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VIII.

Séance du 11 mars 1859.


Présidence de M. A. COMBES.

M. le Sous-Préfet assiste à la séance.

L’examen d’un bulletin de la Société de la Picardie est renvoyé à M. R. Ducros.

M. DE GRIMALDI fait un rapport sur le bulletin du 2e trimestre de la Société impériale des antiquaires de France.

Ce bulletin contient les procès-verbaux des séances de la Société, depuis le 7 avril 1858, jusqu’au 16 juin. Parmi les importants travaux qu’il renferme, quelques-uns semblent dignes d’une attention spéciale. M. Théodule Devéria donne sur le déroulage des manuscrits antiques, et particulièrement sur ceux qui sont imprégnés de bitume, des détails pleins d’intérêt. On sait combien il est pénible, de voir disparaître des trésors que l’on croyait avoir arrachés aux ravages du temps. Les procédés employés par M. Devéria sont très-ingénieux, et les succès qu’il a obtenus sont de nature à permettre d’espérer qu’il sera possible de conserver ces débris sous lesquels se cachent peut-être des chefs-d’œuvre inconnus.

M. Renier a communiqué dans la même séance, une inscription latine trouvée dans l’Algérie, à Zraia, l’ancienne Colonia Julia Zaraï. Cette inscription renferme la constatation d’un fait important. C’est un tarif des droits de douanes qui se payaient à l’importation d’un certain nombre de marchandises dans la Numidie. C’est le seul document de ce genre que l’antiquité nous ait laissé. Il prouve encore une fois, qu’il ne faut pas toujours se hâter d’accorder aux temps modernes le mérite, ou leur attribuer la responsabilité, de certaines mesures fiscales, ou de rapports internationaux qui semblent plutôt le produit direct de tout état social.

Ce document est véritablement curieux et peut devenir, pour les économistes, un excellent terme de comparaison. Une note de M. Vallet de Viriville sur un exemplaire de la pragmatique sanction, imprimé à Paris en 1507, renferme des détails très-intéressants qui portent sur la typographie ou bibliographie, et sur la reliure au point de vue archéologique. C’est une étude complète qui met en relief le mérite de cette édition, et montre combien l’art trouve de ressources quand il est traité d’une manière sérieuse.

Plusieurs autres travaux sont signalés. Ils témoignent tous de recherches consciencieuses, et d’un amour véritable pour cette science si difficile, parce qu’elle est immense dans son étendue. L’archéologie cherche à se rendre raison de tout. Elle interroge le passé, non pas par une vaine et stérile curiosité, mais dans le but d’arriver à des conséquences d’où ressort une connaissance plus profonde des lois, des mœurs et des institutions des peuples. Il y a une liaison intime entre l’esprit qui anime une époque, et les produits divers des arts considérés comme expression de la nature, et destinés à donner satisfaction au goût, ou bien comme un des éléments du luxe. Envisagée ainsi, l’archéologie a une haute portée : elle est appelée à rendre des services nombreux à l’histoire ; et par l’ensemble des résultats auxquels elle arrive, ou des inductions qu’elle permet de tirer, elle éclaire les points les plus obscurs, et explique les faits dont il serait souvent impossible de discerner la nature ou de suivre les conséquences.


M. V. CANET entretient la Société de diverses tentatives faites pour canaliser l’Agoût.

La notice historique de M. le docteur Clos renferme sur cette question quelques indications qu’il peut être utile de compléter, afin de ne pas laisser dans l’oubli une des mesures des plus importantes entreprises dans le passé, pour le développement de l’agriculture, de l’industrie, du commerce, et par conséquent de la richesse, dans une contrée qui renferme de si nombreux éléments de vie et de prospérité.

La question de la canalisation de l’Agoût ne se présente pas seule. Elle donne lieu à des études diverses sous des aspects tout à fait différents. Elle se lie d’abord à la tentative la plus grande et la plus féconde pour le midi ; elle touche de près à la construction du canal des deux mers.

La création d’un canal destiné à relier les deux mers était une pensée ancienne. Il n’est pas étonnant que, dans un pays où tout ce qui manifeste une grande force et une véritable hardiesse, est attribué aux Romains, on ait fait remonter jusqu’aux conquérants du monde le projet de créer entre l’Océan et la Méditerranée un moyen de communication. L’idée se retrouve à travers le moyen-âge, et enfin des plans sont dressés sous François 1er , Charles IX, Henri IV. Mais les difficultés d’exécution paraissent insurmontables. En 1660, Riquet fait connaître son plan à Colbert : le 18 janvier 1662, un arrêt du conseil ordonne l’examen du projet. Une rigole d’essai est faite, et, par un arrêt du 13 octobre 1666, la construction du canal est ordonnée, et la concession est faite à Paul Riquet, comme propriété incommutable et non rachetable. Au mois d’octobre 1680, époque de la mort de Riquet, la navigation était établie de Toulouse à Trèbes, et l’année suivante le canal était terminé.

