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<section begin=article17/>il lui répondit que le général Lally avait rasé Saint-David, et n’avait donné que trois jours aux habitants pour transporter leurs eflets; que le gouverneur de Madras avait accordé trois mois aux habitants de Pondichéry ; que les Anglais égalaient au moins les Français en générosité, mais qu’il fallait partir, et aller dire la messe ailleurs. Alors la ville fut impitoyablement rasée, sans que les Français pussent avoir le droit de se plaindre.
<section begin=article17/>il lui répondit que le général Lally avait rasé Saint-David, et n’avait donné que trois jours aux habitants pour transporter leurs effets ; que le gouverneur de Madras avait accordé trois mois aux habitants de Pondichéry ; que les Anglais égalaient au moins les Français en générosité, mais qu’il fallait partir, et aller dire la messe ailleurs. Alors la ville fut impitoyablement rasée, sans que les Français pussent avoir le droit de se plaindre.

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LALLY ET LES AUTRES PRISONNIERS CONDUITS EN ANGLETERRE, RELÂCHÉS SUR LEUR PAROLE. PROCÈS CRIMINEL DE LALLY.


Les prisonniers continuèrent dans la route et en Angleterre leurs reproches mutuels, que le désespoir aigrissait encore. Le général avait ses partisans, surtout parmi les officiers du régiment de son nom : presque tous les autres étaient ses ennemis déclarés ; chacun écrivait aux ministres de France, chacun accusait le parti opposé d’être la cause du désastre. Mais la véritable cause était la même que dans les autres parties du monde : la supériorité des flottes anglaises, l’opiniâtreté attentive de la nation, son crédit, son argent comptant, et cet esprit de patriotisme qui est plus fort à la longue que l’esprit mercantile et que la cupidité des richesses.
Les prisonniers continuèrent dans la route et en Angleterre
leurs reproches mutuels, que le désespoir aigrissait encore. Le
général avait ses partisans, surtout parmi les officiers du régi-
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déclarés; chacun écrivait aux ministres de France, chacun accu-
sait le parti opposé d’être la cause du désastre. Mais la véritable
cause était la même que dans les autres parties du monde : la
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son crédit, son argent comptant, et cet esprit de patriotisme qui
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des richesses.


Le général Lally obtint de l’amirauté d’Angleterre la permission de repasser en France sur sa parole. Son premier soin fut de payer ce qu’il avait emprunté pour le service public. La plupart de ses ennemis revinrent en même temps que lui ; ils arrivèrent précédés de toutes les plaintes, des accusations formées de part et d’autre, et de mille écrits dont Paris était inondé. Les partisans de Lally étaient en très-petit nombre, et ses adversaires innombrables.
Le général Lally obtint de l’amirauté d’Angleterre la permis-
sion de repasser en France sur sa parole. Son premier soin fut
de payer ce qu’il avait emprunté pour le service public. La plu-
part de ses ennemis revinrent en même temps que lui; ils arri-
vèrent précédés de toutes les plaintes, des accusations formées de part et d’autre, et de mille écrits dont Paris était inondé. Les
partisans de Lally étaient en très-petit nombre, et ses adversaires
innombrables.


Un conseil entier, deux cents employés sans ressources ; les directeurs de la compagnie des Indes voyant leur grand établissement anéanti; les actionnaires tremblant pour leur fortune; des officiers irrités : tous se déchaînaient avec d’autant plus d’animosité contre Lally qu’ils croyaient qu’en perdant Pondichéry il avait gagné des millions. Les femmes, toujours moins modérées que les hommes dans leurs terreurs et dans leurs plaintes, criaient au traître, au concussionnaire, au criminel de lèse-majesté.<section end=article18/>
Un conseil entier, deux cents employés sans ressources ; les directeurs de la compagnie des Indes voyant leur grand établissement anéanti ; les actionnaires tremblant pour leur fortune ; des officiers irrités : tous se déchaînaient avec d’autant plus d’animosité contre Lally qu’ils croyaient qu’en perdant Pondichéry il avait gagné des millions. Les femmes, toujours moins modérées que les hommes dans leurs terreurs et dans leurs plaintes, criaient au traître, au concussionnaire, au criminel de lèse-majesté.<section end=article18/>
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ET SUR LE GÉNÉRAL LALLY.

il lui répondit que le général Lally avait rasé Saint-David, et n’avait donné que trois jours aux habitants pour transporter leurs effets ; que le gouverneur de Madras avait accordé trois mois aux habitants de Pondichéry ; que les Anglais égalaient au moins les Français en générosité, mais qu’il fallait partir, et aller dire la messe ailleurs. Alors la ville fut impitoyablement rasée, sans que les Français pussent avoir le droit de se plaindre.


ARTICLE XVIII.


LALLY ET LES AUTRES PRISONNIERS CONDUITS EN ANGLETERRE, RELÂCHÉS SUR LEUR PAROLE. PROCÈS CRIMINEL DE LALLY.


Les prisonniers continuèrent dans la route et en Angleterre leurs reproches mutuels, que le désespoir aigrissait encore. Le général avait ses partisans, surtout parmi les officiers du régiment de son nom : presque tous les autres étaient ses ennemis déclarés ; chacun écrivait aux ministres de France, chacun accusait le parti opposé d’être la cause du désastre. Mais la véritable cause était la même que dans les autres parties du monde : la supériorité des flottes anglaises, l’opiniâtreté attentive de la nation, son crédit, son argent comptant, et cet esprit de patriotisme qui est plus fort à la longue que l’esprit mercantile et que la cupidité des richesses.

Le général Lally obtint de l’amirauté d’Angleterre la permission de repasser en France sur sa parole. Son premier soin fut de payer ce qu’il avait emprunté pour le service public. La plupart de ses ennemis revinrent en même temps que lui ; ils arrivèrent précédés de toutes les plaintes, des accusations formées de part et d’autre, et de mille écrits dont Paris était inondé. Les partisans de Lally étaient en très-petit nombre, et ses adversaires innombrables.

Un conseil entier, deux cents employés sans ressources ; les directeurs de la compagnie des Indes voyant leur grand établissement anéanti ; les actionnaires tremblant pour leur fortune ; des officiers irrités : tous se déchaînaient avec d’autant plus d’animosité contre Lally qu’ils croyaient qu’en perdant Pondichéry il avait gagné des millions. Les femmes, toujours moins modérées que les hommes dans leurs terreurs et dans leurs plaintes, criaient au traître, au concussionnaire, au criminel de lèse-majesté.