« Œuvres complètes de Tolstoï, tome 3/Notes bibliographiques » : différence entre les versions

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Dernière version du 10 janvier 2019 à 16:18

Traduction par J.-Wladimir Bienstock.
Stock (Œuvres complètes, volume 3p. 437-445).


NOTES BIBLIOGRAPHIQUES




I


LES COSAQUES


1o La nouvelle intitulée les Cosaques fut insérée dans le numéro de janvier 1863 de la Revue « Le Messager Russe » (Rousskï Viestnik), mais elle avait été écrite longtemps avant. La première ébauche en fut faite probablement pendant le séjour de Tolstoï au Caucase, c’est-à-dire au commencement des années 1850. Tolstoï a ajouté lui-même au titre « Les Cosaques » les mots : « Nouvelle du Caucase de 1852, » qui montrent ainsi son origine. Plusieurs fois dans la suite, il donna quelques retouches à ce travail.

Cette nouvelle intéressait non seulement Léon Tolstoï lui-même, mais aussi tout le cercle de ses amis des lettres, comme on le voit par leurs correspondances ; ainsi Botkine dans sa lettre à Fet, datée de Paris (6 mars 1860), écrit :

«… Par la lettre de Tourgueniev, j’ai appris avec joie que L. Tolstoï s’est remis à travailler son roman du Caucase. Quelque sottise qu’il fasse, je dirai toujours que c’est un homme d’un grand talent, et pour moi chacune de ses extravagances a plus de valeur que les actes raisonnables des autres… »[1]

Mais cette nouvelle, comme beaucoup des grandes œuvres de Tolstoï, devait rester inachevée.

Tolstoï, dans sa jeunesse, amateur de tous genres de sport, s’adonnait avec passion au jeu du billard ; un jour il perdit mille roubles contre Katkov, illustre publiciste conservateur et directeur du journal « Les Bulletins de Moscou » et de la revue « Le Messager Russe. » Comme il lui arrivait souvent, Tolstoï n’avait pas d’argent et ne voulant pas ajourner le paiement d’une dette d’honneur, il remit à Katkov la nouvelle inachevée les Cosaques, les honoraires devaient rester en paiement de la dette de jeu. « Après cette aventure, nous a raconté Léon Nikolaiévitch, cette nouvelle me sembla si répugnante, que je l’abandonnai, et ne voulus point la terminer. » Cette aventure produisit aussi son effet dans le cercle de ses amis écrivains. Ainsi, de Paris, le 5 mars 1862, Tourgueniev écrit à Fet :

«… Tolstoï a écrit à Botkine qu’à Moscou il a perdu au jeu et emprunté mille roubles à Katkov, comme avance pour son roman du Caucase. Que Dieu veuille qu’au moins, cette aventure le remette dans sa vraie voie… »[2]

Mais ce moyen ne pouvait attirer Tolstoï au travail et il nous faut plutôt regretter cette aventure qui si mal à propos interrompit son œuvre.

Cette Nouvelle produisit une forte impression, même sur l’un des critiques les plus sévères de Tolstoï : Tourgueniev. Le 7 avril 1863, il écrit à Fet, de Paris :

« … J’ai lu Les Cosaques, et j’en suis enthousiasmé. (Botkine aussi). Seul le personnage d’Olénine gâte l’impression générale, qui est magnifique. Pour le contraste entre la civilisation et la nature primitive, vierge, il n’y avait nul besoin d’introduire de nouveau cette créature toujours occupée d’elle-même, ennuyeuse et maladive. Comment Tolstoï ne se débarrassera-t-il pas de ce cauchemar !… »

Tolstoï lui-même plaçait Les Cosaques au-dessus de ses autres œuvres, et malgré toute sa modestie, dans sa lettre à Fet, de la même année 1863, il s’exprime ainsi :

