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sanctions « à déterminer contre l’État qui se refuserait, soit à soumettre les questions internationales à un arbitrage, soit à en accepter les sanctions. » Autrement dit, pour emprunter le langage du président Wilson, avant que les États-Unis entrassent en guerre : « la Société des nations. » Et ce serait très bien, mais ce n’est pas absolument nouveau. On ne sait combien de nations avaient tenu à La Haye dans les vingt dernières années on ne sait combien de conférences, dont les résolutions avaient été consignées dans on ne sait combien de protocoles. Mais il y avait l’Allemagne impériale : chiffons de papier. La question même d’une « diminution simultanée et réciproque des armemens » avait été soulevée, si nous ne nous trompons. Mais il y avait l’Allemagne, qui ne voulut rien entendre. Certains États en vinrent à passer des conventions par lesquelles ils s’obligeaient entre eux à l’arbitrage obligatoire et s’engageaient, en cas de conflit, à observer, sans recourir aux armes, des délais si longs qu’ils faisaient disparaître les chances ou les risques de guerre. Mais il y avait l’Empire allemand, qui déclara ne pas savoir signer. Aujourd’hui encore, il y a l’Empire allemand, il y a l’Allemagne impériale, il y a l’Allemagne militarisée par la Prusse, et c’est pourquoi il ne peut pas y avoir de « Société des nations. »
REVUE. — CHRONIQUE.


Une Société des nations, comme toute société, exige trois choses (la Note les énumère) : des règles, des garanties, des sanctions. Mais les règles n’existent pas par elles-mêmes, on veut dire ne se défendent pas, ne s’imposent pas, et les garanties n’existent que par les sanctions. Or les sanctions ne peuvent exister que par la force; c’est trop peu : par la supériorité de la force. Les sociétés, au sortir de la barbarie et de l’anarchie primitives, n’ont été réduites à la vie civile que lorsqu’il y a eu, au service de la justice, une gendarmerie plus forte que toutes les associations de malfaiteurs. De même, entre les nations. Vainement on discutera, on conviendra, on décrétera, tant qu’il y aura parmi les peuples un brigand plus fort que toutes leurs gendarmeries. Et c’est pourquoi il ne peut pas y avoir de société des nations, tant que l’Allemagne n’aura pas été et ne se sera pas sentie non seulement battue, mais dominée, maîtrisée, pliée, par une force plus forte que la sienne, à l’observation du droit et, des traités.


La Note va plus vite que nous ; elle reprend : « Une fois la suprématie du droit ainsi établie, on enlève tout obstacle aux voies de communication des peuples en assurant par des règles à fixer également la vraie liberté et la communauté des mers. » Mais, « une fois la suprématie du droit ainsi établie, » la guerre sera évidemment
tions « à déterminer coQtre l’État qui se refuserait, soit à soumettre
les questions internationales à un arbitrage, soit à en accepter les
sanctions. » Autrement dit, pour emprunter le langage du président
Wilson, avant que les États-Unis entrassent en guerre : « la Société
des nations. » Et ce serait très bien, mais ce n’est pas absolument
nouveau. On ne sait combien de nations avaient tenu à La Haye dans
les vingt dernières années on ne sait combien de conférences, dont
les résolutions avaient été consignées dans on ne sait combien de protocoles.
Mais il y avait l’Allemagne impériale : chifi’ons de papier. La
question même d’une « diminution simultanée et réciproque des
armemens » avait été soulevée, si nous ne nous trompons. Mais il y
avait l’Allemagne, qui ne voulut rien entendre. Certains États en
vinrent à passer des conventions par lesquelles ils s’obligeaient
entre eux à l’arbitrage obligatoire et s’engageaient, en cas de conflit, à
observer, sans recourir aux armes, des délais si longs qu’ils faisaient
disparaître les chances ou les risques de guerre. Mais il y avait l’Empire
allemand, qui déclara ne pas savoir signer. Aujourd’hui encore,
il y a l’Empire allemand, il y a l’Allemagne impériale, il y a l’Allemagne
militarisée par la Prusse, et c’est pourquoi il ne peut pas y
avoir de « Société des nations. »

