Voyage à l’île de la Réunion (île Bourbon)/04

La bibliothèque libre.

Travaux du port de Saint-Pierre. — Dessin de Thérond d’après une lithographie de M. Roussin.


VOYAGE À L’ÎLE DE LA RÉUNION

(ÎLE BOURBON),

PAR M. L. SIMONIN[1].
1861. — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.




IV

DE SAINT-BENOÎT AU VOLCAN ET À SAINT-PIERRE.

Les campagnes de Saint-Benoît. — Débordement des rivières. — Le Brûlé de Sainte-Rose. — Le Grand-Brûlé. — Coulées de laves. — Le fond de la Marmite. — Les billets de banque de Saint-Joseph. — Les travaux du port de Saint-Pierre. — Les ouragans et les raz de marée. — Les productions et le commerce de la colonie.

De la paisible demeure de la rivière des Roches, où j’avais trouvé une si bienveillante hospitalité, je me rendis à Saint-Benoît, l’un des quartiers les plus importants de l’île après Saint-Denis. C’est aussi l’un des plus fertiles et des mieux arrosés. C’est là que les muscadiers et les girofliers donnent les plus belles récoltes ; c’est là encore que la canne est de la plus belle venue. Les sucreries sont nombreuses dans les environs, et plus d’un planteur de ce canton, plus d’un habitant, comme on appelle à Bourbon les grands cultivateurs, aujourd’hui dix fois millionnaire, a commencé sa fortune sans autres ressource que son travail. Le sol que le colon défriche et plante le récompense avec usure, et pour les hommes intelligents et travailleurs, il y a encore à la Réunion de l’argent à gagner et une belle fortune à faire : il y a place pour tout le monde au soleil des tropiques.

Je pris à Saint-Benoît, la diligence pour Saint-Pierre. Elle fait régulièrement chaque jour le tour de la moitié de l’île. Les pluies qui étaient tombées peu de temps auparavant avaient grossi la rivière des Marsouins, qui arrose Saint-Benoît, et le pont avait été emporté. Les rivières de Bourbon, pour être d’un petit parcours, jouent souvent de ces tours à l’administration des ponts et chaussées coloniale, et l’on citerait difficilement, dans l’île, un cours d’eau qui n’ait pas, deux ou trois fois au moins, emporté son pont à la mer. Il y en a même qui sont d’un régime si capricieux que l’on n’a pas pu les ponter : telle est la rivière des Pluies près Saint-Denis, et la rivière de Saint-Étienne près Saint-Louis.

De Saint-Benoît à Sainte-Rose, je perdis peu à peu de vue les champs de canne, et traversai des sites plus agrestes. À la rivière de l’Est, même accident qu’à celle des Marsouins ; le beau pont suspendu jeté sur ce torrent rapide avait été emporté par l’orage des jours précédents.

À peine eus-je traversé la rivière sur un pont de service qui venait d’y être jeté pour relier du mieux possible les deux rives, que j’entrai dans le territoire de Sainte-Rose. Il m’offrit un tout autre aspect que les quartiers que je venais de visiter. Ici la nature volcanique de l’île se dévoile entièrement, et le Brûlé de Sainte-Rose, que l’on parcourt avant d’arriver à la ville, n’est que la coulée d’un ancien cratère. Les scories se montrent à nu, traçant à la surface du sol leurs contours sinueux. C’est à peine si un indice de végétation apparaît ; quelques maigres fougères, quelques framboisiers sauvages sont les seules plantes qui ont pu pousser sur ce terrain vomi par le feu.

De Sainte-Rose à la forêt du Bois-Blanc, le spectacle change un peu ; ou retrouve çà et là quelques pièces de terre plantées de canne ou de maïs ; et quelques habitations ou l’on cultive des vivres. Dans les bois, qui par moments bordent la route, on distingue surtout des vangassayers, dont les fruits à la peau rouge, rappelant les mandarines de Malte, pendent en grappes odorantes.

Vue panoramique prise du Piton des Neiges. — Dessin de E. de Bérard d’après l’album de M. le marquis de Trévise.

Dès que nous eûmes traversé ces bosquets parfumés, nous entrâmes dans le Grand-Brûlé, et dans ce qu’on nomme l’Enclos. Là le tableau qui un instant s’était offert à nous dans le Brûlé de Sainte-Rose se déroula devant nous sur une plus large échelle et nous courûmes, pendant près de dix kilomètres, sur une route ouverte à travers les scories du volcan. À gauche est la mer, où toutes les laves se rendent pendant la coulée, quand le cratère entre en éruption. Elles y produisent l’effet le plus pittoresque et le plus majestueux ; c’est le feu qui vient se marier à l’eau. La mer, dans le mouvement de recul des vagues, semble se retirer devant la masse qui s’approche ; elle revient ensuite au rivage, et léchant la scorie bouillonnante, dégage une colonne d’épaisse vapeur, qui se colore en rouge étincelant sous la haute température de la lave.

