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assuré que la netteté de ses convictions, la fermeté de son caractère et l’austérité de sa vie. Membre, en d’autres temps, d’un parti peu nombreux, mais énergique, il avait été l’adversaire de la plupart des hommes qu’il rencontrait à l’Union civique et leur avait porté des coups difficiles à oublier ; mais on savait, en revanche, qu’il était désintéressé et courageux. C’était le chef désigné d’une pareille campagne.

L’Union civique fut très rapidement en mesure de révéler en public d’une manière éclatante la force d’opinion dont elle disposait. Au commencement d’avril 1890, elle organisa un nouveau meeting, suivi comme le premier d’un défilé dans les rues et de discours sur la place Victoria. L’affluence fut telle que le gouvernement frémit. Ce n’était pas seulement le nombre, c’était la qualité des adhérens qui rendait la manifestation imposante. D’anciens présidens de la république, d’anciens ministres, tout ce que la capitale renfermait d’hommes distingués et intègres, étaient à la tête du cortège, qui se déroulait interminablement dans les rues, précédé de bannières et de musiques. Il comptait plus de 10,000 personnes, bien que les Argentins, jugeant qu’il s’agissait là d’une question de politique intérieure, n’eussent pas convié les étrangers, qui forment plus de la moitié de la population de Buenos-Ayres. Ils étaient néanmoins de la fête, remplissaient les rues et la place Victoria, criaient : « Vive l’Union civique ! » en agitant leurs chapeaux. Le docteur Pellegrini, vice-président de la république, disait le soir au docteur Juarez, qui, surpris, irrité, mais toujours frivole, ne voulait voir là qu’un incident de peu de portée : « Après un incident comme celui-là, il n’y a plus de place que pour une révolution. » Les quelques conseillers du président auxquels l’atmosphère de sa petite cour n’avait pas fait perdre la tête lui tenaient le même langage avec tant d’unanimité qu’il finit par les croire. Le lendemain, le ministère donnait sa démission, et le docteur Juarez formait un cabinet présentant d’assez sérieuses garanties d’indépendance. Les nouveaux ministres, avant d’accepter leurs portefeuilles, avaient imposé le programme politique qu’ils comptaient appliquer. Ce n’était pas très constitutionnel, les ministres n’étant, dans la République Argentine, que des secrétaires d’état dont la responsabilité ne couvre pas celle du président ; mais c’était peut-être le salut.

Le gros problème était la question financière. L’âme du ministère était donc le ministre des finances, M. Francisco Uriburu, dont on appréciait avec raison l’esprit exact et ferme. Après avoir été ministre du docteur Rocha au gouvernement de la province de Buenos-Ayres, il s’était, depuis l’avènement du docteur Juarez,