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Au rebours du commun des hommes qui travaillent avant de vivre & pour qui l’action eſt la récréation après le travail, Baudelaire vivait d’abord. Curieux, contemplateur, analyſeur, il promenait ſa penſée de ſpectacle en ſpectacle & de cauſerie en cauſerie. Il la nourriſſait des objets extérieurs, l’éprouvait par la contradiction ; & l’œuvre était ainſi le réſumé de la vie, ou plutôt en était la fleur.
Au rebours du commun des hommes qui travaillent avant de vivre & pour qui l’action eſt la récréation après le travail, Baudelaire vivait d’abord. Curieux, contemplateur, analyſeur, il promenait ſa penſée de ſpectacle en ſpectacle & de cauſerie en cauſerie. Il la nourriſſait des objets extérieurs, l’éprouvait par la contradiction ; & l’œuvre était ainſi le réſumé de la vie, ou plutôt en était la fleur.


Son procédé était la concentration ; ce qui explique l’intenſité d’effet qu’il obtenait dans des proportions reſtreintes, dans une demi-page de proſe, ou dans un ſonnet. Ainſi s’explique encore ſon goût paſſionné des méthodes de compoſition, ſon amour du plan & de la conſtruction dans les ouvrages de l’eſprit, ſon étude conſtante des combinaisons & des procédés. Il y avait en lui quelque choſe de la curioſité naïve de l’enfant qui caſſe ses joujoux pour voir comment ils ſont faits. Il ſe délectait à la lecture de l’article où Edgar Poë, ſon héros, ſon maître envié & chéri, expoſe
Son procédé était la concentration ; ce qui explique l’intenſité d’effet qu’il obtenait dans des proportions reſtreintes, dans une demi-page de proſe, ou dans un ſonnet. Ainſi s’explique encore ſon goût paſſionné des méthodes de compoſition, ſon amour du plan & de la conſtruction dans les ouvrages de l’eſprit, ſon étude conſtante des combinaiſons & des procédés. Il y avait en lui quelque choſe de la curioſité naïve de l’enfant qui caſſe ſes joujoux pour voir comment ils ſont faits. Il ſe délectait à la lecture de l’article où Edgar Poë, ſon héros, ſon maître envié & chéri, expoſe

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Vie de Charles Baudelaire.

une œuvre parlée, agie, vécue, qu’il importe de connaître, parce qu’elle explique l’autre & en contient, comme il l’eût dit lui-même, la genèſe.

Au rebours du commun des hommes qui travaillent avant de vivre & pour qui l’action eſt la récréation après le travail, Baudelaire vivait d’abord. Curieux, contemplateur, analyſeur, il promenait ſa penſée de ſpectacle en ſpectacle & de cauſerie en cauſerie. Il la nourriſſait des objets extérieurs, l’éprouvait par la contradiction ; & l’œuvre était ainſi le réſumé de la vie, ou plutôt en était la fleur.

Son procédé était la concentration ; ce qui explique l’intenſité d’effet qu’il obtenait dans des proportions reſtreintes, dans une demi-page de proſe, ou dans un ſonnet. Ainſi s’explique encore ſon goût paſſionné des méthodes de compoſition, ſon amour du plan & de la conſtruction dans les ouvrages de l’eſprit, ſon étude conſtante des combinaiſons & des procédés. Il y avait en lui quelque choſe de la curioſité naïve de l’enfant qui caſſe ſes joujoux pour voir comment ils ſont faits. Il ſe délectait à la lecture de l’article où Edgar Poë, ſon héros, ſon maître envié & chéri, expoſe