« Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 57.djvu/722 » : différence entre les versions

La bibliothèque libre.
→‎Page non corrigée : Page créée avec « réglée, et, à maintes reprises déjà, la délégation allemande a été entendue, soit par la Commission elle-même, soit par ses divers services. Était-il nécessa... »
 
Zoé (discussion | contributions)
État de la page (Qualité des pages)État de la page (Qualité des pages)
-
Page non corrigée
+
Page corrigée
Contenu (par transclusion) :Contenu (par transclusion) :
Ligne 1 : Ligne 1 :
réglée, et, à maintes reprises déjà, la délégation allemande a été entendue, soit par la Commission elle-même, soit par ses divers services. Était-il nécessaire d’inviter, en outre, à Spa, le chef même du gouvernement allemand? Lisez la presse germanique. Elle déclare qu’il ne se rendra pas à cette invitation, s’il ne doit avoir, dans la conférence, que voix consultative. Toujours le plan incliné!
réglée, et, à maintes reprises déjà, la délégation allemande a été
entendue, soit par la Commission elle-même, soit par ses divers
services. Était-il nécessaire d’inviter, en outi e, à Spa, le chef même
du gouvernement allemand? Lisez la presse germani(iue. Elle déclare
qu’il ne se rendra pas à cette invitation, s’il ne doit avoir, dans la
conférence, que voix consultative. Toujours le plan incliné!


Mais qu’on donne ou non voix délibérative au chef du gouvernement allemand, il ne viendra pas là pour discuter comme un expert devant une commission d’experts, ni pour causer comme un ambassadeur avec un ministre. Il viendra comme un homme politique s’expliquer de pair à pair avec des hommes politiques. A Londres, à San-Remo, à Hythe, nous avons vu à quels malentendus aboutissent trop souvent, même entre Alliés seuls, ces conversations rapides, improvisées; qui commencent à l’arrivée d’un train et qui finissent au départ d’un autre. Que sera-ce d’un entretien de même genre entre ennemis d’hier ? Depuis l’armistice, comme pendant la guerre, les Allemands cherchent à s’insinuer entre les Alliés pour les diviser. Allons-nous nous-mêmes leur en offrir l’occasion? Supposons que nous obtenions de l’Angleterre, pour tous les Alliés, ce chiffre de 150 milliards de marks or qu’on a essayé de faire luire à nos yeux et qui, — M. Perchot l’a clairement montré, à la tribune du Sénat, — ne nous procurerait pas jusqu’au paiement total les tristes avantages du change actuel; supposons que nous soyons, les Anglais et nous, d’accord sur ce chiffre, dont même les 55 p. 100 ne nous laisseraient, à nous, Français, ni un forfait, ni un minimum, mais une réduction arbitraire de notre créance. A Spa, ce rabais serait peut-être encore rabaissé; et, le nouveau rabais une fois fixé, une Allemagne, qui aurait pris goût à nos concessions, serait certainement moins disposée qu’aujourd’hui à nous payer. Avant que nous soyons au bas du plan incliné, n’est-il pas temps encore de jeter un cri d’alarme?
Mais qu’on donne ou non voix délibérative au chef du gouvernement
allemand, il ne viendra pas là pour discuter comme un expert
devant une commission d’experts, ni pour causer comme un ambassadeur
ai’ec un ministre. Il viendra comme un homme pohtique
s’expliquer de pair à pair avec des hommes politiques. A Londres, à
San-Remo, à Hythe, nous avons vu à quels malentendus aboutissent
trop souvent, même entre Alliés seuls, ces conversations
rapides, improvisées, qui commencent à l’arrivée d’un train et qui
Unissent au départ d’un autre. Que sera-ce d’un entretien de même
genre entre ennemis d’hier ? Depuis l’armistice, comme pendant la
guerre, les Allemands cherchent à s’insinuer entre les Alliés pour les
diviser. Allons-nous nous-mêmes leur en offrir l’occasion? Supposons
que nous obtenions de l’Angleterre, pour tous les Alliés, ce chiffre
de 120 milliards de marks or qu’on a essayé de faire luire à nos
yeux et qui, — M. Perchot l’a clairement montré, à la tribune du
Sénat, — ne nous procurerait pas jusqu’au paiement total les tristes
avantages du change actuel; supposons que nous soyons, les Anglais
et nous, d’accord sur ce chiffre, dont même les 55 p. 100 ne nous
laisseraient, à nous, Français, ni un forfait, ni un minimum, mais
une réduction arbitraire de notre créance.’ A Spa, ce rabais serait peut-être
encore rabaissé; et, le nouveau rabais une fois fixé, une
Allemagne, qui aurait pris goût à nos concessions, serait certainement
moins disposée qu’aujourd’hui à nous payer. Avant que nous
soyons au bas du plan incliné, n’est-il pas temps encore de jeter un
cri d’alarme?


Raymond Pgincaré.


RAYMOND POINCARE.
Le Directeur-G érant .


''Le Directeur-Gérant'' : RENE DOUMIC.
René Doumig.

<REFERENCES/>

Version du 19 septembre 2015 à 06:10

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

réglée, et, à maintes reprises déjà, la délégation allemande a été entendue, soit par la Commission elle-même, soit par ses divers services. Était-il nécessaire d’inviter, en outre, à Spa, le chef même du gouvernement allemand? Lisez la presse germanique. Elle déclare qu’il ne se rendra pas à cette invitation, s’il ne doit avoir, dans la conférence, que voix consultative. Toujours le plan incliné!

Mais qu’on donne ou non voix délibérative au chef du gouvernement allemand, il ne viendra pas là pour discuter comme un expert devant une commission d’experts, ni pour causer comme un ambassadeur avec un ministre. Il viendra comme un homme politique s’expliquer de pair à pair avec des hommes politiques. A Londres, à San-Remo, à Hythe, nous avons vu à quels malentendus aboutissent trop souvent, même entre Alliés seuls, ces conversations rapides, improvisées; qui commencent à l’arrivée d’un train et qui finissent au départ d’un autre. Que sera-ce d’un entretien de même genre entre ennemis d’hier ? Depuis l’armistice, comme pendant la guerre, les Allemands cherchent à s’insinuer entre les Alliés pour les diviser. Allons-nous nous-mêmes leur en offrir l’occasion? Supposons que nous obtenions de l’Angleterre, pour tous les Alliés, ce chiffre de 150 milliards de marks or qu’on a essayé de faire luire à nos yeux et qui, — M. Perchot l’a clairement montré, à la tribune du Sénat, — ne nous procurerait pas jusqu’au paiement total les tristes avantages du change actuel; supposons que nous soyons, les Anglais et nous, d’accord sur ce chiffre, dont même les 55 p. 100 ne nous laisseraient, à nous, Français, ni un forfait, ni un minimum, mais une réduction arbitraire de notre créance. A Spa, ce rabais serait peut-être encore rabaissé; et, le nouveau rabais une fois fixé, une Allemagne, qui aurait pris goût à nos concessions, serait certainement moins disposée qu’aujourd’hui à nous payer. Avant que nous soyons au bas du plan incliné, n’est-il pas temps encore de jeter un cri d’alarme?


RAYMOND POINCARE.

Le Directeur-Gérant : RENE DOUMIC.