« Les Loix du mouvement et du repos déduites d’un principe metaphysique » : différence entre les versions

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===Probleme II. Trouver les Loix du Mouvement des Corps Elastiques?===
===Probleme II. Trouver les Loix du Mouvement des Corps Elastiques?===

Soient deux Corps Elastiques, dont les Masses sont ''A'' & ''B'', qui se meuvent vers le même côté, avec les vîtesses ''a'' & ''b'': mais ''A'' plus vîte que ''B'', ensorte qu'il l'atteigne & le choque: & soient α & β les vîtesses des deux corps après le choc: la somme ou la différence de ces vîtesses après le choc, est la même qu'elle etoit auparavant.

Le changeent arrivé dans l'Univers, consiste en ce que le corps ''A'', qui se mouvoit avec la vîtesse ''a'', & qui dans un certain tems parcouroit un espace = ''a'', ne se meut plus qu'avec la vîtesse α, & ne parcourt qu'un espace = α: le corps ''B'', qui ne se mouvoit qu'avec la vîtesse ''b'', & ne parcouroit qu'un espace = ''b'', se meut plus avec la vîtesse β, & parcourt un espace = β.

Ce changement est donc le même qui seroit arrivé, si pendant que le corps ''A'' se mouvoit avec la vîtesse ''a'', & parcouroit l'espace = ''a'', il eût été emporté en arrière sur un plan immatériel, qui se fût mû avec une vîtesse ''a-α'', par un espace = ''a-α'': & que le corps ''B'' se mouvoit avec la vîtesse ''b'', & parcouroit l'espace = ''b'', il eût été emporté en avant sur un plan immatériel, qui se fût mû avec une vîtesse ''β-b'', par un espace = ''β-b''.

Or, que les corps ''A'' & ''B'' se meuvent avec des vîtesses propres sur les plans mobiles, ou qu'ils y soient en repos, le mouvement des ces plans chargés des corps, étant le même: les Quantités d'Action, produites dans la Nature, seront ''A (a - α)<sup>2</sup>'', & ''B (β - b)<sup>2</sup>''; dont la somme doit être la plus petite qu'il soit possible. On a donc

:<math>
A a a - 2 A a \alpha + A \alpha \alpha +
B \beta \beta - 2 B b \beta + B b b = Minimum
</math>

Ou

:<math>
-2 A a d\alpha + 2 A \alpha d\alpha + 2 B \beta d\beta - 2 B b d\beta = 0
</math>

Or, pour les Corps Elastiques, la vîtesse respective étant, après le choc, la même qu'elle étoit auparavant; on a β - α = ''a - b'', ou ''β = α + a - b'', & dβ = dα: qui étant substitués dans l'Equation precédente, donnent pour les vîtesses

:<math>
\alpha = \frac{A a - B a + 2 B b}{A + B}
</math>

&

:<math>
\beta = \frac{2 A a - A b + B b}{A + B}
</math>

Si les corps se meuvent l'un vers l'autre, il est facile d'appliquer le même raisonnement: ou bien il suffit de considérer ''b'' comme négatif par rapport à ''a'', & les vîtesses seront

:<math>
\alpha = \frac{A a - B a - 2 B b}{A + B}
</math>

&

:<math>
\beta = \frac{2 A a + A b - B b}{A + B}
</math>

Si l'un des corps étoit en repos avant le choc, ''b=0''; & les vîtesses sont

:<math>
\alpha = \frac{A a - B a}{A + B}
</math>

&

:<math>
\beta = \frac{2 A a}{A + B}
</math>

Si l'un des corps est un obstacle inébranlable, considérant cet obstacle comme un corps ''B'' d'une Masse infinie en repos; on aura la vîtesse α = ''-a'': c'est à dire, que le corps ''A'' rejaillira avec la même vîtesse qu'il avoit en frappant l'obstacle.

Si l'on prend la somme des Forces vives, on verra qu'après le choc elle est la même qu'elle étoit auparavant: c'est à dire, que

:<math>
A \alpha \alpha + B \beta \beta = A a a + B b b.
</math>

Ici la somme des Forces vives se conserve après le choc; mais cette conservation n'a lieu que pour les Corps Elastiques, & non pour les Corps Durs. Le Principe genéral, qui s'étend aux uns & aux autres, est que ''la Quantité d'Action, nécessaire pour causer quelque changement dans la Nature, est la plus petite qu'il est possible.''

Ce Principe est si universel & si fécond, qu'on en tire la Loi du Repos, ou de l'Equilibre. Il est évident qu'il n'y a plus ici de différence entre les Corps Durs & les Corps Elastiques.