Lorsque Riquet eut trouvé dans la Montagne-Noire une assez grande quantité d’eau pour suffire aux besoins du canal projeté, et qu’il fut sûr de pouvoir la conduire au point qu’il avait remarqué comme ligne de partage, le problème fut résolu. Les autres travaux n’étaient plus que des difficultés secondaires, dont deux grandes puissances, le temps et l’argent, devaient incontestablement venir à bout.

Cependant la pensée de Riquet parait avoir subi de nombreuses modifications. Aurait-il voulu conduire les eaux de la Montagne-Noire, pour les déverser dans la Méditerranée, de là venir aboutir à Revel, aller rejoindre l’Agoût et par là le Tarn ? C’est un projet qui lui a été prêté et qui paraît peu vraisemblable. N’aurait-il pas plutôt voulu, en donnant au canal la direction qui a été suivie, lui fournir comme un embranchement, sur les lieux mêmes auxquels il avait enlevé leurs eaux ? Cette seconde supposition paraît plus probable, et les travaux entrepris sur l’Agoût au moment même où commençaient les constructions du canal du Midi, sembleraient la justifier pleinement.

Toutes les eaux qui servent à l’alimentation du canal se réunissent dans deux rigoles, la rigole de la plaine et celle de la montagne. La rigole de la montagne se jette directement dans le bassin de Saint-Ferréol. Celle de la plaine est formée par une dérivation du Sor à Pont Crouzot, se dirige vers Revel, où avait été construit un port qui conserve encore le nom de Port-Louis, et va rejoindre les eaux sorties du bassin de Saint-Ferréol, à un endroit appelé les Thomasses. Évidemment dans la pensée de Riquet, comme dans la volonté des États de Languedoc, il y avait quelque chose à faire pour les contrées que l’on privait de leurs eaux. Depuis les Thomasses jusqu’à Naurouse, la rigole du canal du Midi est navigable. En 1705 et jusqu’en 1725, ainsi que le constate le docteur Clos dans sa notice sur Sorèze, un service de transport pour les marchandises a été établi de Revel à Naurouse. Paul Riquet s’était lui-même servi de cette rigole pour le transport du bois et des pierres qu’il empruntait à la Montagne-Noire. Il serait donc facile, et c’est ce qu’a constaté en 1837, un voyage de M. le duc de Caraman, de faire de la rigole, un véritable canal destiné à relier Revel à la grande voie de Toulouse à Cette.

Mais ce résultat important sans doute pour la ville qui devait en profiter, ne donnait point satisfaction aux vœux du pays et n’accomplissait pas la pensée de Riquet. À Pont-Crouzet, le Sor prenait autrefois une direction vers le nord. On lui a tracé un nouveau lit aux Thomasses, et les eaux que rejettent les épanchoirs sont entraînées, et vont auprès de Garravaques rejoindre l’ancien lit. C’est là le cours d’eau qu’il s’agirait de canaliser, jusqu’à Vielmur où il se jette dans l’Agoût.

Le Conseil général de la Haute-Garonne, depuis 1837, jusqu’en 1854, a tous les ans, exprimé le vœu que le gouvernement accordât au canal du Midi une subvention, afin qu’il pût se charger de la construction de l’embranchement destiné à le rejoindre à la rivière d’Agoùt. Le Conseil général du Tarn a plusieurs fois exprimé le même vœu, mais d’une manière plus générale. Ainsi Jusqu’à la veille même du jour où le Midi doté d’un chemin de fer allait voir commencer les travaux, on se préoccupait de compléter la pensée de Riquet, et d’offrir aux contrées qu’il avait privées de leurs eaux, une compensation suffisante.

Cette question semble n’avoir aujourd’hui qu’un intérêt purement historique pour le pays. Castres est sur le point de voir changer les conditions dans lesquelles l’embranchement qui doit le desservir a été reçu par la compagnie du chemin de fer du Midi. S’il n’y a donc pas d’intérêt pour le pays, à solliciter l’exécution d’un projet ancien, il y a du moins une certaine satisfaction à signaler les efforts qui ont été faits pour augmenter le mouvement de production, en facilitant les moyens de communication et de transport.

