Sur la solitude
Heureux celui qui sans soins et soucis
Vit dans son modeste héritage,
L’envie et le chagrin n’attristent pas ses nuits,
Il jouit de la paix du sage.
Heureux celui qui sait de ses troupeaux
Tirer vêtements et laitage,
Qui sait des champs tirer le pain – et des ormeaux
L’hiver le feu, l’été l’ombrage.
Heureux celui qui peut sentir toujours
Doucettement s’écouler l’heure,
Sain de corps et d’esprit, voyant passer ses jours
Sans qu’aucun souci les effleure.
Heureux celui qui la nuit peut dormir
Profondément par lassitude.
Qui goûte le repos comme après un plaisir
On sent le charme de l’étude.
Puissé-je ainsi passer inapperçu,
Ainsi mourir dans la coulisse,
Ainsi quitter un jour le monde à son insu.
Sans qu’une pierre me trahisse !