Le volcan de la Réunion n’est pas toujours en éruption. C’est à peu près une fois tous les ans, et quelquefois aussi moins souvent, qu’il donne des signes de son activité. En traversant le Grand-Brûlé, ou recoupe les différentes coulées, et à leur aspect, ainsi qu’à la végétation qui les recouvre, on peut marquer leur âge relatif. Les coulées les plus récentes sont noirâtres, luisantes, et semblent à peine solidifiées. Elles présentent les formes les plus tourmentées, et parfois se sont élevées en dôme, accumulant leurs replis tortueux. Celles qui les ont immédiatement précédées sont couvertes d’efflorescences blanchâtres, et de quelques mousses ou lichens. Les coulées plus anciennes, qui se sont peu à peu éboulées, commencent à laisser passer, à travers leurs nombreux interstices des fougères et quelques framboisiers sauvages qui y végètent tant bien que mal. Enfin sur les coulées les plus vieilles, presque entièrement nivelées, des palmiers et d’autres arbres de haute futaie sont parvenus à planter leurs racines.

Le cratère brûlant ne vomit pas toujours des laves ; souvent c’est une pluie de cendres qui se disperse au vent ; d’autres fois, une matière légère, vitreuse et en forme de filaments, à laquelle les créoles ont donné le nom pittoresque de cheveux du volcan. Les cendres sont transportées au loin, et un roulement sourd, comme un coup de tonnerre, annonce leur apparition. Les cheveux s’arrêtent près de l’embouchure du cratère et ils coulent souvent avec les scories.

L’Enclos, qui renferme le Grand-Brûlé formé de toutes les coulées de lave, est terminé à sa partie supérieure par le cratère aujourd’hui en activité, et qu’on appelle la Marmite ou le Piton de fournaise.

Sommet du Grand-Bénard. — Dessin de E. de Bérard d’après l’album de M. le marquis de Trévise.

Les limites de l’Enclos, autour du volcan comme en descendant vers la mer, sont de véritables murs et pic, ce qui lui a valu son nom. Le cratère actuel paraît donc être un cratère d’affaissement, comme l’Etna, et non de soulèvement comme le Vésuve. Le terrain, dans un mouvement de bascule général, se sera incliné et affaissé vers la mer, pendant qu’à la partie opposée, le Piton de fournaise aura été porté à l’élévation de deux mille six cents mètres, qui est celle de son point culminant. Ce phénomène de dislocation s’est sans doute produit sous l’effet de la lave bouillonnant à l’intérieur, et dont les gaz mis en mouvement ont pressé sur les parois solides du terrain comme la vapeur dans une chaudière. Le cratère qui s’est ouvert joue ici le rôle d’une véritable soupape de sûreté, dont l’action est certainement efficace pour la petite étendue de l’île. Ce fait nous explique comment Bourbon, malgré son volcan n’a jamais éprouvé de tremblement de terre sérieux.

La route du Grand-Brûlé, que nous traversâmes au galop des chevaux, a été coupée par la lave lors de la coulée de 1858. Le fleuve de feu s’était divisé, en descendant à la mer, en trois immenses bras mesurant ensemble près d’un kilomètre. Il s’avançait avec majesté, et mit plusieurs jours pour arriver jusqu’à la route. Le dégât fut bien vite réparé. Les communications ne furent que peu de temps interrompues, les habiles ingénieurs qui avaient ouvert cette voie n’étant pas hommes à laisser détruire leur ouvrage. Ce chemin à travers des laves mouvantes, que jusqu’à eux on avait cru impossible, est assurément l’un des travaux d’art les plus remarquables de la colonie. Il faut non-seulement en remercier la science, mais encore faire à l’habile administration de M. Hubert Delisle, le gouverneur d’alors, la part qu’elle mérite dans cette belle et utile entreprise.

Avant de quitter le Grand-Brûlé et son sol de laves aux allures tourmentées et bizarres, je jetai un dernier regard vers le volcan qui fermait l’horizon à ma droite. Un nuage de fumée sortait lentement du cratère et, montant perpendiculairement dans l’air, s’arrêtait au-dessus du Piton de fournaise comme un gigantesque panache qui, la nuit, semble une colonne de feu. Tel le Vésuve m’était apparu de Naples lors de l’éruption de 1857. Mais le volcan de Bourbon est plus paisible et surtout moins dangereux que son frère d’Italie ; il est aussi plus voisin de la mer, et c’est invariablement vers elle qu’il dirige les matières en fusion qui sortent de son mystérieux laboratoire.

Je sortis du Grand-Brûlé par une rampe assez ardue et de là jusqu’à Saint-Philippe, je traversai alternativement des champs en culture et d’autres coulées de lave, la plupart très-anciennes et vomies par des cratères éteints depuis des siècles. D’autres ont une origine plus moderne et même presque récente.

