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Évelina/Lettre 64

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Évelina (1778)
Maradan (2p. 131-148).


LETTRE LXIV.


Continuation de la lettre d’Évelina.
Bristol, le 19 septembre.

Hier matin madame Selwyn et moi nous fûmes invitées, par cartes, à dîner chez madame Beaumont ; nous acceptâmes, et nous revenons dans ce moment de Clifton-Hill.

Il faut que je commence par vous tracer le caractère de cette dame ; je me servirai des pinceaux satiriques de notre amie Selwyn : voici le tableau qu’elle en fait.

Madame Beaumont est à la lettre ce qu’on pourroit appeler une superstitieuse de cour. Née d’une famille ancienne et illustre, elle s’est fait un système particulier de morale ; la naissance et la vertu sont chez elle des termes synonymes. Elle a des qualités louables, mais qui ont leur source plutôt dans sa vanité que dans ses principes ; car elle se pique d’être de trop bonne famille pour commettre une action indigne d’elle et des ancêtres dont elle a le rang à soutenir. Par un hasard heureux, elle s’est mis en tête que l’affabilité est de toutes les vertus celle qui fait le plus d’honneur aux gens de qualité ; de sorte que ce même orgueil, sur lequel la plupart des grands appuient leur arrogance, est précisément ce qui rend son commerce facile. Mais sa politesse est trop compassée et trop mécanique pour qu’elle puisse faire plaisir. Si elle me témoigne quelques égards, je dois cet honneur à un pur accident, dont le souvenir ne la flatte peut-être pas trop ; j’eus l’occasion un jour de lui céder à Southampton des chambres dont elle avoit besoin, et l’on m’a dit depuis qu’elle n’auroit point accepté ce service, si elle n’avoit pas cru que j’étois noble : je suppose qu’elle fut inconsolable lorsqu’elle découvrit sa méprise ; cependant son attention scrupuleuse à garder toute espèce de décorum, l’a engagée à me combler de bontés. Elle se trompe si elle s’imagine que je mets beaucoup de prix à ses honnêtetés ; car je suis convaincue que je ne les dois ni à son attachement, ni à la reconnoissance, mais uniquement aux obligations qu’elle a eu le malheur de contracter envers une personne dont le nom ne se trouve pas dans l’almanach de la cour.

Ce portrait est entièrement de madame Selwyn, et vous y reconnoîtrez son penchant invincible pour la satire.

Madame Beaumont nous fit un accueil très-gracieux ; mais elle me déconcerta par ses questions sur ma famille. Elle me demanda entr’autres, si j’appartenois aux Anville qui résident dans les provinces du nord de l’Angleterre ? s’il n’existoit pas une famille de mon nom dans le Lincolnshire, &c. ?

La conversation roula ensuite sur le mariage projeté de mylord Merton. Madame Beaumont en parla avec beaucoup de circonspection, mais ce qu’elle en dit montroit assez qu’elle désapprouve le choix de lady Louise. Mylord Orville est en grande faveur chez elle ; elle l’appelle, d’après une expression empruntée des Contes de Marmontel, un jeune homme comme il y en a peu.

Cet entretien fut interrompu fort mal-à-propos par M. Lovel. Je suis fâchée de le retrouver à Bristol. Il salua respectueusement madame Beaumont, mais sa politesse ne s’étendit pas jusqu’à nous.

Un moment après parut lady Louise Larpent ; ses manières étoient toujours les mêmes ; elle salua légèrement la seule madame Beaumont, et ne tarda pas à prendre sa place sur le sofa, d’où elle promena ses grands yeux langoureux dans le salon, sans daigner fixer personne.

M. Lovel s’approcha d’elle à force de courbettes, et lui demanda des nouvelles de sa santé.

« Ah ! vous voilà, monsieur, je ne vous avois pas vu ; y a-t-il long-temps que vous êtes ici » ?

« Depuis cinq minutes, qui, par votre absence, m’ont déjà duré cinq heures ».

