« Chants et Chansons (Pierre Dupont)/Le Chant des ouvriers » : différence entre les versions

La bibliothèque libre.
Contenu supprimé Contenu ajouté
Phe-bot (discussion | contributions)
m Phe: match
Phe-bot (discussion | contributions)
m Phe: split
Ligne 3 : Ligne 3 :




==[[Page:Dupont - Chants et Chansons, t. 1, 1855.djvu/39]]==


<pages index="Dupont - Chants et Chansons, t. 1, 1855.djvu" from=39 to=41 />

{{t3|LE CHANT DES OUVRIERS}}


{{c|1846}}


<poem>
Nous dont la lampe, le matin,
Au clairon du coq se rallume,
Nous tous qu’un salaire incertain
Ramène avant l’aube à l’enclume,
Nous qui des bras, des pieds, des mains,
De tout le corps luttons sans cesse,
Sans abriter nos lendemains,
Contre le froid de la vieillesse.

Aimons-nous et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
::::::Buvons,
À l’indépendance du monde !

Nos bras, sans relâche tendus
Aux flots jaloux, au sol avare,
Ravissent leurs trésors perdus,
Ce qui nourrit et ce qui pare :
Perles, diamants et métaux,
Fruit du coteau, grain de la plaine ;
Pauvres moutons, quels bons manteaux
Ils se tissent avec notre laine !


Aimons-nous et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
::::::Buvons,
À l’indépendance du monde !
</poem>
==[[Page:Dupont - Chants et Chansons, t. 1, 1855.djvu/40]]==
<poem>

Quel fruit tirons-nous des labeurs
Qui courbent nos maigres échines !
Où vont les flots de nos sueurs ?
Nous ne sommes que des machines.
Nos Babels montent jusqu’au ciel,
La terre nous doit ses merveilles :
Dès qu’elles ont fini le miel,
Le maître chasse les abeilles.

Aimons-nous et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
::::::Buvons,
À l’indépendance du monde !

Au fils chétif d’un étranger
Nos femmes tendent leurs mamelles,
Et lui, plus tard, croit déroger
En daignant s’asseoir auprès d’elles ;
De nos jours, le droit du seigneur
Pèse sur nous plus despotique :
Nos filles vendent leur honneur
Aux derniers courtauds de boutiques.

Aimons-nous et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
::::::Buvons,
À l’indépendance du monde !

Mal vêtus, logés dans des trous,
Sous les combles, dans les décombres,
Nous vivons avec les hiboux,
Et les larrons, amis des ombres ;
</poem>
==[[Page:Dupont - Chants et Chansons, t. 1, 1855.djvu/41]]==
<poem>
Cependant notre sang vermeil
Coule impétueux dans nos veines ;
Nous nous plairions au grand soleil,
Et sous les rameaux verts des chênes.

Aimons-nous et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
::::::Buvons,
À l’indépendance du monde !

À chaque fois que par torrents
Notre sang coule sur ce monde,
C’est toujours pour quelques tyrans
Que cette rosée est féconde ;
Ménageons-le dorénavant,
L’amour est plus fort que la guerre ;
En attendant qu’un meilleur vent
Souffle du ciel ou de la terre.

Aimons-nous et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
::::::Buvons,
À l’indépendance du monde !
</poem>

Version du 3 juin 2016 à 12:19






LE CHANT DES OUVRIERS


1846.


Nous dont la lampe, le matin,
Au clairon du coq se rallume ;
Nous tous qu’un salaire incertain
Ramène avant l’aube à l’enclume ;
Nous qui des bras, des pieds, des mains,
De tout le corps luttons sans cesse,
Sans abriter nos lendemains
Contre le froid de la vieillesse,

Aimons-nous, et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
                        Buvons
À l’indépendance du monde !


Nos bras, sans relâche tendus,
Aux flots jaloux, au sol avare,
Ravissent leurs trésors perdus,
Ce qui nourrit et ce qui pare :
Perles, diamants et métaux,
Fruit du coteau, grain de la plaine.
Pauvres moutons, quels bons manteaux
Il se tisse avec notre laine !

Aimons-nous, et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
                        Buvons
À l’indépendance du monde !



Quel fruit tirons-nous des labeurs
Qui courbent nos maigres échines ?
Où vont les flots de nos sueurs ?
Nous ne sommes que des machines.
Nos Babels montent jusqu’au ciel,
La terre nous doit ses merveilles :
Dès qu’elles ont fini le miel,
Le maître chasse les abeilles.

Aimons-nous, et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
                        Buvons
À l’indépendance du monde !


Au fils chétif d’un étranger
Nos femmes tendent leurs mamelles,
Et lui, plus tard, croit déroger
En daignant s’asseoir auprès d’elles ;
De nos jours, le droit du seigneur
Pèse sur nous plus despotique :
Nos filles vendent leur honneur
Aux derniers courtauds de boutiques.

Aimons-nous, et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
                        Buvons
À l’indépendance du monde !


Mal vêtus, logés dans des trous,
Sous les combles, dans les décombres
Nous vivons avec les hiboux,
Et les larrons, amis des ombres ;

Cependant notre sang vermeil
Coule impétueux dans nos veines ;
Nous nous plairions au grand soleil
Et sous les rameaux verts des chênes.

Aimons-nous, et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
                        Buvons
À l’indépendance du monde !


À chaque fois que par torrents
Notre sang coule sur ce monde,
C’est toujours pour quelques tyrans
Que cette rosée est féconde ;
Ménageons-le dorénavant,
L’amour est plus fort que la guerre ;
En attendant qu’un meilleur vent
Souffle du ciel ou de la terre,

Aimons-nous, et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
                        Buvons
À l’indépendance du monde !