Traité de l’Âme (Jamblique)

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Œuvres de Plotin
Tome second - Ennéades
Traduction française de Marie-Nicolas Bouillet


TRAITÉ DE L’ÂME
PAR
JAMBLIQUE
ET FRAGMENTS DIVERS.



Traité de l’âme. — I. Questions que soulève l’étude de l’âme. II. De l’Essence de l’âme. III. Des Facultés. IV. Du Nombre des facultés. V-VII. Des Facultés qui constituent l’essence de l’âme. VIII. Des Opérations. IX. Des Actes. X. Du Nombre des âmes. XI. De la Descente des âmes. XII. De la Différence qui existe dans la descente des âmes. XIII-XIV. De la Vie de l’âme dans le corps. XV. De la Mort. XVI. De la Purification. XVII. De la Récompense[1].
Commentaire du traité d’Aristote sur l’âme. — XVIII. Des Sens. XIX. De la Vue. XX. Du Sens interne. XXI. De l’Imagination. XXII-XXIII. De l’Intelligence.
Lettre sur le destin.
Questions que soulève l’étude de l’âme.

I[2]. Aristote ramène les principes qui paraissent le plus évidemment constituer la nature de l’âme à trois caractères essentiels, savoir, le mouvement, la connaissance, la ténuité de la substance (λεπτότης τῆς οὐσίας (leptotês tes ousias)), qu’il nomme quelquefois substance incorporelle (ἀσώματος ὑπόστασις (asômatos hupostasis))[3] ; puis, il examine par rapport à chacun de ces trois points toutes les opinions qui ont été professées sur l’âme : il embrasse ainsi la variété infinie des opinions et les classe d’une manière claire et brève. Mais je trouve que cette division à deux défauts : d’un côté, elle est confuse, parce qu’elle contient des homonymes : car il y a une grande différence entre le mouvement de translation et le mouvement de la vie, entre la connaissance des objets qui ont une figure et la connaissance de ceux qui n’en ont pas, entre la pureté de la substance de l’air et la pureté de lֺ’incorporel en soi ; d’un autre côté, elle est imparfaite, parce qu’elle est incomplète : car on ne peut embrasser avec ces trois points toutes les opinions qui ont été professées sur l’âme[4].

De l’Essence de l’âme.

II[5]. — 1o Quelques-uns ramènent la nature de l’âme aux principes des quatre éléments. Selon eux, les corps premiers sont indivisibles, plus élémentaires que les éléments eux-mêmes ; n’étant pas mélangés, étant d’ailleurs remplis uniquement de la première substance, qui est pure, ils ne sont divisibles d’aucune façon ; ils ont une infinité de figures, parmi lesquelles se trouve la figure sphéroïde ; or l’âme est composée d’atomes sphéroïdes[6].

2o D’après ce qu’enseignent certains Péripatéticiens, l’âme est la forme du corps, ou une qualité simple et incorporelle, ou une qualité substantielle et parfaite[7]. Une opinion analogue, opinion qui, bien qu’elle ne vienne pas des anciens, constitue cependant une secte particulière, est celle qui fait consister l’âme dans le concours (συνδρομὴ (sundromê)) de toutes les qualités, dans ce qu’il y a de principal en elles et qui leur est soit postérieur, soit antérieur[8].

9o Énumérons maintenant, en les distinguant les uns des autres, ceux qui donnent à l’âme une essence mathématique [c.-à-d. une essence intermédiaire entre l’essence sensible et l’essence intelligible].

A. La première espèce d’essence mathématique est la figure (σχῆμα (schêma)), qui est la limite de l’étendue et l’étendue elle-même. Parmi ceux qui professent cette opinion on compte le platonicien Sévérus[9]. Speusippe place l’essence de l’âme dans l’idée de ce qui est étendu en tout sens[10]. Il serait plus raisonnable de faire consister l’âme pure dans la cause de ces choses [de l’étendue et de la figure], ou dans ce qui les unit[11].

B. L’autre espèce d’essence mathématique est le nombre. Quelques-uns des Pythagoriciens affirment simplement que « l’âme est un nombre[12] » ; Xénocrate ajoute : « qui se meut lui-même[13] » ; le pythagoricien Modératus : « qui renferme les raisons[14] » ; Hippasus, auditeur des Pythagoriciens : « qui est l’organe rationnel du Dieu créateur du monde (ϰριτιϰὸν ϰοσμουργοῦ θεοῦ ὄργανον (kritikon kosmourgou theou organon))[15]. »

Selon Aristote, Platon compose l’animal en soi [le monde intelligible] de l’idée de l’un, ainsi que des premières longueur, largeur et profondeur, et dit que l’unité est l’Intelligence, que le nombre deux est la Science, que le nombre de la surface est l’opinion, et que celui du solide est la Sensation[16].

C. Examinons maintenant l’harmonie, non celle qui est fondée sur les corps [qui résulte du mélange des éléments[17]], mais celle qu’on appelle l’harmonie mathématique [l’harmonie propre à l’essence qui est intermédiaire entre l’essence sensible et l’essence intelligible]

Modératus attribue à l’Âme [du monde] cette espèce d’harmonie qui établit l’accord et l’amitié entre les contraires[18] ; Timée [dans Platon[19]], celle qui, dans les essences, les vies et leur génération, sert de moyen terme et de lien. Plotin, Porphyre et Amélius ont enseigné que l’harmonie consiste dans les raisons que contient l’essence de l’Âme (ἐν λόγοις τοῖς ϰατ’ οὐσίαν προῦπάρχουσιν (en logois tois kat’ ousian prouparchousin))[20]. Enfin un grand nombre de Platoniciens et de Pythagoriciens sont d’avis que l’harmonie est unie au monde et inséparable du ciel[21].

4o Passons maintenant à la nature incorporelle, et examinons avec ordre toutes les opinions qui ont été émises à ce sujet. Il y a des philosophes qui croient que l’essence de l’Âme universelle a toutes ses parties semblables à elle-même, qu’elle est une et identique, en sorte qu’elle est tout entière dans chacune de ses parties[22]. Ils placent dans l’âme particulière elle-même le monde intelligible, les dieux et les démons, le Bien et tout ce qu’il y a de plus relevé dans l’univers[23] ; ils enseignent ainsi que tout est dans tous les êtres, mais selon la nature propre de chacun d’eux[24]. Numénius professe cette opinion dans toute son étendue[25], Plotin avec quelque restriction[26], Amélius avec inconstance, Porphyre avec hésitation : car tantôt il l’abandonne nettement, tantôt il la suit comme une tradition[27]. Selon cette opinion, l’Âme, dans son essence totale, ne diffère en rien de l’intelligence, des dieux et des êtres supérieurs.

Une doctrine, qui est opposée à la précédente, sépare l’Âme et l’Intelligence[28] : elle fait de l’Âme une nature inférieure, née de l’intelligence, mais distincte d’elle, en ce sens que la partie de l’Âme qui est au-dessous de l’Intelligence en dépend, mais a une existence propre. Cette même doctrine sépare également l’Âme et tous les êtres supérieurs ; elle lui assigne une nature propre[29], en la définissant soit l’Essence intermédiaire entre les corps qui sont divisibles et les genres d’êtres qui sont indivisibles[30], soit la Plénitude des raisons universelles et la Puissance démiurgique inférieure aux idées[31], soit la Vie qui vit par elle-même et provient du monde intelligible et des genres immuables, soit la Procession de l’être véritable et universel vers une essence moins parfaite[32]. Pythagore, Platon, Aristote[33], tous les anciens qui se sont acquis du renom par leur sagesse, sont réellement pour cette doctrine, si l’on approfondit leurs opinions d’une manière scientifique. Pour nous, nous essaierons de composer sur ces opinions un Traité qui fasse connaître la vérité[34].

Quelques-uns des Physiciens composent l’âme par la combinaison des contraires, du chaud et du froid, du sec et de l’humide : ils prétendent que la vie (τὸ ζῆν (to zên)) doit son nom à ce qu’elle est mise en ébullition par la chaleur (ἀπὸ τὸ ἀναζεῖν ὑπὸ τοῦ θερμοῦ (apo to anazein hupo tou thermou)), et l’âme (ψῦχὴ (psuchê)), à ce qu’elle est rafraîchie par le froid (ψῦχος (psuchos))[35] ; ils croient que dans les deux cas l’âme est l’air qu’on respire, comme le dit Aristote[36] en citant les vers d’Orphée sur la nature, d’après lequel l’âme vient de l’univers et entre en nous, quand nous respirons, apportée par les vents. » Orphée lui-même semble penser qu’il n’existe qu’une seule Âme ; laquelle se divise en une foule de parties, en sorte que les âmes particulières reçoivent, en respirant, les souffles multiples et intermédiaires (πολλαὶ ϰαὶ μέσαι ἐπίπνοιαι (pollai kai mesai epipnoiai)) émanés de l’Âme universelle[37].

Quelques-uns des Peripatéticiens font de l’âme un corps éthéré[38] ; d’autres la définissent soit « la perfection de l’essence du corps divin, » perfection qu’Aristote appelle entéléchie, comme le dit Théophraste dans quelques-uns de ses écrits[39], soit « ce qui est engendré par les genres universels divins (τὸ ἀπογεννώμενον ἀπὸ τῶν θειωτέρων γενῶν ὅλων (to apogennômenon apo tôn theiôterôn genôn holôn)), comme le conçoivent des modernes, soit ce qui forme un mixte avec le corps, » comme l’enseignent les Stoïciens[40], soit « ce qui est mélangé à la nature, » soit « ce qui est quelque chose du corps (la qualité qu’il a d’être animé), mais qui ne constitue pas une substance indépendante du corps, » comme le prétend Dicéarque le messénien[41].

Des Facultés de l’âme.

III[42]. Selon Platon, les facultés de l’âme ne sont pas différentes de l’âme [parce que l’âme est indivisible en elle-même] ; d’un autre côté, elles sont congénères et subsistent ensemble en une seule idée, en tant que l’essence de l’âme est composée [parce que l’âme a trois vies qui sont d’essence différente][43]. Aristote, qui conçoit également l’âme comme une essence simple et incorporelle, laquelle consomme la forme[44], ne croit pas que les facultés soient dans l’âme comme dans un composé[45]. — Au contraire, les sectateurs de Zénon et de Chrysippe et tous ceux qui font de l’âme un corps, regardant les facultés comme les qualités du sujet, et l’âme comme la substance qui est le sujet des qualités, constituent avec ces deux choses une nature qui est composée d’éléments hétérogènes. Dans ce système, les facultés appartiennent soit à l’âme elle-même, soit à ce qui possède l’âme, c’est-à-dire à l’animal considéré avec le corps.

Pour les philosophes tels que Pythagore et Platon[46], d’après lesquels l’âme à une double vie, parce qu’elle vit en elle-même et dans le corps[47], les facultés sont présentes à l’âme d’une autre manière qu’à l’animal. — Au contraire, pour les philosophes d’après lesquels l’âme n’a point d’autre vie que celle du composé, parce qu’elle forme un mixte avec le corps, comme le disent les Stoïciens ; ou parce qu’elle communique toute sa vie à l’animal, comme le prétendent les Péripatéticiens, les facultés[48] n’ont qu’un seul mode de présence : elles sont mélangées à l’animal tout entier, ou bien l’animal tout entier y participe.

Comment donc les facultés diffèrent-elles l’une de l’autre ?

Selon les Stoïciens, quelques facultés diffèrent par la diversité des organes dans lesquels elles résident : car il y a, disent-ils, divers esprits tendus du principe dirigeant vers les divers organes, les yeux, les oreilles, etc. ; d’autres facultés, qui ont pour siége le même organe, diffèrent par leur qualité propre : car, de même qu’une pomme réunit dans le même sujet la saveur et le parfum, de même le Principe dirigeant réunit dans le même sujet la Représentation sensible, l’Assentiment, l’Appétit, la Raison. — Selon les Péripatéticiens[49] et tous ceux qui n’admettent pas que l’âme ait des parties, les facultés sont rapportées à la fois à une essence unique et à différentes espèces d’après la nature de leurs fonction[50].

Selon Platon, l’âme a trois parties parce que ses trois vies appartiennent à trois essences différentes ; d’un autre côté, elle a plusieurs facultés, si l’on considère, non plus les différences essentielles de sa vie, mais la diversité des propriétés qui sont réunies dans le même principe[51]. — En général, il y a entre une partie et une faculté cette distinction qu’une partie diffère d’une autre partie par son essence, tandis qu’une faculté peut avoir le même sujet qu’une autre faculté et n’en diffère que par sa fonction génératrice ou productrice.

Du Nombre des facultés.

IV[52]. Les sectateurs de Zénon distinguent huit parties dans l’âme[53], mais ils attribuent à une seule partie plusieurs facultés : ainsi, pour eux, le Principe dirigeant comprend la Représentation sensible, l’Assentiment, l’Appétit, la Raison[54].

Platon, Archytas et les autres Pythagoriciens[55] divisent l’âme en trois parties, la Raison, la Colère et la Concupiscence, qu’ils regardent comme nécessaires pour constituer les vertus ; d’un autre côté, ils accordent à l’âme pour facultés la Puissance naturelle, la Locomotion, la Sensibilité, l’Imagination, l’Amour du beau et du bien, enfin l’Intelligence[56].

Quant à Aristote, il compte cinq facultés, la Puissance naturelle, la Sensibilité, la Locomotion, le Désir et la Pensée[57].

Des Facultés qui constituent l’essence de l’âme.

V[58]. Plotin enlève à l’âme pure les facultés irrationnelles, la Sensation, l’Imagination, la Mémoire, le Raisonnement. La Raison pure est la seule faculté qu’il attribue à l’essence pure de l’âme et qu’il regarde comme conforme à l’idée de cette essence[59]. — Démocrite le platonicien[60] réunit dans l’essence de l’âme toutes ces espèces de facultés. — Platon divise les facultés en facultés qui ne relèvent que d’elles-mêmes et facultés qui appartiennent à l’animal, et il définit chaque espèce par celle des deux vies [rationnelle ou animale] à laquelle elle se rapporte[61].

[Facultés naturelles : Puissance nutritive, Puissance générative.] Plotin et Porphyre pensent que les facultés propres à chaque partie de l’univers [c’est-à-dire à chaque être considéré comme animal] sont produites par l’Âme universelle[62], et que [à la mort des animaux] les facultés produites de quelque manière que ce soit par l’Âme universelle s’évanouissent et cessent d’exister, comme la vie d’un végétal engendré par une raison séminale finit quand la raison séminale se retire de lui pour rentrer en elle-même [en remontant à l’Âme qui l’a produite[63]]. Mais on pourrait admettre avec raison, ce semble, que ces facultés existent toujours dans l’univers et ne périssent pas[64].

