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Il ne fallait qu’un prétexte pour précipiter la crise, et le prétexte a été le vote d’un nouveau douzième provisoire du budget. Par une fatalité, l’Italie est trop souvent réduite à cet expédient du vote décousu des douzièmes budgétaires. Le parlement a voté déjà quatre douzièmes depuis le commencement de l’année ; il avait il y a trois semaines à voter le cinquième, celui du mois de mai. Cette fois la commission de la chambre des députés proposait un ordre du jour témoignant le regret de voir le gouvernement prolonger ce système. Un ordre du jour de confiance substitué à cette motion, réclamé et appuyé par le gouvernement, a été rejeté, et le cabinet n’avait plus qu’à se retirer ou à proposer au roi la dissolution de la chambre. C’est à cette dernière résolution que le roi Humbert a dû s’arrêter, d’autant mieux qu’il aurait été un peu embarrassé pour trouver les élémens d’une administration nouvelle dans la coalition qui a formé la majorité artificielle du dernier scrutin de la chambre. Voilà donc où aboutit ce règne de la gauche italienne qui a déjà quatre ans de durée et qui ne s’est manifesté que par une succession de ministères également impuissans ! De tout ce que la gauche italienne avait mis dans ses programmes rien n’est encore réalisé, ni la suppression de l’impôt sur la mouture, ni la réforme électorale, ni la réforme de l’organisation provinciale et communale. Les programmes des élections de 1876 restent les programmes des élections de 1880. — Ce n’est pas notre faute, disentassez mélancoliquement les ministres d’aujourd’hui, c’est la faute de ceux qui, en soulevant des discussions inutiles, ont retardé des réformes annoncées par une parole royale ! Ce qu’il y a de curieux, c’est qu’à leur tour les dissidens de la gauche ainsi accusés rendent le ministère Cairoli-Depretis responsable de ces retards, tandis que la droite se borne à signaler les erreurs et les fautes des uns et des autres, l’impuissance de tous ceux qui ont été ses successeurs au pouvoir.

Le procès est maintenant porté devant le pays. M. Nicotera est à Kaples, où il essaie de conquérir l’opinion du midi ; M. Grispi s’efforce de gagner la Sicile, M. Zanardelli fait des discours dans le Vénitien. M. Sella, M. Minghetti soutiennent la cause modérée à Milan et à Bologne. Les ministres sont eux aussi en campagne. La lutte est partout engagée, La question commencera à se décider dès demain, premier jour des élections. Que va-t-il sortir de tout ce mouvement ? Est-ce que le coup de théâtre des élections anglaises se reproduirait au-delà des Alpes ? Ce qui est certain dans tous les cas, c’est que, si l’Italie a besoin des réformes qu’on lui promet, elle a besoin avant tout de retrouver un parlement moins divisé et un gouvernement moins incertain pour maintenir son crédit et son influence de nation nouvelle.

CH. DE MAZADE.

Le directeur-géranl, C. Buloz.