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de la magistrature. Le scrutin a mis le gouvernement en minorité, et, du coup, M. le président du conseil s’est cru obligé d’annoncer fièrement la retraite du cabinet, Il n’y avait pas trois heures que le parlement avait repris sa session, il n’y avait pas une heure que la déclaration du gouvernement venait d’être lue, le ministère avait déjà essuyé un échec.

Était-ce simplement, comme on l’a dit, l’effet d’un malentendu, d’une surprise ? Ce n’était point évidemment un malentendu, autant qu’on a bien voulu le dire, puisque M. le président du conseil n’ignorait pas les intentions d’une partie de la chambre qui lui avaient été communiquées, puisque le vote avait été précédé d’un débat contradictoire. En réalité, les uns se sont donné avec empressement le plaisir d’infliger au cabinet une mésaventure ; les autres, sans s’être précisément prononcés contre lui, n’ont pas éprouvé un besoin démesuré de lui épargner l’ennui d’un mécompte, et le vote a décidé. Comment sortir cependant de cette confusion où venait de se laisser tomber un ministère qui, après tout, ne demandait pas mieux que de se relever et de rester ? Il fallait d’abord absolument qu’il y eût eu un malentendu. Un député obligeant de la majorité, M. Louis Legrand, s’est dévoué pour le prouver, pour éclaircir le mystère, pour offrir enfin au chef du cabinet l’occasion d’une revanche de scrutin par un de ces votes de confiance qui sont l’éternelle ressource des pouvoirs en détresse, et c’est ici vraiment que tout a son prix. M. Louis Legrand s’est expliqué, M. le président du conseil s’est expliqué, M. Clemenceau, M. Naquet, M. Floquet, se sont expliqués. Tout le monde s’est expliqué, tout le monde a demandé, a appelé la lumière, et, par le fait, de toutes ces explications, il n’a jailli sérieusement aucune lumière. Le ministère a eu son vote, il a pu rester, mais on n’a pas vu plus clair dans sa situation pas plus que dans la confusion des partis. Après cette discussion lumineuse, on a été à peu près aussi avancé qu’on l’était la veille. Ce qu’il y a de curieux, d’original, c’est l’émulation avec laquelle on s’est plu à invoquer le devoir patriotique d’éviter les crises. L’honorable interpellateur a déclaré avec une parfaite conviction qu’il croyait s’inspirer « de la pensée intime de cette grande démocratie française, si laborieuse, si calme, qui ne demande qu’à vivre, qu’à travailler, qui a horreur de l’instabilité gouvernementale… » M. Jules Ferry, reprenant le motif à son tour, s’est écrié : « j’estime que ce pays de France, qui n’aime pas les crises politiques, a surtout horreur de celles qu’il ne comprend pas clairement. Je suis d’avis qu’il n’est jamais bon qu’une crise ministérielle se dénoue ailleurs que dans la pleine lumière de la tribune, en face du pays… L’instabilité gouvernementale, qui n’est bonne pour aucun régime, est mortelle pour le gouvernement parlementaire, elle serait un très grand péril pour le gouvernement républicain que nous possédons… » Fort