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leur capacité pour cela, car c’est une chose que rarement on juge bien avant de l’avoir éprouvée, — il s’ensuit qu’ils devront accepter la responsabilité de gouverner. »

C’était peut-être d’une logique irréprochable ; mais quand on savait le fond des choses, l’origine de la constitution du Cap, les causes de cette superbe indifférence affichée par le secrétaire d’État, les fautes passées et les périls à venir, on pouvait enfoncer un dard même à travers la cuirasse de l’optimisme le plus dédaigneux. Sir Philip Wodehouse se donna le facile plaisir de déshabiller la politique des autres comme on avait dévêtu la sienne, et, devant le même parlement, devenu silencieux, il flagella l’équanimité de lord Granville avec une vigueur de bon sens qui ne le cédait en rien à celle du ministre :

« Je me souviens du temps, disait-il, où l’extension du gouvernement responsable aux colonies commença d’attirer l’attention. Des personnes, en Angleterre, sachant peu de chose des colonies, et sans qu’on les eût exactement renseignées sur leur situation, furent fascinées par l’idée de propager les institutions britanniques à travers tout le domaine de la Grande-Bretagne. Elles ne voyaient pas que le principe même de la responsabilité est contraire à l’existence d’une colonie, ou, pour parler plus justement, d’une dépendance. Elles ne se rendaient pas compte qu’un ministère colonial, existant de par sa responsabilité envers ses propres constituans, ne saurait obéir en même temps à un gouvernement impérial ; — que le jour de la collision doit venir ; — que par évasion prudente ou soumission ce dénoûment peut être retardé, mais qu’il est, tôt ou tard, inévitable ; — qu’une telle forme de gouvernement convient seulement aux communautés qui désirent ou prévoient leur séparation de la mère patrie, à une date peu distante, soit par transfert à une autre puissance, soit par la fondation d’un État indépendant ; — que là où cette séparation n’est pas convoitée ou envisagée, le gouvernement de parti cesse de paraître expédient. »

En écoutant ces paroles, quelles réflexions devaient se faire les représentans du Cap ? Ne se disaient-ils pas tout au fond de leur conscience que sir Philip Wodehouse avait mille fois raison ? Malgré de longs désaccords, il emporta leur estime. Les adieux qu’il leur fit dans son discours de prorogation mêlaient une note plus émouvante de mélancolie voilée à l’inoubliable dignité de son attitude :

« Je n’ai jamais été un colonial dans l’acception ordinaire du terme, mais j’ai été, ma vie durant, un serviteur de la couronne britannique dans les colonies. Toutes mes sympathies sont pour l’étroite connexion des colonies avec l’Angleterre, et le