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de l’horizon. On eût pu, par conséquent, voir son limbe supérieur quelques jours plus tôt, mais le ciel avait été constamment brumeux. Cet événement heureux pour l’expédition produisit un effet tout opposé sur les Esquimaux, qui regardent l’hiver comme la saison la plus favorable pour eux, l’obscurité leur permettant de surprendre plus facilement les phoques, qui sont très rusés et très difficiles à approcher de jour. La température moyenne de ce mois, qui passe pour le plus froid dans ces régions, avait été de 25° F. au-dessous du zéro. Le temps avait été presque constamment orageux, mais il n’était pas tombé de neige. La santé de l’équipage déjà emprisonné dans les glaces depuis trois mois s’était plutôt améliorée qu’elle n’avait souffert. L’armurier était mort, mais par une cause étrangère au climat, d’une maladie de poitrine dont il était atteint long-temps avant le départ de l’expédition.
de l’horizon. On eût pu, par conséquent, voir son limbe supérieur quelques jours plus tôt, mais le ciel avait été constamment brumeux. Cet événement heureux pour l’expédition produisit un effet tout opposé sur les Esquimaux, qui regardent l’hiver comme la saison la plus favorable pour eux, l’obscurité leur permettant de surprendre plus facilement les phoques, qui sont très rusés et très difficiles à approcher de jour. La température moyenne de ce mois, qui passe pour le plus froid dans ces régions, avait été de 25° {{abr|F.|Fahrenheit}} au-dessous du zéro. Le temps avait été presque constamment orageux, mais il n’était pas tombé de neige. La santé de l’équipage déjà emprisonné dans les glaces depuis trois mois s’était plutôt améliorée qu’elle n’avait souffert. L’armurier était mort, mais par une cause étrangère au climat, d’une maladie de poitrine dont il était atteint long-temps avant le départ de l’expédition.


« 2 février. — Une lentille de grande dimension, dont nous nous servions pour lire, avait disparu depuis quelques jours. Mes soupçons tombèrent sur le sorcier Otookiu, qui était resté seul et sans lumière dans la cabine, quelques instans après que je lui avais montré l’usage de cet instrument. Sa répugnance à me recevoir dans sa hutte lors de ma prochaine visite au village, me confirma dans mon opinion. Je lui dis alors que le gonflement de la face dont il souffrait en ce moment était causé par le verre magique, et qu’il eût à le rendre, s’il voulait guérir. Il avoua aussitôt sa faute, et je lui fis promettre de rapporter la lentille le lendemain, sans quoi je l’assurai que son autre joue enflerait comme la première. La lentille fut effectivement rendue le jour suivant, avec un marteau qui avait également disparu, et nous apprîmes que les mouchettes étaient en la possession d’une femme, ainsi qu’un des verres de mes lunettes qui était tombé, et qu’un enfant avait trouvé par hasard. La terreur du sorcier était si grande, qu’il rapporta par la même occasion un hameçon et une tête de harpon que je lui avais donnés en échange d’un arc. Afin de le confirmer dans cette impression de crainte salutaire, je consentis à annuler le marché. Le lendemain, le verre de mes lunettes fut rendu, et je donnai au porteur une boîte de fer blanc comme si ce n’eût pas été de sa part une simple restitution. Nous recouvrâmes également les mouchettes, et je fis savoir aux naturels que, si quelque objet disparaissait encore à l’avenir, aucun d’eux ne serait plus admis à bord.
« ''2 février''. — Une lentille de grande dimension, dont nous nous servions pour lire, avait disparu depuis quelques jours. Mes soupçons tombèrent sur le sorcier Otookiu, qui était resté seul et sans lumière dans la cabine, quelques instans après que je lui avais montré l’usage de cet instrument. Sa répugnance à me recevoir dans sa hutte lors de ma prochaine visite au village, me confirma dans mon opinion. Je lui dis alors que le gonflement de la face dont il souffrait en ce moment était causé par le verre magique, et qu’il eût à le rendre, s’il voulait guérir. Il avoua aussitôt sa faute, et je lui fis promettre de rapporter la lentille le lendemain, sans quoi je l’assurai que son autre joue enflerait comme la première. La lentille fut effectivement rendue le jour suivant, avec un marteau qui avait également disparu, et nous apprîmes que les mouchettes étaient en la possession d’une femme, ainsi qu’un des verres de mes lunettes qui était tombé, et qu’un enfant avait trouvé par hasard. La terreur du sorcier était si grande, qu’il rapporta par la même occasion un hameçon et une tête de harpon que je lui avais donnés en échange d’un arc. Afin de le confirmer dans cette impression de crainte salutaire, je consentis à annuler le marché. Le lendemain, le verre de mes lunettes fut rendu, et je donnai au porteur une boîte de fer blanc comme si ce n’eût pas été de sa part une simple restitution. Nous recouvrâmes également les mouchettes, et je fis savoir aux naturels que, si quelque objet disparaissait encore à l’avenir, aucun d’eux ne serait plus admis à bord.