===Probleme III. Trouver la Loi du Repos des Corps?===
===Probleme III. Trouver la Loi du Repos des Corps?===

Version du 24 juillet 2006 à 19:56


Les loix du mouvement et du repos déduites d'un principe metaphysique
1746

Je donnai le principe, sur lequel l'Ouvrage suivant est fondé, le 15. Avril 1744, dans l'Assemblée publique de l'Academie Roiale des Sciences de Paris, comme les Actes de cette Academie en feront foi.

M. le Professeur Euler donna à la fin de la même année son excellent Livre: Methodus inveniendi lineas curvas maximi minimive proprietate gaudentes. Dans le Supplement qui y avoit été ajouté, cet illustre Géomêtre démontre; Que dans les trajéctoires, que des corps décrivent par des forces centrales, la vitesse multipliée par l'elément de la courbe, fait toujours un minimum.

Cette remarque me fit d'autant plus de plaisir, qu'elle est une belle application de mon principe au mouvement des Planetes; dont ce principe en efect est la regle.

Je vais tenter de tirer de la même source des verités d'un genre superieur & plus important.


I. Examen des preuves de l'existence de Dieu, tirées des merveilles de la Nature

Soit que nous demeurions renfermés en nous-mêmes, soit que nous en sortions pour parcourir les merveilles de l'Univers, nous trouvons tant de preuves de l'existence d'un Etre tout puissant & tout sage...


II. Qu'il faut chercher les preuves de l'existence de Dieu, dans les Loix generales de la Nature. Que les Loix selon lesquelles le Mouvement se conserve, se distribue & se détruit, sont fondées sur les attributs d'une suprême Intelligence

Ce n'est donc point dans les petits détails, dans ces parties de l'Univers dont nous connoissons trop peu les rapports, qu'il faut chercher l'Etre suprême:...


III. Recherche des Loix du Mouvement & du Repos

Les Corps soit en repos, soit en mouvement, ont une certaine force pour persister dans l'état où ils sont: cette force appartenant à toutes les parties de la Matiere, est toujours proportionnelle à la quantité de Matiere que ces Corps contiennent, & s'appelle leur inertie.

L'impenetrabilité des Corps, & leur inertie, rendoient necessaire l'établissement de quelques loix, pour accorder ensemble ces deuc propriétés, qui sont à tout moment opposées l'une à l'autre dans la Nature. Lorsque deux Corps se rencontrent, ne pouvant se pénétrer, il faut que le Repos de l'un & le Mouvement de l'autre, ou le Mouvement de tous les deux soient altérés: mais cette altération dépendant de la force avec laquelle les deux Corps se choquent, examinons ce que c'est que le Choc; voyons de quoi il dépend; & si nous ne pouvons avoir une idée assez claire de sa force, voyons du moins les circonstances qui le rendent le même.

On suppose ici, comme l'ont supposé tous ceux qui ont cherché les loix du Mouvement; Que les Corps se rencontrent directement; c'est à dire, que leurs centres de gravité se meuvent dans la ligne droite qui est la direction de leur mouvement; & que dans le Choc cette ligne passe par le lieu de leur attouchement, & y est perpendiculaire. Cette derniere condition a toujours lieu, si les Corps sont des globes de matière homogêne, tels que nous les considérons ici.

Si un Corps se mouvant avec une certaine vîtesse, rencontre un autre Corps en repos; le Choc est le même que si le dernier Corps se mouvant avec la vîtesse du premier, le rencontroit en repos.

Si deux Corps se mouvant l'un vers l'autre, se rencontrent; le Choc est le même que si l'un des deux étant en repos, l'autre le rencontroit avec une vîtesse qui fût egale à la somme des vîtesses de l'un & de l'autre.

Si deux Corps se mouvant vers le même côté, se rencontrent; le Choc est le même que si l'un des deux étant en repos, l'autre le rencontroit avec une vîtesse qui fût egale à la différence des vîtesses de l'un & de l'autre.

En general donc, si deux Corps se rencontrent; soit que l'un des deux soit en repos; soit qu'ils se meuvent tous les deux l'un vers l'autre; soit qu'ils se meuvent tous deux du même côté: quelles que soient leurs vîtesses, si la somme ou la différence de ces vîtesses (ce qu'on appelle la vîtesse respective) est la même, le Choc est le même. La grandeur du Choc de deux Corps donnés dépend uniquement de leur vîtesse respective.

La verité de cette proposition est facile à voir, en concevant les deux Corps emportés sur un plan mobile, dont la vîtesse détruisant la vîtesse de l'un des deux, donneroit à l'autre la somme ou la différence des vîtesses qu'ils avoient. Le Choc des deux Corps sur le plan, seroit le même que sur un plan immobile.

Voions maintenant la différence que la Dureté, ou l'Elasticité des Corps, cause dans les effets du Choc.

