« Page:Boutroux - De la contingence des lois de la nature.djvu/155 » : différence entre les versions

La bibliothèque libre.
AkBot (discussion | contributions)
Pywikibot touch edit
 
État de la page (Qualité des pages)État de la page (Qualité des pages)
-
Page non corrigée
+
Page corrigée
Contenu (par transclusion) :Contenu (par transclusion) :
Ligne 1 : Ligne 1 :
distincte ; ce n’est plus même uniquement l’ensemble des données parmi lesquelles l’induction discerne la loi, et qui, une fois résumées ainsi dans une formule générale, rendent inutiles des observations nouvelles : c’est l’éternelle source et l’éternelle règle de la science, en tant que celle-ci veut connaître les choses d’une manière vraiment objective, c’est-à-dire dans leur histoire, en même temps que dans leur nature, laquelle n’est, en définitive, qu’un de leurs états. Selon la doctrine de la contingence, il est chimérique, il est faux de prétendre ramener l’histoire à une déduction pure et simple.
part chronologique de la pensée distincte ; ce n’est plus même uniquement l’ensemble des données parmi lesquelles l’induction discerne la loi, et qui, une fois résumées ainsi dans une formule générale, rendent inutiles des observations nouvelles : c’est l’éternelle source et l’éternelle règle de la science, en tant que celle-ci veut connaître les choses d’une manière vraiment objective, c’est-à-dire dans leur histoire, en même temps que dans leur nature, laquelle n’est, en définitive, qu’un de leurs états. Selon la doctrine de la contingence, il est chimérique, il est faux de prétendre ramener l’histoire à une déduction pure et simple.


L’étude de l’histoire des êtres acquiert, de ce point de vue, une importance singulière. Il se trouve qu’au lieu de s’éloigner du principe des choses, comme il arriverait si leur histoire était contenue en germe dans leur nature et n’en était que le développement analytique et nécessaire, la science dynamique s’en rapproche, au contraire, plus que la science statique. C’est l’acte qui implique l’essence, bien loin que l’essence puisse expliquer l’acte. Ce n’est donc pas la nature des choses qui doit être l’objet suprême de nos recherches scientifiques, c’est leur histoire. Ces deux points de vue se distinguent d’ailleurs inégalement, selon que la part de la contingence est plus ou moins grande dans la chose à connaître. Ainsi dans les formes inférieures de l’être, l’extrême stabilité dissimule l’histoire. Mais, à mesure que l’on considère des êtres plus élevés, l’essence apparaît de moins en moins comme primordiale : il devient de plus en plus évident qu’elle a son principe dans l’action même de l’être. L’homme est l’auteur de son caractère et de sa destinée.
L’étude de l’histoire des êtres acquiert, de ce point de vue, une importance singulière. Il se trouve qu’au lieu de s’éloigner du principe des choses, comme il arriverait si leur histoire était contenue en germe dans leur nature et n’en était que le développement analytique et nécessaire, la science dynamique s’en rapproche, au contraire, plus que la science statique. C’est l’acte qui implique l’essence, bien loin que l’essence puisse expliquer l’acte. Ce n’est donc pas la nature des choses qui doit être l’objet suprême de nos recherches scientifiques, c’est leur histoire. Ces deux points de vue se distinguent d’ailleurs inégalement, selon que la part de la contingence est plus ou moins grande dans la chose à connaître. Ainsi dans les formes inférieures de l’être, l’extrême stabilité dissimule l’histoire. Mais, à mesure que l’on considère des êtres plus élevés, l’essence apparaît de moins en moins comme primordiale : il devient de plus en plus évident qu’elle a son principe dans l’action même de l’être. L’homme est l’auteur de son caractère et de sa destinée.
Ce n’est donc pas la recherche scientifique, c’est uniquement la prétention d’arriver à se passer de l’expérience qui est condamnée par la doctrine des variations contingentes ; c’est, par là même, la réduction des sciences historiques aux sciences statiques. Les premières deviennent, au contraire, les sciences concrètes proprement dites, tandis que les autres ne sont plus, à des degrés divers, que des sciences abstraites.


Ce n’est donc pas la recherche scientifique, c’est uniquement la prétention d’arriver à se passer de l’expérience qui est condamnée par la doctrine des variations contingentes ;
Enfin, la doctrine de la contingence joint à un intérêt esthétique et scientifique un intérêt pratique. En effet, si l’on admettait que l’existence du monde et les lois de succession qui

Dernière version du 11 mars 2020 à 07:56

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

part chronologique de la pensée distincte ; ce n’est plus même uniquement l’ensemble des données parmi lesquelles l’induction discerne la loi, et qui, une fois résumées ainsi dans une formule générale, rendent inutiles des observations nouvelles : c’est l’éternelle source et l’éternelle règle de la science, en tant que celle-ci veut connaître les choses d’une manière vraiment objective, c’est-à-dire dans leur histoire, en même temps que dans leur nature, laquelle n’est, en définitive, qu’un de leurs états. Selon la doctrine de la contingence, il est chimérique, il est faux de prétendre ramener l’histoire à une déduction pure et simple.

L’étude de l’histoire des êtres acquiert, de ce point de vue, une importance singulière. Il se trouve qu’au lieu de s’éloigner du principe des choses, comme il arriverait si leur histoire était contenue en germe dans leur nature et n’en était que le développement analytique et nécessaire, la science dynamique s’en rapproche, au contraire, plus que la science statique. C’est l’acte qui implique l’essence, bien loin que l’essence puisse expliquer l’acte. Ce n’est donc pas la nature des choses qui doit être l’objet suprême de nos recherches scientifiques, c’est leur histoire. Ces deux points de vue se distinguent d’ailleurs inégalement, selon que la part de la contingence est plus ou moins grande dans la chose à connaître. Ainsi dans les formes inférieures de l’être, l’extrême stabilité dissimule l’histoire. Mais, à mesure que l’on considère des êtres plus élevés, l’essence apparaît de moins en moins comme primordiale : il devient de plus en plus évident qu’elle a son principe dans l’action même de l’être. L’homme est l’auteur de son caractère et de sa destinée.

Ce n’est donc pas la recherche scientifique, c’est uniquement la prétention d’arriver à se passer de l’expérience qui est condamnée par la doctrine des variations contingentes ;