« … Je vis dans un monde si éloigné de la littérature et de sa critique qu’en recevant une lettre comme la vôtre, mon premier sentiment est de l’étonnement. Mais qui donc a écrit Les Cosaques et Polikouchka ? Y a-t-il à les discuter ? Le papier supporte tout et le directeur paie pour tout et insère tout. Mais ce n’est que la première impression, ensuite on pénètre dans le sens des mots, on se creuse la cervelle et on trouve là-bas quelque part, dans un coin, parmi les vieux restes oubliés, on trouve là-bas quelque chose d’indéfini sous le titre : artistique. Et en comparant avec ce que vous dites, on conviendra que vous avez raison, et on trouvera même du plaisir à fouiller dans ces vieilles reliques et dans cette odeur autrefois aimée. Et même on est empoigné du désir d’écrire. Sans doute vous avez raison. Mais il y a peu de lecteurs tels que vous. Polikouchka, c’est le bavardage sur le premier sujet venu d’un homme qui « tient sa plume » et « Les Cosaques, avec la sanie, bien que mal… »[3]

Dans cette nouvelle, certains passages ont un caractère autobiographique et quelques-uns des personnages du récit sont peints d’après nature. La plupart des impressions du personnage principal ont été reçues par l’auteur lui-même, bien que le sujet soit emprunté au récit d’un officier de ses amis. Le valet d’Olénine et le Cosaque Erochka sont des personnages réels, et nous y reviendrons dans la biographie de Tolstoï.

2o Les Cosaques ont paru en français dans deux éditions :

a) Chez Hachette en un volume qui contient en outre, les Souvenirs de Sébastopol.

b) Chez Flammarion, dans la collection des Auteurs célèbres.

Sur la traduction française des Cosaques nous trouvons quelques lignes très intéressantes dans un livre de M. Halperine-Kaminsky paru récemment et intitulé : Ivan Tourgueneff d’après sa correspondance avec ses amis français. Nous citerons les pages 320 et 321 relatives à la nouvelle Les Cosaques :

« M. Durand-Gréville, dans ses notes qu’il m’a obligeamment communiquées, dit qu’en 1874 il avait écrit à Tolstoï pour lui demander l’autorisation de traduire Les Cosaques sous la direction de Tourgueniev, mais qu’il n’obtint pas de réponse. Plus tard, en 1879, un de ses amis de Saint-Pétersbourg lui adressa une traduction des Cosaques, « mais dans un français un peu exotique ». Il l’a proposé à l’éditeur Plon en lui promettant d’obtenir une préface de Tourgueniev.

En effet, nous lisons, à propos de ce roman, dans une lettre de Tourgueniev à Tolstoï du 9 janvier 1879.

« Il se trouve ici un éditeur qui désirerait publier en volume la traduction parue dans le Journal de Saint-Pétersbourg. Mais comme il sait que cette traduction est faible, il voudrait que l’écrivain français Durand (qui possède parfaitement la langue russe) et moi, nous revisions soigneusement cette traduction, ce que nous ferons volontiers (j’écrirai une petite préface). Cet éditeur demande aussi votre autorisation qui serait, par exemple, formulée ainsi : « Je soussigné déclare, tant en mon nom qu’au nom de la personne qui a traduit et publié dans le Journal de Saint-Pétersbourg ma nouvelle Les Cosaques, que je donne à MM. Ivan Tourgueniev et Émile Durand, l’autorisation de publier cette nouvelle en France, après avoir introduit dans le texte de la traduction les corrections nécessaires. »

» J’espère, ajoute Tourgueniev plus loin, que vous n’y verrez aucun inconvénient, et je puis vous assurer que nous ferons tous deux de notre mieux pour présenter au public français Les Cosaques dans la forme dont ils sont dignes, et mieux en tout cas que ne l’a fait le traducteur américain. »

» Cette traduction, revisée par Tourgueniev et Durand-Gréville, devait paraître chez Plon, mais à l’essai, M. Durand, ayant trouvé le travail de revision plus long qu’une traduction nouvelle, se découragea, et M. Plon ne donna pas suite à ce projet. »


II


L’INCURSION


1o Ce récit a été écrit en 1852, c’est-à-dire pendant le séjour de Tolstoï au Caucase, presqu’en même temps que l’Enfance. Nous le classons ainsi que le récit suivant, écrit plus tard, dans un même volume avec les Cosaques, en unissant ainsi trois des meilleurs récits du Caucase.

