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« Mon Dieu, mon ami, que tout va mal ! » écrivait madame Jullien le 30 juin 1793, à son mari. « Car, remarquez que la conduite de l’Assemblée irrite tellement la masse que, quand il plaira à Louis XVI, de prendre le fouet de Louis XIV pour chasser ce débile parlement, on criera bravo de tous côtés, dans de bien différents sentiments, il est vrai ; mais qu’importe aux tyrans, pourvu que l’accord favorise leurs desseins ! L’aristocratie bourgeoise est dans le délire, le peuple dans l’abattement du désespoir, aussi les orages couvent. » (p. 164.)

Qu’on rapproche ces mots de deux de Chaumette cités plus haut ; et l’on comprendra que pour l’élément révolutionnaire de la population parisienne, l’Assemblée devait représenter un boulet attaché aux pieds de la Révolution [1].

  1. « Dans ces moments, l’horizon se charge de vapeurs qui doivent produire une explosion », écrivait madame Jullien le 8 août. « L’Assemblée me semble trop faible pour seconder le vœu du peuple, et le peuple me semble trop fort pour se laisser dompter par elle. De ce conflit, de cette lutte, doit résulter un événement : la liberté ou l'esclavage de vingt-cinq millions d'hommes. » (p. 211). Et plus loin : « La déchance du roi, demandée par la majorité et rejetée par la minorité qui domine l'Assemblée, occasionnera le choc affreux qui se prépare. Le Sénat n’aura pas l’audace de la prononcer, et le peuple n’aura pas la lâcheté de souffrir le mépris qu’on fait de l’opinion publique. » Et lorsque l’Assemblée acquitte Lafayette, madame Jullien fait cette prophétie : « Mais tout cela nous achemine vers une catastrophe qui fait frémir les amis de l’humanité ; car il pleuvra du sang, je n’exagère point. » (p. 213).