En 1666, les deux diocèses de Castres et de Lavaur réunirent leurs efforts pour atteindre au but désigné probablement par Paul Riquet lui-même. Des travaux antérieurs avaient été faits sur l’Agoût. Borel constate qu’il était navigable. Évidemment il s’agissait de quelque fractions du cours de la rivière, et nullement d’une partie importante.

En 1670, le plan des barrages et des écluses fut dressé, et l’exécution commença immédiatement. 400,000 livres furent dépensées. Malheureusement deux diocèses contigus furent intéressés à la question, et les travaux, au lieu de se faire successivement, de manière à obtenir des résultats complets, furent entrepris dans toute l’étendue : ils ne purent pas être achevés, et dès-lors, ils devinrent complètement inutiles.

La plupart des barrages existent encore aujourd’hui, et un certain nombre d’écluses sont dans un état parfait de conservation. Les écluses sont au nombre de 23, depuis Castres jusqu’à Saint-Sulpice, au point de jonction de l’Agoût et du Tarn. Voici leurs noms : Lacase, Mélou, Saïx, Le Crusel, Le Regourdel, Vielmur, Guitalens, Serviès, Belvèse, Saint-Paul, Saint-Chugou, La Brugné, Viterbe, Lecati, Jonquières, Flamarens, Le Carla, Lavaur, Les Bouillens, Ambres, Le Rouch, Saint-Jean-de-Rives, Saint-Sulpice. Ces écluses existaient en 1700, ainsi que le constate une carte du diocèse de Castres, dédiée à messire Augustin de Meaupou, conseiller du Roi en ses conseils, évêque de Castres, par Hubert, géographe ordinaire du roi.

Il ne reste qu’à exprimer des regrets d’avoir vu de pareils efforts rester inutiles, et une pensée si féconde pour le pays entravée dans son exécution. Il est bon cependant de constater que les États de Languedoc avaient demandé un dédommagement pour le pays Castrais, que Paul Riquet a poursuivi autant qu’il dépendait de lui l’exécution d’un projet avantageux pour des populations nombreuses, et que Mgr de Meaupou, évêque de Castres et plusieurs évêques de Lavaur, n’ont rien négligé pour doter le pays de ce moyen puissant de prospérité.


M. V. CANET fait connaître à la Société deux empreintes de sceaux communiquées par M. Terrisse.

La première, d’assez grande dimension, représente un écusson avec trois croix fleur-de-lisées, sur champ de sable. Entre l’écusson et les ornements qui le séparent de l’inscription en exergue, on distingue en haut et sur les deux côtés, une figure symbolique d’animal. L’inscription porte : ✝ s. CURIÆ MONIALIS D. HUGONIS ADHEMARI.

La seconde empreinte représente une Vierge grossièrement sculptée : elle est assise sur un banc dont les deux extrémités sont recourbées : sur sa tête est une couronne formée de trois fleurs-de-lys. Sa main tient aussi une fleur. On sait qu’il n’est pas rare de trouver dans des sceaux appartenant à des personnages religieux, des représentations de ce genre. « Les fleurs, les roses, les lys, dans la main des évêques, des abbés et des dames, dit dom de Vaines, expriment l’intégrité des mœurs. Rien de plus ordinaire que ces symboles dans les sceaux des églises et des anciens monastères, pour signifier leur état florissant, et le soin que l’on y prenait de répandre partout la bonne odeur de Jésus-Christ. »

Près de la Vierge et sur le banc où elle est assise, se tient debout un enfant dont le bras s’appuie sur le sien. Il est vêtu d’une robe longue, sans ornement. L’ensemble est peu satisfaisant. Il accuse ou l’enfance de l’art, ou une grande inhabileté.

Les caractères sont gothiques.

L’inscription porte : s. CONVENTUS ABBATIÆ MONASTERII BELLÆ PERTISSÆ.


M. PARAYRE lit une note sur un procédé métallurgique applicable à la production de l’aluminium, par M. Cumenge fils.

L’aluminium est le métal de l’alumine. L’alumine se trouve dans toutes les argiles : quelques-unes en renferment jusqu’à 78 % de leur poids. 52 parties d’alumine contiennent 28 parties d’aluminium.

