« Page:Barine - Névrosés : Hoffmann, Quincey, Edgar Poe, G. de Nerval.djvu/225 » : différence entre les versions

La bibliothèque libre.
 
AkBot (discussion | contributions)
Pywikibot touch edit
 
(Aucune différence)

Dernière version du 22 juillet 2018 à 12:13

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

celle des Séraphins ; c’était d’ailleurs une fille sans artifice, et innocente comme la courte vie qu’elle avait menée parmi les fleurs. Aucune ruse ne déguisait la ferveur de l’amour qui animait son cœur, et elle en scrutait avec moi les plus intimes replis, pendant que nous errions ensemble dans la vallée du Gazon-Diapré, et que nous discourions des puissants changements qui s’y étaient récemment manifestés. »

Ils se marièrent en 1836. Pour donner satisfaction, paraît-il, aux lois du pays, Poe produisit un témoin qui attesta sur la foi du serment que la fiancée avait vingt et un ans accomplis. Le pasteur qui les unissait trouva qu’elle avait l’air bien jeune pour son âge, et il n’en fut rien de plus.

Poe adorait sa femme-enfant. Le seul objet de luxe des jours moins durs était une harpe, ou un piano, pour accompagner la belle voix de Virginie. La beauté de Virginie remplissait son mari d’orgueil. Il mettait toute sa volonté à ignorer que cette mignonne créature ne lui était que prêtée par la Mort, et pour bien peu de temps ; la phtisie, qui lui avait déjà pris son père et sa mère, allait lui ôter encore ses amours, et Virginie le savait, s’il faut en croire jusque-là le conte où elle est célébrée : « — À la longue, m’ayant un jour parlé, tout en larmes, de la cruelle transformation finale qui attend la pauvre Humanité, elle ne rêva plus dès lors qu’à ce sujet douloureux, le mêlant à tous nos entretiens… Elle avait vu que le doigt de la Mort était sur son sein, et que, comme l’éphémère, elle n’avait été parfaitement mûrie en beauté que pour mourir. » Mais lui, disent les contemporains, il devenait fou à la moindre allusion au malheur suspendu sur sa tête. Nous reviendrons plus tard à Éléonora ; nous n’en aurons que trop l’occasion. Laissons quelque peu ces blêmes amoureux dans les poétiques greniers