome moral, le moi, dans le tombeau. Vous
maniez la destinée humaine; vous abrégez la jeunesse, vous prolongez
la vieillesse; vous avez vos raisons. Dans notre crépuscule, nous
qui sommes le relatif, nous nous heurtons à tâtons à vous qui êtes
l’absolu, et ce n’est pas sans meurtrissure que nous faisons la
rencontre obscure de vos lois. Vous êtes calomnié vous aussi; les
religions vous appellent jaloux, colère, vengeur; par moments elles
plaident vos circonstances atténuantes; voilà ce que font les
religions. La religion vous vénère. Aussi la religion a-t-elle pour
ennemies les religions. Les religions croient l’absurde. La religion
croit le vrai. Dans les pagodes, dans les mosquées, dans les
synagogues, du haut des chaires et au nom des dogmes, on vous
conseille, on vous exhorte, on vous interprète, on vous qualifie; les
prêtres se font vos juges, les sages non. Les sages vous acceptent.
Accepter Dieu, c’est là le suprême effort de la philosophie. Nos
propres dimensions nous échappent à nous-mêmes. Vous les connaissez,
vous; vous avez la mesure de tout et de tous. Les lois de percussion
sont diverses. Tel homme est frappé plus souvent que les autres; il
semble qu’il ne soit jamais perdu de vue par le destin. Vous savez
pourquoi. Nous ne voyons que des raccourcis; vous seul connaissez les
proportions véritables. Tout se retrouvera plus tard. Chaque chiffre
aura son total. Vivre ne donne sur la terre pas d’autre droit que
mourir, mais mourir donne tous les droits. Que l’homme fasse son
devoir, Dieu fera le sien. Nous sommes à la fois vos débiteurs et vos
créanciers; relation naturelle des fils au père. Nous savons que nous
venons de vous; nous sentons confusément, mais sûrement, le point
d’attache de l’homme à Dieu; de même que le rayon a conscience du
soleil, notre immortalité a conscience de votre éternité. Elles se
prouvent l’une par l’autre; cercle sublime. Vous êtes nécessairement
juste puisque vous êtes; et que ni le mal ni la mort n’existent. Vous
ne pouvez pas être autre chose que la bonté au haut de la vie et la
clarté au fond du ciel. Nous ne pouvons pas plus vous nier que nous
ne pouvons nier l’infini. Vous êtes l’illimité évident. La vie
universelle, c’est vous; le ciel universel, c’est vous. Votre bonté
est la chaleur de votre clarté; votre vérité est le rayon de votre
amour. L’homme ne peut que bégayer à jamais un essai de vous
comprendre. Il travaille, souffre, aime, pleure et espère à travers
cela. Devant vous, abaisser nos fronts, c’est élever nos esprits.
C’est là tout ce que nous avons à vous dire, ô Dieu.
VII
Pas de plainte donc. Nous n’avons tout au plus droit qu’à
l’étonnement. L’étonnement contient toute la quantité de protestation
permise à cet immense ignorant qui est l’homme. Et ce douloureux
étonnement, comment le réserver pour soi quand la France le réclame?
Comment songer aux douleurs privées en présence de l’affliction
publique? Une telle patrie prend toute la place. Que chacun ait
sa blessure à lui, soit, mais qu’il la cache en présence du flanc
saignant de notre mère. Ah! quels songes on faisait! On était mis hors
la loi, expulsé, banni, rebanni, proscrit, reproscrit; tel homme qui a
des cheveux blancs a été chassé quatre fois, d’abord de France, puis
de Belgique, puis de Jersey, puis de Belgique encore; eh bien, quoi?
on était des exilés. On souriait. On disait: Oui, mais la France!
La France est là, toujours grande, toujours belle, toujours adorée,
toujours France! Il y a un voile entre elle et nous, mais un de ces
jours l’empire se déchirera du haut en bas, et, derrière la déchirure
lumineuse, la France reparaîtra! La France reparaîtra, quel
éblouissement! Dans sa splendeur, dans sa gloire, dans sa majesté
fraternelle aux nations, avec toute sa couronne comme une reine, avec
toute son auréole comme une déesse, puissante et libre, puissante
pour protéger, libre pour délivrer! Voilà ce qui est triste, c’est
de s’être dit cela. Hélas, on rêvait l’apothéose, on a le pilori. La
patrie a été foulée aux pieds par cette sauvage, la guerre étrangère,
et par cette folle, la guerre civile; l’une a essayé d’assassiner la
civilisation et de supprimer le chef-lieu du monde; l’autre a brûlé
les deux crèches sacrées de la Révolution, les Tuileries, nid de la
Convention, l’hôtel de ville, nid de la Commune. On a profité de la
présence des prussiens pour jeter bas la colonne d’Iéna. On leur a
ajouté cette joie. On a tué des vieillards, on a tué des femmes, on
a tué des petits enfants. On a été des gens ivres qui ne savent
ce qu’ils font. On a creusé des fosses immenses où l’on a enterré
pêle-mêle, et à demi morts, le juste et l’injuste, le faux et le vrai,
le bien et le mal. On a voulu abattre cette géante, Paris; on a voulu
ressusciter ce fantôme, Versailles. On a eu des incendies dignes
d’Érostrate et des fratricides dignes d’Atrée. Qui a fait ces crimes?
