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REVUE DES DEUX MONDES.

la dernière heure, la question était restée indécise entre M. Hayes, le candidat du parti républicain, et M. Tilden, qui représentait le parti démocrate. Ce n’est que par un subterfuge dans la supputation des suffrages que l’élection de M. Hayes avait été enlevée. À peine proclamée cependant, la présidence de M. Hayes n’a plus été contestée, et en définitive elle n’a offert rien que de favorable et d’heureux pour les États-Unis. Loin de porter au pouvoir des ressentimens de parti, M. Hayes s’est plutôt appliqué à faire oublier ce qu’il y avait eu de défectueux dans son origine en gouvernant avec sagesse. Il a fait ses quatre années de présidence sans trouble, sans accident. Cette fois, la lutte s’est trouvée engagée entre deux nouveaux prétendans. Le parti démocrate avait adopté pour candidat le général Hancock, qui appartient à l’ancienne armée, qui a été chaudement soutenu par le général Mac-Clellan et qui est d’ailleurs par lui-même un homme d’un esprit distingué. Le parti républicain avait choisi pour candidat le général Garfield, personnellement peu connu, quoique mêlé depuis longtemps aux affaires publiques. Le fait est que personne ne songeait sérieusement à M. Garfield avant ce jour du dernier été où il a été désigné par la convention de Chicago. Il a été choisi pour éviter le général Grant, dont le nom pouvait diviser les électeurs, et ce qu’il faut ajouter, c’est que, malgré cette déconvenue, le général Grant n’a point hésité à mettre sa popularité au service de son rival de candidature. De concert avec un sénateur, M. Conkling, il a tenu la campagne pour Garfield. Il a parcouru l’Ouest, où il est le plus populaire, et, malgré ses habitudes silencieuses, il a multiplié les discours. Il a fait contre fortune bon cœur ; peut-être garde-t-il l’espoir d’être plus heureux à des élections prochaines et de retrouver dans quatre ans la faveur de son parti pour rentrer à la Maison-Blanche.

Toujours est-il que le général Garfield est l’élu d’aujourd’hui, et par cette élection le parti républicain compte une victoire de plus, ou plutôt il garde le pouvoir qu’il a depuis vingt ans. Par ce long règne, le parti républicain a évidemment acquis une influence très étendue qui est peut-être la première raison de son succès. De plus, par ses opinions protectionnistes, il garde une clientèle puissante qui fait sa force. Ce qu’il y a de caractéristique, c’est que, dans cette vaste et florissante république, le pouvoir se transmet sans révolution, et un président démocrate vint-il à triompher, les vieilles haines entre le Nord et le Sud sont trop apaisées pour qu’une nouvelle crise de sécession pût menacer désormais la puissante et opulente Union américaine.


CH. DE MAZADE.

Le directeur-gérant : C. Buloz.