« 17 février. — Nous fîmes quelques achats aux naturels, mais sans leur permettre d’entrer dans le navire. Leur visite avait néanmoins un autre but, celui de faire une restitution générale des différens objets qu’ils avaient dérobés, parmi lesquels un couteau de table était le seul instrument dont nous eussions remarqué la disparition. Nos canons, que nous
« ''17 février''. — Nous fîmes quelques achats aux naturels, mais sans leur permettre d’entrer dans le navire. Leur visite avait néanmoins un autre but, celui de faire une restitution générale des différens objets qu’ils avaient dérobés, parmi lesquels un couteau de table était le seul instrument dont nous eussions remarqué la disparition. Nos canons, que nous

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de l’horizon. On eût pu, par conséquent, voir son limbe supérieur quelques jours plus tôt, mais le ciel avait été constamment brumeux. Cet événement heureux pour l’expédition produisit un effet tout opposé sur les Esquimaux, qui regardent l’hiver comme la saison la plus favorable pour eux, l’obscurité leur permettant de surprendre plus facilement les phoques, qui sont très rusés et très difficiles à approcher de jour. La température moyenne de ce mois, qui passe pour le plus froid dans ces régions, avait été de 25° F. au-dessous du zéro. Le temps avait été presque constamment orageux, mais il n’était pas tombé de neige. La santé de l’équipage déjà emprisonné dans les glaces depuis trois mois s’était plutôt améliorée qu’elle n’avait souffert. L’armurier était mort, mais par une cause étrangère au climat, d’une maladie de poitrine dont il était atteint long-temps avant le départ de l’expédition.

« 2 février. — Une lentille de grande dimension, dont nous nous servions pour lire, avait disparu depuis quelques jours. Mes soupçons tombèrent sur le sorcier Otookiu, qui était resté seul et sans lumière dans la cabine, quelques instans après que je lui avais montré l’usage de cet instrument. Sa répugnance à me recevoir dans sa hutte lors de ma prochaine visite au village, me confirma dans mon opinion. Je lui dis alors que le gonflement de la face dont il souffrait en ce moment était causé par le verre magique, et qu’il eût à le rendre, s’il voulait guérir. Il avoua aussitôt sa faute, et je lui fis promettre de rapporter la lentille le lendemain, sans quoi je l’assurai que son autre joue enflerait comme la première. La lentille fut effectivement rendue le jour suivant, avec un marteau qui avait également disparu, et nous apprîmes que les mouchettes étaient en la possession d’une femme, ainsi qu’un des verres de mes lunettes qui était tombé, et qu’un enfant avait trouvé par hasard. La terreur du sorcier était si grande, qu’il rapporta par la même occasion un hameçon et une tête de harpon que je lui avais donnés en échange d’un arc. Afin de le confirmer dans cette impression de crainte salutaire, je consentis à annuler le marché. Le lendemain, le verre de mes lunettes fut rendu, et je donnai au porteur une boîte de fer blanc comme si ce n’eût pas été de sa part une simple restitution. Nous recouvrâmes également les mouchettes, et je fis savoir aux naturels que, si quelque objet disparaissait encore à l’avenir, aucun d’eux ne serait plus admis à bord.

« 17 février. — Nous fîmes quelques achats aux naturels, mais sans leur permettre d’entrer dans le navire. Leur visite avait néanmoins un autre but, celui de faire une restitution générale des différens objets qu’ils avaient dérobés, parmi lesquels un couteau de table était le seul instrument dont nous eussions remarqué la disparition. Nos canons, que nous