Voyages (Louis Domeny de Rienzi)

La bibliothèque libre.
Le Directeur de la Revue (des Deux Mondes)


M. DE RIENZI.

Nous donnons dans notre livraison de ce jour la première partie d’un voyage plein de faits, d’intérêt et de nouveauté. L’empressement des plus célèbres voyageurs de notre époque à venir à nous, et la liaison intime qui s’est établie entre la Revue des Deux Mondes et l’homme qui navigue ou qui chemine au loin pour tout voir, tout sentir, tout braver, pour se faire tour à tour Chinois, Turc, Russe, Arabe du désert, afin d’avoir beaucoup à raconter, beaucoup à émouvoir, beaucoup à enseigner à son retour ; cette honorable collaboration, disons-nous, de tous les génies nomades, nous a donné pour rédacteur M. de Rienzi. C’est là un de ces bonheurs qui n’arrivent jamais seuls ; c’est là un des résultats les plus heureux de la faveur publique ; c’est là un des avantages du plan de notre Revue, si vaste et si simple à la fois, qui embrasse l’histoire du globe, sans négliger aucun des moindres détails et des plus fugitifs de la littérature contemporaine. C’est à ce plan que nous devons le rare avantage d’avoir à peu près le même jour des souvenirs de Nodier, une nouvelle de M. Alfred de Vigny, et un voyage encore tout humide du naufrage d’un des plus infatigables voyageurs de notre époque, M. Louis-Domeny de Rienzi.

M. de Rienzi descend en ligne directe de ce hardi tribun qui fit éclater à lui tout seul le premier germe de la liberté italienne ; Rienzi, roi dans Rome plus que le pape, homme de la foule que la parole fait tout puissant ; passionné génie que la parole abandonne un jour, et qui meurt avec gloire ; anachronisme inoui et presque incroyable dans cette ville si pieusement soumise au vasselage des souverains pontifes. Depuis Rienzi, son nom fut un beau nom à porter, non-seulement dans l’Italie, qui se souvient de ce beau nom, comme d’un nom du siècle de Léon x, mais dans toute l’Europe qui, depuis Rienzi, a été témoin de tant d’élévations aussi inouies que la sienne, de tant de chutes plus grandes encore, et qui, à force d’élévations étranges et de défaites subites, a compris que cette espèce de grandeur qui éclate parfois dans un homme, n’était pas seulement une révolte ; que plus souvent c’était une révolution.

Avec ce beau nom, une ame vive, un coup-d’œil pénétrant, une passion toute italienne pour l’art et la poésie, un infatigable besoin de voir des ruines, de saisir des formes, d’étudier des mœurs nouvelles, de courir de grands dangers, M. Louis de Rienzi se mit en route de bonne heure, lui, soldat français, déjà capitaine dans l’armée de Bonaparte, et qui avait fait avec lui ces hardis et glorieux voyages à main armée devant lesquels se taisait l’Europe muette d’effroi, et dont nous revenions chargés des dépouilles opimes de la conquête, laissant après nous quelque chose de nos lois et de nos mœurs ; ce qui fait qu’en résultat les peuples conquis par nous ont conservé de la conquête française un souvenir sans amertume : nous leur donnions alors le code Napoléon, comme les Russes donnent le choléra-morbus. Excellens et beaux voyages à faire, sans contredit, que ces voyages sous la conduite de l’empereur !

