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des institutions impériales pour établir sa hiérarchie : les cités sont devenues des évêchés ; les provinces des circonscriptions métropolitaines ; les assemblées provinciales, des synodes ; plus tard enfin, le pape héritera de l’infaillibilité légale des empereurs.

Mais c’est l’âme même de l’empire qui a passé dans les monarchies du moyen âge ; qui, après l’endettement féodal, a reconstitué les états, en donnant l’idée d’une organisation supérieure ; qui, enfin, fit prendre aux descendans d’Alaric et de Radagaise le titre de chefs du saint-empire romain et dire par saint Louis : « Si veut le roi, si veut la loi, » paroles que des souverains répètent encore. Deux principes romains ont rendu les rois maîtres de la justice par les appels et de la loi par la puissance législative : constitutio principis legis vicem habet.

C’est aussi en se souvenant d’une des plus vieilles institutions de Rome que des royautés modernes ont pris en main le protectorat des intérêts populaires : tributnicia potestas.

Rome n’a rien fait pour la science théorique ; le temps des grandes conquêtes sur la nature n’était pas encore ; pour les arts et pour les lettres, butin de guerre rapporté au bord du Tibre, elle est au second rang ; du moins l’occupe-t-elle honorablement. Phidias, sans doute, n’est pas né sur l’une des Sept-Collines et il n’y a qu’un Parthénon. Mais, tout en copiant les temples, les statues et les médailles de la Grèce, les Romains ont donné une grande importance à des élémens d’art qu’Athènes et Corinthe négligeaient ou ignoraient, l’arc, par exemple, et la voûte [1]. Pour leurs grands capitaines, pour les besoins de leur empire et les plaisirs de leurs cités, ils ont construit des arcs-de-triomphe, le dôme du Panthéon, des aqueducs, des cirques, des amphithéâtres ; et ces voies militaires qui portaient si rapidement leurs légions et leur volonté aux extrémités du monde ; et ces ponts sur de grands fleuves que nous n’avons pas encore tous rétablis ; et le Colisée, les Thermes de Caracalla, montagnes de pierre qui pèsent lourdement, mais avec tant de majesté, sur le sol, qu’on pourrait les prendre pour une figure de la domination romaine. Dans ces œuvres la Grèce n’a rien à réclamer, tout au plus la main qui exécutait, non l’esprit qui avait conçu. Elle avait créé, après l’Egypte et l’Orient, une nouvelle architecture religieuse ; Rome créa l’architecture civile et a fait comprendre la nécessité des grands travaux publics.

Si, dans les lettres, elle ne fut bien souvent qu’un écho de la

  1. La voûte exige des culées puissantes, des massifs inertes où se dépensent, inutilement pour l’effet général, de la force, de l’espace et des matériaux. Le sobre génie de la Grèce s’était refusé à cette prodigalité.