Œuvres complètes de Buffon, éd. Lanessan/Histoire naturelle des minéraux/Concrétions du mercure

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CONCRÉTIONS DU MERCURE

Le cinabre est la mine primordiale du mercure, et l’on peut regarder le vif-argent coulant comme le premier produit de la décomposition du cinabre : il se réduit en poudre lorsqu’il se trouve mêlé de parties pyriteuses ; mais cette poudre, composée de cinabre et du fer des pyrites, ne prend point de solidité, et l’on ne connaît d’autres concrétions du mercure que celles dont M. Romé de Lisle fait mention sous le titre de mercure en mine secondaire, mine de mercure cornée volatile, ou mercure doux natif. « Cette mine secondaire de mercure, dit cet habile minéralogiste, a été découverte depuis peu parmi les mines de mercure en cinabre, du duché de Deux-Ponts ; c’est du mercure solidifié et minéralisé par l’acide marin avec lequel il paraît s’être sublimé dans les cavités et sur les parois de certaines mines de fer brunes ou hépatiques, de même que le mercure coulant dont cette mine est souvent accompagnée[1]. »

J’ai dit, d’après le témoignage des voyageurs, qu’on ne connaissait en Amérique qu’une seule mine de mercure à Guanca-Velica ; mais M. Dombey, qui a examiné avec soin les terrains à mines du Pérou et du Chili, a trouvé des terres imprégnées de cinabre aux environs de Coquimbo, et il m’a remis, pour le Cabinet du roi, quelques échantillons de ces terres qui sont de vraies mines de mercure. Les Espagnols les ont autrefois exploitées ; mais celles de Guanca-Velica s’étant trouvées plus riches, celles de Coquimbo ont été abandonnées jusqu’à ce jour, où les éboulements produits par des tremblements de terre, dans ces mines de Guanca-Velica, ont obligé le gouvernement espagnol de revenir aux anciennes mines de Coquimbo avec plus d’avantage qu’auparavant, par la découverte qu’a faite M. Dombey de l’étendue de ces mines dans plusieurs terrains voisins qui n’avaient pas été fouillés. D’ailleurs, ce savant naturaliste m’assure que, indépendamment de ces mines de cinabre à Coquimbo, il s’en trouve d’autres aux environs de Lima, dans les provinces de Cacatambo et Guanuco, que le gouvernement espagnol n’a pas fait exploiter, et dont cependant il pourrait tirer avantage : il y a même toute apparence qu’il s’en trouve au Mexique, car M. Polony, médecin du roi au Cap Saint-Domingue, fait mention d’une mine de mercure, dont il m’envoie des échantillons, avec plusieurs autres mines d’or et d’argent de cette contrée du Mexique[2].


Notes de Buffon
  1. Cristallographie, par M. Romé de Lisle, t. III, p. 161 et suiv.
  2. Lettre de M. Polony à M. le comte de Buffon, datée du Cap, à Saint-Domingue, 20 octobre 1785.