Personne et tout le monde; ces deux exécrables anonymes, la guerre
étrangère et la guerre civile; les barbares, qui en sont venus aux
mains, stupidement, des deux côtés à la fois, du côté orageux où
sont les aigles, du côté ténébreux où sont les hiboux, enjambant
la frontière, enjambant la muraille, ceux-ci franchissant le Rhin,
ceux-là ensanglantant la Seine, tous franchissant et ensanglantant la
conscience humaine, sans pouvoir dire pourquoi, sans rien comprendre,
sinon que le vent qui passe les avait mis en colère. Attentats des
ignorants. Aussi bien des ignorants d’en haut que des ignorants d’en
bas. Attentats des innocents aussi, car l’ignorance est une innocence.
Férocités farouches. Qui plaindre? les vaincus et les vainqueurs. Oh!
voir à terre, gisant, inerte, souffleté, le cadavre de notre gloire!
Et la vérité! et la justice! et la raison! et la liberté! toutes ces
artères sont ouvertes. Nous sommes saignés aux quatre veines de notre
honneur. Pourtant nos soldats ont été héroïques, et certes le seront
encore. Mais quels désastres! Rien n’est crime, tout est fatalité! Les
vieilles calamités de Ninive, de Thèbes et d’Argos sont dépassées.
Personne qui n’ait sa plaie, laquelle est la plaie publique. Et, à
travers tout cela, aggravation lugubre, il vous vient par moments
cette pensée poignante qu’à cette heure il y a, à cinq mille lieues
d’ici, loin de leur mère, des enfants de vingt ans condamnés à mort,
puis au bagne, pour un article de journal. O pauvres hommes! éternelle
pitié! fanatismes contre fanatismes. Hélas! fanatiques, nous le sommes
tous. Celui qui écrit ces lignes, est un fanatique lui-même; fanatique
de progrès, de civilisation, de paix et de clémence; inexorable pour
les impitoyables; intolérant pour les intolérants. Frappons-nous la
poitrine.
Oui, ces choses sombres ont été accomplies. On a vu cela, et, à cette
heure, que voit-on? La joie des rois assis comme des bourreaux sur un
démembrement. Après les écartèlements, cela se fait; et Charlot, avant
de les jeter au bûcher, s’accroupit et se reposa un moment sur les
lamentables tronçons de Damiens, comme Guillaume sur l’Alsace et la
Lorraine. Guillaume, du reste, n’est pas plus coupable que Charlot; les
bourreaux sont innocents; les responsables sont les juges; l’histoire
dira quels ont été, dans l’affreux traité de 1871, les juges de la
France. Ils ont fait une paix pleine de guerre. Ah! les infortunés! A
cette heure, ils règnent, ils sont princes, et se croient maîtres.
Ils sont heureux de tout le bonheur que peut donner une tranquillité
violente; ils ont la gloire d’un immense sang répandu; ils se pensent
invulnérables, ils sont cuirassés de toute-puissance et de néant; ils
préparent, au milieu des fêtes, dans la splendeur de leur imbécillité
souveraine, la dévastation de l’avenir; quand on leur parle de
l’immortalité des nations, ils jugent de cette immortalité par leur
majesté à eux-mêmes, et ils en rient; ils se croient de bons tueurs,
et pensent avoir réussi; ils se figurent que c’est fait, que les
dynasties en ont fini avec les peuples; ils s’imaginent que la tête du
genre humain est décidément coupée, que la civilisation se résignera
à cette décapitation, qu!est-ce que Paris de plus ou de moins? Ils se
persuadent que Metz et Strasbourg deviendront de l’ombre, qu’il y aura
prescription pour ce vol, que nous en prendrons notre parti, que la
nation-chef sera paisiblement la nation-serve, que nous descendrons
jusqu’à l’acceptation de leur pourpre épouvantable, que nous n’avons
plus ni bras, ni mains, ni cerveau, ni entrailles, ni cœur, ni
esprit, ni sabre au côté, ni sang dans les veines, ni crachat dans la
bouche, que nous sommes des idiots et des infâmes, et que la France,
qui a rendu l’Amérique à l’Amérique, l’Italie à l’Italie, et la Grèce
à la Grèce, ne saura pas rendre la France à la France.
