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ajouté avec une pointe de belle humeur qu’il était expressément chargé par le sultan de communiquer cette bonne nouvelle à la « société distinguée » de Guildhall. Il a rempli la mission avec plaisir, — sans nulle garantie toutefois.

Ce qu’il y a de plus curieux, ce n’est pas précisément l’originalité assez humoristique avec laquelle M. Gladstone s’est fait auprès des convives du lord maire le porte-nouvelles du sultan au sujet d’une cession qui n’est pas d’ailleurs encore effectuée, — c’est bien plutôt le ton général du discours du premier ministre sur l’état présent des affaires orientales. Évidemment le chef du cabinet libéral de Londres s’est quelque peu tempéré dans ses dispositions à l’égard de la Turquie et même dans ses opinions sur l’œuvre diplomatique du ministère tory. Il ne parle plus en révolutionnaire de l’Orient, et il s’est sensiblement rapproché de la politique de ses prédécesseurs. « Lord Beaconsfield déclarait avec raison, dit-il, que le traité de Berlin était un acte qui, s’il était exécuté, promettait d’être un grand bienfait pour l’Europe… » Comment ce traité, dont l’exécution peut être aussi utile à la Turquie elle-même qu’à l’Europe, deviendra-t-il une réalité ? M. Gladstone tient à déclarer qu’il ne recherche rien qui ne soit « possible dans l’état présent des choses. » Il se défend surtout vivement de vouloir agir seul. « Nous ne sommes nullement disposés, ajoute-t-il, à agir isolément ; nous n’avons pas cru qu’il fût du devoir de l’Angleterre de remplir toute seule des obligations qui incombent à l’Europe. Tout ce que nous pouvons faire, c’est d’appuyer, de développer par des moyens amiables et respectueux la formation du concert européen et son application à des objets utiles… » Quant à ce fameux concert européen, le chef du cabinet de Londres le considère comme une machine puissante, mais d’un usage difficile, à l’aide de laquelle il ne faut pas cependant « désespérer d’obtenir au moins quelque chose. » M. Gladstone a visiblement perdu quelques illusions depuis la démonstration de Dulcigno, et ce qu’il a dit de ces éternelles affaires d’Orient est certes d’un homme fort modéré. Peut-être s’est-il exposé à s’entendre prochainement demander compte dans le parlement de ce qu’il a fait d’une politique qu’il a si ardemment combattue et qu’il semble vouloir reprendre ou continuer aujourd’hui. Pour le moment, il a réussi à Guildhall par sa modération même, par la sincérité de son langage et de ses aveux sur une situation générale qui, après tout, reste ce qu’elle était.

Si l’Angleterre a toujours son rôle dans les conseils de l’Europe pour » cette « tâche commune » dont parlait M. Challemel-Lacour, elle a certainement ses « problèmes intérieurs, » comme la France a les siens, et le plus grave, le plus pressant de tous est cette crise irlandaise sur laquelle M. Gladstone s’est expliqué avec une sérieuse liberté d’esprit au banquet du lord-maire. Malheureusement, en effet, « l’île sœur » est plus que jamais en combustion depuis quelques mois. L’Angleterre a