VI[65]. [Facultés irrationnelles : Appétit, Sensation, Opinion, Imagination, Mémoire[66].] Outre ces facultés [l’Appétit et la Sensation] qui sont tout à fait communes à l’âme et au corps [parce que, supposant l’exercice des organes, elles s’attachent au corps qui leur sert de matière[67]], il y a d’autres facultés qui dépendent de l’âme [parce qu’elles ne supposent pas l’exercice des organes], mais qui ne constituent cependant pas son essence [parce qu’elles s’exercent sur les données de la Sensation[68]] : telle est [avec l’Opinion et l’Imagination] la Mémoire, qui est la conservation des images[69].

VII[70]. [Facultés rationnelles et intellectuelles : Volonté, Raison discursive, Intelligence[71]]. Quant à l’Intelligence et aux facultés les plus éminentes de l’âme, les Stoïciens disent que la Raison n’est pas innée, qu’elle n’existe pas en nous à priori, mais qu’elle est produite en nous à posteriori, vers l’âge de quatorze ans, par les sensations et les représentations sensibles dont elle est le résultat. — Les Pythagoriciens et les Platoniciens disent au contraire que la Raison est présente même dans les nouveaux-nés, mais qu’elle est obscurcie par les sensations des objets extérieurs et qu’elle sommeille au lieu d’exercer sa fonction propre[72].

Pour l’Intelligence, beaucoup de Péripatéticiens en distinguent deux espèces, l’Intelligence qui provient de la semence (ὁ ἐϰ τοῦ σπέρματος νοῦς (ho ek tou spermatos nous)), l’Intelligence qui provient de la nature (ὁ από τῆς φύσεως νοῦς) : ils affirment que l’une se développe immédiatement dès la naissance, mais que l’autre, l’Intelligence séparable et venue du dehors (ὁ χωρίστος ϰαὶ θύραθεν ϰαλούμενος (ho chôristos kai thurathen kaloumenos)) ne s’ajoute à la précédente que fort tard, quand l’Intelligence en puissance est complètement développée, parce que c’est seulement alors qu’elle peut participer à la pensée en acte[73]. — Beaucoup de Platoniciens eux-mêmes pensent que l’Intelligence entre dans le corps avec l’âme, que l’âme et son intelligence ne constituent pas deux essences différentes.

Des Opérations de l’âme.

VIII[74]. Qui ne sait qu’Aristote affirme tout à la fois que l’âme est immobile et qu’elle est la cause des mouvements[75] ? Si ce qui est immobile est également inactif, l’âme sera inactive comme elle est immobile, et [sans agir elle-même] elle sera la cause des actes comme elle est la cause des mouvements. Si, comme quelques-uns l’affirment, l’acte est la fin, la liaison, l’union et la cause stable des mouvements ; si de plus, comme l’avance Aristote, l’entéléchie immobile de l’âme contient l’acte en elle-même, ce sera l’acte le plus parfait qui produira les diverses opérations propres à l’animal[76].

Selon Platon, au contraire, la production des opérations propres à l’animal est loin d’être inhérente à l’essence et à la vie de l’âme. Il est évident, sans doute, que l’âme fait partie du composé ; mais, comme il y a dans l’animal changement, division, extension par rapport au corps, intervalle par rapport au temps et au lieu, toutes choses qui sont étrangères à la vie incorporelle en soi, il est clair aussi que, selon Platon, aucun des mouvements du composé n’est propre à l’âme elle-même. De même que, selon ce philosophe, il y a en nous deux vies, l’une séparée du corps, l’autre commune au corps et à l’âme, de même il y a des fonctions (ἐνεργήματα (energêmata)) qui appartiennent à l’âme, et d’autres qui appartiennent au composé[77]. Parmi ces dernières, les unes ont leur origine dans l’âme, d’autres naissent des affections du corps, d’autres proviennent à la fois de l’âme et du corps, mais toutes ont l’âme pour cause commune[78]. De même que la marche d’un navire dépend à la fois du vent et du pilote, et que, si le mouvement ne peut avoir lieu sans le concours de plusieurs autres choses, le pilote et le vent en contiennent rependant en eux la cause principale[79] ; de même, l’âme se sert elle-même de tout le corps et en gouverne toutes les actions, en le dirigeant comme un char[80] ou un instrument[81] ; mais, en même temps, elle a en elle-même des mouvements qui lui sont propres et qui, ne dépendant pas de l’animal, réalisent la vie qui lui est essentielle, tels que l’enthousiasme[82], la pensée pure, et, en général, tous les actes par lesquels nous nous unissons aux dieux.

C’est ce que n’accordent point les philosophes qui font de l’Âme un corps, comme les Stoïciens et une foule d’autres ; ni ceux qui la conçoivent mélangée avec la génération [avec le corps], comme la plupart des Physiciens ; ni ceux qui supposent qu’elle est un produit du corps, qu’elle consiste dans une espèce d’harmonie[83].

Des Actes de l’âme.

IX[84]. Toutes les âmes accomplissent-elles les mêmes actes, ou bien les âmes universelles[85] produisent-elles des actes parfaits, et les autres âmes des actes conformes au rang qui a été assigné à chacune d’elles ?

Selon les Stoïciens, il n’y a qu’une seule raison (εἶς λόγος (eis logos)) pour les âmes universelles et les âmes particulières, leur entendement est absolument le même, leurs actes droits (ϰατορθώματα (katorthômata)) sont égaux et leurs vertus identiques[86]. — Plotin en général et Amélius paraissent professer la même opinion : car ils disent tantôt que l’âme particulière diffère de l’âme universelle, tantôt qu’elle lui ressemble[87]. Selon Porphyre, au contraire, il y a une grande distance entre les fonctions de l’âme universelle et celles de l’âme particulière.

Il y aurait encore une autre opinion qui mériterait d’être prise en considération : divisant les actes d’après les genres et les espèces des âmes, elle enseigne que les actes des âmes universelles sont parfaits, ceux des âmes divines purs et immatériels, ceux des âmes démoniques efficaces[88], ceux des âmes héroïques grands, ceux des âmes des animaux et des hommes périssables, en suivant pour les autres êtres les lois de l’analogie[89]. cette division ainsi établie, on en déduit les conséquences. En effet, quand on admet que partout est répandue une Âme qui est une et identique par le genre et l’espèce, comme l’affirme Plotin[90], ou bien une et identique numériquement[91], comme Amélius l’avance avec assez de légèreté dans plusieurs passages de ses écrits[92], on dit que l’âme est identique à ses actes (τήν ψυχήν εἶναι ἄπερ ἐνεργεῖ (tên psuchên einai aper energei))[93]. Mais ceux qui ont un système plus sage distinguent dans la procession des essences de l’âme un premier, un second et un troisième degrés[94] ; professant une opinion nouvelle, mais plus solide, ils accordent que les actes des âmes universelles, divines, immatérielles, répondent pleinement à leur essence ; mais ils nient formellement que les âmes particulières, renfermées dans une seule espèce et divisées dans les corps, soient immédiatement identiques à leurs actes. De là découle une division qui est en harmonie avec ces principes : je dis, pour m’exprimer conformément à cette nouvelle doctrine, que les actes parfaits, simples et séparés de la matière, sont inhérents aux facultés qui les produisent, et que les actes des âmes imparfaites et divisées sur la terre ressemblent aux fruits produits par les plantes.

En outre, il faut remarquer que les Stoïciens accordent aux êtres inanimés et administrés [par l’âme] toutes les fonctions d’une âme quelconque. — Les Platoniciens n’en font pas autant : car ils enseignent que certaines facultés de l’âme, telles que la Sensibilité et l’Appétit, s’attachent au corps qui leur sert de matière, mais que les facultés qui sont pures, telles que l’Intelligence, ne se servent nullement du corps[95]. Platon ne regarde point comme inhérents au corps par leur essence les actes des facultés corporelles, mais il dit qu’ils lui deviennent communs avec l’âme par la conversion de l’âme vers le corps. Quant aux actes des facultés séparées du corps, il admet qu’ils n’ont aucun rapport avec lui. En effet, d’après ce philosophe, les actes de l’âme universelle et divine sont exempts de tout mélange avec le corps à cause de la pureté de son essence, mais les actes de l’âme particulière et unie à la matière ne sont point purs comme ceux de la précédente ; les actes de l’âme qui remonte [au monde intelligible] et qui s’affranchit de la génération cessent de se rapporter au corps, mais ceux de l’âme qui descend [dans le monde sensible] sont liés et enchaînés au corps de diverses manières ; l’âme qui a pour véhicule (ὄχημα (ochêma)) un esprit pur[96] reçoit par lui facilement ce qui lui vient d’en haut et produit ses actes sans aucune peine, mais les actes de l’âme qui est semée et contenue dans un corps solide contractent la nature corporelle ; enfin, les actes de l’âme universelle convertissent vers eux-mêmes le corps qu’ils administrent, tandis que les actes de l’âme particulière se convertissent eux-mêmes vers le corps dont ils prennent soin[97].

Pour reproduire ces distinctions sous une autre forme, les Péripatéticiens n’attribuent les actes de l’âme qu’à l’animal (c’est-à-dire au composé de l’âme et du corps). Platon, au contraire, commence par rapporter à l’âme tous les actes, puis il détermine ceux qui lui sont communs avec l’animal. Pythagore et Platon, se fondant sur ce principe que l’essence de l’âme est supérieure à la nature [c’est-à-dire à la puissance végétative et générative] et l’engendre, lui rapportent les actes les plus élevés et les plus importants ; ils enseignent qu’elle n’a point la nature pour principe, mais qu’elle est son principe à elle-même, qu’elle gouverne par elle-même et en elle-même ses propres fonctions, enfin que tous les mouvements qui sont nobles, beaux, supérieurs à la nature, appartiennent exclusivement à l’âme.

Les Platoniciens eux-mêmes diffèrent entre eux d’opinion : les uns, comme Plotin et Porphyre[98], rapportent à un seul ordre et à une seule idée[99] les fonctions, les facultés et les diverses espèces de vie ; d’autres, comme Numénius, les opposent pour la lutte[100] ; d’autres enfin, comme Atticus et Plutarque [de Chéronée], de la lutte font sortir l’harmonie[101].

Les Platoniciens disent encore que les âmes, entraînées primitivement par des mouvements désordonnés et coupables, sont entrées dans des corps pour communiquer l’ordre et la beauté à ce qui est au-dessous d’elles[102] ; c’est de cette manière qu’ils établissent l’harmonie entre les âmes et les corps. Quant à la cause qui a déterminé les âmes à faire descendre leur action [sur la matière], c’est, selon Plotin, la première diversité[103] ; selon Empédocle, le premier éloignement de Dieu[104] ; selon Héraclite, le [désir de trouver le] repos dans le changement[105] ; selon les Gnostiques, la folie ou l’égarement[106] ; enfin, selon Albinus, l’erreur du libre arbitre[107]. Les premiers sont d’ailleurs en désaccord avec les derniers sur un autre point : ils assignent pour origine au mal que l’âme fait et souffre les choses qui l’entourent et s’attachent à elle, soit la matière, comme le disent souvent Numénius et Cronius[108], soit le corps, comme l’écrit quelquefois Harpocration[109], soit la nature et la vie irrationnelle, comme Plotin[110] et Porphyre[111] l’affirment dans une foule de passages.

Selon Aristote, les êtres dépourvus de raison diffèrent de l’homme par leurs facultés et leurs autres caractères[112]. — Selon les Stoïciens, les fonctions de la vie communiquées aux êtres sont de plus en plus imparfaites, et, plus elles approchent de la nature irrationnelle, plus elles sont incomplètes par rapport aux fonctions supérieures[113].

Enfin, comme je l’ai entendu dire à certains Platoniciens, tels que Porphyre[114] et beaucoup d’autres, les actes de l’homme deviennent semblables à ceux de la brute, et ceux de la brute deviennent semblables à ceux de l’homme[115], autant que des choses qui ont une essence différente peuvent devenir semblables les unes aux autres.

Du Nombre des âmes.

X[116]. Ceux qui admettent que l’essence de l’âme est numériquement une, mais qui multiplient cette âme, soit, comme le fait Amélius[117], par les modes et les degrés (σχέσεις ϰαὶ ϰατατάξεις (skeseis kai katataxeis)), soit, comme le disent les Orphiques, par les souffles émanés de son essence universelle[118], réduisent ensuite la multiplicité universelle à l’unité, en ce que les modes et les degrés divers [de la vie] reviennent se confondre dans cette âme unique : de cette manière, ils empêchent cette âme de se diviser avec les êtres qui y participent, quand elle cesse de se communiquer à eux [par suite de leur mort], et ils la conservent partout universelle et identique ; ils lui attribuent donc une essence unique, déterminée par l’unité.

Ceux qui, comme Démocrite et Épicure, admettent qu’il y a une infinité de mondes, et croient que les âmes sont constituées par l’infinité des atomes qui se rencontrent par hasard et qui forment tel élément[119], disent, pour être d’accord avec leurs principes, que le nombre des âmes est infini. — Il est aussi des philosophes qui, faisant naître les âmes de semences dont chacune peut à son tour en engendrer plusieurs sans que la progression s’arrête jamais, rendent leur nombre infini par la génération (γένεσις (genesis)), dont l’action est perpétuelle[120]. — D’autres, tirant d’un seul animal qui périt plusieurs animaux et plusieurs vies, conçoivent aussi le nombre des âmes comme illimité par la transformation (μεταϐόλη (metabolê)) qui l’accroît toujours : car la transformation ne subit aucune interruption dans ce système, et, par suite, la naissance y succède sans cesse à la mort[121]. — D’autres encore, confondant l’âme avec la nature, reconnaissent également qu’il se produit par division (διαίρεσις (diairesis)) un nombre infini d’âmes[122] : car si l’on divise un des êtres produits par la nature, c’est-à-dire un végétal, chaque partie est identique au tout et paraît pouvoir engendrer d’autres végétaux semblables[123].

Quant aux Platoniciens, comme ils enseignent que les âmes ne naissent pas et ne périssent pas, ils affirment qu’elles existent toujours dans la même proportion (συμμετρία (summetria)), puisque leur nombre ne peut s’accroître par des naissances ni diminuer par des extinctions. Plotin en particulier regarde cette mesure (μέτρον (metron)) comme un nombre parfaitement déterminé[124].

De la Descente des âmes.