« Savez-vous bien que je suis très-fâchée contre vous, et que je ne vous parlerai pas de toute la journée » ?

« Le ciel me préserve que vous poussiez votre ressentiment aussi loin ; dans une telle situation, une journée seroit pour moi un siècle. Mais en quoi ai-je donc eu le malheur de vous déplaire » ?

« Oh ! vous m’avez fait mourir de frayeur l’autre jour. Comment avez-vous osé être assez cruel pour courir contre le cabriolet de mylord Merton » ?

« Sur mon honneur, madame, vous me faites injure. Je ne fus pas le maître de retenir mes chevaux, et j’ai souffert plus que vous, par la seule idée de vous alarmer ».

Mylord Merton entra dans ce moment, et s’avançant vers sa future, il lui demanda d’un ton fort nonchalant comment elle se portoit ?

« Mal, répondit lady Louise, j’ai été assommée de maux de tête toute la matinée ».

« J’en suis au désespoir ; mais vous devriez consulter un médecin, madame ».

« Je suis excédée des consultes. M. Ridgeway est venu me voir encore tantôt, mais ses remèdes ne sont bons à rien. Personne ne sait ce qui me manque, et en attendant je dessèche de langueur ».

« Vous êtes, madame, d’une constitution très-délicate », dit M. Lovel.

« Oui, certes, je suis tout nerf ».

« Je suis bien aise du moins que vous n’ayez pas été ce matin à la promenade. Coverley m’a fait trotter encore en furieux, il a une couple de chevaux des plus fringans qu’on puisse trouver ».

« Et pourquoi ne nous avoir pas amené M. Coverley ? c’est un drôle de corps que j’aime prodigieusement ».

« Il devoit être ici avant moi, et je suppose qu’il ne se fera pas long-temps attendre ». Au milieu de cette frivole conversation, mylord Orville entra dans la salle. Comme il se distinguoit de ceux qui étoient arrivés avant lui ! comme il les effaçoit tous ! Après avoir rendu ses devoirs à madame Beaumont et à madame Selwyn, il vint me joindre.

« J’espère, me dit-il, que les fatigues de lundi matin n’ont point incommodé miss Anville » : puis, se tournant vers lady Louise, qui parut surprise de ce que son frère m’adressoit la parole, il ajouta : « Vous permettrez, ma sœur, que je vous présente miss Anville ».

Lady Louise fit semblant de se lever de son sofa, et me dit froidement qu’elle seroit charmée d’avoir l’honneur de faire ma connoissance, et aussi-tôt elle chuchota quelques mots à l’oreille de mylord Merton. Quant à moi, je fus également confuse, et de la politesse inattendue de mylord Orville, et de la manière désobligeante dont sa sœur y répondit. — Quel contraste ! et comment ne l’apperçoit-elle pas, puisque tout le monde admire les manières aisées et polies de son frère !

La conduite de lady Louise l’avoit choqué ; il la quitta sans lui parler, et il continua à m’entretenir jusqu’à ce qu’on avertît que le dîner étoit servi. Ne devois-je pas lui tenir compte de son attention ? Oui, sans doute, et tous mes projets de vengeance furent oubliés.

À l’instant où nous allions nous mettre à table, M. Coverley survint encore : il fit, tout d’une haleine, un millier d’excuses de ce qu’il arrivoit si tard, et il allégua pour raison un petit accident. Il avoit eu le malheur de renverser et de briser son phaéton. À ce récit, lady Louise jeta un grand cri, et protesta que de sa vie elle ne monteroit plus en chaise.

Mylord Merton. « Ce n’est du moins pas à Coverley qu’il faudroit vous confier, car il ne sait pas mener. »

M. Coverley. « Je gage mille guinées que je vous tiens tête quand vous voudrez ».

Mylord Merton. « Va ! fixez le jour, et nous choisirons nos juges ».

M. Coverley. « Le plutôt sera le mieux ; demain, si cela vous fait plaisir, pourvu que mon cabriolet puisse être réparé dans cet intervalle ».