Les Corps parfaitement Durs sont ceux, dont les parties sone inséparables & infléxibles; & dont, par conséquent, la figure est inaltérable.

Les Corps parfaitement Elastiques sont ceux, dont les parties, après avoir été pliées, se redressent, reprennent leur première situation, & rendent au corps sa première figure. Quant à la nature de cette Elasticité, nous entreprenons pas de l'expliquer; il suffit ici d'en connoître l'effet.

Je ne parle point des Corps Moûs, ni des Corps Fluides; ce ne sont que des amas de Corps Durs ou Elastiques.

Lorsque deux Corps Durs se rencontrent, leurs parties étant inséparables & infléxibles, le Choc ne sauroit altérer que leurs vîtesses. Les deux Corps se pressent & se poussent, jusqu'à ce que la vîtesse de l'un soit égale à la vitesse de l'autre. Les Corps Durs, après le Choc, vont donc ensemble d'une vîtesse commune.

Mais lorsque deux Corps Elastiques se rencontrent, pendant qu'ils se pressent & se poussent, le Choc est emploié aussi à plier leurs parties. Es les deux corps ne demeurent appliqués l'un contre l'autre, que jusqu'à ce que leur ressort, bandé par le Choc autant qu'il le peut être, les sépare en se débandant; & les fasse s'éloigner avec autant de vîtesse qu'ils s'approchoient: Car la vîtesse respective des deux Corps étant la seule cause qui avoit bandé leur ressort, il faut que le débandement reproduise un effet égal à celui, qui comme cause avoit produit le bandement: c'est à dire une vîtesse respective, en sens contraire, égale à la première. La vîtesse respective des Corps Elastiques est donc, après le Choc, la même qu'auparavant.

Cherchons maintenant les Loix, selon lesquelles le Mouvement se distribue entre deux Corps qui se choquent, soit que ces Corps soient Durs, soit qu'ils soient Elastiques.

Nous déduirons ces Loix d'un seul Principe, & de ce même Principe nous déduirons les Loix de leur Repos.

Principe General

Lors qu'il arrive quelque changement dans la Nature, la Quantité d'Action, nécessarire pour ce changement, est la plus petite qu'il soit possible.

La Quantité d'Action est le produit de la Masse des Corps, par leur vîtesse & par l'espace qu'ils parcourent. Lors qu'un Corps est transporté d'un lieu dans un autre, l'Action est d'autent plus grande, que la Masse est plus grosse; que la vîtesse est plus rapide; que l'espace, par lequel il est transporté, est plus long.

Probleme I. Trouver les Loix du Mouvement des Corps Durs?

Soient deux Corps Durs, dont les Mases sont A & B, qui se meuvent vers le même côté, avec les vîtesses a & b: mais A plus vîte que B, en sorte qu'il l'atteigne & le choque. Soit la vîtesse commune de ces deux corps après le choc & . Le changeent arrivé dans l'Univers, consiste en ce que le corps A, qui se mouvoit avec la vîtesse a, & qui dans un certain tems parcouroit un espace = a, ne se meut plus qu'avec la vîtesse x, & ne parcourt qu'un espace = x: le corps B, qui ne se mouvoit qu'avec la vîtesse b, & ne parcouroit qu'un espace = b, se meut plus avec la vîtesse x, & parcourt un espace = x.

Ce changement est donc le même qui seroit arrivé, si pendant que le corps A se mouvoit avec la vîtesse a, & parcouroit l'espace = a, il eût été emporté en arrière sur un plan immatériel, qui se fût mû avec une vîtesse a-x, par un espace = a-x: & que le corps B se mouvoit avec la vîtesse b, & parcouroit l'espace = b, il eût été emporté en avant sur un plan immatériel, qui se fût mû avec une vîtesse x-b, par un espace = x-b.

Or, que les corps A & B se meuvent avec des vîtesses propres sur les plans mobiles, ou qu'ils y soient en repos, le mouvement des ces plans chargés des corps, étant le même: les Quantités d'Action, produites dans la Nature, seront A (a - x)2, & B (x - b)2; dont la somme doit être la plus petite qu'il soit possible. On a donc

Ou

D'où l'on tire pour la vîtesse commune

Dans ce cas, où les deux corps se meuvent du même côté, la quantité de mouvement détruite & la quantité produite, sont égales: & la quantité totale de mouvement demeure, apres le choc, la même qu'elle étoit auparavant.

Il est facile d'appliquer le même raisonnement au cas, où les corps se meuvent l'un vers l'autre: ou bien il suffit de considérer b comme négatif par rapport à a: & la vîtesse commune sera

Si l'un des corps étoit en repos avant le choc, b=0; & la vîtesse commune est

Si un corps rencontre un obstacle inébranlable, on peut considérer cet obstacle comme un corps d'une Masse infinie en repos: Sie donc B est infini, la vîtesse x=0.