XI[125]. Plotin, Porphyre et Amélius disent que les âmes passent toutes également de l’Âme supra-céleste dans des corps[126]. Timée nous paraît traiter ce point d’une manière fort supérieure quand il représente le Démiurge semant les âmes, lors de leur première existence (ὑπόστασις πρώτη (hypostasis prôtê))[127], dans les genres de corps les meilleurs, dans tout le ciel et dans tous les éléments de l’univers. D’après cela, les âmes semées par le Démiurge seront distribuées dans toutes les créations du Démiurge, et, lors de leur première procession (πρόοδος (proodos)), les âmes, en recevant l’existence, possèdent avec elles-mêmes leurs réceptacles, à savoir : l’Âme universelle, l’univers ; les âmes des dieux visibles, les sphères célestes ; les âmes des éléments, les éléments mêmes auxquels elles sont échues d’après la demeure que le sort a assignée à chacune d’elles[128] ; en sorte que les descentes (ϰάθοδοι (kathodoi)) des âmes deviennent différentes les unes des autres par les différentes demeures qu’elles ont reçues du sort, comme l’explique clairement la distribution dont parle Timée[129].

Il est une autre secte de Platoniciens qui, en traitant des descentes que les âmes opèrent de différents lieux, ne les distinguent ni d’après les sorts assignés par le Démiurge, ni d’après les divisions des meilleurs genres, tels que les dieux, les anges, les démons, les héros[130], ni d’après les distributions de l’univers ; mais, affirmant que l’âme est toujours dans un corps, ces philosophes, tels qu’Ératosthène, Ptolémée le platonicien[131] et d’autres encore, font passer l’âme de corps subtils dans des corps épais. Ils disent, en effet, qu’elle demeure toujours dans quelque partie du monde sensible, que de temps à autre elle vient de tel ou tel lieu de l’univers entrer dans un corps solide : selon Héraclide de Pont[132], c’est de la voie lactée, selon d’autres, c’est de toutes les sphères célestes que les âmes descendent ici-bas ; selon ceux-ci, elles habitent dans la lune[133] ou dans la région aérienne qui se trouve au-dessous de la lune, et c’est de là qu’elles viennent dans la génération terrestre ; selon ceux-là, elles passent de corps solides dans d’autres corps solides.

On voit qu’en faisant partir les âmes de tant de régions diverses on leur assigne des descentes fort différentes. Les manières dont ces descentes s’opèrent ne diluèrent pas moins selon les auteurs. Héraclite, admettant qu’il y a des changements nécessaires des contraires les uns dans les autres, suppose qu’il y a pour les âmes une ascension et une descente, que rester dans les mêmes choses est une fatigue et que changer est un repos[134]. — Selon le platonicien Taurus[135], les âmes sont envoyées par les dieux sur la terre, soit, comme l’affirment ceux qui se conforment à la doctrine de Timée, pour contribuer à la perfection de l’univers, afin qu’il y ait dans la monde sensible autant d’animaux qu’il y en a dans le monde intelligible[136], soit, comme le pensent les autres, pour donner le spectacle d’une vie droite, parce que les dieux voulant se manifester par la vie pure et sainte des âmes.

Les manières dont s’opère la descente des âmes se divisent encore à un autre point de vue : l’âme descend volontairement si elle se résout elle-même à administrer les choses terrestres ou si elle obéit aux êtres supérieurs ; elle descend involontairement si elle est entraînée par force vers ce qui est inférieur[137].

De la Différence qui existe dans la descente des âmes.

XII[138]. Toutes les âmes ne sont pas unies aux corps de la même manière : l’Âme universelle, à ce que croit Plotin, possède sans sortir d’elle-même le corps qui s’approche d’elle, mais elle ne s’approche pas elle-même du corps et n’est pas contenue par lui ; les âmes particulières s’approchent au contraire des corps, leur sont liées et y entrent quand ils sont déjà régis par la Nature universelle[139]. Les âmes des dieux [des astres] convertissant vers leur nature intellectuelle leurs corps divins qui imitent l’intelligence [par leur mouvement circulaire[140]] ; quant aux âmes des autres genres divins, elles dirigent leurs véhicules (ὀχέματα (ochemata)) selon le rang qu’elles occupent[141]. En outre, les âmes pures et parfaites entrent dans les corps d’une manière pure, sans pâtir, sans être privées de la faculté de penser. Le contraire a lieu pour les âmes impures et imparfaites.

Atticus et d’autres Platoniciens ne partagent pas cette opinion et ils lient toutes les âmes aux corps par un seul mode d’union : dans toute incarnation des âmes, ils regardent toujours comme préexistante l’âme irraisonnable, désordonnée et incorporée à la matière[142] ; puis, lorsqu’elle a été ornée, ils l’unissent à l’âme raisonnable.

Les descentes des âmes diffèrent aussi par leurs buts. En effet, l’âme qui descend pour le salut, la purification et la perfection des êtres d’ici-bas, garde sa pureté ; celle qui se tourne vers les corps pour s’exercer et corriger ses mœurs n’est point complètement impassible ni entièrement indépendante ; quant à celle qui vient ici-bas par punition et par suite d’un jugement, elle semble être entraînée et subir une contrainte[143]. Quelques modernes cependant ne font pas cette distinction. N’établissant pas de différence entre les âmes, ils les font descendre toutes de la même manière et les regardent toutes également comme mauvaises : telle est l’opinion de Cronius, de Numénius et d’Harpocration.

Il faut aussi considérer que les vies des âmes, avant leur descente dans un corps, ont de grandes différences entre elles[144]. Or, la diversité de leurs vies produit une grande diversité dans leur première union avec un corps. En effet, les âmes nouvelles et livrées à la contemplation des êtres, les âmes compagnes des dieux et ayant la même nature qu’eux, enfin les âmes parfaites et renfermant en elles-mêmes toutes les formes de l’âme s’unissent toutes pour la première fois à des corps sans pâtir ni contracter de souillure. Mais les âmes remplies de concupiscence et d’autres passions pâtissent lorsqu’elles descendent pour la première fois dans un corps.

De la Vie de l’âme dans le corps.

XIII[145]. Selon Hippocrate, de la famille des Asclépiades, la vie est réellement communiquée au corps et l’âme y devient présente quand le fœtus est formé (parce qu’il est dès lors apte à participer à la vie)[146] ; selon Porphyre, c’est dès que l’embryon est engendré. Il y a encore une autre opinion, qui n’a pas été énoncée jusqu’ici, d’après laquelle l’âme, possédant plusieurs facultés et plusieurs essences, les communique au corps dans le temps convenable, a mesuré que celui-ci devient apte à les recevoir, d’abord la puissance naturelle, puis la sensibilité et l’appétit, ensuite l’âme raisonnable, enfin l’âme intellectuelle[147]. Telles sont les diverses opinions sur les époques auxquelles s’opère l’union de l’âme et du corps.

Quant à la question de savoir comment l’âme entre dans le corps, d’après une première opinion, qui se subdivise elle-même en trois autres, l’âme est attirée du dehors au moment de la conception, soit par l’ardeur du père au moment où il respire, soit par l’ardeur de la mère quand elle est bien disposée pour garder [le souffle vital] qu’elle reçoit, soit par la communauté d’affection du père et de la mère quand, respirant ensemble, ils ont tous deux la propriété d’attirer également parce que leurs natures se confondent ensemble[148]. — D’après une seconde opinion, c’est par une loi fatale que l’âme qui se meut par elle-même entre dans le corps organisé, en se détachant soit de l’univers, soit de l’Âme universelle, soit de la Démiurgie universelle[149]. Les plus purs des Platoniciens, comme Plotin, disent que, dans les individus, le mouvement vital commence par le corps organisé[150], soumis pour la génération aux facultés qui se servent de lui comme d’instrument, mais que ces facultés sont séparables des corps individuels[151].

La manière même dont l’âme se sert du corps a été conçue diversement. Les uns la comparent à la fonction du pilote qui peut se séparer de son navire[152] ; d’autres croient plus convenable de l’assimiler à la fonction du cocher qui, monté sur un char, dirige la marche commune ; d’autres enfin expliquent l’empire que l’âme a sur le corps par le concours égal de tous deux ou par le penchant de l’âme qui incline vers le corps[153].

XIV[154]. Il y a aussi désaccord au sujet du commerce des âmes avec les dieux[155]. Les uns regardent comme impossible qu’il y ait commerce entre les dieux et les âmes renfermées dans des corps ; les autres prétendent que les dieux et les âmes pures, même lorsqu’elles demeurent dans des corps, ne forment qu’une seule et même cité[156]. Ceux-ci n’accordent rien de pareil et disent que l’âme est dans l’animal comme une partie est dans un tout[157]. Ceux-là comparent l’âme à un artisan qui serait incorporé à son instrument, à un pilote qui serait incarné dans son gouvernail[158]. Enfin, il en est qui pensent que l’âme ne s’unit qu’avec les démons et les héros.

Selon Platon, les bons se distinguent des méchants par la pureté, l’élévation et la perfection de leur âme[159]. Selon les Stoïciens, ils recherchent la convenance et le beau qui dépend de la nature[160] ; selon les Péripatéticiens, le juste milieu (συμμετρία (summetria)) conforme à la nature et la vie intellectuelle supérieure à la nature humaine[161]. Selon Hérillus, ils ont pour but la science[162] ; selon Ariston, l’indifférence [pour les choses qui ne sont ni honnêtes ni déshonnêtes[163]] ; selon Démocrite, le calme (εὐσχημοσύνη (euschêmosunê))[164] ; selon d’autres, quelque partie de l’honnête, soit l’absence de la douleur (ἀσχλησία (asklêsia)), comme l’avance Hiéronyme[165], soit quelque autre genre de vie. Mais comme on peut, en se plaçant au point de vue des choses sensibles, distinguer une infinité de vies particulières, nous ne nous donnerons pas la peine de les énumérer et nous n’essaierons point de les définir.

De la Mort.

XV[166]. Qu’arrive-t-il à l’âme quand la mort vient terminer cette vie ? Faut-il admettre que, de même qu’à la naissance l’âme a précédé le corps, ou a reçu l’existence en même temps que lui, ou ne l’a reçue qu’après lui, selon les diverses sectes, de même, à la mort, l’âme périt avant le corps, ou se dissout avec lui, ou bien subsiste en elle-même après être sortie d’ici-bas ? C’est là la question principale. Mais elle se subdivise en plusieurs parties qui sont elles-mêmes susceptibles de recevoir diverses espèces de solutions.

On peut se demander si les êtres vivants meurent, soit parce que les artères, ne pouvant plus recevoir le souffle extérieur, éprouvent une suffocation[167], soit parce que la tension [de l’esprit sensitif] se relâche[168] et que la chaleur s’affaiblit ou s’éteint en quelque sorte à l’intérieur. Si c’est de cette manière que la mort arrive, l’âme périt avant le corps ou en même temps que lui, comme le pense Cornutus. Si, au moment de la mort, l’âme disparaît du corps qui lui sert de sujet et dont elle est une puissance (comme l’harmonie est une puissance de la lyre[169]) ou bien une perfection[170], l’âme ne périt pas avant le corps (car elle n’arrive pas à l’anéantissement progressivement), mais elle passe de l’être au non-être d’une manière subite, sans aucun intervalle de temps et sans corruption, de même que, lorsqu’elle existe, elle arrive à l’existence tout d’un coup, comme un éclair qui brille. Dans ce cas, vivre, ce sera, pour l’être vivant, posséder la forme de la vie ; mourir, être privé de sa présence ou ne plus la posséder. Cette opinion a été professée par un grand nombre de Péripatéticiens. Si l’âme est disséminée (παρέσπαρται (parespartai)) dans le corps et s’y trouve renfermée comme du vent dans une outre[171], ou bien y est mélangée et s’y meut comme les grains de poussière qui voltigent dans l’air et que l’on aperçoit par les fentes[172], il est évident qu’alors l’âme sort du corps, se disperse et se dissipe, comme le croient Démocrite et Épicure.

Plotin a fondé une autre secte : il sépare de la raison [qui constitue l’essence pure de l’âme] la puissance irrationnelle[173] [qui constitue l’âme irraisonnable, image et acte de l’âme raisonnable][174], et [après la mort] il envoie cette puissance irrationnelle dans la génération[175], ou bien il l’enlève au principe pensant[176]. — Ce dernier point donne lieu lui-même à deux opinions. En effet, ou la puissance irrationnelle de chaque âme se résout dans la Vie irrationnelle totale de l’univers [c’est-à-dire dans la Puissance naturelle et végétative de l’Âme universelle][177], de laquelle elle a été détachée, et de cette manière, comme le croit Porphyre[178], elle subsiste sans subir de changement ; ou bien la Vie irrationnelle totale subsiste séparée du principe pensant et est conservée dans le monde, comme l’enseignent les prêtres anciens[179].

Il y a à peu près la même différence dans les opinions relatives aux substances intermédiaires entre l’âme et le corps. — Les uns introduisent immédiatement l’âme dans le corps organisé, comme le font la plupart des Platoniciens. — D’autres pensent qu’entre le corps solide et l’âme incorporelle et angélique il y a des vêtements étherés, célestes, spirituels[180], qui, enveloppant la vie intellectuelle, sont produits pour la contenir et lui servir de véhicules, et d’un autre côté l’attachent convenablement au corps solide par des liens intermédiaires communs.

De la Purification.

XVI[181]. Pour Plotin et la plupart des Platoniciens, la purification parfaite de l’âme consiste à s’affranchir des passions, à mépriser les connaissances acquises par les sens, et tout ce qui appartient au domaine de l’opinion, à se détacher des conceptions qui se rapportent à des objets matériels, à se remplir de l’Être et de l’Intelligence, et à rendre le sujet pensant semblable au sujet pensé[182]. Quelques-uns d’entre les Platoniciens disent encore souvent que la purification se rapporte à l’âme irrationnelle et à l’opinion, mais que l’essence rationnelle et l’âme intellectuelle sont toujours élevées au-dessus du monde, attachées aux intelligibles et n’ont jamais besoin de se perfectionner ni de s’affranchir de choses superflues.

Examinons par quels êtres est accompli chacun de ces trois actes, le jugement, le châtiment et la purification des âmes[183].

