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point le plus élevé du littoral, je pus distinguer, à l’est, la longue et étroite langue de sable qui porte le nom de Tep-Kaioukiou ; elle s’avançait dans la mer, toute bordée d’énormes glaçons, et blanche d’une neige sur laquelle quelques taches noires, des blocs d’ardoises, sans doute, se remarquaient.

« La descente fut rapide, quoique nous fussions deux dans le traîneau ; les Tchouktchis sont très habiles dans l’art de fabriquer ces voitures légères ; elles sont en bois de bouleau, et il n’entre pas un clou dans leur confection. Rien de plus aisé à réparer, car les traîneaux ne sont pas faits d’une seule pièce de bois, mais composés de fragmens de bouleau dont en voyage on répare instantanément les cassures à l’aide d’une lanière de morse. Les seuls animaux domestiques employés par les Tchouktchis des côtes sont les chiens, encore n’a-t-on aucun soin de ces pauvres animaux bien inférieurs, du reste, à leurs congénères de Terre-Neuve. Pendant notre long séjour dans ces contrées, je n’ai jamais vu les Tchouktchis donner de la nourriture à ces dociles serviteurs, qui, tout en courant, déterraient sous la neige des détritus qu’ils dévoraient.

« Nous n’avions pas habité assez longtemps ce pays pour comprendre de sitôt la langue des habitans, et cependant ma conversation avec Harat ne tarissait pas, ce qui me permettait d’augmenter mon vocabulaire. Harat me fit entendre les chants monotones de sa race, en échange desquels je dus lui apprendre des airs suédois ; aussi, n’est-il pas impossible que le prochain explorateur s’arrêtant à l’Irr-Kajpij y soit reçu par quelque air national des Scandinaves. Tant que dura notre course, les yeux de Harat ne quittèrent guère mes poches, d’où pointaient certains flacons alléchans ; je dus le rappeler quelquefois à la surveillance des chiens qu’il menait aux cris de Zuda ! pour les faire tourner adroite et de Da ! pour les faire tourner à gauche. Ces cris étaient généralement accompagnés d’un bon coup de fouet qu’il donnait du côté où il voulait aller. Nous revînmes à l’Irr-Kajpij par une pluie battante et j’entrai chez Tcheporin pendant qu’on préparait le bateau qui devait me ramener à bord de la Vega. Les deux femmes de mon hôte me réchauffèrent en se hâtant de me frotter les mains, puis elles me firent entrer sous la tente intérieure, où brûlait une grande lampe. Les lampes des Tchouktchis consistent en une sorte de cruche en terre ou en bois, remplie d’huile de baleine, où nagent des mèches de mousse ramenées sur le bord ; la flamme en est très haute et aussi mince que celle de nos lampes. En hiver, la cuisine se fait sur ces lampes, qui jettent beaucoup de clarté ; elles donnent une grande chaleur. Étendus sur des peaux de renne, nous nous mîmes tous