Cependant ce voyage à travers l’Europe ne parut pas assez complet à M. de Rienzi. Cette étude furtive de mœurs, au milieu des royaumes conquis, lui parut trop facile ; son guide impérial lui parut trop hâté, ses enjambées étaient trop grandes pour qu’il pût le suivre et se livrer en même temps au génie de l’observation, ce bienveillant génie qui sert de bâton de soutien et d’hôte au voyageur fatigué. M. de Rienzi se met donc en route tout seul. Ce fragment de nos armées, ce soldat français, renonce aux habitudes d’un soldat, il prend le manteau du voyageur : il marcha d’abord avec le savant helléniste André Ariston, mort loin de lui dans l’incendie de Constantinople, en 1820. Les deux voyageurs visitèrent d’abord les régions caspiennes et caucasiennes ; ils atteignirent le sommet de ces monts-géans pour lesquels la fable n’a pas assez d’historiens, pour lesquels l’histoire n’a pas assez de poésie : ils traversèrent les hordes de Kirguises, une partie de l’Asie mineure, la Géorgie, l’Arménie, la Syrie, la Palestine et Carthage ; ils traversèrent tous ces pays du vieux monde en poètes, en savans, en artistes, en hommes de cœur, d’intelligence et d’épée, ils voyagèrent comme avait voyagé M. de Chateaubriand. Après avoir visité Samos, patrie d’Ariston, et l’île de Crète aux cent villes, M. de Rienzi revint en France, sans son ami, sans son guide Ariston. En France il restait encore du pays à faire ; l’Afrique est une ruine barbare, comme l’Italie est une ruine élégante et policée. Là et là, Italie ou Afrique, au milieu des monsignori italiens ou des hordes errantes, ce sont toujours des ruines. Plus loin, vous trouverez la vie sociale et politique, la vie vulgaire, la nature jeune encore, les lois qui s’étudient, l’égoïsme des villes qui se perfectionnent ; passez la mer, allez en Amérique, vous trouverez tout cela ; le monde change en Amérique : plus de vieux monde, plus de ruines, plus de chefs-d’œuvre, plus de grande ville qui prolonge son ombre gigantesque sur des marbres géans comme à Rome, plus d’histoire antique, plus de saint Louis qui meurt pour sa foi, plus de reine de Carthage au sommet du bûcher, plus de lieux consacrés par la poésie comme à Carthage, plus d’Orient soumis, plus de despotisme poétique comme à Constantinople, plus rien de tout cela en Amérique. Les États-Unis, mornes, corrects, marchands, gouvernés à bon marché, industriels et positifs avant tout ; Haïti, la Colombie, le Mexique, l’isthme de Panama ; tout cela positif, calculateur, tout neuf, plein de révolutions neuves et de préjugés gothiques, de vertus et de vices, cherchant l’utile avant tout, ne songeant pas à l’art, destiné à n’y pas songer, ne comprenant pas qu’un homme voyage pour le voyage, pas plus qu’il ne comprend qu’un homme écrive un poème épique, poussé par la seule passion poétique. Dans des régions ainsi faites et qui veulent savoir la valeur réelle d’un homme, M. de Rienzi fut forcé d’être quelque chose. On le fit colonel de huzards au service de la Colombie et aide-de-camp du général en chef.

Le soldat de Bonaparte rédigea le traité en faveur des Parganiotes, qui voulaient établir une république au milieu de toutes ces républiques. Bonaparte a fait de singuliers élèves. Il a élevé au sein du despotisme tous les hommes qui, depuis, ont défendu ou fondé la liberté dans toute l’Europe. Nous avons vu M. de Rienzi, capitaine français, vivre dans les huttes des sauvages ; jeter, en faveur des débris de Parga, les bases d’une république de plus dans cette terre de républiques ; en 1821 nous le retrouvons à Rome, cette ville toute Rienzi alors, où il préparait il buon stato. 1821 fut une année de soulèvemens et de luttes, on y parla de la liberté bien haut, mais ce ne fut qu’un vain bruit bientôt étouffé dans cette ville sans écho pour ce grand nom de liberté ! Liberté ! c’est un mot que n’entend pas la ville artiste. La liberté moderne, c’est quelque chose qui fait peur aux temples, aux belles ruines, aux vieux trônes, au paisible Vatican, aux chefs-d’œuvre, aux statues, aux tableaux de Raphaël, aux vases Médicis, aux villas ; à tous les enchantemens du ciel italien, de la terre italienne, des nuits et des jours de l’Italie. Liberté, c’est un mot qui empêche le sommeil, qui dérange l’improvisateur, qui arrête le voyageur curieux, qui trouble le prêtre dans sa molle méditation. D’ailleurs à cette même époque la Grèce criait aussi liberté ! liberté ! la Grèce, les mains meurtries, le sein nu, haletante et pauvre. L’Europe n’avait pas encore fixé les yeux sur elle ; Londres et Paris n’avaient pas encore entonné toute leur nauséabonde poésie en faveur de la pauvre Athènes ; les premiers défenseurs de la Grèce s’y rendirent incognito, tout seuls, sans point d’appui derrière eux ; donnant l’exemple à lord Byron, qui l’a glorieusement suivi, mais qui dormait alors à Venise, dans les bras de la Fornarina, ou sur votre sein, à vous, aimable comtesse Guccioli ! Un des premiers qui vit la Grèce en armes, qui se précipita au milieu de l’insurrection grecque, fut Rienzi. Il fut d’abord colonel, puis général (stratarque), il commanda l’artillerie à Athènes en 1822 ; il fut un des fondateurs de cette guerre que les Français venus après trouvèrent en toute activité ; il arriva le premier à ce travail dont il n’a pas touché l’obole ; il supporta tous les feux du jour, il fut le second du général Goura dans la défense d’Athènes contre les Osmanlis. Aujourd’hui le capitaine français Rienzi, le colonel colombien Rienzi, le général grec Rienzi, aurait un nom tout grec, une renommée toute grecque, s’il fût venu plus tard en Grèce, quand on regardait en France ce qui se passait dans la Grèce, quand on pleurait à ses défaites, quand on battait des mains à ses triomphes, quand on portait le deuil de Byron, quand on accompagnait le colonel Fabvier jusqu’aux portes de Paris.