Si l’on en croit la plupart des Pythagoriciens et des Platoniciens, c’est par les âmes particulières elles-mêmes que ces actes sont accomplis ; mais, selon ceux de ces philosophes qui ont le mieux étudié la question, c’est par les âmes universelles et parfaites, par l’Âme universelle qui préside à l’ordre de l’univers[184], par l’Intelligence royale qui donne au monde entier toute sa beauté ; selon les anciens, c’est par les dieux visibles [les astres], principalement par le soleil, par les principes démiurgiques invisibles, par tous les genres d’êtres supérieurs, les héros, les démons, les anges et les dieux qui président eux-mêmes à la constitution de l’univers.

Quel est le but en vue duquel ces êtres réalisent ces actes ?

Le but du jugement est d’affranchir de tout mélange la pureté des hommes vertueux, de distinguer la perfection de ceux qui ont une beauté accomplie en les séparant autant que possible de toute imperfection, enfin d’exalter au plus haut degré l’excellence des âmes supérieures, excellence dont rien d’inférieur ne saurait approcher. Mais ceux qui ne partagent pas là-dessus l’opinion des anciens[185] ne regardent pas comme principaux effets du jugement ceux que nous venons d’énoncer ; ils font plutôt consister son utilité dans le bon ordre, la distinction du bien et du mal, et toutes choses de ce genre.

Le but du châtiment est de faire prévaloir le bien sur le mal, de réprimer le vice, de le détruire et de l’anéantir, de réaliser pour tous une égalité conforme au mérite[186]. Au lieu de suivre à cet égard la doctrine des anciens, certains philosophes croient que l’utilité de la peine consiste à établir l’égalité en infligeant un châtiment aussi grand ou plus grand que la faute ; d’autres, à soumettre le coupable à la loi du talion, d’autres encore à corriger le vice, etc. : car il y a sur ce point une grande diversité d’opinions parmi les Pythagoriciens et les Platoniciens.

Quant à la purification, elle a pour but de délivrer l’âme des choses étrangères, de lui rendre son essence propre, de lui donner la perfection, la plénitude, l’indépendance[187], de lui faciliter son retour (ἄνοδος (anodos)) au principe qui l’a engendrée[188], de conduire les substances particulières à s’unir aux substances universelles et à participer à leur puissance, à leur vie et à leur fonction[189]. Ceux qui n’admettent pas avec les anciens que ce soient là les effets véritablement importants de la purification lui assignent pour but de séparer l’âme du corps, de la délivrer de ses chaînes, de l’affranchir de la corruption, de la faire sortir de la génération, ou d’atteindre quelque autre résultat aussi borné, qu’ils regardent comme supérieur au reste. C’est ainsi que beaucoup de Pythagoriciens et de Platoniciens sont en désaccord sur ce point.

Fixons les limites de ces trois choses [du jugement, du châtiment et de la purification], et voyons où se termine chacune d’elles. Les âmes sont soumises au jugement tant qu’elles sont placées dans la génération, qu’elles ne sortent pas de l’univers et qu’elles sont en quelque sorte mêlées à la diversité[190] ; mais, dès qu’elles sont sorties [de la génération], affranchies, pures, complètement indépendantes, maîtresses d’elles-mêmes, remplies des dieux, elles cessent d’être soumises au jugement. Cependant, les Pythagoriciens et les Platoniciens ne suivent pas ici la doctrine des anciens et soumettent toutes les âmes au jugement. — Il en est de même pour le châtiment. Les anciens placent au nombre des dieux, même lorsqu’elles sont encore ici-bas, les âmes pures et unies avec les dieux par la conformité de la pensée, et, lorsque celles-ci sont sorties de leurs corps, ils les introduisent immédiatement parmi les dieux sans les soumettre à aucune peine. Quant aux Platoniciens, ils font passer toutes les âmes de la génération dans le monde intelligible quand elles ont subi leur peine. — La purification donne lieu aux mêmes controverses. Les anciens disent que les âmes unies aux dieux sont au-dessus de la purification ; les autres, tels que certains Platoniciens, qu’il y a pour l’âme des périodes universelles de purification ; mais il en est, tels que Plotin[191], qui croient que l’âme séparée du corps est au-dessus de la purification.

De la Récompense.

XVII[192]. Les anciens ne sont pas du tout d’accord sur la récompense que reçoivent les âmes lorsqu’elles sortent de leurs corps et qu’elles vont parmi les âmes angéliques. Plutarque, Porphyre, ainsi que les anciens, leur font garder leur rang propre ; mais Plotin les affranchit de toutes les choses terrestres[193]. Les anciens leur accordent avec raison d’être, par leur intelligence, dans une excellente disposition qui les rapproche des dieux, et de présider aux choses de ce monde ; mais Porphyre leur enlève ce privilége. Quelques-uns des anciens affirment qu’elles ne se servent pas du raisonnement, et que leurs actes sont si parfaits que le raisonnement le plus pur et le plus exact ne saurait nous en donner l’idée[194] ; mais Porphyre refuse absolument aux âmes une vie indépendante [de la génération], parce qu’il les croit attachées à la génération et données aux animaux composés d’une âme et d’un corps] pour leur porter assistance. Dans Platon, Timée ramène les âmes, au moment de leur ascension, dans les divers lieux dans lesquels elles ont été semées par le Démiurge ; il ne les élève pas au-dessus du rang qu’elles occupaient avant que le Démiurge eût formé le monde[195].

Numénius paraît penser que l’âme s’unit et s’identifie complètement avec ses principes[196] ; les anciens croient qu’elle s’y allie tout en restant une substance différente. Le premier semble résoudre l’âme dans ses principes, tandis que les seconds la rattachent à ces mêmes principes ; l’un suppose un rapprochement qui exclut toute distinction, et les autres un rapprochement qui admet une distinction. Cette distinction ne dépend pas du monde ni de la nature, comme l’ont cru quelques Platoniciens ; elle est indépendante de l’univers, comme nous le concevons pour les substances incorporelles[197].

Porphyre admet cette union de l’âme avec les dieux jusqu’aux âmes humaines, mais il pense que les âmes inférieures à celles-ci forment une autre espèce, qui est l’espèce irrationnelle. En outre, il assimile aux substances universelles[198] les âmes qui demeurent en elles-mêmes et conservent leur essence. Les Platoniciens enseignent que ces âmes prennent soin des êtres inanimés[199]. Selon les anciens, les âmes délivrées de la génération partagent avec les dieux le gouvernement de l’univers ; selon les Platoniciens, elles gardent leur rang[200]. De même, selon les premiers, elles partagent avec les anges les fonctions démiurgiques ; selon les seconds, elles font le tour du ciel.


    n’est autre chose que l’esprit ou véhicule éthéré des Néoplatoniciens. On retrouve cette doctrine dans une foule d’auteurs, entre autres dans La Fontaine, qui l’oppose à l’hypothèse de Descartes sur l’âme des bêtes :

    J’attribuerais à l’animal
    Non point une raison selon notre manière,
    Mais beaucoup plus aussi qu’un aveugle ressort ;
    Je subtiliserais un morceau de matière,
    Que l’on ne pourrait plus concevoir sans effort,
    Quintessence d’atome, extrait de la lumière.
    . . . . . . . . . . . . . . . Je rendrais mon ouvrage
    Capable de sentir, juger, rien davantage,
    Et juger imparfaitement,
    Sans qu’un singe jamais fît le moindre argument.
    À l’égard de nous autres hommes,
    Je ferais notre lot infiniment plus fort ;
    Nous aurions un double trésor :
    L’un, cette âme pareille en tous tant que nous sommes,
    Sages, fous, enfants, idiots,
    Hôtes de l’univers sous le nom d’animaux ;
    L’autre, encore une autre âme, entre nous et les anges
    Commune en un certain degré ;
    Et ce trésor a part créé
    Suivrait parmi les airs les célestes phalanges,
    Entrerait dans un point sans en être pressé,
    Ne finirait jamais quoique ayant commencé :
    Choses réelles, quoique étranges.caché(Fables, X. 1.)

    Faute de connaître la doctrine néoplatonicienne de l’esprit intermédiaire entre l’âme et le corps, le savant commentateur de La Fontaine, M. Walckenaër, a commis l’étrange erreur d’attribuer l’invention de cette hypothèse à La Fontaine : « Ce qui précède, dit-il, est un composé des idées d’Empédocle [il eût fallu dire d’Héraclite et de Platon, que La Fontaine mêle ensemble pour tâcher de s’expliquer à lui-même le système de Descartes, contre lequel son bon sens naturel lui suggérait des difficultés insolubles. »