En 1827, Vœhler, chimiste allemand, découvrit l’aluminium, et donna une méthode pour le préparer. Mais les globules qu’il obtenait étaient masqués par des matières étrangères, et les métaux nécessaires à son extraction étaient trop chers, pour qu’il fût possible d’appliquer ce produit à l’industrie. En 1856, M. Deville constata dans un mémoire à la Société d’encouragement, les résultats qu’il avait obtenus. Son premier soin avait été de constituer un chlorure d’aluminium et de le décomposer, afin d’isoler le métal. Deux corps se présentaient à lui : le sodium et le potassium. Le sodium fut préféré. M. Deville le transforme en carbonate de soude, le mélange avec du carbonate de chaux, et de la houille pulvérisée. Il renferme le tout dans un cylindre qu’il porte au rouge. La distillation est aussi facile que celle de l’eau.

Pour transformer l’aluminium en chlorure d’aluminium, il suffit de faire passer un courant de chlore à travers un mélange d’alumine et de charbon porté à une température rouge. Il se produit de l’acide carbonique et du chlorure d’aluminium qui se sublime. Mais ce corps est peu stable et difficile à manier. On substitue au chlorure d’aluminium, un chlorure double d’aluminium et de sodium, préparé au moyen du sel marin. Les produits essentiels de cette combinaison obtenus, il ne reste qu’à les faire réagir l’un sur l’autre, pour isoler le métal. On le jette pêle-mêle dans un four à réverbère incandescent, et l’aluminium s’obtient sans accident.

Le procédé que propose M. Cumenge fils, n’a aucune analogie avec ceux qui ont été jusqu’à présent employés. Son mérite le plus remarquable consiste à pouvoir être employé pour l’extraction de tous les métaux dont l’usage n’est pas vulgarisé, aussi bien que pour celle de l’aluminium.

L’aluminium métallique peut être produit avec les seuls agents auxiliaires suivants : le soufre, le charbon, l’air atmosphérique.

Voici en quels termes l’inventeur parle de ses diverses opérations.

« Les principes fondamentaux de ce procédé sont les suivants :

» 1° Le sulfure d’aluminium est ramené à l’état métallique avec dégagement d’hydrogène sulfuré, en le chauffant dans un courant d’hydrogène parfaitement desséché ;

» 2° Le sulfure d’aluminium produit de l’aluminium métallique, par réaction sur le sulfate d’alumine sec, ou même sur l’alumine, avec dégagement d’acide sulfureux, en les chauffant au rouge dans une atmosphère non oxydante ;

» 3° Le sulfure d’aluminium est réduit par voie sèche, par les métaux communs, entre autres par le fer, le cuivre, le zinc.

» C’est de l’application de l’ensemble ou d’une partie des principes énoncés ci-dessus, que l’inventeur se réserve la propriété, quels que soient d’ailleurs les moyens employés pour produire et faire réagir les réactifs indiqués, et quel que soit le moyen employé pour produire le minerai artificiel d’aluminium qui est la base du traitement qu’il propose. Quant aux fours et appareils nécessaires pour effectuer ce traitement, ils sont employés depuis longtemps pour produire des réactions analogues dans la métallurgie des autres métaux : l’inventeur ne décrira donc spécialement aucun appareil. »

Voici le procédé qui a servi à produire ce minerai artificiel ou sulfure d’aluminium :

« Dans un tuyau ou cornue en terre réfractaire, tout à fait analogue aux cornues servant à la distillation de la houille pour la fabrication du gaz d’éclairage, on introduit du charbon de bois ou du coke, à peu près à moitié de sa longueur, et on achève de remplir l’autre moitié avec de l’alumine. On chauffe au rouge, après avoir bouché la cornue, en ne faisant qu’un orifice à chacune des extrémités : l’un du côté du charbon pour l’introduction du soufre nécessaire à la réaction ; l’autre du côté de l’alumine, pour le dégagement des gaz qui se produisent. Le soufre au fond, se volatilise, et, par son passage sur le charbon rougi, se transforme en sulfure de carbone ; le sulfure de carbone ainsi produit, passe sur l’alumine chauffée ; le carbone s’empare de l’oxygène en formant du gaz acide de carbone, et le soufre se fixe sur l’aluminium métallique. »

Le sulfure étant produit on peut le traiter par réaction ou par réduction :

« 1° Par réaction, au four réverbère à atmosphère réductrice et non oxydante, en le mélangeant de la quantité de sulfate d’alumine nécessaire pour que l’oxigène total du sulfate, ou de l’oxide ajouté, soit en quantité égale à celle qu’il faut pour oxider le soufre du sulfure à l’état d’acide sulfureux. L’aluminium reste à l’état métallique et l’on peut à ce moment, ajouter le métal avec lequel on veut former un alliage ;

» 2° Par réduction, au moyen de l’hydrogène, qui chasse tout le soufre du sulfure à l’état d’hydrogène sulfuré. L’hydrogène est produit d’une façon quelconque, mais le procédé le plus économique, qui est l’action de la vapeur d’eau sur le charbon rougi, devra être préféré.