À Marathon, M. de Rienzi fut blessé grièvement. C’étaient là de rudes périls, de dangereux combats ! Il quitta la Grèce affaibli et malade ; le voyage le reprit comme une fièvre un instant suspendue. Des États-Unis, de l’Afrique, de l’Asie Mineure, de Rome, la ville toujours éternelle, de Paris, la ville plus qu’éternelle, voilà le voyageur qui traverse Smyrne, Éphèse, Chio, Naxos, les îles glissantes de l’Archipel, riantes sœurs qui se donnent la main sous ce beau ciel. Puis, de la Grèce le voilà en Égypte : alors Méhemet-Ali avait pour chefs de ses armées un lieutenant-colonel français, des lieutenans français, de vieux débris de l’empire renversé qui faisaient la guerre encore pour vivre, sans enthousiasme, sans colère, sans patriotisme, par métier. Méhemet offrit à Rienzi une place dans son armée, il en voulait faire un chef d’état-major pour commencer. Rienzi, blessé pour la Grèce, ne voulut pas rouvrir sa blessure ; il refusa Méhemet, et il se remit en route, marchant intrépidement, et renversant tous les obstacles sans passion et sans peur, comme fait une idée qui marche. Il a parcouru la côte des trois Arabies, la Nubie, la Troglodytique, l’Abyssinie, une des tribus des Somalis, tout le pays en un mot dont nous entendions parler avec tant d’admiration, jeunes enfans, dans les histoires de Rollin. N’est-ce pas chose étrange qu’un descendant du tribun souverain s’en aille seul dans la Chaldée, ce berceau des miracles ? De la Chaldée, le voilà dans la Perse, véritable région des Mille et une Nuits. L’Inde s’ouvrait devant lui, royaume sans limites ; il entre dans l’Inde, et il va tant qu’il a quelque chose à voir. Il a visité l’île méridionale de Ceylan ; il a vu ce qu’on peut voir de la Chine, ce royaume stationnaire depuis le commencement du monde ; les Philippines, Célèbes, Yap, Ouaïgiou, la Nouvelle-Guinée, la terre d’Arnheim, plusieurs des îles Moluques, et quelques-unes des îles Salomon dans la Polynésie. Tout cela fut pour Louis Rienzi un cercle dont la Chine était le centre. Il retourna en Chine, et sa première action fut toute poétique dans ce pays si positif. À Macao, on montre une grotte qui s’appelle la Grotte de Camoëns. La tradition raconte que le poète y composa une partie des Lusiades. Malheureux grand homme qu’attendent le naufrage, et après le naufrage l’hôpital, toutes les misères de la poésie réunies sur sa tête comme sur celle d’Homère ! M. de Rienzi s’arrêta dans la Grotte de Camoëns. L’idée lui vint de consacrer ce lieu poétique par un monument[1] qui rappelât tous les souvenirs attachés au grand nom du poète. C’est ainsi qu’à Rome, M. de Chateaubriand a élevé un tombeau à Poussin, qu’il a béni avec un vers de Virgile. Quand son monument fut élevé, M. de Rienzi, se souvenant qu’on est toujours poète quand on a de l’âme, écrivit au-dessus de la grotte de Camoëns ces vers qui ne sont pas sans charme, auxquels cependant je préfère l’inscription qui vient après, et qui est pleine de naïveté.