Madame Selwyn. « Voilà une entreprise digne d’occuper des gens de qualité, qui ne savent que faire de leur temps ».

Lady Louise. « Vous m’inquiétez, messieurs, avec vos propos ».

Madame Beaumont. « Tranquillisez-vous, lady ; ils y penseront une seconde fois, jusqu’ici ils plaisantent ».

Lady Louise. « La seule idée d’un tel projet me fait frissonner ; j’en tremble de peur, et j’ai perdu tout mon appétit ».

Mylord Orville. « Laissons donc là cette matière, et parlons d’autre chose ».

Lady Louise. « Pardonnez, mon frère, je ne lâche pas prise avant que mylord m’ait promis qu’il renoncera à cette partie ; c’est le seul moyen de m’épargner une bonne maladie ».

Mylord Orville. « Il ne sera pas si difficile d’ajuster ce différend ; et si ces messieurs ne sont pas d’humeur à se désister de leur gageure, ils peuvent la faire dépendre de quelque autre entreprise moins dangereuse. C’est une complaisance qu’ils doivent aux dames ».

Cette proposition fut généralement appuyée, et mylord Merton, aussi bien que M. Coverley, y acquiescèrent ; on convint que ce débat seroit finalement ajusté après le dîner.

« Me voilà de nouveau, reprit madame Selwyn, brouillée avec les phaétons, quoique mylord Orville m’en ait presque fait revenir le goût ».

« Mylord Orville ! s’écria M. Coverley : eh, bon Dieu ! il est plus prudent, plus timide qu’une vieille femme ; je me fais fort de devancer son phaéton avec une charrette ».

Cette turlupinade divertit d’autant plus la société, que M. Coverley y joue le rôle de plaisant.

« Peut-être, repartit madame Selwyn, M. Coverley ignore-t-il pour quelle raison mylord Orville est si prudent ».

« Pas, que je sache : seroit-il permis de savoir cette raison particulière » ?

« Volontiers, et elle vous paroîtra en effet très-particulière ; c’est que les amis du lord Orville sont jaloux de le conserver encore ».

Celui-ci remercia madame Selwyn de ce compliment ; mais M. Coverley n’en parut pas satisfait. « Point de tricherie, s’écria-t-il en s’adressant à mylord Merton. Vous avez déjà cherché l’autre jour à me mettre madame à dos ; auriez-vous réussi à me rendre ce service aujourd’hui » ?

« Je vous félicite de tout mon cœur de la préférence, dit lord Merton ».

La conversation tomba ensuite sur la bonne chère, et ce sujet fut discuté à fond avec la plus grande sagacité. Si mylord Merton, MM. Lovel et Coverley, ne m’avoient pas été connus par leurs titres, je les aurois pris certainement pour des cuisiniers de profession tant ils étalèrent d’érudition dans un art qui doit avoir absorbé une grande partie de leurs études, à en juger par les progrès qu’ils y ont faits. Il seroit difficile de décider si ces messieurs appartiennent à la classe des gloutons ou des épicuriens, car ils sont également gourmands et voraces, et ils savent vider indifféremment tous les plats. Leurs propos m’ennuyèrent beaucoup ; mylord Orville n’en fut pas moins dégoûté, et je compris aisément à son maintien que nos sentimens étoient parfaitement d’accord sur cet article.

Après le dîné, les dames se retirèrent dans l’appartement de madame Beaumont, où nous passâmes une heure assez triste : notre hôtesse étoit sérieuse, madame Selwyn ne se donna pas la peine de parler, et lady Louise avoit des vapeurs qu’elle nous communiqua à toutes, jusqu’à ce que nos cavaliers vinrent nous joindre et nous rapporter un peu de gaîté.

