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heureux par des sujets de l’empereur François-Joseph, où des appels étaient adressés au tsar « de venger les outrages séculaires de la Blanche-Montagne et de Kossovo, et de planter la bannière russe sur les Dardanelles et la basilique de Sainte-Sophie. »
heureux par des sujets de l’empereur François-Joseph, où des appels étaient adressés au tsar « de venger les outrages séculaires de la Blanche-Montagne et de Kossovo, et de planter la bannière russe sur les Dardanelles et la basilique de Sainte-Sophie. »


L’ébranlement donné par de telles démonstrations à toute une race, à tout un monde religieux, fut profond et prolongé, et certes les annales contemporaines ont rarement connu de période aussi peu ''correcte'' au point de vue du droit international et des pratiques des chancelleries que celle qui eut pour départ le congrès de Moscou et pour arrêt la conférence de Paris au sujet de la Grèce. Elle fut étrange en effet, cette époque, avec des présidens du conseil tels que Ratazzi, Bratiano, Koumondouros, avec des généralissimes comme Garibaldi, Pétropoulaki et « Philippe le Bulgare, » avec ces expéditions de Mentana, de Sistow, de l’''Arcadion'' et de l’''Enosis'', avec ces agitations, pour tout dire, allemande, italienne, tchèque, croate, roumaine, serbe, bulgare, grecque et panslave. Sans entrer plus avant dans l’histoire fastidieuse de ces événemens complexes et nullement éclaircis encore, il suffit, pour en apprécier le caractère général et en saisir le lien intime, de relire avec toute l’attention qu’il mérite le rapport déjà mentionné de l’ambassadeur de France près la cour de Berlin, en date du 5 janvier 1868. « Il faut à M. de Bismarck, y écrit M. Benedetti, une Italie troublée, en désaccord permanent avec la France, pour nous contraindre à entretenir des forces plus ou moins considérables dans les états du saint-siège, pour se ménager au besoin le moyen de susciter, à l’aide du parti révolutionnaire, une rupture violente entre le gouvernement de l’empereur et celui du roi Victor-Emmanuel, pour neutraliser en un mot notre liberté sur le Rhin... Je ne serais pas surpris non plus, si M. de Bismarck était l’instigateur de l’impulsion nouvelle imprimée depuis l’été dernier à la propagande panslaviste; il y trouve l’avantage immédiat d’inquiéter l’Autriche par la Russie. La Russie se montrerait assurément moins entreprenante, et la Prusse de son côté ne l’encouragerait pas à réveiller la question d’Orient, par la simple raison qu’elle ne saurait elle-même y trouver aucun avantage, si elle ne croyait indispensable de payer de ce prix la liberté qu’elle revendique en Allemagne. L’incertitude de la situation ne fait que resserrer chaque jour davantage les liens qui unissent la Prusse à la Russie et solidariser les ambitions de l’une en Allemagne avec celles de l’autre en Orient. »
L’ébranlement donné par de telles démonstrations à toute une race, à tout un monde religieux, fut profond et prolongé, et certes les annales contemporaines ont rarement connu de période aussi peu ''correcte'' au point de vue du droit international et des pratiques des chancelleries que celle qui eut pour départ le congrès de Moscou et pour arrêt la conférence de Paris au sujet de la Grèce. Elle fut étrange en effet, cette époque, avec des présidens du conseil tels que Ratazzi, Bratiano, Koumondouros, avec des généralissimes comme Garibaldi, Pétropoulaki et « Philippe le Bulgare, » avec ces expéditions de Mentana, de Sistow, de l’''Arcadion'' et de l’''Enosis'', avec ces agitations, pour tout dire, allemande, italienne, tchèque, croate, roumaine, serbe, bulgare, grecque et panslave. Sans entrer plus avant dans l’histoire fastidieuse de ces événemens complexes et nullement éclaircis encore, il suffit, pour en apprécier le caractère général et en saisir le lien intime, de relire avec toute l’attention qu’il mérite le rapport déjà mentionné de l’ambassadeur de France près la cour de Berlin, en date du 5 janvier 1868. « Il faut à M. de Bismarck, y écrit M. Benedetti, une Italie troublée, en désaccord permanent avec la France, pour nous contraindre à entretenir des forces plus ou moins considérables dans les états du saint-siège, pour se ménager au besoin le moyen de susciter, à l’aide du parti révolutionnaire, une rupture violente entre le gouvernement de l’empereur et celui du roi Victor-Emmanuel, pour neutraliser en un mot notre liberté sur le Rhin… Je ne serais pas surpris non plus, si M. de Bismarck était l’instigateur de l’impulsion nouvelle imprimée depuis l’été dernier à la propagande panslaviste ; il y trouve l’avantage immédiat d’inquiéter l’Autriche par la Russie. La Russie se montrerait assurément moins entreprenante, et la Prusse de son côté ne l’encouragerait pas à réveiller la question d’Orient, par la simple raison qu’elle ne saurait elle-même y trouver aucun avantage, si elle ne croyait indispensable de payer de ce prix la liberté qu’elle revendique en Allemagne. L’incertitude de la situation ne fait que resserrer chaque jour davantage les liens qui unissent la Prusse à la Russie et solidariser les ambitions de l’une en Allemagne avec celles de l’autre en Orient. »