Ô Patané, salut ! Lieu chéri du poète,
Je n’oublîrai jamais ton illustre retraite.
Ici, Camoëns, au bruit du flot retentissant,
Mêlant l’accord plaintif de son luth gémissant,
Au flambeau d’Apollon alluma son génie,
Et chanta les héros de la Lusitanie.
Du Tage à l’urne d’or loin des bords paternels,
De Bellone il cueillit les lauriers immortels.
Malheureux exilé, cet émule d’Homère
Acheta son génie au prix de sa misère ;
Mais il reçut du ciel, pour calmer ses douleurs,
Et l’inspiration et l’amour des neufs sœurs.
Lusus[2] et le Chinois honorent sa mémoire.
Le temps qui détruit tout agrandira sa gloire.
Moi, qui chéris ses vers, qui pleurai ses malheurs,
Cent fois je visitai ces lieux inspirateurs,
Du phébus portugais ce Pinde vénérable,
Et dans ces bois sacrés sa grotte inviolable.
Agité plus que lui, je fuyai dans les champs,
Et le monde et mon cœur, l’envie et les tyrans.

              Au grand Louis de Camoëns,
              Portugais, d’origine castillane,
              L’humble Louis de Rienzi,
              Français, d’origine romaine.

25 août 1821.

La grotte de Patané, près la jolie ville de Macao, est située dans l’enceinte d’un vaste jardin. Le travail de M. de Rienzi a donné à cette grotte une forme élégante et monumentale. Il a fait creuser une niche de plus de six pieds de haut sur cinq de large, à l’endroit même où venait s’asseoir Camoëns, rêvant à son poème os Lusiadas. Dans cette niche, il a placé le buste du poète. Le granit a été taillé par le ciseau, et ce monument aurait été complet, si l’étranger locataire du jardin n’eût pas été jaloux de ce Français qui venait de si loin lui donner une leçon de respect et de regrets à la mémoire du poète. En Chine, l’autre occupation de M. de Rienzi fut de classer la plus belle collection d’objets d’art et de curiosités qui se puisse imaginer. Tout ce que l’Orient, ce pays si curieux, a de curieux et de rare, statues, antiques, peintures, costumes, armes, médailles, livres, manuscrits, pierres précieuses, toute une histoire de ce monde à part, si peu étudié, si peu connu… M. de Rienzi l’avait entassé dans un vaisseau qui partait pour l’Inde. Le travail de sa vie entière, le résultat de toutes ses recherches et d’heureuses spéculations, ses études, sa passion, sa fortune, tout était confié au navire O Dourado. Rienzi s’embarqua à Macao, plein d’espoir ; il était riche doublement : il revenait dans sa patrie, grand propriétaire et grand artiste. Mais près de Singapora, sur cette mer de Chine où fit naufrage le grand Camoëns, le naufrage attendait Rienzi. Rienzi, comme Camoëns, sauva à la nage le sabre du guerrier et quelques vers du poète ; plus heureux encore que Camoëns, s’il ne sauva pas une Lusiade, Rienzi sauva son ami, don Joachim d’eça e Castro, descendant de la malheureuse Inès.

Les journaux de l’Inde et de l’Europe ont rendu compte de ce grand naufrage ; tout fut perdu, toute cette fortune, toutes les richesses du travail et de l’art ; toutes ces curiosités, si pleines d’intérêt pour l’Europe savante. Ce que M. de Rienzi regretta le plus, ce fut le journal de ses voyages, l’histoire entière de sa vie nomade et savante ; plus de douze volumes in-8o de recherches et de découvertes, un atlas sans prix de quatre cents cartes ou dessins originaux, sans compter les travaux de l’historien et du poète, qui délassaient le voyageur ; une histoire de Rienzi le tribun, une tragédie aussi intitulée Rienzi, et plusieurs manuscrits, tous chers au poète ; plusieurs drames inachevés, et surtout une traduction littérale en vers français et en octaves de la Lusiade de Camoëns.

