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rétablit un impôt qui s’appelait autrefois personnel-mobilier, qui s’appelle dans le projet ministériel cédule ou taxe d’habitation, pourquoi cet impôt ne s’appliquerait-il pas aussi bien au revenu de la rente qu’à celui du travail ? C’est ce que demandaient les radicaux ; c’est ce que proposait M. Doumer. Le gouvernement, faute d’avoir fait un choix résolu et d’avoir adopté un système complet, est resté dans une situation intermédiaire où les coups sont tombés sur lui de toutes parts. Il a paru reconnaître, dès les premiers jours du débat, que cette situation n’était pas tenable, et son attitude s’en est ressentie.

M. le ministre des finances a prononcé trop tard un discours qui, au point de vue purement spécial et technique, ne manquait ni de vigueur, ni de logique : il aurait pu produire un effet utile si la partie, dès ce moment, n’avait pas été déjà à peu près perdue. M. le Président du Conseil est intervenu à son tour ; il a dit des choses excellentes, mais également tardives. Le résultat de la bataille était très douteux. L’attaque, de la part de quelques orateurs du centre, avait été si habile et si véhémente ; la défense, de la part du gouvernement et de ses amis, avait marqué tant d’hésitation et si peu de confiance, que le dénouement paraissait de plus en plus à craindre. Il était bien certain que le projet ministériel ne passerait pas, et que, si on se mettait à le discuter, on n’en sortirait pas ; mais que faire ? Comment obvier à la difficulté qui se présentait d’un côté comme de l’autre, à quelque parti qu’on s’arrêtât ? Heureusement, les radicaux ont sauvé la situation, et les socialistes les y ont aidés, bien qu’ils aient adopté, ceux-ci et ceux-là, une attitude absolument différente. Les socialistes se sont déclarés partisans du projet du gouvernement, sinon dans sa totalité, au moins dans sa partie essentielle qui était à leurs yeux l’impôt sur la rente. Il y avait là un vague parfum de violation de contrats, que la discussion n’avait pas suffisamment dissipé, et qui charmait M. Jaurès. Le député de Carmaux a prononcé un grand discours dans lequel, comme l’a dit M. Méline, il a embrassé le gouvernement, pour mieux l’étouffer. Il a affecté de voir dans l’impôt sur la rente une première, mais redoutable atteinte portée au capital, sous sa forme jusqu’ici la plus sacrée. Il s’est dit heureux qu’un ministère modéré proclamât que l’État ne saurait jamais se lier in æternum, et qu’il restait toujours maître de réviser, c’est-à-dire de violer les engagemens qu’il avait pris. Cette manière ingénieuse de défendre le projet du gouvernement rendait au gouvernement lui-même et à ses amis une partie de leur liberté. On ne pouvait pas admettre, en effet, que le vote du projet pût être présenté comme une victoire des socialistes. Le discours de M. Jaurès a contribué à fixer les dispositions finales de la majorité. Mais encore fallait-il trouver une porte de sortie, et peut-être cela n’aurait-il pas été facile sans les radicaux, et surtout sans M. Doumer, qui s’est montré leur chef dans cette circonstance. A