C’est de Saint-Philippe que l’on monte quelquefois au volcan. On peut s’y rendre aussi de Saint-Benoît ou de Saint-Pierre. Les créoles ne font guère cette excursion, et seuls les étrangers se la permettent quelquefois. En ma qualité de voyageur ayant salué le Vésuve, les volcans des Andes et ceux du Mexique, où le sol tremble, comme dit la chanson, je brûlais du désir d’aller donner un coup d’œil au cratère brûlant de Bourbon. Cet espoir, que j’avais nourri pendant plus de deux mois, fut déçu au moment de mettre mon projet à exécution, et il serait trop long de raconter ici les causes de ce contre-temps. Mon ami M. Maillard, touriste infatigable et ingénieur colonial à la Réunion pendant vingt-cinq ans, a été plus favorisé que moi. « Rien, me dit M. Maillard, ne peut, décrire le grandiose du phénomène que nous aperçûmes lorsqu’après nous être couchés à plat ventre, de manière à ne laisser passer au-dessus de l’abîme que la tête et les épaules, nous vîmes au fond d’un puits de cent cinquante mètres de diamètre et de deux à trois cents mètres de profondeur, une nappe noire, sur l’un des côtés de laquelle paraissait se remuer une énorme boule de matières en fusion. Elle était d’une couleur rouge clair, et présentait comme le bouillonnement d’une marmite. Quand par moment ce bouillonnement prenait un peu plus d’intensité, la nappe noire se fendait ou plutôt s’étoilait, et la matière rouge, comprimée par le poids de cette couche ou poussée par une force intérieure, se faisait jour, sous forme d’un immense bourrelet, qui bientôt se refroidissait et ressoudait la surface un moment désunie. Parfois il se formait d’autres brisures d’une fente à l’autre, et si le polygone ainsi délimité était petit, les bourrelets de lave en fusion se rejoignaient, et les plaques détachées semblaient s’abîmer dans la masse ronge, qui apparaissait alors au-dessus de la croûte noire. De la partie bouillonnante sortaient des vapeurs sulfureuses qui avaient coloré en jaune les parois du cratère sur une largeur de trente à quarante mètres. Ces vapeurs, projetées par le vent, allaient se perdre dans l’atmosphère par la partie ou nous n’avions pu aborder.

À peu de distance de Saint-Philippe, j’atteignis le quartier voisin, baptisé d’un nom pieux comme tous les quartiers de l’île. Le nom de celui-ci est Saint-Joseph, et comme les cultures n’y sont pas encore très-étendues, les gens du peuple ont créé pour vivre une industrie assez avantageuse, d’ailleurs plus répandue encore à Saint-Philippe. Ils découpent en lanières les feuilles du vacoa et les tressent pour en faire des sacs à contenir le café et le sucre. Les hommes, les femmes, les enfants s’occupent sur le devant de leur porte à ce travail peu fatigant. On sera peut-être étonné d’apprendre qu’il se débite à Bourbon à peu près pour deux millions de francs par année de ces sacs de vacoa. À Maurice, il existe également un village dont les habitants se livrent à cette industrie, et les sacs qu’ils fabriquent sont même exportés par les Anglais jusque sur la côte de Natal, voisine de la colonie du Cap. Aussi les habitants de ce village appellent-ils gaiement les sacs de vacoa des billets de banque, parce qu’ils les échangent avantageusement contre de l’argent ou des objets de consommation chez tous les marchands de la localité.

J’arrivai à Saint-Pierre dans la soirée d’une journée si bien remplie, et dès le lendemain, je me rendis au port pour en visiter les travaux.

M. Maillard me fit visiter tous ses chantiers. Nous nous rendîmes d’abord aux carrières, où des blocs de plusieurs mètres cubes sont extraits à la poudre pour être ensuite précipités dans la mer et former les jetées. Les quais que nous parcourûmes ensuite se développent peu à peu, s’avançant sur les eaux ; ils doivent comprendre le port dans une enceinte quadrangulaire. Le fond de la mer est creusé à la drague, et c’est par le moyen de cette machine qu’on enlève les bancs de coraux sous-marins. Le port de Saint-Pierre sera le premier qu’aura la Réunion. Jusqu’à présent les rivages à pic ou sans aucun abri de la colonie bourbonnaise n’offrent que des rades inhospitalières, où, dans la saison des ouragans et des raz de marée, les navires ne peuvent tenir la mer. Les ouragans, les cyclones, comme on les appelle, font leur apparition dans le courant de l’été ou hivernage, c’est-à-dire du mois de novembre à mars. Le baromètre annonce généralement leur approche par la dépression subite de la colonne de mercure. Bientôt le vent souffle avec une violence inaccoutumée, et la pluie tombe à torrents. À terre, les arbres sont déracinés, les toits des maisons emportés. Sur la mer, malheur au navire qui se trouve sur la ligne de parcours du furieux tourbillon : il est englouti dans les ondes.

