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lement les données sont les lois partielles découvertes. Quand des lois distinctes ont été bien établies, on s’efforce de découvrir des rapports nouveaux qui les relient et les identifient dans une nouvelle loi supérieure. Le problème du monde reste insoluble tant que les lois partielles découvertes qui en sont les données n’arrivent pas à concorder, tant qu’il existe des lacunes dans la série des rapports constants qui rattachent tous les phénomènes ; et la science ne travaille qu’à remplir peu à peu ces vides, à renouer ces solutions de continuité, en cherchant l’identification des lois connues. Les hypothèses sont en quelque sorte des ponts jetés provisoirement d’une loi partielle à l’autre, et elles servent de lien provisoire jusqu’à ce qu’elles soient vérifiées et deviennent lois, ou soient supplantées par la découverte de la vraie loi. Ainsi la série interrompue et indéfinie des rapports tend à se renouer et à se clore : l’œuvre de la science consiste à en compléter les termes pour en faire la somme.

La plupart des philosophes ont dédaigné jusqu’à présent cette méthode lente et sûre. Ils ont prétendu interroger le monde avant de l’avoir analysé, et cette présomption les a toujours égarés. Oubliant ou ignorant que, pour poser une question légitime sur une chose quelconque, il faut que les termes de cette question soient tirés de l’analyse de la chose même, ils se sont exposés à soulever des questions absurdes. Et, comme ils négligent tous les rapports que l’expérience seule peut révéler, ils manquent de données concordantes pour poser une équation quelconque où la vraie solution puisse être impliquée.

Leur illusion est facile à mettre en lumière. Ils ont puisé dans l’expérience interne certaines notions qui conviennent à l’essence humaine, et arbitrairement ils en font les prédicats