Page:Lenotre - Prussiens d’hier et de toujours, 1916.djvu/155

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essaya bien de vendre ses soldats, par petits paquets, aux souverains étrangers ; mais un soldat prussien, à la fin du XVIIe siècle, cela ne valait pas grand’chose. Il essaya aussi de la fausse monnaie, expédient plus productif, et attacha à sa gracieuse majesté un alchimiste ; ceci encore ne rendit guère. Alors il eut recours aux impôts et son ingéniosité, en ce chapitre, fut véritablement géniale. Jamais, en aucun pays, contribuables ne furent pressurés comme l’étaient les Prussiens de ce temps-là. Non seulement chaque tête supportait une lourde taxe de capitation, mais la perruque qui la coiffait, et qui était obligatoire, devait être munie d’un timbre pouvant atteindre jusqu’à cent thalers. Également soumis à l’impôt les bonnets de femmes, les culottes, les bas, les souliers ; et, pour que l’usure même des effets rapportât quelque chose au monarque, l’État s’adjugea le monopole de la fabrication et de la vente des brosses, de fortes brosses à crins durs qui élimaient et déchiraient les draps les plus solides. Aux seuls agents du fisc était réservé le droit de tondre les cochons. Il fallait payer deux thalers par an pour obtenir la permission d’acheter du thé et du chocolat. Ainsi du reste. C’est de ce temps-là que date le dicton : « Misère en Prusse. »

Les coffres, de la sorte, se remplirent. Et tout de suite Frédéric commence à jouer au grand roi. Il fait venir de Paris ses perruques ; ses vêtements sont boutonnés d’or et de diamants. Le musée de Monbijou conserve un de ses habits, violet, velours et soie, jadis constellé de pierreries dont on l’a