Les Quatre Saisons (Merrill)/À la mer

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Les Quatre SaisonsSociété du Mercure de France (p. 194-195).

À LA MER

Ô Mer qui déroules le tumulte éternel de tes vagues
Depuis la nuit qui couve, au Nord, les neiges stériles
Jusqu’aux cieux bleus où tu chantes, câline, autour des îles,
Les hommes qui t’aiment trop t’ont jeté chaînes et bagues !

Ils t’ont livré leurs rêves de fer et d’or, cargaison
Des navires nostalgiques qui sombrent dans le soleil.
Et les femmes ont tendu vers toi leurs bras vermeils
Quand tu crachais ton écume jusqu’au seuil des maisons.


Mer qui ne veux obéir qu’aux vents et à la lune,
Et qui rugis d’espoir quand les veilleurs des phares voient,
Sous les éclairs, la face pâle des matelots parmi les hunes,

Ô Mer qui berças l’enfance de mes ancêtres,
Je ne puis te donner, n’étant pas, comme eux, ton maître,
Que ce coquillage creux où tonne, lointaine, ta voix !