Vitraux/Menuet d’automne

La bibliothèque libre.
Léon Vanier, éditeur (p. 24-25).
◄  Orante
Vitrail  ►

Les asters et les véroniques, — de leurs corolles sans parfums, — laissent tomber sur les parterres — où d’autres fleurs ne s’ouvrent plus, — la tristesse mystique et lente des adieux.

Mauve tendre et vert alangui, — leurs teintes vagues s’harmonisent — aux ciels lavés du prime automne, — à la souriante langueur — des beaux jours près de s’envoler.

Bouquets de souvenir et non bouquets de deuil, — l’or violent des chrysanthèmes, — le sang pourpré des dahlias, — n’altèrent point leur éclat doux.

En mineur, d’une voix éteinte — et sur un mode atténué, — les asters et les véroniques — au vent fraîchi qui les caresse, — marmonnent des refrains d’adieux.

C’est la saison prestigieuse — où les arbres portent des feuilles — de topazes et de rubis, — où la grive crie à travers — les pampres fauves adornés — de rutilante orfèvrerie.

En ses corbeilles débordantes, — Octobre entasse, à pleines mains — les présents des chasseurs et ceux des vignerons.

Sous les courtines jaune pâle — de leurs ultimes floraisons, — en un dernier baiser, les roses — solemnisent leurs noces d’or.

La terre se pâme, enivrée — et célèbre une fête encore — avant d’entrer dans le silence — et la paix noire de l’hiver.

Demain, les martinets frileux — avec les feuilles arrachées — s’envoleront à tire d’aile ; — demain, les bises hiémales — sangloteront parmi les bois…

Mauve tendre et vert alangui, — sur les plates-bandes fanées, — les asters et les véroniques — chantent, mezzo voce, la chanson des adieux.