  1. Les titres qui composent ce sommaire sont tirés de Stobée (Voy. les notes d’Heeren). Les termes dont ils sont formés se retrouvent tous dans le texte même de Jamblique.
  2. Stobée, Eclogœ physicœ, LII, 528, p. 858, éd. Heeren.
  3. Aristote dit dans son traité De l’Âme (I, 2 ; p. 108, 119 de la trad. de M. Barthélemy Saint-Hilaire) : « Le début de notre recherche, c’est de poser tout d’abord les principes qui paraissent le plus évidemment appartenir à la nature de l’âme… Ainsi tous les philosophes, on peut le dire, définissent l’âme par trois caractères : le mouvement, la sensation et l’immatérialité (τὸ ἀσώματον (asômaton)).
  4. M. Barthélemy Saint-Hilaire adresse la même critique à Aristote (De l’Âme, tr. fr., p. 120, note).
  5. Stobée, Eclogœ physicœ, LII, § 28. p. 860. Toutes les définitions qui ont été données de l’âme sont ramenées ici par Jamblique à quatre points de vue : Éléments, Qualité, Quantité ou Essence mathématique (Figure, Nombre, Harmonie), Nature incorporelle. Cette division semble empruntée à Aristote (Voy. Simplicius, Commentaire sur le Traité de l’Âme, folio 2, édition d’Alde).
  6. C’était l’opinion de Démocrite. Voy. Aristote, De l’Âme, I, 2 ; p. 108 et 115 de la tr. fr.
  7. Alexandre d’Aphrodisie dit que l’âme est la perfection du corps (τελειότης (teleiotês)) et la définit « la puissance, l’entéléchie, la forme du corps qui la possède. » Voy. M. Ravaisson, Essai sur la Métaphysique d’Aristote, t. II, p. 301.
  8. Il s’agit sans doute ici de Galien, dont Proclus parle en ces termes : « Selon Galien, les facultés de l’âme dépendent du tempérament du corps : si le corps est humide, mou et sans consistance, l’âme est faible et stupide ; s’il est au contraire bien constitué, elle est forte et intelligente. » (Commentaire sur le Timée, p. 346.) Selon Galien, il y a dans l’homme trois âmes, l’âme concupiscible, l’âme irascible, l’âme rationnelle, qui habitent l’une le foie, l’autre le cœur, l’autre l’encéphale. La matière de ces trois viscères est un mélange des quatre qualités élémentaires, le chaud, le froid, le sec, l’humide ; leur forme est la proportion, le tempérament des qualités élémentaires ; et, comme l’âme est la forme, suivant la théorie d’Aristote, il s’ensuit que les trois âmes ne sont pas autre chose que les tempéraments des trois viscères dans lesquels elles résident. Voy. Galien, Que les mœurs de l’âme suivent le tempérament du corps, chap. III et IV.
  9. « Parmi nos devanciers, dit Proclus (Commentaire sur le Timée, p. 187), les uns ont fait de l’âme une essence mathématique, parce qu’elle tient le milieu entre le sensible et l’intelligible : ils l’appellent un nombre, et la composent de la monade et de la dyade indéfinie, comme Aristander et Numénius : ou bien une grandeur géometrique, formée du point et de la ligne, comme Sévérus. » La définition que Sévérus donnait de l’âme se rattachait au Timée : elle avait pour but d’expliquer comment l’âme est, selon Platon, composée de l’essence indivisible et de l’essence divisible. Cependant Sévérus n’était pas complètement d’accord avec Platon sur la nature de l’âme : car, dans un fragment qu’Eusèbe nous a conservé (Prép. Évang., XIII, 17), il dit que l’âme n’est point formée de deux essences, l’une passible et l’autre impassible, ainsi que l’enseigne Platon, mais qu’elle est simple, impassible et incorporelle.
  10. M. Ravaisson, dans sa dissertation sur Speusippe (Speusippi de primis rerum principiis placita, p. 41-43), propose de lire ἀδιαστάτου (adiastatou) au lieu de διαστατοῦ (diastatou). Cette correction ne nous paraît pas pouvoir se concilier avec le sens général de notre passage, et nous pensons qu’il faut adopter ici l’interprétation proposée par M. H. Martin : « Speusippe niait les nombres intelligibles, c’est-à-dire les idées, et ne reconnaissait que les nombres mathématiques. Dans sa définition, le mot idée ne doit donc pas être pris à la rigueur. Speusippe a sans doute voulu dire que l’âme est une grandeur mathématique incorporelle, non perceptible par les sens. (Études sur le Timée, t. I, p. 375.)
  11. C’est la doctrine exposée par Jamblique dans un fragment que nous a conservé Simplicius (Comm. sur les Catégories, f. 34). C’est aussi la doctrine de Plotin, qui dit que l’espace a été créé par la procession de l’âme (Enn. III, liv. VI, § 17).
  12. Voy. Aristote, Métaphysique, I, 5. Voy. également ci-dessus, p. 125. note 2.
  13. Voy. Aristote, De l’Âme, I, 2, 4. Selon Simplicius (Comm. sur le Traité de l’Âme, fol. 6), dans cette définition de Xénocrate, l’âme est un nombre signifie que l’âme est une forme ; et qui se meut lui-même veut dire qui est divisible, parce que l’âme tient le milieu entre l’essence intelligible, qui est complètement indivisible, et l’essence sensible, qui est complètement divisible. Cette explication est empruntée à la doctrine de Plotin (Enn. IV, liv. II). Voy. aussi Proclus, Comm. sur le Timée, p. 190.
  14. Ce sont l’un, raison de l’unité, de l’identité et de l’égalité, et la dyade, raison de la divisibilité, de la diversité et de l’inégalité. Voy. Porphyre, Vie de Pythagore, § 48-51, éd. Westermann.
  15. Dans sa Vie de Pythagore (§ 81, 88), Jamblique dit qu’Hippasus avait étudié la doctrine des Pythagoriciens, mais qu’il appartenait à la classe des auditeurs : (ἀϰουσματιϰοὶ (akousmatikoi)), et non à celle des disciples (μαθηματιϰοὶ (mathêmatikoi)). Diogène Laërce (VII, 6) est un peu plus explicite sur ce philosophe : « Hippasus de Métaponte, pythagoricien, disait que le temps du changement du monde est déterminé, que l’univers est limité et se meut toujours. » Quant à l’expression de ϰριτιϰὸν ὄργανον (kritikon organon), elle s’applique à l’Âme du monde, comme celle de τὸ ἡγεμονιϰόν (to hêgemonikon) dans cette pensée de Philolaüs : τὸ δὲ ἡγεμονιϰόν έν τῷ μεσαιτάτῳ πυρὶ ὸπερ τρόπιος δίϰην προυπεϐάλλετο τῆς τοῦ παντὸς σφαίρας ὸ δημιουργὸς θέος (to de hêgemonikon en tô mesaitatô puri oper tropios dikên proupeballeto tês tou pantos sphairas ho dêmiourgos theos) (Stobée, Eclogœ phys., XXII, § 6, p. 452).
  16. Voy. Aristote, De l’Âme, I, 2 ; p. 113, trad. fr. Selon Simplicius (Comm. sur le Traité de l’Âme, f. 6), cette assertion de Platon signifie simplement que le monde intelligible contient les idées de toutes choses, parce que les anciens appelaient nombres les idées. Cette explication est empruntée à Plotin (Enn. VI, liv. VI).
  17. Voy. Plotin, Enn. VI, liv. VII, § 8 ; t. II, p. 460.
  18. Voy. Porphyre, Vie de Pythagore, § 49.
  19. Voy. Platon, Timée, p. 35. Voici en abrégé comment, au rapport de Proclus (Comm. sur le Timée, p. 206), Amélius et Porphyre expliquaient ce passage de Platon : « Selon Amélius, l’Âme contient tout ce qui est dans le monde : par la monade, elle embrasse tous les dieux qui habitent le monde ; par la dyade et la triade, les démons ; par la tétrade et l’ennéade, elle est la providence du genre humain ; enfin, par l’octade et l’icosieptade [les nombres 8 et 27], elle étend son action dans le monde entier et jusqu’aux êtres du dernier rang : car elle administre chaque espèce d’êtres par les puissances convenables… Selon Porphyre, l’Âme contient en elle-même des raisons harmoniques, en ce sens qu’elle est une multiplicité de puissances unies par l’harmonie ; en même temps, elle remplit d’harmonie l’univers, parce qu’elle y administre toutes choses par les raisons harmoniques qu’elle possède en elle-même. » Macrobe attribue sur ce point la même doctrine à Porphyre : « Hanc Platonicorum persuasion Porphyrius libris suis inseruit, quibus Timœi obscuritatibus nonnihil lucis infudit ; aitque eos credere, ad imaginem contextionis Animæ, esse in corpore mundi intervalla quæ epitritis, hemioliis, et epogdois hemitoniisque complentur et limmate ; et ita provenire concentum, cujus ratio, in substantiva Animæ contexta, mundano quoqua corpori, quod ab Anima movetur, inserta est. » (In Somnium Scipionis, II, 3.)
  20. Selon Plotin, il y a dans l’univers une harmonie unique, tout y est coordonné, tout y conspire à un but unique, parce que l’univers est administré par l’Âme dont la Raison contient les raisons génératrices de tous les êtres vivants (Enn. III, liv. II, § 16). Pour Amélius et Porphyre, Voy. la note précédente.
  21. Voy. le fragment de Philolaüs cité par Stobée, Eclogœ phys., XXII, § 7, p. 454.
  22. Jamblique veut dire que, selon cette doctrine, qui est celle de Plotin, les âmes particulières ont la même essence que l’Âme universelle, en ce sens qu’elles possèdent les mêmes facultés. Voy. pour Plotin, Enn. IV, liv. III, § 4 et 5 ; liv. IX, § 5 ; et pour Porphyre, Principes de la théorie des intelligibles, § XXXIX, tr. fr., t. I, p. LXXX.
  23. Voy. Plotin, Enn. III, liv. IV, § 3, fin.
  24. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. IX, § 5.
  25. Voy. les fragments de Numénius, t. I, p. CII.
  26. Plotin admet qu’il y a des différences importantes entre la condition de l’Âme universelle et celle de l’âme humaine. Voy. Enn. II, liv. IX, § 7 ; Enn. IV, liv. III, § 9-17.
  27. Pour Porphyre, Voy. les Principes de la théorie des intelligibles, § XXXIX, t. I, p. LXXX.
  28. Cette doctrine est celle de Jamblique lui-même, comme on le voit par la citation suivante que Proclus fait de ce philosophe : « Les considérations qui précèdent nous permettent de juger l’opinion de Plotin et de Théodore, selon lesquels il y a en nous quelque chose qui demeure impassible et qui pense toujours : car Platon [Timée, p. 437], n’admettant que deux révolutions dans l’essence de l’âme, a dit que l’une [la révolution de la nature du même] était complètement entravée, et que l’autre [la révolution de la nature de l’autre] était troublée : il est donc également impossible que l’une ou l’autre soit l’acte de la pensée pure. C’est avec raison que le divin Jamblique combat cette opinion dans les termes suivants : « Qu’est-ce qui pèche donc en nous quand, entraînés par le principe irrationnel, nous cédons aux séductions de l’imagination ? N’est-ce pas la volonté ? Comment ne serait-ce pas elle, puisque c’est par elle que nous pouvons résister aux illusions de l’imagination ? Or, quand la volonté a failli, comment l’âme elle-même resterait-elle infaillible ? Qu’est-ce qui fait le bonheur complet de la vie ? n’est-ce pas que la raison s’acquitte de la fonction qui lui est propre [contemple l’intelligence divine], qu’elle s’en acquitte parfaitement ? Quand notre partie suprême est parfaite, l’ensemble de notre être est heureux : qui nous empêche donc d’être tous dès aujourd’hui complètement heureux, si la plus haute partie de nous-mêmes pense toujours et est toujours unie aux dieux ? Car, si cette partie est l’intelligence, qu’importe à l’âme ? si cette partie est une partie de l’âme, l’âme entière doit être heureuse. » (Comm. sur le Timée, p. 341.) Pour les passages de Plotin auxquels Proclus et Jamblique font ici allusion, Voy. Enn. I, liv. I, § 9-12 ; et Enn. IV, liv. VIII, § 8. Pour la théorie que Jamblique professe lui-même sur l’intelligence, Voy. ci-après, § XXII. »
  29. Tout en critiquant la psychologie de Plotin, Jamblique lui emprunte le fond des définitions qu’il donne ici et qui s’appliquent à la fois à l’Âme universelle et aux âmes particulières.
  30. Au lieu de τῶν μεγιστῶν ϰαὶ ἀμεγίστων σωμάτων γενῶν (tôn megistôn kai amegistôn sômatôn genôn), nous lisons τῶν μεγιστῶν σωμάτων ϰαὶ ἀμεγίστων γενῶν (tôn megistôn sômatôn kai amegistôn genôn). Ce passage est commenté par Simplicius (Comm. sur le Traité de l’Âme, liv. III, 2e partie, préf.) : « L’âme n’est pas l’essence véritable : car tantôt elle pense et tantôt elle ne pense pas. Or, si l’essence suprême de l’âme ne demeure pas pure dans sa procession vers les choses qui occupent le second rang, il en résulte que sous ce rapport aussi elle a une nature intermédiaire, comme le dit Jamblique dans son Traité de l’âme : intermédiaire, dis-je, non-seulement entre les choses divisibles et les choses indivisibles, mais encore entre les choses engendrées et les choses non-engendrées, entre les choses corruptibles et les choses incorruptibles. » Ce passage de Jamblique est également commenté par Priscien (Comm. du Traité de Théophraste sur l’Imagination et l’Intelligence, p. 289 ; « L’âme particulière est donc à la fois muable et immuable, comme le dit Jamblique, en sorte que, sous ce rapport aussi, elle a une nature intermédiaire. En effet, les choses supérieures sont complètement immuables ; les choses périssables sont complètement muables ; mais l’âme particulière, occupant un rang intermédiaire, divisée et multipliée avec les choses qui sont contenues dans le monde, non seulement demeure ce qu’elle est, mais encore change en faisant subsister tant de vies particulières ; elle ne change pas seulement dans ses états, elle change en quelque sorte dans son essence. »
  31. Étant un dieu inférieur, l’âme descend ici-bas dans le but de développer sa puissance et d’orner ce qui est au-dessous d’elle, etc. » (Plotin, Enn. IV, liv. VIII, § 6.)
  32. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. VIII, § 6.
  33. Jamblique interprète ici l’opinion d’Aristote sur la nature de l’âme dans le sens de la doctrine néo-platonicienne. Cette interprétation est développée dans un passage où Simplicius s’appuie sur l’autorité même de Jamblique : « Selon Aristote, l’âme est incorporelle, indivisible, immobile par rapport aux mouvements corporels… C’est une raison et une forme ; elle est une dans tous les animaux, même dans ceux qui sont raisonnables : elle possède toutes les essences vitales et toutes les facultés, soit appétitives, comme le Désir rationnel, l’Appétit irascible et l’Appétit concupiscible, soit cognitives, comme l’Intelligence, la Raison, l’Opinion, l’Imagination, la Sensation, soit naturelles (ces facultés occupent le dernier rang). Dans le livre III, après avoir dit que notre âme, en sa qualité de raisonnable, tient le milieu entre les êtres les plus élevés et les êtres les plus bas, Aristote l’assimile tantôt à l’âme sensitive, tantôt à l’âme intellectuelle ; tantôt il l’abaisse à la Sensibilité, tantôt il l’élève à l’Intelligence, dont elle est alors l’image ; tantôt il la représente comme ramenée à l’indivisibilité, autant que cela est possible, et demeurant en elle-même, quand elle imite l’Intelligence qui lui est supérieure ; tantôt il la dépeint sortant d’elle-même en quelque sorte, par son inclination vers ce qui est hors d’elle, et, par cet acte de procession, arrivant être divisible, sans perdre cependant d’une manière complète les propriétés opposées : car, en se divisant, elle aspire en même temps à l’indivisibilité ; en s’avançant vers ce qui est hors d’elle, elle opère aussi une conversion vers elle-même ; en s’éloignant d’elle-même, elle ne cesse pas cependant de demeurer en elle, quoiqu’elle soit affaiblie quand elle incline vers ce qui est hors d’elle. Ainsi, notre âme change tout à la fois et demeure ce qu’elle est, parce qu’elle occupe un rang intermédiaire entre les êtres immuables et les êtres muables, qu’elle participe également aux propriétés des uns et des autres. En effet, elle est indivisible et elle se divise ; elle est non-engendrée et elle devient ; elle s’altère sous un certain rapport, et elle demeure inaltérable. C’est pourquoi nous n’admettrons pas, comme le fait Plotin [Enn. IV, liv. VIII, § 8], qu’une partie de notre âme demeure toujours immuable et pure ; nous n’admettrons pas non plus que notre âme descende complètement dans la génération ; mais nous démontrerons qu’elle descend tout entière, et qu’en même temps elle demeure distincte du corps, tout en s’abaissant aux choses qui tiennent le second rang. Au reste, l’ensemble de notre Commentaire éclaircira ces idées, qui sont la doctrine même d’Aristote et qui ont été parfaitement expliquées par Jamblique. » (Comm. sur le Traité de l’Âme, préface.)
  34. Sur cette phrase, Voy. ci-dessus, p. 613. Jamblique annonce ici son Commentaire du Traité d’Aristote sur l’Âme.
  35. Voy. Platon, Cratyle, t. XI, p. 48 de la trad. de M. Cousin.
  36. Voy. Aristote, De l’Âme, I, 5, p. 155 de la trad. fr.
  37. Voy. ci-après, 51, p. 646. Porphyre, dans son traité De l’Antre des Nymphes (§ 25, éd. Hercher), développe cette idée dans les termes suivants : « C’est avec raison que les anciens ont fixé des vents pour les âmes qui viennent dans la génération et pour celles qui en sortent, parce que les âmes attirent un certain esprit (πνεῦμα (pneuma)), comme quelques-uns l’ont pensé, et qu’elles ont une essence spirituelle. Borée est le vent propre aux âmes qui viennent dans la génération : car Borée rappelle à la vie les hommes qui sont sur le point de mourir, en soufflant sur eux quand ils respirent avec peine, etc. » Virgile dit, en parlant des cavales, quelque chose d’analogue :

    Ore omnes versæ in zephyrum stant rupibus altis,
    Exceptantque leves auras, et sæpe sine ullis
    Conjugiis vento gravidæ…
    GéorgiquesGéorgiques, III, 273.