Une Société des nations, comme toute société, exige trois choses
(la Note les énumère) : des règles, des garanties, des sanctions. Mais
les règles n’existent pas par elles-mêmes, on veut dire nesedéfendent
pas, ne s’imposent pas, et les garanties n’existent que par les sanctions.
Or les sanctions ne peuvent exister que par la force; c’est trop
peu : parla supériorité de la force. Les sociétés, au sortir de la barbarie
et de l’anarchie primitives, n’ont été réduites à la vie civile
que lorsqu’il y a eu, au service de la justice, une gendarmerie plus
forte que toutes les associations de malfaiteurs. De même, entre les
nations. Vainement on discutera, on conviendra, on décrétera, tant
qu’n y aura parmi les peuples un brigand plus fort que toutes leurs
gendarmeries. Et c’est pourquoi il ne peut pas y avoir de société des
nations, tant que l’Allemagne n’aura pas été et ne se sera pas sentie
non seulement battue, mais dominée, maîtrisée., pliée, par une force
plus forte que la sienne, à l’observation du droit et des traités.
La Note va plus vite que nous ; elle reprend : « Une fois la suprématie
du droit ainsi établie, on enlève tout obstacle aux voies de
communication des peuples en assurant par des règles à fixer également
la vraie liberté et la communauté des mers. » Mais, « une fois la
suprématie du droit ainsi établie, » la guerre sera évidemment termi-

Version du 30 avril 2015 à 14:43

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sanctions « à déterminer contre l’État qui se refuserait, soit à soumettre les questions internationales à un arbitrage, soit à en accepter les sanctions. » Autrement dit, pour emprunter le langage du président Wilson, avant que les États-Unis entrassent en guerre : « la Société des nations. » Et ce serait très bien, mais ce n’est pas absolument nouveau. On ne sait combien de nations avaient tenu à La Haye dans les vingt dernières années on ne sait combien de conférences, dont les résolutions avaient été consignées dans on ne sait combien de protocoles. Mais il y avait l’Allemagne impériale : chiffons de papier. La question même d’une « diminution simultanée et réciproque des armemens » avait été soulevée, si nous ne nous trompons. Mais il y avait l’Allemagne, qui ne voulut rien entendre. Certains États en vinrent à passer des conventions par lesquelles ils s’obligeaient entre eux à l’arbitrage obligatoire et s’engageaient, en cas de conflit, à observer, sans recourir aux armes, des délais si longs qu’ils faisaient disparaître les chances ou les risques de guerre. Mais il y avait l’Empire allemand, qui déclara ne pas savoir signer. Aujourd’hui encore, il y a l’Empire allemand, il y a l’Allemagne impériale, il y a l’Allemagne militarisée par la Prusse, et c’est pourquoi il ne peut pas y avoir de « Société des nations. »

Une Société des nations, comme toute société, exige trois choses (la Note les énumère) : des règles, des garanties, des sanctions. Mais les règles n’existent pas par elles-mêmes, on veut dire ne se défendent pas, ne s’imposent pas, et les garanties n’existent que par les sanctions. Or les sanctions ne peuvent exister que par la force; c’est trop peu : par la supériorité de la force. Les sociétés, au sortir de la barbarie et de l’anarchie primitives, n’ont été réduites à la vie civile que lorsqu’il y a eu, au service de la justice, une gendarmerie plus forte que toutes les associations de malfaiteurs. De même, entre les nations. Vainement on discutera, on conviendra, on décrétera, tant qu’il y aura parmi les peuples un brigand plus fort que toutes leurs gendarmeries. Et c’est pourquoi il ne peut pas y avoir de société des nations, tant que l’Allemagne n’aura pas été et ne se sera pas sentie non seulement battue, mais dominée, maîtrisée, pliée, par une force plus forte que la sienne, à l’observation du droit et, des traités.

La Note va plus vite que nous ; elle reprend : « Une fois la suprématie du droit ainsi établie, on enlève tout obstacle aux voies de communication des peuples en assurant par des règles à fixer également la vraie liberté et la communauté des mers. » Mais, « une fois la suprématie du droit ainsi établie, » la guerre sera évidemment