Les raz de marée, qui ont lieu généralement dans la saison des ouragans, sont des phénomènes d’un autre ordre et jusqu’ici assez mal expliqués. La mer, paisible au large, s’élève tout à coup sur la côte et vient se briser au rivage avec un fracas inusité. Les galets sont roulés avec un bruit sinistre, et l’on dirait le grondement du tonnerre. Cependant le ciel reste calme et aucun vent ne souffle. Peu à peu les vagues s’apaisent et la mer redevient tranquille. À Saint-Pierre, où les raz de marée se font surtout remarquer par leur violence, les dégâts sont souvent considérables, et l’on a eu principalement à en souffrir dans les travaux du port. Plus d’une fois des blocs gigantesques du poids de plus de vingt mille kilogrammes ont été violemment précipités du couronnement des jetées, contre lesquelles venaient battre des vagues énormes, irrésistible bélier. D’autres fois, des portions entières de jetées ont été démolies et dispersées sous la mer. Le mal a été bon à quelque chose, et il s’est ainsi formé une sorte de talus naturel beaucoup plus large à sa base que celui adopté par les ingénieurs, mais aussi beaucoup plus solide et plus à l’abri des attaques des raz de marée.

Jardin d’une maison de ville, à Saint-Pierre. — Dessin de H. Stock d’après une photographie.

Malgré tant d’ennemis conjurés, les travaux du port de Saint-Pierre s’avancent, et déjà les caboteurs et les navires de long cours qui fréquentent ces parages ont moins à souffrir que par le passé des ouragans et de la grosse mer. Il faut à toute force un port à la Réunion, il lui faut des bassins de radoub et de carénage pour réparer les navires qui la fréquentent ou qui reviennent de l’Inde. Tout cela se fera à Saint-Pierre et peut-être aussi à Saint-Paul. Deux ports ne seront pas superflus, car l’île de la Réunion est assurément la plus belle des colonies qui sont restées à la France, et c’est aussi la plus productive. Chaque année elle est visitée par environ quatre cents navires, presque tous français, et la valeur de son commerce d’importation et d’exportation atteint quatre-vingts millions de francs. La métropole fournit surtout à la colonie des tissus, des vins, des liqueurs, de l’huile, du savon, des modes et tous les articles dits de Paris, enfin des machines et des mules pour le travail des sucreries. Les colonies de l’Inde envoient du riz, des toiles bleues ou guinées, du tabac, du poisson salé. Terre-Neuve expédie de la morue, qui forme avec le riz la principale nourriture des noirs et des Indiens engagés. La morue gâtée s’emploie comme engrais concurremment avec le guano, que l’on tire en grande partie du Pérou.

Le commerce avec l’étranger a lieu surtout avec l’Inde anglaise, la colonie du Cap, l’Australie, Maurice et Madagascar. Les marchandises importées sont des blés, des légumes secs et autres graines, de l’huile de coco, des viandes salées. De Madagascar on tire des bœufs, des moutons et des porcs, et beaucoup de volaille.

En retour de tous les produits qu’elle reçoit, l’île de la Réunion expédie surtout du sucre, sa principale production. Le chiffre de la fabrication atteint aujourd’hui plus de soixante-dix millions de kilogrammes. Il faut compter aussi près de deux millions de litres d’arak consommés presque entièrement dans le pays.

Après le sucre vient le café, toujours très-renommé pour son excellente qualité, mais dont l’exportation actuelle ne dépasse pas deux cent mille kilogrammes. C’est juste le dixième de ce qu’elle était avant les grands ouragans de 1859, et avant que la culture de plus en plus progressive de la canne n’ait fait aussi arracher presque tous les pieds de café.

La production du girofle atteint à peine aujourd’hui trente mille kilogrammes, et celle de la noix muscade trois mille. Celle du cacao ne peut satisfaire que la consommation locale, et celle du coton a disparu. Elle était jadis une des principales ressources de la colonie. Le coton en effet est indigène à la Réunion, et certaines variétés de cette plante donnaient à Saint-Paul et Saint-Leu des produits très-estimés. En revanche la culture de la vanille est depuis quelques années en très-grande faveur, et l’exportation des gousses desséchées arrive aujourd’hui au chiffre de dix mille kilogrammes. Comme on le voit, c’est encore le sucre qui forme l’élément principal du commerce d’exportation de la colonie : chaque année la canne est cultivée davantage. Il est à désirer que les colons n’aient pas un jour à se repentir d’avoir ainsi tout négligé : café, épices, coton, cacao, pour la précieuse graminée.

  1. Suite et fin. — Voy. p. 145.