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teur de leur race, — avait évoqué pour elle tous les souvenirs du Passé, souvenirs pesants, sous lesquels fléchissait son cœur. Toutes les traditions, toutes légendes que de vieilles tantes et des grand’mères bavardes avaient jadis murmurées à ses oreilles, pendant les longues soirées, au coin de l’âtre encore tiède, lui revenaient maintenant plus sombres et plus terribles, investies de la tristesse qui la rongeait. Dans la destinée des Pyncheon, elle ne voyait plus qu’une série monotone de calamités successivement reproduites pour chaque génération, et auxquelles allait être ajouté un incident tragique, dont le Juge, Clifford, la vieille fille elle-même étaient les acteurs désignés et marqués.

Vainement voulait-elle secouer cette obsession, rien ne pouvait calmer l’ébranlement de ses nerfs, rien ne pouvait lui ôter l’idée qu’à ce moment même il se passait quelque chose d’inusité, dont le terme approchait à grands pas. Elle s’arrêta par instinct devant la Croisée en ogive et s’y accouda pour regarder la rue, afin d’échapper, par l’aspect de la réalité, aux chimères dont elle était pour ainsi dire enveloppée. Rien de plus, rien de moins que les jours précédents : les trottoirs mouillés ; dans les creux du pavé, quelques flaques d’eau ; à certaine fenêtre, qu’elle connaissait bien, une ouvrière travaillant pour un tailleur, et vers laquelle, dans ce moment de détresse, Hepzibah jeta une sorte d’appel sympathique. Puis une chaise de poste vint à passer, dont ses yeux myopes suivirent les roues rapides et les flancs mouchetés de boue, jusqu’au moment où elle eut tourné le coin de la rue, — refusant d’emporter plus loin les vaines et futiles préoccupations à l’aide desquelles Hepzibah cherchait à