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le ruiner sous Louis XIV. En attendant, M. Humann se frotte les mains, et s’écrie qu’il sera fort heureux de voir disparaître ce vilain papier espagnol qui lui a causé tant d’embarras et d’inquiétudes. Le ministre oublie sans doute, dans sa joie, que ce papier se trouve aujourd’hui dans des bourses françaises, et que sa chute entraînerait nécessairement un discrédit pour nos fonds. Notre ministère n’en est encore qu’aux plus étroites vues personnelles, il ne s’est pas même élevé jusqu’à l’égoïsme bien entendu, qui est la morale de ceux qui n’en n’ont pas.
le ruiner sous Louis XIV. En attendant, M. Humann se frotte les mains, et s’écrie qu’il sera fort heureux de voir disparaître ce vilain papier espagnol qui lui a causé tant d’embarras et d’inquiétudes. Le ministre oublie sans doute, dans sa joie, que ce papier se trouve aujourd’hui dans des bourses françaises, et que sa chute entraînerait nécessairement un discrédit pour nos fonds. Notre ministère n’en est encore qu’aux plus étroites vues personnelles, il ne s’est pas même élevé jusqu’à l’égoïsme bien entendu, qui est la morale de ceux qui n’en n’ont pas.


La discorde n’est pas seulement dans le ministère, elle s’est glissée au parquet, où l’ordre des avocats a failli se faire une grande querelle avec la magistrature. M. Parquin, bâtonnier de l’ordre des avocats, a été l’Achille de cette épopée. Il a vaillamment attaqué le premier président Séguier, véritable Agamemnon au petit pied qui traite fort rudement ses collègues, et fort cavalièrement les avocats et le public. Le discours de M. Parquin avait mis en émoi tout l’ordre des avocats, et les adresses de félicitation lui pleuvaient déjà de tous les points du royaume, lorsqu’un Ulysse est venu mettre fin à cette grande affaire, et enlacer le héros de quelques doucereuses paroles qui ont tout à coup calmé son ardeur. La cour royale, qui s’était déclarée compétente dans cette affaire, et juge dans sa propre cause, s’est bornée à infliger une simple réprimande à Me Parquin.
La discorde n’est pas seulement dans le ministère, elle s’est glissée au parquet, où l’ordre des avocats a failli se faire une grande querelle avec la magistrature. M. Parquin, bâtonnier de l’ordre des avocats, a été l’Achille de cette épopée. Il a vaillamment attaqué le premier président Séguier, véritable Agamemnon au petit pied qui traite fort rudement ses collègues, et fort cavalièrement les avocats et le public. Le discours de M. Parquin avait mis en émoi tout l’ordre des avocats, et les adresses de félicitation lui pleuvaient déjà de tous les points du royaume, lorsqu’un Ulysse est venu mettre fin à cette grande affaire, et enlacer le héros de quelques doucereuses paroles qui ont tout à coup calmé son ardeur. La cour royale, qui s’était déclarée compétente dans cette affaire, et juge dans sa propre cause, s’est bornée à infliger une simple réprimande à M{{e}} Parquin.


En fait de réprimandes, il nous semble que la cour de cassation en devrait une à M. Madier de Montjau, qui dédaigne de s’occuper des devoirs de sa charge de conseiller, et qui, prolongeant son absence sans congé, a laissé en suspens toutes les affaires. M. Madier de Montjau, député ministériel, et l’un des membres les plus actifs de la majorité, avait été chargé, dit-on, par M. d’Argout et M. Thiers, son ami intime, de donner ses soins aux élections départementales, et de préparer les voies aux candidats ministériels dans le cas où l’on se verrait forcé de dissoudre la chambre. Aussi avons-nous lieu de croire que l’opposition que M. le président de la cour de cassation vient de mettre au traitement de M. Madier de Montjau n’aura pas de résultats. Le garde-des-sceaux, à qui appartient la connaissance de cette affaire, donnera certainement une main-levée amicale et absoudra le député dévoué des fautes du magistrat négligent.
En fait de réprimandes, il nous semble que la cour de cassation en devrait une à M. Madier de Montjau, qui dédaigne de s’occuper des devoirs de sa charge de conseiller, et qui, prolongeant son absence sans congé, a laissé en suspens toutes les affaires. M. Madier de Montjau, député ministériel, et l’un des membres les plus actifs de la majorité, avait été chargé, dit-on, par M. d’Argout et M. Thiers, son ami intime, de donner ses soins aux élections départementales, et de préparer les voies aux candidats ministériels dans le cas où l’on se verrait forcé de dissoudre la chambre. Aussi avons-nous lieu de croire que l’opposition que M. le président de la cour de cassation vient de mettre au traitement de M. Madier de Montjau n’aura pas de résultats. Le garde-des-sceaux, à qui appartient la connaissance de cette affaire, donnera certainement une main-levée amicale et absoudra le député dévoué des fautes du magistrat négligent.