  38. « Critolaüs peripateticus constare eam [animam dixit] de quinte essentia. » (Macrobe, In Somnium Scipionis, I, 14.)
  39. Cicéron fait sans doute allusion à cette opinion, quand il dit dans les Tusculanes (I, 10) : « Aristoteles, quum quatuor illa genera principiorum esset complexus, e quibus omnia orirentur, quintum genus adhibet, vacans nomine ; et sic ipsum animum ἐντελεχείαν (entelecheian) appellat novo nomine, quasi quamdam continuatam motionem et perennem. »
  40. Zeno [dixit animam] concretum corpori spiritum. » (Macrobe, In Somnium Scipionem, I, 14.)
  41. Voy. M. Ravaisson, Essai sur la Métaphysique d’Aristote, t. II, p. 34.
  42. Stobée, Eclogœ physicœ, LII, § 29, p. 872.
  43. Jamblique explique cette phrase à la fin du § 3, p. 635.
  44. Heeren propose de lire τελεσιουργοῦ (telesiourgou) au lieu de τελεσιουργὸν εἴδους (telesiourgon eidous). Ce changement ne semble pas nécessaire : les deux mots employés par Jamblique paraissent être l’équivalent d’ἐντελέχεια (entelecheia), qui signifie, comme on le sait, le complément, la réalité parfaite du corps. Voy. ci-après, p. 676.
  45. Aristote dit que l’âme n’a point de parties (De l’Âme, I, 5, p. 168 de la trad. fr.). Voy. aussi ce que Jamblique dit sur les Péripatéticiens à la fin du § III, p. 635.
  46. Dans ce passage et dans d’autres qui suivent, Jamblique attribue évidemment à Pythagore les idées des Néopythagoriciens, et à Platon celles des Néoplatoniciens.
  47. Les sages disent que l’âme a une double vie, l’une qui lui est commune avec le corps, l’autre qui est séparable de tout le corps : pendant la veille, nous usons surtout de la vie qui nous est commune avec le corps, sauf les moments où nous nous séparons tout à fait de lui par les conceptions pures de l’intelligence et de la raison discursive ; mais, pendant le sommeil, nous sommes complètement affranchis des entraves qui nous enchaînent, et nous usons de la vie qui est séparée de la génération. » (Des Mystères des Égyptiens, 3.)
  48. Il faut sous-entendre δυνάμεις (dunameis) et non ψυχαὶ (psuchai), comme Heeren le dit par erreur.
  49. Voy. à ce sujet l’opinion de Nicolas de Damas citée par Porphyre (Des Facultés de l’âme, t. I, p. XCII).
  50. Il y a dans le texte ϰατά μὲν τὲν οὑσίαν αἰ δυνάμεις, ϰατά δὲ εἴδη ὤν δύνανται ποιεῖν (kata men ten ousian ai dunameis, kata de eidê ôn dunantai poiein). Heeren propose de lire, pour rendre la phrase la plus claire : ϰατά μὲν τὲν οὑσίαν ἀμέρισται αἰ δυνάμεις, ϰαθ’ ἅ δύνανται ποιεῖν (kata men ten ousian ameristai ai dunameis, kath’ a dunantai poiein). Ce changement ne paraît pas nécessaire.
  51. Jamblique veut dire que Platon divise l’âme de deux manières, en parties et en facultés. Il ne fait ici que résumer les explications que Porphyre donne à ce sujet dans son traité Des Facultés de l’âme. Voy. t. I. p. XCI-XCIII.
  52. Stobée, Eclogœ phys., LII, § 30, p. 878.
  53. Des huit parties que les Stoïciens attribuent à l’âme sont les cinq Sens, la Parole, la Puissance générative, le Principe dirigeant. Voy. Porphyre, Des Facultés de l’âme, t. I, p. LXXXIX.
  54. Voy. Diogène Laërce VII, § 159.
  55. Voy. Stobée, Eclogœ phys., LII, § 23.
  56. Cette assertion est empruntée à Porphyre, Des Facultés de l’âme, t. I, p. XC.
  57. Aristote dit, dans son traité De l’Âme (II, 3, p. 181 de la trad. fr.) : « Nous appelons facultés : la Nutrition, les Appétits, la Sensibilité, la Locomotion, la Pensée. »
  58. Voy. Stobée. Eclogœ phys., LII, § 31, p. 880.
  59. Voy. Plotin, Enn. I, liv. I, § 2. Jamblique n’exprime pas complètement la pensée de Plotin, d’après lequel l’âme ne possède en acte que la Raison pure quand elle est séparée du corps (Enn. IV, liv. III, § 18 ; liv. IV, § 1-5, 23), mais possède toujours en puissance la Sensibilité, laquelle fait partie intégrante de son essence. Voy. les Éclaircissements du tome I, p. 364.
  60. Il y a dans le texte : ὁι δὲ περὶ Δημόϰριτον Πλατωνιϰοὶ (hoi de peri Dêmokriton Platônikoi). Heeren croit qu’il y a là une faute des copistes, parce qu’il confond Démocrite d’Abdère avec Démocrite le platonicien, qui est cité par Porphyre (Vie de Plotin, § 20) et par Proclus (Comm. sur le Timée, p. 149).
  61. Voy. ci-après, § IX, p. 644.
  62. Selon Plotin, l’homme, considéré comme animal, est une partie de l’univers, d’abord par son corps, puis par son âme, mais seulement par son âme irraisonnable, par laquelle il participe à la Puissance naturelle et végétative de l’Âme universelle (Enn. IV, liv. IV, § 32). Les facultés propres à chaque partie de l’univers sont celles que Jamblique désigne sous le nom de nature dans le § IX, p. 644.
  63. « Quand on coupe les rejetons ou les rameaux d’un arbre, où va l’âme végétative qui s’y trouvait ? Elle retourne à son principe… Si l’on coupe ou si l’on brûle la racine, où va la puissance végétative qui y était présente ? Elle retourne, sans changer de lieu, à la Puissance naturelle de l’Âme universelle. » (Plotin, Enn. V, liv. II, § 2.)
  64. Voy. ci-après, § XV, p. 656. Ce passage obscur est éclairci par un fragment de Jamblique sur la catégorie avoir (Comm. sur les Catégories ; dans Simplicius, Comm. sur les Catégories, fol. 95). « L’Âme, en descendant dans le corps, produit certaines facultés qui s’ajoutent à son essence comme acquises ; elle reçoit du corps d’autres facultés, qu’elle développe par son inclination et sa procession : comment donc pourrait-on dire qu’elle les a [par elle-même] ? D’ailleurs, elle reçoit certaines facultés dans chaque partie du monde où elle vient demeurer ; elle produit les unes elle-même, elle tient les autres du monde. Elle prend aussi dans chaque partie du monde un corps qui est en rapport avec cette partie [Voy. ci-après, p. 656, note 3] ; elle reçoit ce corps de l’univers, ou bien elle le produit elle-même par ses propres raisons (λόγοι (logoi)), si c’est un corps organisé. Elle se dépouille de ces facultés et de ces corps, quand elle passe dans une autre région. Il résulte évidemment de là que toutes ces choses n’étaient pour elle qu’acquises, qu’elle les avait comme des choses étrangères, parce qu’elles étaient d’une autre nature. Cette théorie de Jamblique est empruntée à Plotin : « La génération ajoute quelque chose à l’âme, etc. » (Enn. I, liv. I, § 12.) Voy. encore le passage de Simplicius cité ci-dessous.
  65. Stobée, Florilegium, tit. XXV, § 6, p. 378, éd. Gaisford.
  66. Simplicius, qui suit en Psychologie la doctrine de Jamblique (Voy. ci-dessus, p. 631, note 6), expose en ces termes la génération et le rôle des facultés irrationnelles : « Descendant, par suite de son inclination, dans ce lieu mortel, et devant y être unie à un corps mortel pour composer avec lui un animal mortel (ζῶον ἕν θνητόν (zôon hen thnêton)), l’âme a produit les facultés irrationnelles (ἀλόγους προύϐαλετο ζωάς (alogous proubaleto zôas)) : les unes cognitives, savoir, la Sensation et l’Imagination, les autres appétitives, savoir, la Colère et la Concupiscence ; afin que l’animal mortel pût à l’aide de ces facultés acquérir les connaissances conformes à sa nature, réparer par la nourriture les pertes qu’il fait sans cesse, perpétuer sa race par la génération de son semblable, et repousser ce qui viendrait à lui nuire ; toutes choses que l’animal mortel n’aurait pas été capable de faire, s’il n’eut été pourvu de ces facultés irrationnelles. » (Comm. sur le Manuel d’Épictète, § 27.) Ce passage de Simplicius éclaircit ce que Plotin dit de la nature animale : « Du corps organisé et d’une espèce de lumière qu’elle fournit elle-même, l’âme forme la nature animale, qui diffère à la fois de l’âme et du corps, et à laquelle appartient la Sensation ainsi que toutes les Passions que nous avons attribuées à l’animal. » (Enn. I, liv. I, § 7.)
  67. Jamblique dit dans le § IX que l’Appétit et la Sensibilité s’attachent au corps qui leur sert de matière. C’est la théorie de Plotin (Enn. I, liv. I, § 9). Pour la Sensation, Voy. ci-après, § XVIII-XX.
  68. Voy. Porphyre, Des Facultés de l’âme, t. I, p. LXXXVIII.
  69. Cette définition de la Mémoire est le résumé d’un fragment de Porphyre (t. I, p. LXVII, note 4). Pour l’Opinion et l’Imagination, Voy. ci-après, § XXI.
  70. Stobée, Eclogœ physicœ, LI, § 8, p. 790.
  71. La Raison a pour fonction la pensée discursive, et l’Intelligence la pensée intuitive (Porphyre, Des facultés de l’âme, t. I, p. LXXXVIII). Pour la Volonté et la Raison, Voy. ci-dessus, p. 630, note 6 ; pour l’Intelligence, Voy. ci-après, p. 666-668.
  72. Voy. Plotin, Enn. I, liv. I, § 11 ; et Proclus, Comm. sur le Timée, p. 346.
  73. Jamblique explique ici l’expression θύραθεν νοῦς (thurathen nous), qui est empruntée au traité d’Aristote De la Génération des animaux (II, 36), et dont le sens a été controversé (Voy. M. Ravaisson, Essai sur la Métaphysique, t. II, p. 17 ; M. Chauvet, Des théories de l’Entend. hum., p. 368). Némésius (De la Nature de l’Homme, chap. I) s’exprime sur ce point à peu près dans les mêmes termes que Jamblique : « Aristote pense que l’intellect en puissance se forme avec l’homme, mais que l’intellect en acte nous vient plus tard du dehors » (θύραθεν ἡμῖν ἐπεισίεναι (thurathen hêmin epeisienai)) ; il ne concourt pas à l’essence et à l’existence de l’homme, mais il l’aide à connaître et à contempler la nature. » Voy. encore ci-après, p. 668, 675.
  74. Stobée, Eclogœ physicœ, LII, § 32, p. 882.
  75. « Ce n’est pas du tout ainsi [en se mouvant elle-même] que l’âme paraît mouvoir l’animal ; c’est par une sorte de volonté et de pensée… Sans être mû lui-même, le premier moteur meut parce qu’il est conçu par l’intelligence ou qu’il est imaginé. » (Aristote, De l’Âme, I, 3, et II, 10 ; p. 121 et 335 de la trad. fr.) Aristote donne ici au mot : ϰίνησις (kinêsis) le sens de mouvement corporel : c’est ce qui explique les critiques qu’il adresse à Platon (Simplicius, Comm. sur le Traité de l’Âme, f. 6). Voilà ce qui fait dire à Plotin : « Pour se considérer elle-même, l’âme n’aura nullement à se mouvoir ; ou bien, si on lui attribue le mouvement, il faut que ce soit un mouvement qui diffère tout à fait de celui des corps, et qui soit sa vie propre. » (Enn. I, liv. I, § 13.) Voy. encore Enn. III, liv. I, § 3.
  76. On voit que le mot ἐνέργεια (energeia) a ici le double sens de puissance active et de fonction ou opération.
  77. Voy. Plotin, Enn. I, liv. I, § 9.
  78. Cette idée est développée dans Michel Psellus (De Omnifaria doctrina, § 41) : « Parmi les opérations, les meilleures et les plus éminentes ont leur origine dans l’âme. D’autres sont excitées par le corps : quand un besoin se fait sentir, l’âme cherche ce qui peut le satisfaire. D’un côté, il y a des affections du corps qui ont leur origine dans l’âme : le visage rougit, par exemple, parce que l’âme a jugé qu’une chose est honteuse. D’un autre côté, il y a des affections de l’âme qui ont leur origine dans le corps : l’âme éprouve des plaisirs et des peines, par exemple, à cause de la génération du corps. Il y a enfin des affections qui sont communes à l’âme et au corps, telles que la locomotion : car changer de lieu est le propre du corps ; participer à la locomotion est une opération de l’âme.
  79. Pour la comparaison de l’âme avec le pilote d’un navire, Voy. Platon, Critias, et Aristote, De l’âme, II, 1.
  80. Voy. Platon, Phèdre.
  81. Voy. Platon, 1er Alcibiade.
  82. L’enthousiasme est l’acte par lequel l’âme s’unit aux dieux et particulièrement à l’Un. C’est l’extase, telle que Porphyre la décrit. ci-dessus (p. 626, § V). On y arrive par l’unification progressive de toutes les puissances de l’âme, comme Jamblique l’explique lui-même dans ce fragment : « Jamblique nous recommande souvent de concentrer dans l’unité la multiplicité de nos pensées, de ramener au centre ce qui rayonne vers la circonférence, et de nous approcher dans cet état d’unité et d’intelligibilité, de ce qui est un et intelligible, pour le saisir par une seule pensée, grande, indivisible, intelligible. » (Damascius, Des Principes, p. 331, éd. Kopp.) Proclus a développé cette théorie dans le passage suivant : « Après avoir atteint la Science, laissons là les analyses, les synthèses et les opérations diverses de la pensée discursive, et appliquons notre âme aux intuitions simples de la faculté intellectuelle. La Science en effet n’est pas le plus haut degré de la connaissance ; au-dessus d’elle il y a encore l’Intelligence : je ne parle pas ici de l’Intelligence séparée de l’âme [c’est-à-dire de l’Intelligence suprême], mais de l’illumination que l’âme en reçoit, intelligence dont Aristote dit : c’est par l’intelligence que nous connaissons les principes [Dern. Analyt., I, 3] ; et Platon : c’est dans l’âme qu’est produite l’intelligence [Timée, p. 30]. Nous étant élevés à cette intelligence, nous contemplerons avec elle l’essence intelligible, saisissant par des intuitions simples et indivisibles les genres des êtres qui sont simples, indivisibles et immuables. Enfin, dépassant cette intelligence si précieuse, nous éveillerons la sommité de notre âme qui fait de chacun de nous une unité et ramène à l’unité la multiplicité qui se trouve en nous. De même que nous participons de l’intelligence par notre intelligence, de même nous participons du Premier, qui rend chaque chose une, par l’unité et la fleur de notre essence. Car le semblable est partout connu par le semblable, les choses rationnelles par la raison, les intelligibles par l’intelligence, les formes unes des êtres par l’unité de notre âme : c’est là le plus élevé de nos actes ; par lui, nous devenons divins (ἔνθεοι (entheoi)), quand, fuyant toute multiplicité, nous appliquant à l’unification de nous-mêmes (ἔνοισις ἡμῶν (enoisis hêmôn)), nous devenons unité et nous recevons la forme de l’Un. » (Comm. sur l’Alcibiade, t. II, p. 106.)
