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Œuvres littéraires de Napoléon Bonaparte/Articles de journaux/05

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Texte établi par Tancrède MartelAlbert Savine (Tome 1p. 208-210).

V

Note rectificative[1].

Extrait du Moniteur du 15 décembre  1808.

Plusieurs de nos journaux ont imprimé que S. M. l’impératrice, dans sa réponse à la députation du corps législatif, avait dit qu’elle était bien aise de voir que le premier sentiment de l’empereur avait été pour le corps législatif qui représente la nation[2].

S. M. l’impératrice n’a point dit cela ; elle connaît trop bien nos constitutions ; elle sait trop bien que le premier représentant de la nation, c’est l’empepereur ; car tout pouvoir vient de Dieu et de la nation.

Dans l’ordre de nos constitutions, après l’empereur, est le sénat ; après le sénat, est le conseil d’état ; après le conseil d’état, est le corps législatif ; après le corps législatif, viennent chaque tribunal et fonctionnaire public dans l’ordre de ses attributions ; car, s’il y avait dans nos constitutions un corps représentant la nation, ce corps serait souverain ; les autres corps ne seraient rien, et ses volontés seraient tout.

La convention, même le corps législatif, ont été représentants. Telles étaient nos constitutions alors. Aussi le président disputa-t-il le fauteuil au roi, se fondant sur le principe que le président de l’assemblée de la nation était avant les autorités de la nation. Nos malheurs sont venus en partie de cette exagération d’idées. Ce serait une prétention chimérique, et même criminelle, que de vouloir représenter la nation avant l’empereur.

Le corps législatif, improprement appelé de ce nom, devrait être appelé conseil législatif, puisqu’il n’a pas la faculté de faire des lois, n’en ayant pas la proposition. Le conseil législatif est donc la réunion des mandataires des collèges électoraux. On les appelle députés des départements, parce qu’ils sont nommés par les départements.

Dans l’ordre de notre hiérarchie constitutionnelle, le premier représentant de la nation, c’est l’empereur, et ses ministres, organes de ses décisions ; la seconde autorité représentante est le sénat ; la troisième, le conseil d’état qui a de véritables attributions législatives ; le conseil législatif a le quatrième rang.

Tout rentrerait dans le désordre, si d’autres idées constitutionnelles venaient pervertir les idées de nos constitutions monarchiques[3].

  1. Reproduite par A. Pujol (1843.)
  2. L’impératrice Joséphine s’était, en effet, servie de cette expression.
  3. Ces différents articles montrent toute la vigueur de la plume impériale et consulaire. Avant d’écrire au Moniteur, Napoléon avait fondé, en 1797, le Courrier de l’armée d’Italie, qu’on rédigeait sous ses yeux. Consul, il inspirait aussi le Bulletin de Paris, feuille dirigée contre l’Angleterre. Un autre journal, l’Argus, passe pour avoir reçu de la copie de Bonaparte, cette terrible copie qui faisait dire à Garat : « L’Annibal moderne écrit comme il combat ; l’Italie n’a point pour lui de Capoue. »
    Sur Napoléon journaliste, voyez les Mémoires de Thibaudeau et un article de M. Thiers, dans le National du 24 juin 1830. Voyez aussi notre Appendice, à la fin du tome 3e.