Ils croient cela, ô frémissement!
VIII
Et cependant la nuée monte; elle monte, pareille à la mystérieuse
colonne conductrice, noire sur l’azur, rouge sur l’ombre. Elle emplit
lentement l’horizon. Les vieillards la redoutent pour les enfants, et
les enfants la saluent. Une funeste inclémence germe. Les rancunes
couvent les représailles; les plus doux se sentent confusément
implacables; les augustes promiscuités fraternelles ne sont plus
de saison; la frontière redevient barrière; on recommence à être
national, et le plus cosmopolite renonce à la neutralité; adieu la
mansuétude des philosophes! entre l’humanité et l’homme la patrie se
dresse, terrible. Elle regarde les sages, indignée. Qu’ils ne viennent
plus parler d’union, d’harmonie et de paix! Pas de paix, que la
tête haute! Voilà ce que veut la patrie. Ajournement de la concorde
humaine. Oh! la misérable aventure! Les échéances sont inévitables;
on entend sourdre sous terre les catastrophes semées, et sur leur
croissance, de plus en plus distincte, on peut calculer l’heure de
leur éclosion. Nul moyen d’échapper. L’avenir est plein d’arrivées
fatales. Eschyle, s’il était français, et Jérémie, s’il était teuton,
pleureraient. Le penseur médite accablé. Que faire? Attendre et
espérer, mais espérer à travers le carnage. De là un sinistre
effarement. Le penseur, qui est toujours compliqué d’un prophète, a
devant les yeux un tumulte, qui est l’avenir. Il cherchait du regard,
au delà de l’horizon, l’alliance et la fraternité, et il est condamné
à entrevoir la haine. Rien n’est certain, mais tout menace. Tout est
obscur, mais sombre. Il pense et il souffre. Ses rêves d’inviolabilité
de la vie humaine, d’abolition de la guerre, d’arbitrage entre
les peuples et de paix universelle, sont traversés par de vagues
flamboiements d’épées.
En attendant on meurt, et ceux qui meurent laissent derrière eux ceux
qui pleurent. Patience. On n’est que précédé. Il est juste que le soir
vienne pour tous. Il est juste que tous montent l’un après l’autre
recevoir leur paie. Les passe-droits ne sont qu’apparents. La tombe
n’oublie personne.
Un jour, bientôt peut-être, l’heure qui a sonné pour les fils sonnera
pour le père. La journée du travailleur sera finie. Son tour sera
venu; il aura l’apparence d’un endormi; on le mettra entre quatre
planches, il sera ce quelqu’un d’inconnu qu’on appelle un mort, et on
le conduira à la grande ouverture sombre. Là est le seuil impossible
à deviner. Celui qui arrive y est attendu par ceux qui sont arrivés.
Celui qui arrive est le bienvenu. Ce qui semble la sortie est pour lui
l’entrée. Il perçoit distinctement ce qu’il avait obscurément
accepté; l’oeil de la chair se ferme, l’oeil de l’esprit s’ouvre,
et l’invisible devient visible. Ce qui est pour les hommes le monde
s’éclipse pour lui. Pendant qu’on fait silence autour de la fosse
béante, pendant que des pelletées de terre, poussière jetée à ce
qui va être cendre, tombent sur la bière sourde et sonore, l’âme
mystérieuse quitte ce vêtement, le corps, et sort, lumière, de
l’amoncellement des ténèbres. Alors pour cette âme les disparus
reparaissent, et ces vrais vivants, que dans l’ombre terrestre on
nomme les trépassés, emplissent l’horizon ignoré, se pressent,
rayonnants, dans une profondeur de nuée et d’aurore, appellent
doucement le nouveau venu, et se penchent sur sa face éblouie avec ce
bon sourire qu’on a dans les étoiles. Ainsi s’en ira le travailleur
chargé d’années, laissant, s’il a bien agi, quelques regrets derrière
lui, suivi jusqu’au bord du tombeau par des yeux mouillés peut-être et
par de graves fronts découverts, et en même temps reçu avec joie dans
la clarté éternelle; et, si vous n’êtes pas du deuil ici-bas, vous
serez là-haut de la fête, ô mes bien-aimés!
TESTAMENT LITTÉRAIRE
1875
Je veux qu’après ma mort tous mes manuscrits non publiés, avec leurs
copies s’il en existe, et toutes les choses écrites de ma main que je
laisserai, de quelque nature qu’elles soient, je veux, dis-je,
que tous mes manuscrits, sans exception, et quelle qu’en soit la
dimension, soient réunis et remis à la disposition des trois amis dont
voici les noms:
Paul Meurice,
Auguste Vacquerie,
Ernest Lefèvre.
