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de vingt-deux genres de supplices auxquels il pouvait être condamné ! Le pal ou le feu lent sur un bûcher étaient les plus ordinaires ; l’un des plus atroces peut-être était celui des gauches, qui consistait à enfoncer dans le corps de l’esclave de gros hameçons de fer et puis à le suspendre contre les murailles, où on le laissait mourir de soif et d’épuisement.

Voici, d’après le Père Dan, la statistique des dommages infligés par les corsaires à l’Europe chrétienne. Depuis un quart de siècle, écrivait-il en 1635, « ils ont capturé 600 vaisseaux et la valeur de leurs prises se monte à 20 millions de livres ; »ce qui donne pour un siècle 2 400 vaisseaux et 80 millions de livres. Quant aux pertes en hommes, il évalue à plus d’un million le nombre de chrétiens mis à la chaîne depuis 1600. En 1635, date de son voyage, il compte qu’il y avait en Barbarie 36 000 esclaves, pris sur les navires ou enlevés à terre.


III

La chrétienté ne pouvait rester sourde à l’appel de tant et de si intéressantes victimes. Mais comment leur porter secours ? Deux moyens se présentaient : la force des armes et la diplomatie. Ils avaient été appliqués tour à tour par le cardinal Ximénès et Charles-Quint, de la part de l’Espagne ; par Richelieu et Louis XIV au nom de la France. Nous n’avons pas à faire ici le récit de ces expéditions militaires, ni celui de nos relations diplomatiques avec les régences d’Alger et de Tunis ; ce travail a été fait ailleurs, et de très bonne source [1]. Il nous sera permis du moins d’en constater les vains résultats : ou ces coups de force échouèrent ; ou, après un premier moment d’effroi, ils ne firent qu’exaspérer la cruauté des Algériens ; et quant aux traités conclus avec eux, ils ne furent jamais sérieusement observés. Bien plus efficace fut, à notre avis, l’action de la charité chrétienne.

Dans les premiers siècles de l’Eglise, les évêques avaient toujours compté au premier rang de leurs devoirs celui de visiter les prisonniers et de racheter les captifs, et après l’invasion des Barbares, les occasions ne manquèrent pas d’exercer ce noble privilège. Mais, lorsque, au XIIIe siècle les guerres contre les Sarrasins prirent un caractère de plus en plus acharné, ce furent des ordres religieux qui se consacrèrent spécialement à cette œuvre :

  1. H. de Grammont, Relations de la France avec Alger au XVIIe siècle ; Alger, 1879. — Eug. Plantet, Correspondance des deys d’Alger et des beys de Tunis avec la cour de France ; Paris, 1889-1893 (4 vol. in-8°).