» En effet, la réduction par l’un des métaux indiqués s’effectuera dans les fourneaux et de la façon déjà connue pour d’autres métaux.

» L’auteur indique encore comme moyen de produire des alliages intéressants, l’action de l’alumine ou du sulfate d’alumine sur le sulfure naturel ou artificiel des autres métaux, avec ou sans mélange de charbon, pour produire des sulfures doubles, auxquels sont applicables les mêmes principes de traitement qu’au sulfure d’aluminium.

» Cette méthode peut s’appliquer aux autres métaux dont l’oxyde n’est pas réductible par le charbon, et pour lesquels il est indispensable de passer par le sulfure, si l’on veut éviter l’emploi coûteux du sodium. L’inventeur se réserve la propriété aussi bien pour ces métaux que l’aluminium. »

L’aluminium présenté en lingot est d’un très-beau blanc ; sa cassure est légèrement bleuâtre ; lorsqu’il est poli, sa couleur diffère peu de celle de l’argent, surtout à la lumière artificielle ; il est très-malléable et très-ductile ; il se lamine et s’étire en fils à froid, avec une certaine facilité ; sa ténacité est comparable à celle de l’argent. Il conduit l’électrise huit fois mieux que le fer, il a une grande capacité calorifique, et par suite, se refroidit moins facilement que les autres métaux placés dans les mêmes conditions.

L’aluminium fond à une température beaucoup plus élevée que le zinc ; il n’est pas sensiblement volatil, sa densité est de 2,56, il est plus léger que la porcelaine et le verre, ce qui est une véritable curiosité ; 4 kilog. d’argent qui valent 880 francs peuvent être remplacés par un kilog. d’aluminium qui vaut 300 fr. Sa sonorité est comparable à celle du métal. Les propriétés chimiques de l’aluminium sont très-favorables à son usage dans les arts : il est inattaquable par l’hydrogène sulfuré ; les acides azotique et sulfurique sont sans action sur lui, à la température ordinaire ; le nitrate de potasse qui, au rouge, attaque et oxide tant de métaux, est sans action sur l’aluminium.

Cette série de caractères montre qu’il résiste avec énergie à la plupart des agents d’oxidation ; malheureusement il se laisse attaquer par l’acide chlorhydrique avec une facilité déplorable, à froid ou à chaud ; les alcalis caustiques tels que la potasse, la soude, l’ammoniaque même, le dissolvent sensiblement ; le sel marin et l’acide acétique mélangés l’attaquent.

Les dissolutions d’aluminium n’exercent aucune action fâcheuse sur l’économie animale ; mais il en résulterait usure partielle des divers ustensiles fabriqués avec ce métal.

Telles sont les diverses propriétés de ce nouveau métal qui est appelé à marcher de pair avec les plus précieux : le platine, l’or et l’argent ; son application aux objets d’orfèvrerie et de bijouterie le fera toujours apprécier.

Le procédé indiqué par M. Cumenge fils, semble de nature à rendre plus facile et moins coûteuse la production de l’aluminium. Ce sera un service important rendu à l’industrie. La Société littéraire et scientifique de Castres est heureuse de signaler ce travail d’un compatriote.


M. A. COMBES lit une note sur la reconstruction de l’église cathédrale de Saint-Benoît et de l’église paroissiale de N.-D. de la Plate.

Les églises de Castres avaient été détruites en 1569, pendant les guerres de religion, par un ordre du prince de Condé. Après la rentrée de l’évêque et de son Chapitre en 1629, il fallut songer à relever ces ruines. Des restaurations momentanées furent faites, en attendant qu’il fût possible de subvenir aux dépenses rendues nécessaires par une reconstruction complète. En 1671, les registres capitulaires de Saint-Benoît contiennent une proposition faite par M. de Fossé, grand archidiacre. Cette proposition relative à l’érection d’un monument digne de la religion, est acceptée, et il est convenu que l’église cathédrale sera rebâtie sur ses anciens fondements. On sait que cet édifice remontait à 1278, époque où les religieux Bénédictins, après avoir cédé aux Frères-Prêcheurs leurs premiers bâtiments, s’établirent un peu au-dessous, sur le cours de l’Agoût.