Voions maintenant ce qui doit arriver, lors que les Corps sont Elastiques. Les Corps dont je vais parler, sont ceux qui ont une parfaite Elasticité.

Probleme II. Trouver les Loix du Mouvement des Corps Elastiques?

Soient deux Corps Elastiques, dont les Masses sont A & B, qui se meuvent vers le même côté, avec les vîtesses a & b: mais A plus vîte que B, ensorte qu'il l'atteigne & le choque: & soient α & β les vîtesses des deux corps après le choc: la somme ou la différence de ces vîtesses après le choc, est la même qu'elle etoit auparavant.

Le changeent arrivé dans l'Univers, consiste en ce que le corps A, qui se mouvoit avec la vîtesse a, & qui dans un certain tems parcouroit un espace = a, ne se meut plus qu'avec la vîtesse α, & ne parcourt qu'un espace = α: le corps B, qui ne se mouvoit qu'avec la vîtesse b, & ne parcouroit qu'un espace = b, se meut plus avec la vîtesse β, & parcourt un espace = β.

Ce changement est donc le même qui seroit arrivé, si pendant que le corps A se mouvoit avec la vîtesse a, & parcouroit l'espace = a, il eût été emporté en arrière sur un plan immatériel, qui se fût mû avec une vîtesse a-α, par un espace = a-α: & que le corps B se mouvoit avec la vîtesse b, & parcouroit l'espace = b, il eût été emporté en avant sur un plan immatériel, qui se fût mû avec une vîtesse β-b, par un espace = β-b.

Or, que les corps A & B se meuvent avec des vîtesses propres sur les plans mobiles, ou qu'ils y soient en repos, le mouvement des ces plans chargés des corps, étant le même: les Quantités d'Action, produites dans la Nature, seront A (a - α)2, & B (β - b)2; dont la somme doit être la plus petite qu'il soit possible. On a donc

Ou

Or, pour les Corps Elastiques, la vîtesse respective étant, après le choc, la même qu'elle étoit auparavant; on a β - α = a - b, ou β = α + a - b, & dβ = dα: qui étant substitués dans l'Equation precédente, donnent pour les vîtesses

&

Si les corps se meuvent l'un vers l'autre, il est facile d'appliquer le même raisonnement: ou bien il suffit de considérer b comme négatif par rapport à a, & les vîtesses seront

&

Si l'un des corps étoit en repos avant le choc, b=0; & les vîtesses sont

&

Si l'un des corps est un obstacle inébranlable, considérant cet obstacle comme un corps B d'une Masse infinie en repos; on aura la vîtesse α = -a: c'est à dire, que le corps A rejaillira avec la même vîtesse qu'il avoit en frappant l'obstacle.

Si l'on prend la somme des Forces vives, on verra qu'après le choc elle est la même qu'elle étoit auparavant: c'est à dire, que

Ici la somme des Forces vives se conserve après le choc; mais cette conservation n'a lieu que pour les Corps Elastiques, & non pour les Corps Durs. Le Principe genéral, qui s'étend aux uns & aux autres, est que la Quantité d'Action, nécessaire pour causer quelque changement dans la Nature, est la plus petite qu'il est possible.

Ce Principe est si universel & si fécond, qu'on en tire la Loi du Repos, ou de l'Equilibre. Il est évident qu'il n'y a plus ici de différence entre les Corps Durs & les Corps Elastiques.

Probleme III. Trouver la Loi du Repos des Corps?

Je considère ici les Corps attachés à un Levier: & pour trouver le point, autour duquel ils demeurent en équilibre; je cherche le point, autour duquel, si le Levier reçoit quelque petit mouvement, la Quantité d'Action soit la plus petite qu'il soit possible.

Soit c la longueur du Levier, que je suppose immatériel, aux extrémités duquel soient placés deux Corps, dont les Mases sont A & B. Soit z la distance du corps A au point cherché, & c-z la distance du corps B: il est évident que, si le Levier a quelque petit mouvement, les corps A & B décriront de petits Arcs semblables entr'eux, & proportionnels aux distances de ces corps au point qu'on cherche. Ces Arcs seront donc les espaces parcourus par les Corps, & representent en même tems leurs vîtesses. La Quantité d'Action sera donc proportionelle au produit de chaque corps par le quarré de son Arc; ou (puisque les Arcs sont semblables) au produit de chaque corps par le quarré de sa distance au point, autour duquel tourne le Levier: c'est à dire, à A z z & B (c - z)2; dont la somme doit être la plus petite qu'il soit possible. On a donc

ou

D'où l'on tire

Ce qui est la Proposition fondamentale de la Statique.

FINIS