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problème, en réalité peut-être plus ardu que le premier. En séparant l’église de l’état, que fera-t-on des cathédrales catholiques, des temples protestans, des synagogues israélites, des mosquées musulmanes, aujourd’hui attribués par la loi aux cultes reconnus par l’état ? C’est là une des premières questions à poser aux partisans de la séparation, car elle n’intéresse pas seulement le culte, mais une chose à nos yeux non moins sacrée que la liberté religieuse, une chose dont, libre penseur ou athée, aucun Français n’oserait encore faire fi : l’art, l’histoire, la civilisation nationale.

On sait quelle est en droit la situation des églises. Quelques-unes, les cathédrales, par exemple, font partie du domaine de l’état ; la plupart, les églises paroissiales notamment, sont censées appartenir aux communes. Mais quand l’état, le département ou la commune auraient légalement la propriété des édifices religieux, l’église et les ministres des différens cultes en ont légalement la jouissance. Le propriétaire des édifices consacrés au culte, c’est-à-dire l’état ou la commune, a-t-il, en bonne conscience, le droit d’en changer la destination ? Est-il libre d’en évincer l’usufruitier ? Nous parlons ici du droit moral et non pas naturellement du droit légal, créé et modifié à volonté par des législateurs changeans, passionnés, qui, dans l’intérêt de leurs haines ou de leurs convoitises, peuvent aller jusqu’à méconnaître les titres de propriété les plus authentiques. Pour être votées par la majorité d’une chambre ou d’un conseil municipal, certaines « désaffectations » n’en constitueraient pas moins une confiscation.

Veut-on procéder en bonne justice, conformément aux notions de l’équité la plus élémentaire, on ne saurait décider de la propriété et du sort des églises sans se demander par qui et pour qui les églises ont été construites. La première question est-elle douteuse, la seconde ne l’est guère.

Par qui ont été édifiées les cathédrales ? par qui les églises paroissiales des villes ou des villages ? Est-ce bien toujours par l’état et par les communes qui s’en attribuent la propriété ? Cela peut être, mais ce n’est assurément pas là une règle générale. Beaucoup d’églises de tout âge et de toutes dimensions ont été construites par les évêques, beaucoup par les moines, d’autres par des confréries, d’autres par des particuliers. Un grand nombre d’édifices religieux, parfois les plus vastes et les plus beaux, ne sont que d’immenses ex-voto de pierre, érigés au sortir des guerres ou des pestes du moyen âge. Le plus souvent la cathédrale, l’église a été élevée à la fois par le clergé et les laïques, par les princes et les communes, les générations s’en transmettant l’une à l’autre l’achèvement et l’embellissement sans que, dans ces œuvres collectives, si fréquemment reconstruites et sans cesse remaniées, où l’œil de l’archéologue a