Un premier plan fut proposé par Mercier. Il ne fut pas exécuté, quoique les constructions eussent été mises en adjudication. Le 7 mars 1678, Guilhaume Cailhou, architecte de Carcassonne, en proposa un second qui fut accepté et immédiatement mis à exécution.

D’après ce plan, la longueur du chœur de l’église cathédrale de Saint-Benoit de Castres est de 21 cannes 6 pans, dans œuvre : l’élévation des voûtes est de 16 cannes pour le chœur et de 9 pour les chapelles : deux portes d’entrée latérales ont chacune 5 cannes 3 pans de hauteur, et 1 canne 5 pans de largeur. Deux clochers devaient être bâtis de chaque côté, au-dessus des portes, à une hauteur de 27 cannes, y compris les dômes, avec un double escalier. C’est la seule partie du plan qui n’ait pas été exécutée.

Les ornements sont de l’ordre toscan au dehors, de l’ordre corinthien au dedans. Le bâtiment devait être soutenu, à trois de ses aspects, par des contreforts. Les travaux continuèrent jusqu’en 1682, époque de la mort de M. de Tubœuf. Ils furent alors suspendus et ne purent être repris qu’en 1687, où un sieur Favier proposa un plan plus simple. Le Chapitre n’était pas riche. L’intendant de la province avait donné dix mille livres. M. de Tubœuf dans son testament, en avait destiné quatre mille cinq cents à l’achèvement de l’œuvre qu’il avait entreprise. Le Chapitre fut autorisé en 1701 à emprunter. M. de Meaupou, successeur de M. de Tubœuf, donnait une assez vive impulsion aux travaux ; mais son éloignement fréquent du diocèse détermina des interruptions. Enfin, Mgr Honoré Quiqueran de Beaujeu, « un des plus grands prélats du royaume, distingué par son illustre naissance, et encore plus par ses vertus, et l’éminence de ses lumières » résolut de mener à bonne fin cette entreprise. Il réunit toutes les ressources dont on pouvait disposer, fit faire des emprunts, employer utilement divers legs de son prédécesseur, et enfin, en 1718, il présida à l’inauguration de l’édifice qui, quoique incomplet, était cependant en état de servir aux cérémonies du culte. Comme architecture, l’église de Saint-Benoît est encore aujourd’hui telle que la laissa M. de Beaujeu. Il a été seulement exécuté quelques changements intérieurs dans les décorations.

Pendant les troubles religieux, l’église de la Platé était tombée entre les mains des protestants. Ils en changèrent les dispositions intérieures, afin de l’approprier aux habitudes de leur culte, et de s’en servir comme de moyen de défense. Le clocher était devenu une poudrière. Il fut fort maltraité, ainsi que l’église, par une explosion. Après la paix de 1629, on se hâta de faire les réparations indispensables et en 1742, un projet de réédification fut définitivement adopté. Le 11 août 1743, Mgr Lastic de Saint-Jal, évêque de Castres, posa la première pierre. Les travaux furent vérifiés le 28 octobre 1747 par Larroque, architecte des bâtiments du roi, et la construction fut terminée en 1754. Cependant le plan n’avait pas été entièrement suivi et la constation officielle donna les résultats suivants :

1o Trop peu d’élévation dans la voûte.

2o 109 marches seulement au clocher, au lieu de 136.

3o 3 toises, 2 pieds, 11 pouces de largeur à la nef, au lieu de 5 toises 3 pieds.

4o Trop de profondeur aux chapelles.

En 1755, l’église reçut deux sculptures de Barata père et fils : l’Assomption de la Vierge au maître-autel, et le groupe des fonts baptismaux. Quelque temps après, elle fut ornée de deux tableaux de Despa : la Visitation et l’Annonciation. Elle fut inaugurée solennellement le 13 février, jour des Cendres, par Mgr Jean-Sébastien de Barral.

L’année suivante, à la fête de l’Ascension, eut lieu la première procession faite à l’occasion de rétablissement de l’adoration perpétuelle du saint sacrement. Cette œuvre avait été instituée par le R. P. André, à la suite d’une mission qu’il avait donnée pendant le carême, et dont le résultat avait été satisfaisant. Le centième anniversaire de cette institution a été célébré en 1856, par M. le curé Azaïs, petit-fils de M. Antoine Azaïs, lieutenant de maire, dont l’active et persévérante volonté avait surmonté tous les obstacles qui s’opposaient à la réédification de N.-D. de la Platé.