M. d’Estourmel, nommé depuis trois ans ministre de France près d’une des républiques du Sud, a fait mieux : il ne s’est pas même rendu à son poste ; et, après s’être avancé dernièrement jusqu’à New-York, il a jugé à propos de revenir à Paris. Pendant ce temps, on traînait au cachot M. Barrot, notre consul à Carthagène, et on refusait de donner satisfaction à l’un de nos amiraux, sous prétexte que nous n’avons, dans la République
M. d’Estourmel, nommé depuis trois ans ministre de France près d’une des républiques du Sud, a fait mieux : il ne s’est pas même rendu à son poste ; et, après s’être avancé dernièrement jusqu’à New-York, il a jugé à propos de revenir à Paris. Pendant ce temps, on traînait au cachot M. Barrot, notre consul à Carthagène, et on refusait de donner satisfaction à l’un de nos amiraux, sous prétexte que nous n’avons, dans la {{tiret|Ré|publique}}

Version du 15 octobre 2015 à 12:33

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le ruiner sous Louis XIV. En attendant, M. Humann se frotte les mains, et s’écrie qu’il sera fort heureux de voir disparaître ce vilain papier espagnol qui lui a causé tant d’embarras et d’inquiétudes. Le ministre oublie sans doute, dans sa joie, que ce papier se trouve aujourd’hui dans des bourses françaises, et que sa chute entraînerait nécessairement un discrédit pour nos fonds. Notre ministère n’en est encore qu’aux plus étroites vues personnelles, il ne s’est pas même élevé jusqu’à l’égoïsme bien entendu, qui est la morale de ceux qui n’en n’ont pas.

La discorde n’est pas seulement dans le ministère, elle s’est glissée au parquet, où l’ordre des avocats a failli se faire une grande querelle avec la magistrature. M. Parquin, bâtonnier de l’ordre des avocats, a été l’Achille de cette épopée. Il a vaillamment attaqué le premier président Séguier, véritable Agamemnon au petit pied qui traite fort rudement ses collègues, et fort cavalièrement les avocats et le public. Le discours de M. Parquin avait mis en émoi tout l’ordre des avocats, et les adresses de félicitation lui pleuvaient déjà de tous les points du royaume, lorsqu’un Ulysse est venu mettre fin à cette grande affaire, et enlacer le héros de quelques doucereuses paroles qui ont tout à coup calmé son ardeur. La cour royale, qui s’était déclarée compétente dans cette affaire, et juge dans sa propre cause, s’est bornée à infliger une simple réprimande à Me Parquin.

En fait de réprimandes, il nous semble que la cour de cassation en devrait une à M. Madier de Montjau, qui dédaigne de s’occuper des devoirs de sa charge de conseiller, et qui, prolongeant son absence sans congé, a laissé en suspens toutes les affaires. M. Madier de Montjau, député ministériel, et l’un des membres les plus actifs de la majorité, avait été chargé, dit-on, par M. d’Argout et M. Thiers, son ami intime, de donner ses soins aux élections départementales, et de préparer les voies aux candidats ministériels dans le cas où l’on se verrait forcé de dissoudre la chambre. Aussi avons-nous lieu de croire que l’opposition que M. le président de la cour de cassation vient de mettre au traitement de M. Madier de Montjau n’aura pas de résultats. Le garde-des-sceaux, à qui appartient la connaissance de cette affaire, donnera certainement une main-levée amicale et absoudra le député dévoué des fautes du magistrat négligent.

M. d’Estourmel, nommé depuis trois ans ministre de France près d’une des républiques du Sud, a fait mieux : il ne s’est pas même rendu à son poste ; et, après s’être avancé dernièrement jusqu’à New-York, il a jugé à propos de revenir à Paris. Pendant ce temps, on traînait au cachot M. Barrot, notre consul à Carthagène, et on refusait de donner satisfaction à l’un de nos amiraux, sous prétexte que nous n’avons, dans la Ré-