Un ''comité permanent pour les intérêts de l’unité slave'' s’était formé au lendemain du congrès de Moscou, sous les auspices d’un grand-duc, et son action ne tarda pas à se faire sentir parmi les Ruthènes, les Tchèques, les Croates de l’Autriche; mais c’est
Un ''comité permanent pour les intérêts de l’unité slave'' s’était formé au lendemain du congrès de Moscou, sous les auspices d’un grand-duc, et son action ne tarda pas à se faire sentir parmi les Ruthènes, les Tchèques, les Croates de l’Autriche ; mais c’est

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heureux par des sujets de l’empereur François-Joseph, où des appels étaient adressés au tsar « de venger les outrages séculaires de la Blanche-Montagne et de Kossovo, et de planter la bannière russe sur les Dardanelles et la basilique de Sainte-Sophie. »

L’ébranlement donné par de telles démonstrations à toute une race, à tout un monde religieux, fut profond et prolongé, et certes les annales contemporaines ont rarement connu de période aussi peu correcte au point de vue du droit international et des pratiques des chancelleries que celle qui eut pour départ le congrès de Moscou et pour arrêt la conférence de Paris au sujet de la Grèce. Elle fut étrange en effet, cette époque, avec des présidens du conseil tels que Ratazzi, Bratiano, Koumondouros, avec des généralissimes comme Garibaldi, Pétropoulaki et « Philippe le Bulgare, » avec ces expéditions de Mentana, de Sistow, de l’Arcadion et de l’Enosis, avec ces agitations, pour tout dire, allemande, italienne, tchèque, croate, roumaine, serbe, bulgare, grecque et panslave. Sans entrer plus avant dans l’histoire fastidieuse de ces événemens complexes et nullement éclaircis encore, il suffit, pour en apprécier le caractère général et en saisir le lien intime, de relire avec toute l’attention qu’il mérite le rapport déjà mentionné de l’ambassadeur de France près la cour de Berlin, en date du 5 janvier 1868. « Il faut à M. de Bismarck, y écrit M. Benedetti, une Italie troublée, en désaccord permanent avec la France, pour nous contraindre à entretenir des forces plus ou moins considérables dans les états du saint-siège, pour se ménager au besoin le moyen de susciter, à l’aide du parti révolutionnaire, une rupture violente entre le gouvernement de l’empereur et celui du roi Victor-Emmanuel, pour neutraliser en un mot notre liberté sur le Rhin… Je ne serais pas surpris non plus, si M. de Bismarck était l’instigateur de l’impulsion nouvelle imprimée depuis l’été dernier à la propagande panslaviste ; il y trouve l’avantage immédiat d’inquiéter l’Autriche par la Russie. La Russie se montrerait assurément moins entreprenante, et la Prusse de son côté ne l’encouragerait pas à réveiller la question d’Orient, par la simple raison qu’elle ne saurait elle-même y trouver aucun avantage, si elle ne croyait indispensable de payer de ce prix la liberté qu’elle revendique en Allemagne. L’incertitude de la situation ne fait que resserrer chaque jour davantage les liens qui unissent la Prusse à la Russie et solidariser les ambitions de l’une en Allemagne avec celles de l’autre en Orient. »

Un comité permanent pour les intérêts de l’unité slave s’était formé au lendemain du congrès de Moscou, sous les auspices d’un grand-duc, et son action ne tarda pas à se faire sentir parmi les Ruthènes, les Tchèques, les Croates de l’Autriche ; mais c’est