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envoyé de Maurice, le chevalier de Valfons. « — Eh bien ! lui dit-il, où sont les ennemis ? — A une lieue et demie de Votre Majesté, répondit le chevalier. — Et le maréchal ? — A une lieue en avant, plus près des ennemis. » — C’était lui dire que Cumberland était arrivé, et, en effet, l’avant-garde des alliés était déjà en vue du poste où l’attendait Maurice. — « Et que dit le maréchal ? — Il demande les ordres de Votre Majesté, pour savoir s’il doit attaquer. — Et qu’en pense-t-il ? — Il suivra exactement l’ordre que Votre Majesté lui donnera. — Eh bien, il faut attaquer sans hésiter. Montrez-moi le chemin pour aller retrouver le maréchal. »

Dès que le roi fut arrivé sur l’éminence de Herderen, le maréchal qui, au fond de l’âme, on l’a vu, regrettait la direction qu’on lui avait fait suivre, et ne trouvait peut-être pas le terrain du combat très bien choisi, se mit en devoir de lui expliquer qu’il était encore temps d’arrêter l’armée, puisqu’elle n’avait pas quitté les environs de Tongres ; on abandonnerait ainsi, à la vérité, le dessein de mettre immédiatement le siège devant Maestricht, mais pour le reprendre plus tard après une victoire remportée, dans des conditions plus favorables. Le roi maintint sa résolution, et l’attaque fut décidée pour le lendemain.

Valfons raconte dans ses souvenirs que ce fut même la présence du roi, à ce poste avancé, qui prévint une surprise, dont l’effet eût pu être fâcheux. Le maréchal (nullement décidé, au fond du cœur, à engager la partie) n’avait pas suffisamment garni les passages par lesquels l’armée française pouvait arriver au rendez-vous, et les Autrichiens, en poussant tout de suite vivement leur pointe, auraient pu s’en emparer ; mais averti par des éclaireurs que c’était le roi en personne qui se trouvait à Herderen, le maréchal Bathyany ne put croire qu’il se fût aventuré si fort en avant, s’il n’avait pas été accompagné de tout son monde, et s’abstint de bouger ce jour-là. Le roi passa la nuit dans une chétive demeure, auprès de Herderen, et dès quatre heures du matin, il était sur pied pour surveiller lui-même l’arrivée des troupes [1].

Ce ne fut donc que le 2 juillet au matin que les deux aimées se trouvèrent au complet et en regard l’une de l’autre, dans un espace assez vaste qui s’étend au pied même de Maestricht, entre deux petites rivières : l’une, la Jaar, qui vient se jeter à ce point-là même dans la Meuse ; l’autre, la Demer, qui, prenant sa source non loin de là, se dirige vers le nord pour rejoindre les affluens de l’Escaut. Cette ligne de combat était très étendue, mais c’était à l’extrémité

  1. Souvenirs du chevalier de Valfons, p. 208-210. — Histoire du maréchal de Saxe, par d’Espagnac, t. II, p. 271. — Journal de Luynes, t. VIII, p. 751 et suiv.