De ce grand naufrage, on n’a retiré de la mer qu’une statue en argent d’un précieux travail, une inscription en bronze dans une langue perdue, et une boîte de fer-blanc contenant des papiers et quelques objets précieux : rien de plus.

Quand Rienzi eut tout perdu, il revint sur ses pas ; il renonça pour trois ans encore à revoir sa patrie ; il fût mort de chagrin d’y retourner les mains vides : pendant trois ans, il recommença sa collection, avec moins de ressources, il est vrai, mais non pas avec moins de science et d’exactitude. C’est ainsi qu’après l’immense perte qu’il avait faite, il est parvenu à réunir encore une curieuse collection d’objets d’art et de science qu’il a apportée en France. Cette collection a été visitée avec le plus grand intérêt par nos savans de Paris ; elle se compose, entre autres choses, de fossiles anti-déluviens, de semences et plantes médicales, de manuscrits orientaux, de médailles, antiquités, inscriptions, armes, objets d’histoire naturelle, et autres que le voyageur a donnés à différens cabinets et bibliothèques de France, et surtout de Paris.

M. de Rienzi, après son naufrage, a publié, à Singapora et à Bourbon, quelques fragmens de ses recherches hiéroglyphiques. En 1823, il avait travaillé en Égypte sur cette importante partie de l’archéologie, tandis que le docteur Young et M. Champollion jeune s’en occupaient, l’un en Angleterre, l’autre en France. Il a également publié un alphabet hiératique complet ; il a prouvé que les noms égyptiens étaient écrits en hiéroglyphes phonétiques, de même que les noms étrangers, ce que niait M. Champollion jeune, dans sa lettre à M. Dacier ; enfin il a découvert un système d’écriture qu’il nomme mystolyphique, qui sert à expliquer ce qui constituait la science et la sagesse tant vantée des anciens Égyptiens. Ce système, que rejette M. Champollion jeune, semble être adopté par M. de Sacy, dans le Journal des Savans. Notre voyageur a donné l’explication de l’écriture cludiforme, de son alphabet, et de plusieurs inscriptions qu’il a découvertes dans les ruines de Babylone, Bagistana et Persépolis. Mais toutes ces choses appartiennent à la haute science ; nous ne voyons en M. de Rienzi que le voyageur, nous laisserons l’orientaliste à M. de Sacy ; vous verrez que pour l’intérêt, pour l’instruction, le voyageur nous suffira.

Nous allons donc profiter de notre mieux de cette vie tout entière, employée à étudier tout ce qu’un homme peut savoir. Après douze ans de voyages dans l’Orient, M. de Rienzi nous revient chargé d’expériences, de découvertes, plein de souvenirs curieux, de faits inconnus ; écrivain élégant et clair, narrateur sans faste, voyageur sans exagération, historien nullement romanesque, homme de sens, homme de goût, éprouvé par bien des fortunes diverses, tour à tour Arabe, Tartare, Grec, Égyptien, Italien d’abord, Français avant tout, homme de cœur. Il faudrait de pareils hommes et de pareils courages à cette belle colonie d’Alger, qui nous a tant coûté, et qui nous échappe chaque jour, entourée qu’elle est de Cabaïles féroces et d’Arabes fanatiques ; Alger qui devait nous ouvrir un si admirable chemin au commerce de l’Afrique, Alger fermé désormais aux caravanes de Nigritie et de Temboctou.


Le Directeur de la Revue
  1. Voyez la lithographie. Voici la traduction littérale de l’inscription chinoise :

    AU LETTRÉ PAR EXCELLENCE.

    Les qualités de l’esprit et du cœur l’élevèrent au-dessus de la plupart des hommes : de sages lettrés l’ont loué et vénéré, mais l’envie le réduisit à la misère. Ses vers sublimes sont répandus dans le monde entier. Ce monument a été construit pour transmettre sa mémoire à la postérité.

  2. Lusus : les Portugais prétendent descendre de ce compagnon de Bacchus, de même qu’ils donnent à Lisbonne Ulysse pour fondateur. Les anciens Français ne croyaient-ils pas tirer leur origine de Francus, fils d’Hector ?