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1676sante ; je condamne votre plume d’aller à Rome ; car pour ce qu’elle a fait, je le sauve du feu. Je vais achever avec une autre main que la mienne[1].

En arrivant ici, Mme de Lavardin me parla de l’oraison funèbre du Fléchier : nous la fîmes lire, et je demande mille et mille pardons à Monsieur de Tulle, mais il me paroît que celle-ci est au-dessus[2] : je la trouve plus également belle partout ; je l’écoutai avec étonnement, ne croyant pas qu’il fût possible de trouver encore de nouvelles manières de dire les mêmes choses : en un mot, j’en fus charmée.

Nous avons été bien aises d’apprendre par vous les nouvelles de Messine[3] ; vous nous avez paru original[4], à cause du voisinage. Quelle rage aux Messinois d’avoir tant d’aversion pour les pauvres François, qui sont si aimables et si jolis[5] ! Mandez-moi toujours toutes vos histoires tragiques, et ne nous mettons point dans la tête de craindre le contre-temps de nos raisonnements : c’est un mal que l’éloignement cause, et à quoi il faut se résoudre tout simplement ; car si nous voulions nous contraindre là-dessus, nous ne nous écririons plus rien. Si vous ne recevez point de mes lettres le prochain ordinaire, n’en soyez point en peine : je doute que je puisse vous écrire qu’à Paris, où je compte arriver vendredi ; bonjour, bonne

  1. Cette phrase manque dans l’édition de 1734.
  2. « Au-dessus de la sienne. » (Édition de 1754.)
  3. Les nouvelles de Sicile, et en particulier de Messine, abondent dans la Gazette à la fin de mars et au commencement d’avril. Il est parlé d’avantages remportés sur mer par les Français, de conspirations, de divers projets d’attaque formés par les Espagnols, etc.
  4. C’est-à-dire source première, ou du moins sachant les choses d’original.
  5. Sur les fautes de Vivonne, sur les excès des Français en Sicile et sur la haine croissante des Siciliens, voyez l’Histoire de Louvois par M. Rousset, tome II, chap. xi.