  83. Voy. ci-dessus, § II, p. 633, note 4.
  84. Stobée, Eclogœ physicœ, LII, § 33, p. 886. Dans le § VIII, Jamblique a traité des opérations de l’âme humaine. Dans le § IX, il compare les actes de l’âme humaine à ceux des autres âmes.
  85. Par âmes universelles, ψυχαὶ ὅλαι (psuchai holai), Jamblique entend les âmes qui sont unies à l’Âme universelle et gouvernent avec elle l’univers ; et par âmes particulières, ψυχαὶ μερισται (psuchai meristai), les âmes qui se sont séparées de l’Âme universelle pour descendre ici-bas, et qui, dans cette nouvelle condition, ne gouvernent plus qu’une partie, c’est-à-dire le corps auquel elles sont unies. Voy. Proclus, Éléments de Théologie, § CLXXXV, CCIII, CCIV, CCVI.
  86. « Ratio rationi par est, sicut rectum recto : ergo et virtus, quæ non aliud est quam recto ratio… Omnes virtutes rectæ sunt : si rectæ sunt et pares sunt. Qualis ratio est, tales et actiones sunt ; ergo omnes pures sunt. (Sénèque, Lettres, 65.)
  87. Pour Plotin, Voy. ci-dessus, p. 630, note 4.
  88. Cette épithète s’explique par les lignes suivantes de Proclus : « La véritable essence et l’existence réelle se trouvent chez les dieux ; la puissance par laquelle les dieux opèrent réside dans les démons ; enfin l’acte et l’effet produits au dehors par la puissance des démons sont réalisés en nous. (Comm. sur l’Alcibiade, t. II, p. 219, éd. de M. Cousin.)
  89. Voy. Des Mystères des Égyptiens, ch. 5, 6, 7.
  90. Voy. Enn. IV, liv. IX, § 3.
  91. C’est l’hypothèse réfutée par Plotin, Enn. IV, liv. III, § 1-8.
  92. Voy. ci-après, § x, p. 616, note 3.
  93. « Par là, Platon [dans le Timée, p. 41] établit que les âmes diffèrent entre elles par leur essence, et non pas seulement par leurs actes, comme l’affirme le divin Plotin. » (Proclus, Comm. sur le Timée, p. 314.) Pour Plotin, Voy. Enn. IV, liv. III, § 6 et 8.
  94. Ces trois degrés sont, pour Jamblique, les âmes divines, les âmes démoniques, les âmes humaines. Voy. Proclus, Comm. sur le Timée, p. 314-319.
  95. Voy. ci-dessus, p. 631, note 5.
  96. L’esprit (πνεῦμα (pneuma)) est le corps étheré qui enveloppe l’âme raisonnable, selon les Néoplatoniciens (Voy. Porphyre, Principes de la théorie des intelligibles, xxiii, t. I, p. lxv). Lorsqu’il est pur, c’est-à-dire dégagé de la matière grossière, il rend plus facile le commerce avec les héros, les démons et les anges, qui, selon Porphyre, Jamblique, etc., peuplent les régions de l’air. Voy. S. Augustin, Cité de Dieu, X, 9.
  97. Voy. Porphyre, Principes de la théorie des intelligibles, xxx, t. I, p. lxix. Voy. encore ci-après, p. 656, note 8.
  98. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. IX, § 3 ; et Porphyre, Principes de la théorie des intelligibles, § xxxix, t. I, p. lxxx.
  99. Jamblique a déjà employé la même expression au début du § iii en parlant de Platon.
  100. Numénius admettait qu’il y a en nous deux âmes, l’une rationnelle, l’autre irrationnelle (Porphyre, Des Facultés de l’âme, t. I, p. xc). De même, il supposait qu’il y a dans le monde deux âmes, l’une bonne, l’autre mauvaise (Chalcidius, in Timœum, p. 396).
  101. Selon Atticus et Plutarque, nous avons deux âmes, l’une irraisonnable et mauvaise, incorporée à la matière, et l’autre raisonnable et bonne, qui vient s’ajouter à l’autre et la soumettre à son empire, comme Jamblique explique ci-après (p. 651). Il en est de même dans le monde. La matière existait avant sa formation, et il y avait au milieu d’elle une âme irraisonnable et mauvaise qui l’agitait d’un mouvement désordonné. Dieu lui unit une âme raisonnable et fit ainsi sortir l’ordre du chaos. Voy. Plutarque, De la Formation de l’âme, 4 ; Proclus, Commentaire sur le Timée, p. 84, 99, 116, 119, 173, 184.
  102. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. VIII, § 5.
  103. Voy. Plotin, Enn. V, liv. I, § 1. Outre l’expression de première diversité, ce philosophe emploie celle d’audace (τόλμα (tolma)), terme dont se servaient les Pythagoriciens pour désigner la dualité, comme osant la première se séparer de l’unité.
  104. Voy. Empédocle, éd. Sturz, vers 452. Proclus emploie dans le même sens l’expression éloignement de l’unité, ἀπόστασις ἀπὸ τοῦ ἑνός ; (Comm. sur l’Alcibiade, t. II, p. 102, éd. Cousin).
  105. Selon Héraclite, l’âme, qui a une nature ignée, est dans un mouvement perpétuel. Quand elle est fatiguée de faire le tour du ciel avec les astres, elle descend sur la terre où son mouvement se ralentit ; elle trouve donc alors le repos dans le changement, ou, comme dit Plotin (Enn. IV, liv. VIII, § 5), le repos dans la fuite. Voy. ci-après, p. 649, note 5.
  106. Voy. Plotin, Enn. II, liv. IX, § 10, et les Éclaircissements du tome I, p. 508.
  107. Albinus admettait qu’il y a en nous deux âmes, l’une rationnelle et immortelle, l’autre irrationnelle et périssable (Proclus, Comm. sur le Timée, p. 113). On possède encore de ce philosophe une Introduction aux dialogues de Platon.
  108. Pour Numénius, Voy. ci-dessus, p. 644, note 8. Cronius était l’ami de Numénius, d’après le témoignage de Porphyre (De l’Antre des Nymphes, § 21).
  109. Harpocration était disciple d’Atticus.
  110. Voy. Enn. I, liv. VIII, § 8.
  111. Voy. Porphyre, (De l’Antre des Nymphes, § 21).
  112. Voy. Aristote, De l’Âme, liv. III, 12 ; et Porphyre, De l’Abstinence des viandes, III, 7.
  113. Selon les Stoïciens, « Dieu pénètre toutes les parties du monde (comme notre âme pénètre toutes les parties de notre corps), mais à des degrés divers : car il pénètre certaines parties, les os et les nerfs, par exemple, en qualité d’habitude ; d’autres, le principe dirigeant, par exemple, en qualité d’intelligence (Diogène Laërce, VII, § 139)… L’esprit pénètre le monde entier et reçoit différents noms selon les différence ; de la matière qu’il a pénétrée (Stobée, Eclogœ physicœ, III, § 29, p. 66). »
  114. Voy. ci-dessus, p. 534.
  115. « En général, la prédominance excessive des passions ne permet pas aux hommes de rester hommes et les entraîne vers la nature irraisonnable, bestiale et désordonnée. » (Jamblique, dans Stobée, Florilegium, tit. v, § 62. Voy. encore l’Exhortation à la philosophie, du même auteur. chap. vi, p. 96, éd. Kiessling.) On lit aussi dans Nemésius (De la Nature de l’homme, chap. ii, p. 58, trad. de M. Thibault) : « Jamblique dit qu’il y a autant d’espèces d’âmes que d’espèces d’animaux, ou, en d’autres termes, qu’il y a différentes espèces d’âmes ; et il a écrit un livre pour montrer que les âmes ne passent pas des hommes dans les animaux irraisonnables, ni de ceux-ci dans les hommes, mais qu’elles passent des animaux dans les animaux, et des hommes dans les hommes. Et il me semble qu’ici, non-seulement il se rapproche davantage de l’opinion de Platon, mais encore qu’il est plus près de la vérité.
  116. Stobée, Eclogœ physicœ, lii, § 34, p. 898.
  117. Jamblique a déjà dit plus haut (§ ix, p. 642) : à Amélius avance avec assez de légèreté dans plusieurs de ses écrits que l’Âme est une et identique numériquement. » Par degrés, Amélius entendait les diverses espèces d’âmes qu’il reconnaissait (Voy. ci-dessus. p. 629, note 2), et par modes, les diverses puissances que l’Âme communique à tous les êtres dans la mesure où ils peuvent les recevoir (idée conforme à l’hypothèse que Plotin expose et réfute dans l’Enn. VI, liv. III, § 3). Ce philosophe avait sans doute puisé cette théorie dans Numénius, dont il avait commenté la doctrine, et qui, ainsi que Jamblique l’affirme plus loin (§ xvii, p. 660-661), enseignait qu’après la mort toutes les âmes venaient se confondre dans une Âme unique. On trouve dans un fragment de Numénius une phrase qui paraît renfermer la théorie à laquelle Jamblique fait allusion : « Nous participons à l’Intelligence quand elle descend et se communique à tous les êtres qui peuvent la recevoir. Pendant que le Démiurge nous regarde et se tourne vers chacun de nous, il arrive que la vie et la force se répandent dans nos corps échauffés de ses rayons ; mais s’il se retire dans la contemplation de lui-même, tout s’éteint… Le premier Dieu [l’Intelligence], étant la semence de toute âme, répand ses germes dans toutes les choses qui participent à lui. L’autre Dieu [le Démiurge], en législateur, cultive, distribue et transporte dans chacun de nous les semences qui proviennent du premier Dieu. » (Eusèbe, Prép. évang., XI, 18.)
  118. Voy. ci-dessus, § ii, p. 682.
  119. Voy. ci-dessus. p. 626.
  120. Ceci s’applique aux Péripatéticiens.
  121. Telle était la doctrine des nouveaux Pythagoriciens qui considéraient la naissance et la mort des êtres comme de simples transformations. (Voy. M. Ravaisson, Essai sur la Métaphysique, t. II, p. 325-328.) Cronius avait écrit sur ce sujet un livre intitulé De la Palingénésie (Némésius, De la Nature de l’homme, chap. ii).
  122. Il s’agit ici des Stoïciens, qui confondaient l’Âme du monde avec la Nature (Diogène Laërce, VII, § 148), et croyaient que chaque semence contient une parcelle de l’âme des parents (Eusèbe, Prép. évang., XV, 20).
  123. Voy. Aristote, De l’Âme, I. 5, p. 159 de la trad. fr.
  124. « La période totale contient toutes les raisons [séminales des êtres]. Quand elle est finie, les mêmes êtres sont reproduits par les mêmes raisons… S’il existe une mesure (μεμέτρεται (memetretai)) qui règle combien il doit y avoir d’êtres, leur quantité (τὸ ποσὸν (to poson)) sera déterminée par révolution et le développement de toutes les raisons, en sorte que, quand tout sera fini, une autre période recommencera. » (Plotin, Enn. V, liv. VII, § 1, 3.)
  125. Stobée, Eclogœ physicœ, ii, § 35, p. 902.
  126. Pour Plotin, Voy. Enn. IV, liv. III, § 9-17.
  127. Cette expression équivaut à celle de naissance première qui se trouve dans Platon : « Il dit que la naissance première (γένεσις πρώτη (genesis prôtê)) serait uniformément la même pour tous les animaux, afin qu’aucun n’eût à se plaindre de lui ; que, semées chacune dans celui des astres, instruments du temps, qui lui était attribué, les âmes devaient produire celui des animaux qui est le plus capable d’honorer la divinité. » (Timée, p. 41 ; p. 113 de la trad. de M. H. Martin.)
  128. Ce passage de Jamblique est cité par Michel Psellus (De Omnifaria doctrina, § 34) : « Le philosophe Jamblique, qui entre à ce sujet dans des distinctions trop minutieuses, étend l’âme raisonnable depuis Dieu jusqu’à la terre, et lui attribue dans chaque partie de l’univers des facultés différentes, dont il place les unes dans le ciel, d’autres dans les éléments, d’autres encore dans le corps solide. »
  129. Les idées que Jamblique expose ici paraissent tirées du Commentaire qu’il avait composé sur le Timée de Platon. Voy. Proclus, Comm. sur le Timée, p. 324.
  130. Sur cette division, Voy. Des Mystères des Égyptiens, chap. 5, 6, 7.
  131. Selon Proclus (Comm. sur le Timée, p. 186), Ératosthène disait que l’âme est un composé de substance immatérielle et de matière. Par matière il entendait sans doute le corps subtil dont parle Jamblique. Quant à Ptolémée, il est l’auteur d’un Commentaire sur le Timée qui est cité par Proclus.
  132. Héraclide de Pont est un disciple de Platon cité par Proclus (ibid., p. 28, 281). L’opinion que Jamblique attribue ici à Héraclide a été développée par Porphyre : « Selon Pythagore, la foule des songes n’est autre chose que les âmes qui sont rassemblées dans la voie lactée ; celle-ci est ainsi appelée parce que les âmes se nourrissent de lait quand elles tombent dans la génération, etc. » (De l’Antre des nymphes, § 28.) Macrobe a reproduit à peu près littéralement ce passage dans son Commentaire sur le songe de Scipion, I, 12.
  133. Porphyre dit dans le même ouvrage (§ 18) que les prêtres de Cérès croyaient que la Lune préside à la génération.
  134. La citation que Jamblique fait d’Héraclite est tirée de Plotin (Enn. IV, liv. VIII, § 1). Dans le système d’Héraclite, les contraires sont le feu et l’humidité, et les alternatives produites nécessairement par les contraires sont la descente et l’ascension : dans la descente, le feu, en se condensant, se change en eau ; dans l’ascension, l’eau, en se raréfiant, se change en feu ; la descente a pour résultat la génération du monde, et l’ascension, un embrasement général. L’âme a une nature ignée et se forme par évaporation ; son essence est d’être dans un mouvement continuel. Mais, lorsqu’elle est humide, elle descend dans la génération : c’est pour elle un repos parce que son activité se ralentit ; lorsqu’elle est sèche, au contraire, elle recouvre toute sa mobilité ; elle remonte au ciel et elle se fatigue à en faire le tour : de là ces vers d’Héraclite : « C’est pour les âmes un plaisir, et non une mort, de devenir humides : car c’est un plaisir pour elles de tomber dans la génération… Notre vie est la mort des âmes, et la vie des âmes est notre mort…. L’âme sèche est très-sage. (Aristote, De l’Âme, I, 2 ; Diogène Laërce, IX, § 8 : Porphyre, De l’Antre des nymphes, § 10 ; Énée de Gaza, ci-après p. 673, 675.)