M. V. CANET rend compte d’un volume publié en 1850, par M. Adrien Béringuier, médecin à Rabastens, sous ce titre : Topographie physique, statistique et médicale du canton de Rabastens (Tarn).

Cet ouvrage est de ceux que l’on voudrait voir se multiplier, car ils font connaître et ils font aimer le pays auquel ils sont consacrés. M. Béringuier est médecin. Il s’est donc placé à un point de vue tout spécial, ce qui n’empêche pas son livre d’avoir une valeur que tout le monde peut apprécier. Il est plein d’observations utiles, de recherches intelligentes, d’indications ingénieuses et de sages conseils. Il serait à désirer que chaque canton pût être étudié de cette manière. L’histoire intime des localités serait mieux connue ; et peut-être des observations impartiales, en maintenant de bonnes traditions, auraient-elles pour effet de déraciner des abus regrettables pour tous, ou de mettre obstacle à de dangereuses innovations.

Le premier chapitre renferme la topographie de Rabastens et un certain nombre de détails historiques. Il est regrettable que cette première partie ne soit pas développée. Les documents n’auraient certainement pas manqué à l’auteur, et il aurait fait sur son pays un ouvrage complet. Il ne faut pas oublier que le passé d’une localité exerce sur son état présent une influence puissante. La tradition est plus forte dans les faits que dans les sentiments ou la volonté des hommes. Les différences qui existent encore, entre des points géographiquement très-rapprochés, ne peuvent s’expliquer que par une influence ancienne. D’ailleurs il y a intérêt, quand on étudie le présent, à le relier au passé, et à retrouver les souvenirs qu’il a laissés, ou les traces qu’il est encore possible de suivre.

La géologie du canton, plus particulièrement dans ses rapports avec l’agriculture, forme le second chapitre. Peut-être y aurait il quelques observations à faire sur le morcellement des propriétés. M. Béringuier s’en félicite. S’il parlait uniquement au point de vue de la satisfaction du grand nombre, peut-être aurait-il raison. Cependant il s’occupe de la production, et il établit par des chiffres, la progression à laquelle la fait arriver le morcellement. Il ne s’agit pas de discuter des chiffres, ni d’entrer dans l’examen d’une des questions les plus importantes de notre économie sociale ; il faut dire pourtant, qu’il y a trop de rapports entre le fractionnement indéfini de la propriété territoriale, et l’isolement égoïste dont on remarque tous les jours les effets désastreux dans la société, pour qu’au point de vue de l’intérêt général, on ne trouve pas ces deux faits, également inquiétants pour l’avenir.

Que le fractionnement de la propriété offre en lui-même des avantages, c’est incontestable. Il est bon que le plus grand nombre d’hommes soient attachés au sol, la plus solide et la plus précieuse des propriétés. L’extension du nombre de ceux qui possèdent indique une répartition plus étendue de la fortune générale. Mais que d’améliorations deviennent par là impossibles ! La production se trouve bornée : il faut s’en tenir à un certain genre d’exploitation, et ce n’est pas toujours le plus accommodé à la nature du sol, ni le plus productif.

Le troisième chapitre contient des observations intéressantes sur le climat. Elles sont aussi applicables à Castres qu’à Rabastens. Ce qui concerne le vent d’autan et ses effets, est surtout d’une vérité générale et trop incontestable, pour la plus grande partie des pays situés sur notre revers de la Montagne-Noire.

Les eaux jouent un grand rôle dans l’économie animale, et exercent une influence notable sur la santé. M. Béringuier examine les qualités de celles qui servent à la population de Rabastens, et il constate que les eaux les plus pures ne sont pas les meilleures. Toutes les eaux se chargent en proportions diverses de substances à travers lesquelles elles passent ; et « c’est par un don providentiel, que les eaux de source, de rivière tiennent en dissolution certains sels qui les rendent propres à faciliter l’assimilation des aliments. » Celles de Rabastens sont en général dans d’excellentes conditions.

Les productions territoriales du canton de Rabastens ne diffèrent pas essentiellement de celles du département.

