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qui répètent la même chose, seulement en termes plus forts : cela prouve que personne n’est bâillonné. — Ensuite la garnison de Naples est de six mille hommes ; est-ce assez pour comprimer une ville de cinq cent mille âmes qui voudrait se révolter ? — Quant aux moyens de gagner les paysans, ils font remarquer que le gouvernement n’a pas, comme la convention, une masse énorme de biens nationaux à leur vendre, que depuis le premier Napoléon le régime féodal est aboli dans le royaume, et que déjà un grand nombre de paysans possèdent. Cependant on va dépecer les biens des couvens confisqués, et cette vente ralliera à la révolution beaucoup d’acheteurs ; d’ailleurs on peut compter sur le défrichement, sur les nouvelles cultures, sur le progrès de la richesse publique. Ce pays-ci est d’une fertilité merveilleuse, il a des terres qui portent à la fois sept récoltes, racines, fourrages, raisins, oranges, noix, etc. Depuis deux ans, la culture du coton s’est propagée de toutes parts, et les bénéfices ont été énormes ; au lieu de 8 ou 10 ducats, le quintal est monté jusqu’à 32 et 40. Les paysans maintenant tirent la piastre de leur poche en allant au café ; ils paient leurs emprunts, leurs anticipations ; ils commencent à acheter la terre, c’est leur passion ; en quelques endroits, la récolte a suffi pour payer le sol. Depuis longtemps, on remarquait qu’il y a moins de brigandage et plus de travail dans les districts où la petite propriété est répandue, et Murat avait fait des lois dans ce sens : aussi en plusieurs points on commence aujourd’hui à aliéner et diviser les terres du domaine. Joignez à cela les biens de mainmorte dont on parlait tout à l’heure, et remarquez en outre que les capitaux étrangers arrivent, que des manufactures se fondent, que les journaux se répandent, qu’un Napolitain, expérience faite, apprend à lire et à écrire en trois mois ; il n’y a pas de race plus fine, plus prompte à saisir et à deviner toutes les idées. Le paysan enrichi et éclairé deviendra libéral.

Une des personnes présentes conte l’entretien qu’elle a eu récemment avec un soldat. Ce soldat avait servi sous les Bourbons ; quand Garibaldi débarqua avec sa petite troupe, le bruit courut qu’il amenait soixante mille hommes ; là-dessus, avec la permission de leur capitaine, les hommes de la compagnie posèrent leur fusil et s’en allèrent chacun chez soi fort tranquillement. Victor-Emmanuel proclamé, notre ami le retrouve exempté comme vétéran, lui fait honte, le désigne, en sorte qu’il est repris, bien malgré lui, pour le service. Au bout d’un an, nouvelle rencontre ; cette fois l’homme est enchanté, plein de reconnaissance, il a une tournure martiale. « Ah ! excellence, que je suis content ! J’ai vu Milan, Turin, toute sorte de villes ; j’ai appris à lire. — Et à écrire ? — Pas encore très bien, mais j’écris mon nom. — Tiens, voici une piastre ; quand tu sauras écrire, tu en auras une autre. » Voilà un homme trans-