Dans ce récit Tolstoï définit le vrai courage. Cette définition a indiscutablement un lien avec le développement intérieur qui s’effectuait dans l’âme même de l’auteur. Au commencement de son séjour au Caucase, Tolstoï n’était pas étranger aux désirs ambitieux du succès dans sa carrière militaire. Voilà ce que déclare à ce sujet S. A. Bers (le frère de la comtesse Tolstoï) dans ses souvenirs sur Tolstoï :

« Pendant le service au Caucase, L.-N. désirait ardemment recevoir la croix de Saint-Georges, il était même proposé pour cette décoration mais ne la reçut pas à cause de la malveillance personnelle de l’un de ses chefs. Cet insuccès l’attrista et en même temps changea son opinion sur le courage. Il cessa de considérer comme courageux ceux qui s’enflammaient dans les combats en cherchant des signes de distinction. Son idéal du courage devint la conduite raisonnable dans le danger. Il a exprimé cette opinion dans ses œuvres. Il montrait comme les vrais héros le naïf et calme capitaine Khlopov dans le récit l’Incursion et le modeste capitaine Touchine, dans le roman Guerre et Paix. »

Nous ne pouvons nous porter garant de l’exactitude absolue de cette affirmation, mais cette évolution spirituelle qui montre l’élévation morale incessante et le travail intérieur de Tolstoï nous paraît très probable.

2o L’Incursion a paru en français dans le recueil Paysans et soldats édité chez Dentu, sans nom de traducteur. Le titre Paysans et soldats n’appartient pas à Tolstoï.

L’Incursion y figure sous le titre « La Surprise. Récit d’un Volontaire. »


III


LA COUPE EN FORÊT


1o Ce récit est des années 1854-1855, c’est-à-dire pendant le séjour de Tolstoï à Sébastopol. Il parut pour la première fois dans la Revue Le Contemporain (Souvreménik.)

Rappelons quelques lignes de la lettre de Nekrassov, déjà citée dans les notes bibliographiques du premier volume des Œuvres complètes de Tolstoï (page 349) et qui se rapportent à ce récit :

« La Coupe en Forêt est passée assez bien, quoique quelques traits précieux aient été rayés. Voici mon opinion sur cette nouvelle : par la forme elle rappelle en effet Tourguenev, mais là s’arrête la ressemblance ; tout le reste vous appartient et ne pourrait être écrit par personne sauf vous. Dans ce récit il y a beaucoup de petites notes admirablement justes et tout y est nouveau, intéressant et utile. Ne négligez pas des récits pareils à celui-là. Sur le soldat, notre littérature n’a rien dit jusqu’ici, sauf des banalités. Vous commencez seulement et quelle que soit la forme sous laquelle vous direz ce que vous savez sur ce sujet, tout sera au plus haut degré intéressant et utile. »

Nous voyons ainsi que depuis le commencement de l’activité littéraire de Tolstoï, quelque travail qu’il entreprît, en chacun il apportait quelque chose de nouveau. Et ce trait principal caractéristique du grand talent, remarqué déjà par ses premiers critiques, a passé dans toutes les œuvres littéraires de L. Tolstoï et comme nous le savons s’est conservé jusqu’en ses derniers écrits.

2o Le récit La Coupe en Forêt, en traduction française, figure dans le recueil « Paysans et soldats » précédemment cité, sous le titre Dans les grands bois, récit d’un junker.

P. Birukov.


N. B. — Dans la nomenclature des œuvres complètes de Tolstoï, donnée dans le premier volume de cette édition, par erreur, le récit l’Incursion est nommé l’Invasion.

P. B.
  1. « Souvenirs » de Fet.
  2. « Souvenirs » de Fet.
  3. « Souvenirs » de Fet.