Instruite par une ancienne expression de M. Lovel, que je suis une fille de rien, j’eus la modestie de me retirer dans une croisée, pour n’être à charge à personne. Mylord Merton, M. Coverley et M. Lovel passèrent plusieurs fois devant moi sans faire semblant de me voir ; tous leurs soins furent réservés pour lady Louise, qu’ils ne quittèrent pas d’un instant. J’étois piquée sur-tout de l’incivilité de M. Lovel, que je pouvois compter au nombre de mes connoissances ; il est vrai qu’il me déplaît souverainement par sa fatuité, mais l’air de mépris dont il me traitoit, ne laissa pas que de me faire de la peine. Il est si dur d’être méprisé, même par des gens qui nous sont indifférens ! D’un autre côté, je fus bien aise d’échapper à mylord Merton ; la moindre attention de sa part m’auroit attiré la colère de lady Louise. Quant à M. Coverley, je l’abandonnois volontiers à lui-même ; un tel personnage n’est pas fait pour inspirer le moindre intérêt ; mais relativement à l’ensemble de cette société, je me trouvois un peu humiliée du rôle subalterne que j’y jouois.

J’eus lieu de me féliciter du retour de mylord Orville qui s’étoit absenté : me voyant ainsi isolée, il n’eut rien de plus pressé que de m’adresser la parole ; il approcha même une chaise, et demeura à côté de moi.

Il s’informa particulièrement de ma santé, et si les eaux de Bristol me faisoient du bien. « Je ne pensois pas, ajouta-t-il, en vous quittant à Londres, qu’une indisposition vous amèneroit si-tôt ici. Je ne devrois pas me réjouir de vous avoir revue ; — mais que voulez-vous, madame, pourrois-je m’en empêcher » ?

Ensuite il me demanda des nouvelles de la famille Mirvan, et il fit sur-tout l’éloge de madame Mirvan, à qui il rend toute la justice qui lui est due. Elle est, dit-il, d’un commerce doux et aimable, un vrai modèle de femme.

« Et sa fille, repris-je, est, à tous égards, digne d’une telle mère ; je ne saurois mieux la louer ».

« J’en suis ravi, elles sont dignes de briller l’une par l’autre ».

Mylord Orville commença aussi à me parler des beautés des environs de Clifton ; mais nous fûmes interrompus par les nouveaux débats qu’excitoit l’affaire du pari. Les deux champions n’étoient pas d’accord sur le genre de combat qui devoit décider la querelle. Mylord Orville proposa qu’on le fixât à la pluralité des voix ; et aussi-tôt on les recueillit. Madame Selwyn fut d’avis que le prix devoit être adjugé à celui qui réciteroit la plus longue ode d’Horace ; madame Beaumont se déclara pour celui qui feroit la révérence la plus élégante, et moi j’accordai la palme à celui qui seroit le plus heureux à faire un impromptu. Lady Louise ne jugea pas à propos de donner son suffrage, et on fut obligé de s’en passer. M. Lovel trouva qu’il seroit plus court de terminer l’affaire en tirant à la courte-paille. Cette idée me parut plate et absurde ; mais j’ai su depuis que les plus fortes gageures se décident actuellement à Londres de la même manière. Quelle pitié ! ne diroit-on pas que les richesses ne sont d’aucune utilité réelle, puisque ceux qui les possèdent en font un usage aussi vil ?

Il nous restoit encore à écouter l’opinion de mylord Orville, et la curiosité avec laquelle on l’attendit, montra le cas qu’on en faisoit. Voici de quelle manière il prononça, à la grande surprise de toute la société : « Il faudroit, dit-il, que le gagnant partageât son butin avec un honnête homme nécessiteux : qu’on en produise un de chaque côté, et le prix retombera à celui qui, au jugement de deux arbitres, aura fait le meilleur choix ».

Cet arrêt ferma la bouche à tout le monde, et je crois qu’il n’y eut personne qui ne fût honteux d’avoir suivi un projet dont l’extravagance étoit manifeste. Pour moi, je fus touchée de la noblesse des sentimens de mylord Orville : son jugement étoit une belle leçon pour les jeunes prodigues qui avoient mis cette gageure sur le tapis.