Je donne à ces trois amis plein pouvoir pour requérir l’exécution
entière et complète de ma volonté.
Je les charge de publier mes manuscrits de la façon que voici:
Lesdits manuscrits peuvent être classés en trois catégories:
Premièrement, les œuvres tout à fait terminées;
Deuxièmement, les œuvres commencées, terminées en partie, mais non
achevées;
Troisièmement, les ébauches, fragments, idées éparses, vers ou
prose, semées çà et là, soit dans mes carnets, soit sur des feuilles
volantes.
Je prie mes trois amis, ou l’un d’eux choisi par eux, de faire ce
triage avec le plus grand soin et comme je le ferais moi-même, dans
l’esprit et dans la pensée qu’ils me connaissent, et avec toute
l’amitié dont ils m’ont donné tant de marques.
Je les prie de publier, avec des intervalles dont ils seront juges
entre chaque publication:
D’abord, les œuvres terminées;
Ensuite, les œuvres commencées et en partie achevées;
Enfin, les fragments et idées éparses.
Cette dernière catégorie d’œuvres, se rattachant à l’ensemble de
toutes mes idées, quoique sans lien apparent, formera, je pense,
plusieurs volumes, et sera publiée sous le titre OCÉAN. Presque tout
cela a été écrit dans mon exil. Je rends à la mer ce que j’ai reçu
d’elle.
Pour assurer les frais de la publication de cet ensemble d’œuvres, il
sera distrait de ma succession une somme de cent mille francs qui
sera réservée et affectée auxdits frais.
MM. Paul Meurice, Auguste Vacquerie et Ernest Lefèvre, après les frais
payés, recevront, pour se les partager entre eux dans la proportion du
travail fait par chacun:
1° Sur la première catégorie d’œuvres, quinze pour cent du bénéfice
net;
2° Sur la deuxième catégorie, vingt-cinq pour cent du bénéfice net;
3° Sur la troisième catégorie, qui exigera des notes, des préfaces
peut-être, beaucoup de temps et de travail, cinquante pour cent du
bénéfice net.
Indépendamment de ces trois catégories de publication, mes trois amis,
dans le cas où l’on jugerait à propos de publier mes lettres après ma
mort, sont expressément chargés par moi de cette publication, en vertu
du principe que les lettres appartiennent, non à celui qui les a
reçues, mais à celui qui les a écrites. Ils feront le triage de mes
lettres et seront juges des conditions de convenance et d’opportunité
de cette publication.
Ils recevront sur le bénéfice net de la publication de mes lettres
cinquante pour cent .
Je les remercie du plus profond de mon cœur de vouloir bien prendre
tous ces soins.
En cas de décès de l’un d’eux, ils désigneraient, s’il était
nécessaire, une tierce personne qui aurait leur confiance, pour le
remplacer.
Telles sont mes volontés expresses pour la publication de tous les
manuscrits inédits, quels qu’ils soient, que je laisserai après ma
mort.
J’ordonne que ces manuscrits soient immédiatement remis à MM. Paul
Meurice, Auguste Vacquerie et Ernest Lefèvre, pour qu’ils exécutent
mes intentions comme l’eussent fait mes fils bien-aimés que je vais
rejoindre.
Fait, et écrit de ma main, en pleine santé d’esprit et de corps,
aujourd’hui vingt-trois septembre mil huit cent soixante-quinze, à
Paris.
VICTOR HUGO.
Le lendemain du jour où ce testament fut rendu public, les journaux
insérèrent les déclarations qui suivent:
Nous sommes profondément touchés de la confiance que Victor Hugo nous
témoigne et profondément reconnaissants de l’immense honneur qu’il
nous fait en nous choisissant pour les metteurs en œuvre de ses
manuscrits et pour les interprètes de sa pensée.
Nous acceptons la mission.
Nous n’acceptons pas l’argent.
Pendant trente ans, nous avons fait pour rien ce que Victor Hugo nous
demande de continuer. Il ne nous convient pas d’en être payés après sa
mort plus que de son vivant.
Nous renonçons entièrement et irrévocablement à notre part dans les
bénéfices de la publication de ses manuscrits. Nous la donnons à
tout ce gui servira sa mémoire et son œuvre. Un acte régulier en
déterminera et en constatera l’emploi.
Les premiers produits en seront attribués à la souscription pour le
monument.
PAUL MEURICE.-AUGUSTE VACQUERIE.
Extrêmement honoré d’avoir été associé par Victor Hugo au mandat de
MM. Paul Meurice et Auguste Vacquerie, je me joins à leur
déclaration: je refuse l’argent, et j’accepte la mission avec
reconnaissance.-ERNEST LEFÈVRE.