  135. Taurus, surnommé Calvisius, était un philosophe platonicien qui avait écrit des Commentaires sur les dialogues de Platon.
  136. Voy. Platon, Timée, p. 39 ; Plotin, Enn. III, liv. IX, § 1, et Enn. IV, liv. III, § 10.
  137. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. III, § 12-15.
  138. Stobée, Eclogœ physicœ, lii, § 36, p. 908.
  139. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. III, § 9-17.
  140. Voy. Plotin, Enn. II, liv. II, § 3 ; liv. iii, § 9.
  141. Voy. Plotin, Enn. II, liv. III, § 13, 15-17.
  142. Voy. ci-dessus, p. 644, note 4.
  143. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. IV, § 45.
  144. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. III, § 12 et 15.
  145. Stobée. Eclogœ physicœ, lii, § 37, p. 912.
  146. Voy. Plutarque, de Placitis philosophorum, V, 21.
  147. Ce passage est reproduit par Michel Psellus, De Omnifaria doctrina, § 42.
  148. « Illud etiam ambiguam inter auctores fecit opinion utrumne ex patris tantummodo semine partus nasceretur, ut Diogenes et Hippon Stoicique scripserunt ; au et id ex matris, quod et Anaxagoræ et Alcmæoni necnon Parmenidi Empedoclique et Epicuro visum est. » (Censorinus, De Die natali, 11.)
  149. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. III, § 13.
  150. Selon Plotin, l’âme descend dans le corps lorsque son organisation est déjà ébauchée. Voy. les Éclaircissements du tome 1, p. 476.
  151. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. VII, § 8, fin.
  152. Nous lisons ἀπολύεσθαι (apoluesthai) au lieu d’ἀπόλλυσθαι (apollusthai) ; Jamblique a dit plus haut que les facultés sont séparables, ἀπόλυτοι (apolutoi), et la même idée se trouve exprimée dans le passage de Plotin auquel il est fait ici allusion : « L’âme est-elle dans le corps comme le pilote est dans le navire ? Cette comparaison est bonne pour exprimer que l’âme a la faculté de se séparer du corps. » (Enn. IV, liv. III, § 21.) Cette comparaison, ainsi que celle du cocher, avait été employée précédemment par Platon. Voy. ci-dessus, p. 640, note 4.
  153. C’est par l’inclination de l’âme pour le corps que Porphyre explique leur rapport (Principes de la théorie des intelligibles, § XVII, XVIII, t. I, p. LXIII).
  154. Stobée, Eclogæ physicæ, LII, § 38, p. 916.
  155. La sagesse, qui commande aux autres vertus, naît de l’intelligence pure et parfaite ; ayant pour origine l’intelligence, elle la contemple, reçoit d’elle sa perfection, trouve en elle la mesure et le modèle excellent de tous les actes qu’elle produit en elle-même. S’il existe quelque commerce entre nous et les dieux, c’est principalement par cette vertu qu’il s’opère. C’est par elle surtout que nous leur devenons semblables. » (Jamblique, dans Stobée, Florilegium, tit. III, § 55.)
  156. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. VIII, § 3. C’est une idée empruntée aux Stoïciens. Voy. Eusèbe, Prép. évang., XV, 16.
  157. Plotin examine cette comparaison dans l’Enn. IV, liv. III, § 20.
  158. Ibid., § 21.
  159. Dans de courts fragments cités par Stobée (Florilegium, tit. XXI, § 58, 60 ; tit. CIII, § 23, éd. Gaisford), Jamblique développe ainsi son opinion sur la vertu et le souverain bien : « Vivant par l’âme, c’est par sa vertu que nous vivons bien, de même que, voyant par les yeux, c’est par leur vertu que nous pouvons bien voir… La vertu de l’âme est la perfection et la sagesse de la vie, l’exercice le plus complet et le plus pur de la raison, de l’intelligence et de la pensée. Les actes de la vertu sont bons, beaux, intellectuels, honnêtes, pleins de mesure et de convenance ; ils tiennent le premier rang, ont un but excellent et procurent les plus douces jouissances… L’homme heureux est celui qui ressemble à Dieu le plus possible, qui est parfait, simple, pur et détaché de la vie humaine. »
  160. τῇ ϰοινωνία ϰαὶ τῷ ϰάλῳ τῷ τῆς φύσεως ἐξηρτημένῳ (tê koinônia kai tô kalô tô tês phuseôs exêrtêmenô). Le sens de ϰοινωνία (koinôia) est expliqué par le passage suivant de Cicéron : « Simul autem [homo] vidit rerum agendarum ordinem et, ut ita dicam, concordiam ;… ratione collegit ut statueret in eo collocatum summum illud hominis per se laudandum et expetendum bonum, quod positum sit in eo quod}} ὁμολογίαν (homologian) Stoïci, nos appellamus convenientiam (De Finibus, III, 6). » Quant à l’identité du beau et du bien, Voy. Diogène Laërce (VII, § 101) : ϰαλὸν τὸ τέλειον ἀγαθόν (kalon to teleion agathon).
  161. Voy. Aristote, Éthique à Nicomaque, II, 5, 6, et X, 7.
  162. Voy. Diogène Laërce, VII, § 165.
  163. Ibid., VII, § 160.
  164. Démocrite donnait différents noms à ce qu’il regardait comme le souverain bien, εὐθυμία, εὐεστώ (euthumia, euestô), etc. (Ibid. IX, § 45).
  165. Voy. Cicéron, De Finibus, V, 5.
  166. Stobée, Eclogœ physicœ, lii, § 39, p. 920.
  167. Voy. Sénèque, De la Providence, 6.
  168. ἐϰλυόμενου τοῦ τόνου (ekluomenou tou tonou). Le sommeil (disait Zénon) est le relâchement de l’esprit sensitif. Le relâchement de l’esprit sensitif porté jusqu’à la dissolution (ἄνεσις ϰαὶ ἔϰλυσις τοῦ αἰσθητιϰοῦ πνεύματος), c’est la mort. (Plutarque, De Placitis phil., V, 23.) Voy. aussi M. Ravaisson, Sur le Stoïcisme (Mém. de l’Acad. des inscript. et Belles-Lettres, t. XXI, p. 31).
  169. Voy. ci-dessus, p. 658, note 4.
  170. Voy. ci-dessus, p. 625, note 4.
  171. Ces expressions appartiennent à la doctrine d’Épicure. Voy. Diogène Laërce, X, § 63, 65 ; et Lucrèce, III, 418, 553.
  172. C’était la comparaison employée par Démocrite. Voy. Aristote, De Gener., I, 3 ; et Lucrèce, III, 418, 553.
  173. Voy. ci-dessus le commencement du § V, p. 636.
  174. Voy. Plotin, Enn. I, liv. I, § 7, 12.
  175. Selon Plotin, l’âme ne descend pas tout entière dans le corps ; son intelligence demeure impassible, infaillible et impeccable (Voy. ci-dessus, p. 630, note 6) ; c’est à l’âme irraisonnable que sont imputables nos erreurs et nos fautes ; c’est aussi elle qui est punie après la mort, en étant envoyée dans la génération, c’est-à-dire en passant dans un nouveau corps (Voy. Plotin, Enn. I, liv. I, § 12).
  176. Quand l’âme raisonnable s’est, pendant cette vie, séparée du corps par les vertus purificatives, elle remonte dans le monde intelligible après la mort (Enn. IV, liv. III, § 24), et elle y ramène avec elle l’âme irraisonnable, son image et son acte, qui n’existe plus alors que d’une manière idéale, à l’état virtuel (Enn. III, liv. IV, § 6 ; Enn. IV, liv. IV, § 29, et liv. V, § 7).
  177. Voy. ci-dessus, § V, p. 636.
  178. Selon Proclus (Comm. sur le Timée, p. 811). Porphyre croyait que le véhicule éthéré, avec lequel il identifiait la puissance irrationnelle de l’âme, était, lorsque l’âme retournait au monde intelligible, réuni aux astres auxquels il avait été emprunté (Voy. les Principes de la théorie des intelligibles, § XXIII, t. I, p. LXV). Jamblique pensait au contraire que la puissance irrationnelle et le véhicule éthéré, non-seulement survivaient à la mort, mais encore conservaient leur individualité.
  179. Il s’agit sans doute ici des Orphiques. Voy. ci-dessus, § X, p. 646.
  180. Les vêtements éthérés, célestes et spirituels, dont parle ici Jamblique, sont l’esprit ou corps éthéré qui, selon la plupart des philosophes néoplatoniciens, jouait le rôle d’intermédiaire entre l’âme raisonnable et le corps terrestre : « Toute âme particulière, dit Proclus, a un véhicule immatériel, indivisible, et impassible par son essence… Le véhicule de toute âme descend par l’addition d’enveloppes de plus en plus matérielles ; il remonte avec l’âme, quand il est purifié de la matière et qu’il revient à sa forme propre, dans la même proportion que l’âme qui se sert de lui. L’âme descend en effet d’une manière irrationnelle, en prenant des puissances irrationnelles, et elle remonte en se dépouillant de toutes les facultés propres à la génération dont elle s’était revêtue en descendant. » (Éléments de Théologie, § CCVIII, CCIX.) Synésius, dans son traité Des Songes : (p. 136-138), a développé la théorie néoplatonicienne de l’esprit intermédiaire entre l’âme et le corps : « L’Imagination est le sens des sens, parce que l’esprit imaginatif est le sens commun et le corps premier de l’âme… L’esprit imaginatif est le premier et le propre véhicule de l’âme : il devient subtil et éthéré, lorsque celle-ci s’améliore, épais et terrestre, lorsque celle-ci se déprave. Il a en effet une nature intermédiaire entre le raisonnable et l’irraisonnable, entre l’incorporel et le corporel ; il est leur limite commune ; il lie le divin à ce qui tient le dernier rang… Cet esprit psychique, que les hommes bienheureux ont appelé l’âme spirituelle, devient par sa disposition un dieu, ou un démon de forme variée, ou une image, et c’est dans cette image que l’âme expie ses fautes… Avec du travail et du temps, l’esprit imaginatif peut remonter au ciel après s’être purifié dans plusieurs existences successives, etc. » Cette doctrine est exposée tout au long par Cudworth dans son Système intellectuel, p. 1027. La nature plastique de ce philosophe
  181. Stobée, Eclogœ physicœ, § 59, p. 1056.
  182. Voy. Plotin, Enn. I, liv. II ; et Porphyre, Principes de la théorie des intelligibles, § 1, t. I, p. LI. Voy. aussi le passage de Proclus cité ci-dessus, p. 640, note 6.
  183. ϰρίσις, δίϰη, ϰάθαρσις (krisis, dikê, katharsis). Ce sont les termes mêmes employés par Platon dans le Phédon, le Phèdre et la République. Nous en faisons la remarque parce que Heeren n’a point compris le sens de ces trois mots, autant qu’on en peut juger par les explications qu’il donne dans ses notes sur le § XVI.
  184. Voy. Plotin. Enn. II, liv. III, § 8 ; Enn. III, liv. II, § 13 ; Enn. IV, liv. III, § 12, 24 et liv. viii, 5.
  185. Il y a ici une faute dans le texte d’Heeren et dans la traduction de Canter. Il faut lire οὐδέποτε δὲ ϰατὰ ταὺτὰ (oudepote de kata tauta) (eadem) τοῖς παλαιοτέροις ἀρεσϰει αὐτῆς (tois palaioterois areskei autês), au lieu de ταῦτα (tauta) (ea). La même idée est répétée plusieurs fois ci-après.
  186. Voy. Enn. IV, liv. IV, § 45.
  187. « La purification consiste à séparer le plus possible l’âme du corps, à l’habituer à se concentrer et à demeurer en elle-même, etc. » (Jamblique, Exhortation à la philosophie, ch. XIII.)
  188. Porphyre avait composé sur ce sujet un écrit intitulé Du Retour de l’âme.
  189. « Affranchi de la nature irrationnelle et demeurant dans l’intelligence, l’homme devient semblable à Dieu, etc. » (Jamblique, Exhortation à la philosophie, ch. VI.)
  190. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. VIII, § 5.
  191. « Les âmes qui sont pures, qui n’entraînent avec elles rien de corporel, jouissent du privilége de n’être dans rien de corporel… Elles habitent avec Dieu. » (Plotin, Enn. IV, liv. III, § 24.)
  192. Stobée, Eclogœ phycicœ, LII, § 60 ; p. 1064.
  193. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. III, § 24, 32 ; liv. IV, § 18.
  194. Voy. Enn. IV, liv. III, § 18.
  195. Voy. Platon, Timée, p. 42.
  196. Les principes de l’âme sont pour Numénius l’Intelligence et l’Âme du monde, ou le premier Dieu et le Démiurge. Voy. p. 646, note 3.
  197. « Il ne faut pas croire que la pluralité des âmes vienne de la pluralité des corps. Les âmes particulières subsistent aussi bien que l’Âme universelle indépendamment des corps sans que l’unité de l’Âme universelle absorbe la multiplicité des âmes particulières, ni que la multiplicité de celles-ci morcelle l’unité de celle-là. » (Plotin, Enn. VI, liv. IV, § 4.)
  198. Πορφύριος ἀφομοιοῖ τήν ψυχήν τοῖς πᾶσιν ϰ. τ. λ (Porphurios aphomoioi tên psuchên tois pasin k. t. l.). Cette phrase n’a pas été comprise par Canter qui traduit : cum reliquis animas comparat ; ni par Heeren, qui dit dans une note : « Voluit scriptor Porphyrium omnibus animam tribuisse, attamen ita ut, quum inter se diversæ sint, suum quæque ordinem teneant. » Pour comprendre l’expression τοῖς πᾶσιν (tois pasin), il faut se reporter aux Principes de la théorie des intelligibles, où Porphyre dit : « Des substances universelles et parfaites (ὅλαι ϰαὶ τελείαι ὑποστάσεις (holai kai teleiai hupostaseis)) aucune ne se tourne vers son produit… Quand l’Âme est séparée de la matière, chacune de ses parties possède tous les pouvoirs que possède l’Âme elle-même, etc. » (Trad. fr. § XXX, XXXIX ; t. I, p. LIX, LXXXI.)
  199. L’âme en général prend soin de la nature inanimée et fait le tour de l’univers sous diverses formes. Tant qu’elle est parfaite et conserve ses ailes dans toute leur force, elle plane dans la région éthérée et gouverne le monde entier. » (Phèdre, p. 246 ; t. VI, p. 48 de la trad. fr.) Plotin commente ce passage dans plusieurs livres.
  200. τηροῦσιν αὐτῶν τήν τάξιν (têrousin autôn taxin). Canter traduit : deorum contemplantur ordinem. C’est une erreur. Jamblique a déjà employé cette expression au commencement du § XVII : « Plutarque et Porphyre font garder aux âmes leur rang propre (τηροῦσι ἐπὶ τῆς οἱϰείας τάξεως (têrousi epi tês oikeias taxeôs)). » Il a dit aussi : « Platon ne les élève pas au-dessus du rang qu’elles occupaient, etc. » Il y a d’ailleurs dans le Phèdre : θεοὶ ἄρχοντες ἡγοῦνται ϰατὰ τάξιν ἣν ἕϰαστος ἐτάχθη… ἔπεται δὲ δ άεὶ ἐθέλων τε ϰαὶ δυνάμενος (theoi archontes hêgountai kata taxin hên hekastos etachthê… epetai de d aei ethelôn te kai dunamenos). Il faut donc donner ici à τηροῦσιν (têrousin) le sens de gardent, et non celui de contemplent, et changer αὐτῶν (autôn) en αὑτῶν (hautôn).