Il y eut un moment de silence et de réflexion, et ce fut M. Coverley qui l’interrompit. Il trouva que mylord Orville avoit toujours une singulière façon d’envisager les choses. L’incorrigible lord Merton ajouta que si on goûtoit ce plan, il proposeroit son gros suisse pour être de moitié avec lui. Enfin on renonça à la partie, ou du moins on la remit à une autre occasion.

La conversation prit ensuite une tournure différente, mais je ne m’en occupai guère, mylord Orville ayant renoué la nôtre : « D’où vient, miss Anville, que vous êtes si pensive » ?

« Je suis fâchée, mylord, d’être du nombre de ceux qui ont encouru votre censure ».

« Ma censure ! vous m’étonnez, madame ».

« Oui, mylord, et j’ai honte de la mériter ; j’ai donné ma voix comme une étourdie, et la vôtre me prouve qu’il auroit été bien plus louable de la tourner au profit de l’humanité ».

« Vous prenez la chose au sérieux, et je serois presque tenté de croire que votre réflexion enveloppe un reproche de ma propre conduite ».

« Comment donc, mylord » ?

« En effet, qui de nous deux auroit tort, celui qui saisit à propos l’esprit de la société, ou bien l’autre qui y prend un ton déplacé » ?

« On vous rend plus de justice, mylord ».

« Au fond, je me flatte que mon opinion, madame, ne différoit pas de la vôtre ; seulement, vous vous êtes prêtée à la gaîté qui prévaloit dans la compagnie, et j’aurois mauvaise grace d’en être formalisé, puisqu’au contraire je suis persuadé que mon sérieux y étoit de trop ; d’ailleurs, je ne me le serois point permis, si mes liaisons actuelles avec mylord Merton ne m’autorisoient à le veiller de près ».

Ce compliment me réconcilia avec moi-même, et mylord Orville continua à m’entretenir jusqu’à ce qu’on m’annonça le carrosse de madame Selwyn : je partis avec elle.

Chemin faisant, cette dame me surprit beaucoup en me demandant si je croyois ma santé assez bien rétablie pour suspendre ma cure, madame Beaumont l’ayant sollicitée avec instance de passer une huitaine de jours à Clifton ? Cette pauvre femme, ajouta-t-elle, est si pressée de s’acquitter en plein de sa dette, que je suis tentée d’accepter sa proposition, ne fût-ce que par compassion. D’ailleurs, on est toujours sûr de trouver du monde chez elle ; et tant de sots et de fats qui s’y assemblent fournissent du moins matière à railler ; cela m’amuse.

L’état actuel de ma santé, ne m’astreignant plus au voisinage de la fontaine, je fus dans la nécessité de me soumettre à la volonté de madame Selwyn, et dès demain nous comptons nous établir à Clifton-Hill.

Cet arrangement ne me convient pas trop, et quoique je sois sensible aux attentions obligeantes de mylord Orville, il m’en coûtera pourtant de vivre avec tant d’autres créatures qui se croient autorisées à me traiter avec l’indifférence la plus marquée. D’ailleurs, il est possible que je doive les politesses du lord à une généreuse pitié que lui inspire ma situation actuelle ; et qui sait s’il tiendra bon pendant toute une semaine !

Depuis mon départ de Berry-Hill, j’ai souvent desiré d’avoir madame Mirvan avec moi. Ce n’est pas que j’aie à me plaindre de madame Selwyn ; elle a des égards pour moi, et nous sommes ensemble sur un pied familier. J’avoue cependant qu’avec un petit effort elle pourroit m’être quelquefois plus utile, sur-tout en société ; mais elle y est ordinairement trop occupée d’elle-même, pour penser à moi, ou pour chercher à me mettre en avant. N’allez pas croire au reste, monsieur, que mon intention soit de blâmer madame Selwyn ; ce seroit mal reconnoître l’amitié qu’elle a pour moi.

Allons ! il faut prendre son parti ; mais j’éprouve tous les jours que sans naissance et sans fortune on réussit difficilement à se faire remarquer.