Le chapitre quatrième est consacré à l’examen de l’étal physique et moral des habitants. Le médecin étudie et il rend compte, avec une grande netteté, du résultat de ses observations. La partie consacrée aux mœurs est pleine d’intérêt. Il est bien difficile aujourd’hui de signaler des différences radicales entre les villes et les départements. Non seulement les anciennes désignations sont tombées, mais avec elles, ont disparu les caractères propres à chaque partie du pays. Cependant si les traits généraux sont les mêmes, il y a encore dans la vie intime, dans les usages domestiques, dans la fidélité à certaines traditions qui conservent quelque chose de la naïveté et de la pureté primitives, des signes particuliers auxquels se rattachent certaines localités. Rabastens est de ce nombre. On peut lui souhaiter de garder longtemps ces privilèges qui deviennent de plus en plus rares. Ce sera pour cette ville, non seulement un moyen de se distinguer des autres, mais aussi sans doute, de rester fidèle à un vieil esprit dont il n’est pas possible de ne pas regretter l’affaiblissement.

Le chapitre septième, intitulé : Genre de vie à la ville et à la campagne, est à la fois une étude de mœurs et un ensemble de conseils qui peuvent paraître minutieux, mais dans lesquels il est facile de reconnaître un esprit habitué à peser chaque chose et à lui donner sa valeur. Si la vie se forme de moments ajoutés les uns aux autres, l’hygiène consiste dans des précautions dont chacune n’est rien, prise isolément, et dont l’ensemble entretient et conserve la vie. M. Béringuier fait sur ce point des observations d’une grande justesse, et comme il cherche surtout à être utile, il touche à des points nombreux sur lesquels il serait bon que l’attention put s’arrêter. Voilà le vrai mérite du livre de M. Béringuier. Il n’y a rien de ce qui séduit au premier abord. Il y a tout ce qui est nécessaire pour faire du bien, et provoquer une amélioration réelle.

Dos questions importantes sont soulevées dans le chapitre huitième, qui a pour titre : Fortune générale du canton. M. Béringuier aborde un des problèmes les plus difficiles, non pas seulement de notre époque, mais de tous les temps. Il n’a pas la prétention de le résoudre, mais il voudrait voir augmenter la production territoriale, la seule qui, en réalité, développe la richesse et la répartit utilement. En rendant compte des ressources nombreuses dont dispose la charité, il regrette qu’elles soient si mal distribuées. Ce n’est pas un reproche qu’il fait aux hommes : il l’adresse aux institutions. Il est certain que le secours donné aux pauvres, quelque sagement qu’il soit réparti, ne suffit pas, s’il n’a pour but et pour effet, que de soulager la misère physique. L’homme peut souffrir dans son âme et dans son corps. Qu’importe le pain qu’on lui donne, le vêtement qu’on lui fournit, si le mal est intérieur ? À part quelques exceptions, — et elles sont plus rares qu’on ne pourrait le penser ; — la misère a sa source dans des vices ou dans des inconséquences. Il faudrait donc, au moment même où l’on donne ce qui fait vivre le corps, faire pénétrer aussi, mais avec prudence et discrétion, ce qui peut corriger l’âme. Voilà la charité active, efficace, véritablement chrétienne, la charité élément de conservation sociale. Mais qui s’en fera le ministre et le dispensateur ? Évidemment ce qui existe au point de vue légal, quoique sage que soit son organisation, est incomplet et insuffisant. M. Béringuier le constate, et le danger qu’il signale dans une ville où les aumônes sont très-abondantes, donne une idée de ce que l’on doit avoir à craindre dans les conditions générales, et ce que l’on doit éprouver dans les centres où l’esprit de charité s’est affaibli.

Le chapitre neuvième est une étude sur les maladies propres au canton ; le dernier renferme un travail sur le mouvement de la population. La statistique n’est trop souvent qu’une disposition de chiffres propre à faire triompher un système préconçu. M. Béringuier prouve tout le parti que l’on peut en tirer par de sages inductions et des considérations d’un ordre élevé. Ce chapitre et le livre se terminent par l’expression de désirs d’amélioration et de progrès, qui naissent de l’ensemble de cette étude si remarquable à tant de titres.

M. Béringuier a bien mérité de son pays. On n’étudie pas ainsi une ville sans l’aimer beaucoup. On ne l’aime pas sans vouloir la servir. Tel a été le but de M. Béringuier. Il lui a inspiré un livre comme on voudrait en voir beaucoup ; et ce livre, par les renseignements qu’il renferme, par les sentiments généreux qu’il laisse éclater à chaque page, par les conseils utiles qu’il prodigue, par les indications de toute espèce qui ressortent naturellement d’un examen sérieux et attentif, est une de ces œuvres qui font honneur à l’esprit et au cœur de celui qui les a conçues, méditées et accomplies.